Test | YT Izzo Pro Race : randonneur 5 étoiles

Par Léo Kervran -

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Test | YT Izzo Pro Race : randonneur 5 étoiles

Lancé il y a quelques mois, le Izzo est une nouveauté importante dans la gamme YT. En effet, la marque allemande a pour la première fois mis de côté ses racines gravity pour concevoir ce modèle, avec l’idée d’en faire un vélo facile et adapté à celles et ceux qui ne roulent pas tous les jours sur des pistes d’enduro, ou qui ne cherchent pas forcément la performance en descente. Pari tenu ? Voici notre avis !

Nous avons reçu l’YT Izzo il y a plusieurs mois, avant même sa sortie officielle en plein confinement. Vous vous doutez bien qu’avec tout ce temps passé à voir ce splendide vélo tous les matins sans pouvoir le rouler, nous avons largement eu le temps de le décortiquer sous toutes les coutures… Dans cet article, la partie « statique » sera assez courte, mais si l’Izzo vous intéresse, vous pouvez retrouver sa présentation complète dans notre article paru en avril à l’occasion de l’arrivée du vélo sur le marché : YT Izzo : petit débattement, grandes ambitions.

Cependant, il nous semblait utile de rappeler certains points, à commencer par le positionnement du vélo. Chris Hilton, en charge du développement chez YT, nous expliquait que le projet de l’Izzo est né d’un constat simple : tout le monde n’a pas le terrain pour exploiter un gros vélo, nombre de vététistes fréquentent des sentiers plus lisses et c’est aussi ce que certains préfèrent.

Un vrai « trail bike » donc, polyvalent et accessible pour celles et ceux qui souhaitent un vélo simple et pas une machine de compétition à peine assagie. Un segment important aujourd’hui, avec une concurrence rude mais un équilibre pas toujours facile à trouver entre le gros XC et le mini-enduro…

Sur le papier, l’Izzo affiche une géométrie moderne mais pas extrême avec, entre autres valeurs clés, un reach à 472 mm en taille L couplé à une potence de 60 mm (50 mm en S et M), des bases à 432 mm (437 mm en XL et XXL), un angle de direction à 66° et un angle de selle à 77°.

Vous le verrez, sur cette seconde sélection de photo, nous avons protégé le vélo avec un kit baptisé « Sublimistik » de la société Slicy, que nous avons mis à l’épreuve pendant ces semaines sur les sentiers.

On note également la présence d’un petit flip-chip entre la biellette et l’amortisseur. Très facile à utiliser, il permet de redresser de 0,5° les angles du vélo en mode High, par rapport à la position Low décrite ci-dessus.

L’architecture du vélo abandonne le 4 bar linkage (voir notre lexique des cinématiques) V4L si caractéristique des YT pour des lignes plus classiques, toujours en 4 bar linkage mais avec un amortisseur placé le long du tube de selle. D’après Chris Hilton, cela permet d’avoir un vélo plus vif, plus court et un peu plus progressif que le reste de la gamme. Comme à l’avant, la suspension développe 130 mm de débattement.


Cela permet aussi et surtout d’installer un porte-bidon sur toutes les tailles, quelque chose qui est loin d’être négligeable pour le type de pratique auquel cet Izzo se destine. A ce sujet, YT a travaillé avec Fidlock pour proposer, en option, un système de porte-bidon aimanté parfaitement intégré dans le cadre (facilement remplaçable par un porte-bidon classique). Notre modèle de test est venu accompagné d’un bidon de 835 ml, mais une version 600 ml est également disponible sur le site de la marque allemande.

La gamme Izzo est composée de 4 modèles, tous en carbone, pour un tarif allant de 2 999 € à 6 499 €. Notre modèle d’essai est une version Pro Race, affichée à 5 299 €. A ce prix, on a en général peu de raisons de se plaindre de l’équipement mais YT réalise ici un véritable sans-faute.

