Test | Trek Fuel EX 9.9 : je t’aime, moi non plus 

Par Paul Humbert -

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Test | Trek Fuel EX 9.9 : je t’aime, moi non plus 

Présenté à la fin de l’été 2019, le dernier Fuel EX de chez Trek nous a tapé dans l’oeil. Poussé par le Top Fuel hors de sa catégorie « Trail », il bascule plus que jamais vers un positionnement « All-Mountain » bien engagé. Après une première prise en main, nous l’avons embarqué pour de longs mois de tests sur nos sentiers, en reportage, en voyage. Nous avons pu tester le modèle haut de gamme 9.9 et nous avons eu avec lui une relation intense, mais complexe. On vous explique : 

 

 

Rappelons l’essentiel : le Trek Fuel EX est le vélo « all-mountain » de la marque américaine. Il est censé incarner la polyvalence avec ses 130mm de débattement à l’arrière pour 140mm à l’avant, et ses roues de 29 pouces. 

Côté géométrie, le vélo est moderne, il prend 10 à 20mm de longueur supplémentaire en fonction des tailles. Notre taille L de test affichait un reach de 470mm. Trek couvre d’ailleurs un large spectre d’utilisateurs avec 8 tailles proposées (XS et S en 27,5 pouces) dont une intéressante taille M/L. L’angle de direction affiche 66 degrés, un standard pour la catégorie, et les bases mesurent 437mm de long. L’angle de selle passe à 75°.

Le Trek Fuel EX est équipé d’un « flip chip » qui peut faire évoluer légèrement la géométrie du vélo. L’écrasante majorité de notre test a été réalisée en position basse, la plus ouverte.

Par rapport à la précédente génération, c’est la cinématique qui évolue le plus considérablement puisque la marque abandonne sa technologie « full floater » en raison de la montée en performance des suspensions et des amortisseurs modernes. L’amortisseur est ancré entre une biellette haute et le tube inférieur et on retrouve également un point de pivot au niveau de la roue arrière (baptisé ABP pour Active Braking Pivot) pour conserver une suspension active en toutes circonstances.

Associé à cela, on retrouve un amortisseur Fox RE:Aktiv Thru Shaft travaillé avec Trek et équipé d’un petit réservoir baptisé « External Thermal Compensator » permettant d’évacuer la chaleur et d’assurer des performances optimales, mêmes pendant les plus longues descentes.

 

 

Voilà pour le Fuel EX en général, mais si on se penche plus particulièrement sur le Fuel EX 9.9 de notre essai, voici une revue des composants qui nous ont marqués. Affiché à 7499€, on est sur un positionnement et un vélo très haut de gamme. On s’attend donc à des performances et une fiabilité de haut niveau. On peut déjà dire, à un (gros) détail près, que le Fuel EX 9.9 ne déçoit pas sur ce point. 

Côté finitions, le vélo est très abouti. La machine est bien protégée au niveau des bases, sous le tube inférieur. Notre vélo était protégé par un kit Sublimistick de la marque Slicy, mais les zones exposées ne présentent que peu d’impacts ou de zones où la peintures s’est écaillée. 

La câblerie ne bouge pas, ne gène pas et tout reste bien en place. La transmission Sram X01 s’est montrée particulièrement fiable et nous avons à peine dû retendre le câble de dérailleur. Rien à signaler de ce côté-là, si ce n’est qu’une cassette GX s’est glissée dans le montage X01. Moins chère à l’achat, ses performances sont équivalentes, mais elle est un peu plus lourde qu’un modèle X01.

 

 

Côté freinage, là aussi le Fuel EX est irréprochable avec ses Shimano XT 4 pistons qui assurent, même pendant les plus longues descentes à la montagne. Trek équipe son vélo d’un disque de 203mm à l’avant, et de 180mm à l’arrière. Côté durée dans le temps, là aussi, pas de souci, ni de purge nécessaire. On retrouve d’ailleurs ces freins en vainqueurs de notre grand comparatif publié ici : https://mag.vojomag.com/freins-disque-4-pistons-2020/

 

 

Les suspensions de ce Fuel EX 9.9 sont au coeur du comportement de la machine. Devant, on retrouve une Fox 36 avec la cartouche Grip2, un peu complexe à régler au premier abord, mais qui délivre des performances exceptionnelles quand on trouve ses marques. Derrière, la marque au renard a travaillé avec Trek pour concevoir un amortisseur parfaitement associé à la géométrie du vélo, et il faut avouer que le résultat est là (on vous présente la technologie Tru Shaft ici : https://www.vojomag.com/trek-reaktiv-thru-shaft-retour-dans-les-90s/). Le vélo est très sensible, lit particulièrement bien le terrain mais apporte un énorme soutien, et c’en est presque trop parfois. Quand on va vite, le vélo est posé en milieu de course des suspensions et permet de garder un bon équilibre, tout en conservant une belle lecture du terrain, ce qui permet de se concentrer sur le pilotage.

