Test | Trek Fuel EXe 9.9 XX1 AXS : ne dites plus e-bike léger, dites sportif

Par Léo Kervran -

  • Tech

Test | Trek Fuel EXe 9.9 XX1 AXS : ne dites plus e-bike léger, dites sportif

Premier e-bike à avoir eu accès au nouveau moteur TQ, le Trek Fuel EXe a sérieusement secoué le monde du VTT à assistance électrique. 18,4 kg avec une assistance solide et 140/150 mm de débattement, ça intrigue forcément ! Après l’avoir découvert en juillet pour son lancement, nous avons pu passer tout l’été au guidon de la très luxueuse version 9.9 XX1 AXS afin d’approfondir nos sensations. Il est désormais l’heure de la conclusion :

Pour cet essai, on vous propose un format un peu différent de ce que vous pouvez avoir l’habitude de lire dans nos colonnes. En effet, nous avions largement couvert les informations techniques du vélo à son lancement en juillet dernier (lire Test nouveauté | Trek Fuel EXe: une (r)évolution !) et nous avons donc fait le choix de nous concentrer ici sur la partie terrain avec nos conclusions après plusieurs mois de test.

Si vous n’aviez pas suivi le lancement ou si vous avez oublié les informations essentielles (en 5 mois ça peut se comprendre), petit rappel :

  • le Trek Fuel EXe est un e-bike léger en 29″ qui développe 140 mm de débattement à l’arrière et 150 mm à l’avant
  • l’assistance est fournie par les allemands de TQ. Très discret visuellement, le système HPR-50 développe 50 Nm de couple et jusqu’à 300 W de puissance avec une batterie de 360 Wh. L’ensemble est annoncé à 3,8 kg et vous l’explique en détails ici : L’assistance TQ HPR-50 décortiquée
  • la marque nous a envoyé son modèle le plus haut de gamme, le Fuel EXe 9.9 XX1 AXS, annoncé à 18,4 kg et 14 499 €. Parmi les principaux composants, on retient des suspensions RockShox Lyrik Ultimate et Super Deluxe Ultimate équipés des capteurs Airwiz, des freins Sram Code RSC, une transmission Sram XX1 Eagle AXS et une tige de selle RockShox Reverb AXS. Forcément, à ce tarif, aucune faute sur la finition ou l’équipement ne sera tolérée…

Pour le reste (géométrie, gamme complète…), on vous invite à aller relire notre présentation dont voici encore une fois le lien : Test nouveauté | Trek Fuel EXe: une (r)évolution ! Maintenant, place à l’action !

Comment ça pédale ?

On commence avec le comportement du vélo au pédalage et, bien sûr, de l’assistance TQ HPR-50. Comme Jeffry l’écrivait dans sa prise en main, la première chose qui marque est le silence de fonctionnement. Sur route goudronnée, c’est à peine si on entend le moteur et dès qu’on passe sur les sentiers, le bruit des pneus sur les gravillons ou la terre suffit à le couvrir même sur le mode le plus puissant. Impressionnant et surtout tellement reposant !

A titre personnel, je dois avouer être assez sensible à ce genre de chose et à avoir du mal à apprécier une sortie en e-bike « classique » à cause de ce bruit de fonctionnement. Avec le TQ, c’est comme faire du vélo sans assistance et l’agrément s’en ressent nettement.

Cela vient par ailleurs renforcer le côté déjà très naturel de l’assistance, qui accompagne les coups de pédale du pilote plus qu’elle ne pousse le vélo. La fréquence de pédalage optimale semble se situer vers 70-80 tours/minute, soit celle qu’on adopte naturellement, et la sensation est celle d’être (très) en forme, plutôt que d’être sur une machine à moteur.

La cartographie d’origine nous a toutefois paru un peu faible, notamment en mode Eco. Un petit tour par l’application Trek (celle développée par TQ fonctionne aussi) a permis de régler ça, en remontant un peu les curseurs (niveau d’assistance et puissance max) pour rendre l’Eco utilisable sur les sentiers. Par souci de cohérence, nous avons également poussé un peu le Trail pour garder un écart sensible entre les deux modes.