La transmission est une Sram XO1 Eagle complète, sans concession sur la cassette comme on le voit parfois. Elle est accompagnée par des roues DT Swiss XMC 1200 en carbone, en 30 mm de largeur interne et annoncées à 1530 g.

Côté freinage, c’est à nouveau Sram qui équipe le vélo avec des G2 RSC en disque de 200/180. Les suspensions sont fournies par Fox, une 34 Factory Fit4 devant et un DPS Factory derrière, renforcé par un blocage au guidon. La tige de selle télescopique est également une Fox, tandis que le poste de pilotage vient de Race Face avec un cintre Next en carbone de 35 mm de diamètre. Nous avons pesé le vélo à 13,4 kg, sans pédales ni bidon.

Le YT Izzo Pro Race sur le terrain

Notre modèle d’essai est un Large, donné par YT pour des personnes entre 1m75 et 1m86. Dans les faits, on dirait plutôt entre 1m81 et 1m86-87. En effet, la position est bonne en descente mais en montée, la potence en 60 mm (contre 40 mm habituellement sur des vélos avec des longueurs de reach et de tube supérieur similaires) couplée à l’avant haut éloigne le poste de pilotage et, si vous mesurez moins d’1m80, vous ne parviendrez pas à mettre assez de poids sur l’avant.

Sur le plat ou en montée peu raide, cette géométrie n’est pas trop gênante et invite surtout à monter tranquillement en regardant le paysage mais dans les sections plus pentues, il devient difficile de garder la roue avant au sol.

Reste que la position et la géométrie ne sont pas les seuls éléments à influencer le comportement du vélo, les caractéristiques intrinsèques du cadre et les suspensions jouent aussi un rôle. Sur ces dernières, on sent clairement qu’YT a misé sur le confort. Avec un sag de 25 % à l’arrière et des pneus gonflés à 1,4 bar, l’Izzo est un véritable tapis volant, effaçant toutes les petites imperfections du terrain. A l’avant, la fourche paraît un peu plus ferme et décalée vis-à-vis du confort de l’arrière.

En démontant le bouchon d’air (une simple douille de 26 mm suffit), on s’aperçoit qu’elle est montée avec 3 tokens, sur 6 possibles. C’est beaucoup vu le caractère du vélo et en retirer un permet de retrouver des sensations bien plus en accord avec la suspension arrière.

Qu’en est-il alors du rendement et de l’efficacité ? La marque dit avoir travaillé sa suspension pour qu’elle puisse être utilisée sans avoir à verrouiller l’amortisseur, même si un blocage au guidon est prévu de série sur le vélo. C’est plutôt vrai, l’Izzo ne pompe pas exagérément, mais d’un autre côté, ce blocage fonctionne tellement bien qu’on a du mal à s’en passer.

Sur route ou chemin très lisse et roulant, une simple poussée sur le bouton de la manette de blocage permet de détendre le câble et ainsi verrouiller l’arrière (un fonctionnement « inversé » qui ne plaira pas à tout le monde), ce qui fait gagner quelques points de dynamisme bien agréables. Position, suspension, tout sur le vélo invite à la balade et à la détente et on est bien content de pouvoir retrouver un peu de nervosité et quelques sensations au pédalage de temps à autre. C’est aussi l’occasion de s’apercevoir que malgré le poids pas vraiment flatteur, le vélo répond bien et on lui donnerait facilement 1 kg de moins.

En descente, pas de surprises, l’Izzo reste sur ce caractère très placide et n’invite pas à transformer chaque sentier en spéciale d’enduro. Grâce à sa géométrie moderne, il descend bien et on se sent en sécurité lorsqu’on se laisse porter par le vélo, mais si vous avez un bon passé de descendeur ou d’enduriste et que vous essayez de le pousser dans ses retranchements, vous atteindrez assez facilement ses limites. L’Izzo se comporte à la descente comme à la montée, c’est un vélo fait pour profiter du moment sans chercher à en faire trop ou à faire la course.