Le petit réservoir supplémentaire qui prend sa place sur l’amortisseur semble faire son boulot puisqu’on ne détecte pas de problème de surchauffe, même dans les très longues descentes alpines, et c’est impressionnant !

Le confort et la performance de la suspension sont tels qu’on attend du vélo qu’il tienne le rythme et le pavé dans des sections toujours plus rapides et défoncées, mais on se heurte parfois aux limites physiques du vélo. Côté suspensions, on retrouve vraiment des performances de haut vol. On a véritablement l’impression d’avoir plus de 130mm de débattement à l’arrière, et c’est là qu’on est piégé.

Côté train roulant, c’est là que le bât blesse. Le Fuel EX 9.9 arrive équipé d’une paire de roues Bontrager Line Carbon 30 et d’un montage pneumatique Bontrager XR4 en section 29×2.6. Ces pneus sont parfaitement adaptés aux terrains compacts et roulants, et leur section leur permet d’apporter une petite dose de grip supplémentaire. Toutefois, ils manquent cruellement de polyvalence et de mordant sur les terrains plus cassants ou meubles. Ils ont rapidement quitté le vélo.

 

 

Du côté des roues, on retrouve un montage qui garantit une belle vivacité au vélo. L’ensemble est dynamique, mais bien trop raide dans de nombreuses circonstances. C’est un des éléments qui a soulevé le plus d’interrogation pendant notre test. On apprécie évidemment la légèreté, la vivacité, le dynamisme, mais on perd gros quand on manque de grip, de confort ou simplement de confiance dans les portions techniques ou glissantes.

Enfin, le coup de grâce est arrivé pendant une sortie assez anodine et sans impact majeur, quand la jante arrière s’est brisée. Contactée, la marque n’explique pas cette casse et nous présente son programme de garantie, plutôt complet, et qu’on retrouve ici : https://www.trekbikes.com/fr/fr_FR/carbon_care_wheels/ .

 

 

Si Bontrager s’en sort moyennement sur le train roulant cette fois-ci, la marque de composants se rattrape avec une selle qui nous convient parfaitement et une tige de selle de 170mm de débattement avec sa commande, souple et précise, qui ne nous a pas fait faux bon. 

Le poste de pilotage (35mm) est très bien proportionné, peut-être un peu rigide, mais associé à des poignées très confortables et qui ne s’abiment pas trop vite.

 

 

On retrouve également une nouveauté majeure sur ce Trek Fuel EX : sa boite à gant ! Plus sérieusement, un espace de rangement trouve sa place dans le tube inférieur, sous le porte bidon. Le système d’accès est simple et fiable. On glisse ses outils dans une petite chaussette qui vient se loger dans le cadre. Notre modèle de test n’était pas équipé, par erreur, de cette chaussette, et nous avons glissé notre matériel « en vrac ». C’est un peu plus fastidieux de tout ranger, mais, enroulé dans un coupe-vent, nous avons placé une chambre à air, une cartouche et son percuteur, ainsi que des mèches. L’ensemble ne nous a plus quittés et on adore cette solution pour partir le dos léger. 

L’axe de roue arrière se détache pour proposer une clé Allen permettant l’accès à l’axe de roue avant. Malin !

 

 

Enfin, dernier point qui a son importance, le cadre du Fuel EX a été repensé pour offrir plus de rigidité que le modèle précédent. Le tube supérieur est droit, plutôt large et la volonté d’aller vers plus de fermeté est affirmée par la marque. Comme souvent chez Trek, on retrouve un « Knock Block », soit un petit dispositif qui vient bloquer la rotation de la direction passé le rayon de 58°, afin que la fourche n’entre pas en contact avec le cadre. Nos testeurs sont partagés sur ce point. Si on ne trouve pas de problème à ce système, certains semblent mitigés pour des problématiques de transports.

Sur le terrain | Trek Fuel EX 9.9 

Après cette revue des composants, points par points, il était temps de dresser un bilan de la mise en musique. Ce Trek Fuel EX en a vu de toutes les couleurs. Il est passé entre les mains de nombreux testeurs, et a traversé un sacré nombre de sentiers. Dans les cailloux du Luberon, sur les sentiers du Queyras, dans de nombreux coins des Alpes, en Alsace, dans les Vosges et même jusqu’aux chronos de l’Halloweenduro du Bois des Rêves.