A ce sujet, l’écran d’affichage sur le tube supérieur mérite des éloges. Développé par TQ et personnalisé par Trek, il est joliment intégré et on y trouve toutes les informations nécessaires de façon très lisible. Nous avons particulièrement apprécié la page qui affiche la puissance du moteur et celle du pilote, très utile en relation avec l’application pour définir « ses » paramètres sur chaque mode. Des confrères ont noté un certain écart avec la réalité au niveau des valeurs affichées en direct mais en ce qui nous concerne, ce n’est pas si important : comme avec une pompe haute pression ou un manomètre, tant qu’on utilise toujours le même outil on peut comparer les différentes valeurs qu’il fournit.

Un e-bike sportif ?

En dehors de ça, on note une plateforme équilibrée qui se roule comme on roulerait un vélo classique. Si le poids est proche de certains gros enduros en aluminium et pneus DH, la position est un peu plus sportive, plus « trail » et cela fait une belle différence en montée. On est bien placé sur le vélo pour négocier les sections raides ou techniques et le poids ne vient jamais se mettre en travers de nos ambitions comme cela peut l’être avec un e-bike au-dessus de 20-21 kg.

Toutefois, du haut de ses 140 mm la suspension arrière semble dosée assez ferme et si cela donne une belle impression de dynamisme, on aurait aimé avoir un peu plus de grip. En fait, on parle d’e-bike léger mais pour ce Trek Fuel EXe (et tous les modèles équipés du système TQ semble-t-il), c’est plutôt d’e-bike sportif qu’il faudrait parler. Le Fuel EXe, c’est un e-bike avec lequel il faut pédaler, un e-bike qui peut se montrer exigeant physiquement. L’effort à fournir est clairement plus important que sur un gros VTTAE, au point de déconcerter les aficionados de ces machines… mais c’est bien ce qui pourrait séduire les autres ! A la rédaction et parmi nos testeurs, certains ont adoré et d’autres pas du tout, pour vous dire à quel point c’est différent. On se situe réellement à mi-chemin entre un VTT classique et un e-bike Bosch ou Shimano comme vous avez déjà pu en essayer, sur tous les plans.

L’effort à fournir est clairement plus important que sur un gros VTTAE, au point de déconcerter les aficionados de ces machines.

Côté autonomie, la machine fait bien sans être exceptionnelle. Avec nos modes personnalisés et une utilisation « normale » (principalement Trail, un peu de Turbo pour certains talus et de l’Eco pour du roulant), on a pu l’emmener sur du 32 km / 1400 m de D+ (pilote de 68 kg équipé) et terminer avec encore un peu plus de 20 % de batterie. On a fait par la suite bien mieux avec le BMC Fourstroke AMP LT équipé de la même assistance (lire Test nouveauté | BMC Fourstroke AMP LT : l’e-bike thaumaturge) ce qui nous amène à penser que malgré leur gomme plutôt dure, les pneus du Trek ne sont pas les plus économes en batterie.

Notez également que si le dérailleur Sram XX1 AXS tire son énergie de la batterie du vélo, tomber à court d’assistance n’empêche pas de changer de vitesse. Le dérailleur requiert bien moins d’énergie pour fonctionner et une petite réserve est prévue, de façon à pouvoir finir sa sortie quoi qu’il arrive. Trek annonce 200 changements de vitesse une fois l’assistance à 0 % et on a poussé le vice jusqu’à aller vérifier cette indication… Résultat, on a perdu le compte un peu après 300 changements de rapport à batterie vide, et la petite diode clignotait toujours en vert ! Il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir de ce côté, tant que le système est allumé le dérailleur peut fonctionner, même avec l’assistance sur Off ou la batterie à 0 %.

Et en descente ?