Sur le terrain, l’Izzo nous rappelle beaucoup le Canyon Neuron CF. Le concurrent allemand est aussi le seul autre vélo qui nous vient en tête lorsqu’on pense à ce comportement « randonneur », des vélos au débattement moyen et faits pour rouler tranquillement, contrairement aux minis-enduros et gros XC qui sont très nombreux dans cette catégorie fourre-tout qu’on appelle souvent « trail ».

Néanmoins, dans cette version haut de gamme l’Izzo apparaît un peu trop rigide, notamment au niveau des roues, et moins sécurisant que le Neuron. C’est une caractéristique connue des XMC 1200, elles sont loin d’être les roues les plus tolérantes du marché, et si ça peut convenir à certains vélos, ici cela ne fait que rendre l’Izzo plus exigeant et difficile à piloter. Dans les sections techniques, les trajectoires doivent être très précises car ce ne sont pas les roues ou le cadre qui vont rattraper de petits écarts, bien au contraire.

A ce titre, l’équipement très luxueux de ce modèle Pro Race paraît presque incohérent. Ne vous méprenez pas, c’est toujours appréciable d’avoir des composants de qualité et surtout à ce prix, on connaît des marques qui font moins bien sur des vélos 2000 € plus cher… Mais que ce soit du côté des roues, des suspensions ou de la transmission, tout incite à attaquer, à rouler plus fort en montée comme en descente, précisément ce que l’Izzo n’aime pas faire.

Sans tomber dans l’élitisme, on se demande si la version Pro, avec ses équipements un peu plus simples et plus tolérants mais tout aussi fiables, n’est pas un achat plus intelligent que cette Pro Race. Ici, on aime beaucoup la légèreté du vélo et le fait qu’il réagisse au quart de tour, mais d’une part le cadre bride les composants, et d’autre part ces composants font perdre en sécurité et en facilité au vélo. Tout le monde y perd et c’est un peu dommage.

En ce qui concerne le flip-chip, nous avons essayé les deux orientations et c’est la position basse, ou Low, qui nous est apparue la plus adaptée au vélo. En position haute, on gagne peu au pédalage mais on perd nettement en descente, avec un vélo qui devient rapidement instable et trop nerveux. La position basse est plus sécurisante et plus conforme à l’esprit général qui se dégage de cet Izzo.

Verdict

Avec ce vélo, YT réussit quelque chose devenu rare aujourd’hui : proposer un vélo de trail qui ne soit ni un XC bodybuildé ni un enduro avec 20-30 mm de débattement en moins, et qui apporte malgré tout quelque chose au marché. Sur ce segment presque saturé, la marque allemande tire son épingle du jeu avec un vélo qui se démarque car il n’a rien de particulier. Ne vous fiez pas à ses lignes agressives, l’Izzo est un vélo très placide, et il vous le fera vite comprendre. On pourrait lui reprocher de manquer de caractère, mais c’est justement son atout. Neutre et facile à prendre en main, l’Izzo est le vélo de la randonnée dominicale organisée par le club d’à côté, le vélo de celles et ceux qui veulent avant tout passer un bon moment dehors, sans essayer de repousser leurs limites à chaque sortie. Une espèce de vélo de plus en plus rare aujourd’hui, alors que c’est ce que beaucoup de monde recherche encore. C’était un pari audacieux de la part d’YT mais le contrat est rempli et nul doute que le succès sera au rendez-vous !

YT Izzo Pro Race

5 299 €

13,4 kg(Taille L, sans pédales)

  • Confort général
  • Poids ressenti
  • Vrai vélo de randonnée, pas un mini-enduro ou un gros XC
  • Potence un peu longue
  • Blocage "inversé"
  • Cohérence du montage sur cette version
  • RAS

Évaluation des testeurs

  • Prix d'excellence
  • Coup de coeur
  • Rapport qualité / prix

Plus d’informations : yt-industries.com

ParLéo Kervran