La première case qu’il coche, c’est celle du « all-Mountain » au sens propre. Le Fuel EX 9.9 est capable de se présenter sur tous les reliefs, et on peut s’amuser en toutes circonstance à son guidon. Au pédalage, on est plutôt droit et on avance correctement. Le vélo n’est pas un foudre de guerre, ce n’est pas le plus léger ni le plus rapide en montée, mais il fait clairement ce qu’on attend de lui et on n’hésite pas une seconde à partir pour des heures de pédalage à son guidon. 

La machine est vive, facile à prendre en main et on s’amuse sur les terrains les moins accidentés. À l’autre extrême, une fois à la montagne, la qualité de construction du vélo – associée au superbe travail des suspensions – permet de tenir le rythme, voire de s’imaginer sur un vélo d’enduro. Le spectre d’utilisation est vraiment vaste, et c’est une des forces de la machine.

 

 

En grimpant sur ce Fuel EX, on s’est senti instantanément comme à la maison. L’ergonomie, les composants, les dimensions, tout y était. Ajoutez à ça le côté pratique du rangement dans le cadre, et on se sentait prêt pour tout. Côté look, c’est évidemment subjectif, mais on trouve la machine très réussie. Avec un tel cocktail, il n’a pas fallu trop nous pousser pour choisir ce vélo pour bon nombre de nos sorties.

 

 

Pourtant, si le coup de coeur est évident, notre relation avec le vélo n’a pas forcément été simple. Avec un cadre rigidifié, un poste de pilotage costaud, une Fox 36 qu’on retrouve en enduro et les roues carbone Bontrager, le vélo ne se laissait pas faire. On a adoré la sensation de vivacité, de répondant et même de confort et de filtration lors des chocs frontaux, mais en courbe et au freinage, il fallait savoir à quoi s’en tenir.

On a vite eu la sensation de « trop » : trop rigide, trop glissant, trop vite par terre. 

La première évolution a été le passage à des pneus en section 2.5 un peu plus cramponnés. On gagne directement au freinage et dans les grandes courbes. On a fait évoluer légèrement les suspensions du vélo pour gagner encore un peu de confort, mais il faut admettre qu’on roulait parfois sur des oeufs au moment d’aborder des terrains humides, des racines ou autres sections en dévers. Le vélo ne pardonne pas tous les écarts de trajectoires dès que le terrain est mouillé. 

On garde en tête cette idée qui nous est revenue régulièrement : « J’adore ce vélo, mais c’est pas réciproque. » En prenant le temps de le dompter, on trouve ses limites, on sait quand il va décrocher et quand il faut être prudent. On conséquence, on s’adapte et on ne garde que le meilleur de la machine. Avec ce Fuel EX, notre relation s’est apaisée, on partait l’esprit tranquille mais il faut admettre qu’avec ce petit frein dans un coin de notre tête, ce n’est pas avec ce vélo qu’on roulait le plus vite dans les portions techniques, et ce n’est pas avec lui qu’on s’élançait l’esprit tranquille dans la boue. 

On comprend ce choix d’une grande rigidité, frontale et latérale pour les terrains secs et compacts, mais on a le sentiment que ce montage n’a pas été pensé pour des terrains plus…européens. Alors qu’on parle régulièrement « d’upgrade » pour améliorer un vélo, on pense plutôt ici à un « downgrade » vers une bonne paire de roues en aluminium, plus tolérantes et tout aussi vives.

 

 

Ce Trek Fuel EX 9.9 a donc clairement marqué notre esprit. Sa polyvalence qui lui permet de randonner pendant des heures ou de s’autoriser des journées de descentes à la montagne le rend incontournable. Sa finition, ses équipements offrent un niveau de performance des plus haut de gamme et on a eu du mal à les prendre à défaut, à l’exception des roues. Enfin, son comportement général donne à ce vélo un véritable caractère, contre lequel on s’est butés parfois, mais qu’on a adoré souvent. 

Trek Fuel EX 9.9

7499 €

13,2 kg(Taille L, tubeless, sans pédale)

  • Géométrie, cinématique et ergonomie
  • Suspensions
  • Finitions
  • Rigidité latérale trop élevée
  • Roues Bontrager Line Carbon 30 qui cassent

Évaluation des testeurs

  • Prix d'excellence
  • Coup de coeur
  • Rapport qualité / prix

Plus d’infos sur le site de la marque : www.trekbikes.com

Notre test du Trek Top Fuel : www.vojomag.com/test-trek-top-fuel-9-9-un-trailbike-aux-genes-de-crosseur/

ParPaul Humbert