Lorsque la pente penche enfin dans le bon sens (quoique, avec un e-bike il n’y a plus vraiment de bon et de mauvais sens), le Trek Fuel EXe 9.9 XX1 AXS est… un Trek. On s’explique : chez la marque de Waterloo, les vélos haut de gamme sont souvent très rigides. Trop rigides même, pour nos terrains européens en tout cas.

Parmi les modèles que nous avons testés plus ou moins récemment, c’était le cas de la génération précédente du Fuel EX (Test | Trek Fuel EX 9.9 : je t’aime, moi non plus), du Slash d’enduro (Test | Trek Slash 9.9 X01 : accrochez votre ceinture) ou encore du Checkpoint de gravel (Prise en main | Trek Checkpoint SL 6 eTap : chassez le naturel…), voire de l’ancien Top Fuel dans une moindre mesure (Test | Trek Top Fuel 9.9 : un trailbike aux gènes de crosseur).

Malheureusement, cette version 9.9 XX1 AXS ne fait pas exception à la règle. Entre le cadre, les roues Bontrager Line Pro 30 en carbone et le poste de pilotage en une pièce et en carbone Bontrager RSL, tout concourt à ajouter de la rigidité alors que le cadre seul serait déjà amplement suffisant sur ce point. Résultat, dans les sentiers techniques on subit plus qu’autre chose et il est très difficile de ne pas se faire balader par le vélo.

D’autant plus qu’on ne peut pas se reposer sur les pneus pour apporter un peu de confort. Le Fuel EXe est équipé de Bontrager SE5 Team Issue et ces derniers sont, n’ayons pas peur de le dire, pas du tout adaptés au programme du vélo. La carcasse est si fine et souple, digne d’un pneu de XC, qu’on est obligé de rouler surgonflé pour espérer limiter les crevaisons et préserver les jantes. Et même là, ce n’est pas suffisant : en moins d’un mois, notre pneu arrière s’est retrouvé agrémenté de 4 mèches pour réparer diverses crevaisons et pincements.

Dernier élément qui entre en jeu dans cette sensation, la suspension. Avec 140 mm, on peut déjà faire beaucoup de choses et ici, Trek a choisi de lui donner un caractère très dynamique et progressif. Cela a ses avantages et ses inconvénients mais lorsqu’on y ajoute la rigidité du système et la fragilité des pneus, ça rend la machine encore plus exigeante, même avec toutes les possibilités de réglages offertes par les éléments RockShox Ultimate.

Dans le technique, il faut vraiment « taper » dans le Fuel EXe pour le faire fonctionner et avec l’équipement d’origine, cela demande un très bon niveau de pilotage. On a réussi à le rendre un peu plus accessible avec un autre train roulant (des roues We Are One notamment, lire Test | We Are One Union : le carbone made in Canada) mais quoi qu’il en soit, ce modèle très haut de gamme n’est certainement pas à la portée de tout le monde sur ces terrains.

Terrain de prédilection : les flow trails !

Avec ça, vous allez penser que ce Fuel EXe 9.9 XX1 AXS est un vélo raté, un vélo qui ne procure aucun plaisir en descente. Heureusement, ce n’est pas le cas ! Lorsqu’on délaisse le calcaire et les racines pour des sentiers plus lisses ou des pistes tracées pour le VTT, tel qu’un bikepark bien entretenu ou idéalement un trail center, ce Fuel EXe offre un tout autre visage.

Cette fois, la rigidité n’est plus excessive mais simplement bien présente et fait du Fuel EXe un vélo précis et vif, qui se place exactement là où on le lui demande. Et lorsque des appuis s’invitent sur le chemin, tels que des virages relevés ou un joli goulet, ça devient la fête !

Le dynamisme et le support offerts par la suspension font du vélo une véritable catapulte, qui vous éjecte de chaque sortie de virage avec une vitesse folle. Passée la stupéfaction de la première fois, enchaîner deux ou trois virages sur ce rythme vous plaque un sourire stupide sur le visage dont il est impossible de se défaire et est immédiatement addictif. Relevé, saut, gauche-droite, saut, relevé, on se prend pour Brandon Semenuk et on n’a qu’une envie, celle de recommencer ! Ça tombe bien, on a un moteur pour remonter !

14 499 € et quelques questions

Impossible de terminer cet article sans quelques mots sur le tarif, ou plutôt ce que ce Fuel EXe 9.9 XX1 AXS offre pour son tarif. 14 499 €, c’est une somme presque absurde pour un vélo mais si des personnes sont prêtes à payer ce prix pour une machine parfaite et exclusive, pourquoi pas. L’irrationnel, c’est le propre du luxe. Le problème, c’est qu’on a déjà vu des vélos moins chers et mieux finis…

On ne parle pas ici de la finition du cadre en elle-même. Trek a fait le choix d’une relative sobriété avec cette peinture satinée sur tout le vélo et le rendu est très propre. Les zones critiques comme les points de pivots sont parfaitement réussies et la solidité semble au rendez-vous puisqu’aucune pierre n’a réussi à l’entamer pendant notre essai.

C’est sur les détails qu’il y a matière à dire mais à ce prix-là, les détails n’existent plus et tout compte. Le nom du modèle sur le tube supérieur par exemple, qui ressemble à un vulgaire autocollant dans une police simpliste et tranche avec la qualité de la peinture. L’outil dans le jeu de direction, qui est mal ajusté et fait du bruit en descente.

Pire encore, le câble électrique qui relie la (petite mais bien pensée) commande TQ au reste du système. A ce niveau, on pouvait s’attendre à un câble qui passe en interne dans le cintre pour ne ressortir qu’au dernier moment mais ce n’est pas le cas. Le cockpit Bontrager SL n’a pas été conçu pour et on se retrouve avec un câble trop long maintenu, sur notre modèle d’essai, par du scotch d’électricien. Ça se passe de commentaire.

Note : A ce sujet, la marque nous a indiqué après publication nous avoir envoyé un vélo de démonstration de façon à ce que nous puissions débuter notre essai avant le lancement officiel du 12 juillet. Selon leur mots, certains soucis de finitions comme celui-ci ont « évidemment » été corrigés pour les vélos qui sont désormais vendus au public.

Verdict

On laisse ce Trek Fuel EXe 9.9 XX1 AXS avec un avis partagé. D’un côté, on aime beaucoup le concept du moteur léger et naturel avec une géométrie et un débattement polyvalents, mais de l’autre, la réalisation dans cette version haut de gamme nous convainc moins. Le Fuel EXe brille réellement sur son terrain de prédilection et si vos sentiers ne sont pas trop techniques, il pourra facilement vous séduire. Cependant, il se montre tout de même relativement exigeant et les choix de composants le rendent moins polyvalent que sa fiche technique pourrait le laisser supposer, d’où une certaine impression de passer à côté de quelque chose. Au final, bien que le rapport équipement/prix soit une notion absente de la gamme, on serait curieux de voir si des versions plus « accessibles », et on est bien conscient que c’est très relatif, ne se montreraient pas meilleures sur le terrain grâce à des composants plus tolérants.

Trek Fuel EXe 9.9 XX1 AXS

14 499 €

18,5 kg(taille ML, sans pédales)

  • Caractère sportif qui le rapproche des vélos classique
  • Légèreté pour un e-bike
  • Suspension très dynamique, idéale sur les sentiers joueurs
  • Assistance très naturelle
  • Caractère sportif... si on cherche la puissance d'un gros e-bike
  • Monte pneumatique inadaptée
  • Suspension trop dynamique ?
  • Détails de finition à revoir
  • Trop rigide et exigeant pour les terrains techniques
  • Prix délirant

Évaluation des testeurs

  • Prix d'excellence
  • Coup de coeur
  • Rapport qualité / prix

Plus d’informations : trekbikes.com

ParLéo Kervran