Test | Lapierre Zesty TR 5.9 : en mode mineur

Par Olivier Béart -

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Test | Lapierre Zesty TR 5.9 : en mode mineur

Plébiscité de toutes parts (à juste titre !), le Lapierre Zesty AM a désormais un petit frère avec un cadre en aluminium et un débattement réduit à 120mm : le Lapierre Zesty TR. Il se veut aussi plus accessible financièrement, avec une gamme qui démarre à 1999€. Vojo l’a testé pour voir s’il garde le caractère de son grand frère et les ingrédients qui font le succès du Zesty.

La dernière version du Lapierre Zesty AM est assurément une des pièces maîtresses de la gamme actuelle de la marque française. Lorsque nous avions testé la version AM 8.0 l’an dernier, nous avions été éblouis et ce vélo figure toujours parmi nos références de la catégorie. Avec son cadre carbone, ses roues de 29 pouces et son débattement de 140mm, il offre une réelle polyvalence et un plaisir de pilotage de tous les instants.

Fort de ce succès mérité, Lapierre a souhaité décliner son Zesty dans une version TR (comprenez : trail), en roues de 29 pouces uniquement, et avec un débattement réduit à 120mm. Sa mission : combler le trou laissé entre le X-Race typé XC/Marathon, et le Zesty AM au débattement plus important dont tous les pratiquants n’ont pas nécessairement besoin. Pour le dire autrement et pour reprendre les propos de Lapierre sur son site : « L’idée du Zesty TR est d’offrir au plus grand nombre une solution polyvalente, simple, efficace et esthétique, directement inspirée du renouveau lancé en 2019 autour du « Zesty ». » Reste à voir si la recette est toujours aussi équilibrée et si cette version TR succède dignement au X-Control.

Châssis

Le Lapierre Zesty AM 8.0 que nous avions testé était équipé du cadre en carbone qui distingue les modèles haut de gamme de la marque. La version AM en 140mm de débattement existe aussi en cadre aluminium pour ses deux montages les plus accessibles, 3.9 et 4.9. Ici, sur la version TR, seul le châssis aluminium est disponible, Lapierre voyant ce vélo comme accessible au plus grand nombre dans tous les sens du terme.

Lapierre utilise son aluminium « Suprême 5 » avec des tubes hydroformés qui conservent des formes très proches de celles de la version carbone. Pièce maîtresse du vélo, le « berceau » aux formes complexes qui entoure l’amortisseur et qui relie le boîtier de pédalier, le point de pivot principal, la biellette supérieure et tube de selle, est quant à lui fait de deux coques évidées et particulièrement soignées.

Dans l’ensemble, les Lapierre Zesty TR et AM gardent un air de famille évident, au point que seul un œil averti pourra les distinguer, principalement grâce à leur équipement. Et pour cause, les châssis ont plusieurs pièces en commun, mais ils se distinguent au niveau de la suspension, qui mérite un petit mot pour elle seule.

Cinématique et suspensions

La cinématique reste identique entre les TR et AM au niveau de la suspension arrière. Il s’agit toujours d’un 4 Bar Linkage à la sauce Lapierre (voir notre lexique pour plus d’informations sur les cinématiques), mais la réduction du débattement est obtenue en utilisant un amortisseur à la course et aux dimensions réduites. D’un 200mm de long pour 57,5mm de course sur le AM 29″, on passe ici à un modèle plus petit, de 165mm de long pour 45mm de course du piston.

A l’avant, on retrouve une Fox 34 tant sur le AM que sur le TR, mais la course est ici réduite de 140 à 120mm, dans le même esprit. Et si cette fourche nous avait paru un peu sous-dimensionnée sur le AM, compte tenu des capacités du châssis et des facultés du vélo à rouler très vite dans le technique défoncé, la Fox 34 qui équipe le Zesty TR 5.9 testé cette fois semble ici parfaitement à sa place.

La fourche est équipée d’un blocage au guidon, hélas assez peu esthétique. En effet, du côté gauche, l’espace sous le cintre est déjà occupé par la commande de la tige de selle télescopique. C’est donc à droite, sur le haut du poste de pilotage, que la commande de blocage a pris place. Au-delà du côté disgracieux, la main droite a déjà fort à faire avec le changement de vitesses et, très honnêtement, sur un vélo de ce type qui ne vise de toute façon pas la performance, cela nous semble superflu. A noter que les versions 3.9 et 4.9 du Zesty TR sont quant à elles équipées de suspensions RockShox, avec une fourche Recon ou 35 Gold RL selon les versions (elles aussi avec blocage au guidon).

Géométrie

Du côté de la géométrie, les cotes sont très proches de celles du Zesty AM, et c’est une très bonne nouvelle car c’est un des points qui nous avaient le plus séduits sur le grand frère. L’angle de direction est le même (66°), soit vraiment couché pour la catégorie, alors que le tube de selle est bien redressé (75°) et lui aussi tout à fait dans la tendance pour favoriser l’efficacité et l’agrément au pédalage en côte. Quant aux bases, elles sont très courtes pour favoriser le côté joueur et maniable.

Le reach est aussi dans les valeurs contemporaines, avec 450mm en taille M. Attention tout de même : comme la version AM, en pratique, le vélo semble fort court et nous vous recommandons de suivre à la lettre les recommandations de Lapierre selon votre taille, voire de prendre d’office la taille au-dessus si vous approchez de la limite haute. Dans notre cas, pour des testeurs entre 178 et 180cm, nous sommes d’office partis sur la taille L, conseillée à partir de 176cm.

Equipements

Nous avons testé ici le Lapierre Zesty TR 5.9, soit le montage le plus haut de gamme disponible pour cette version. Il dispose notamment de suspensions Fox Performance, avec la fourche F34 équipée de la cartouche Fit Grip connue pour son onctuosité. Comme nous l’avons signalé plus haut, seul le blocage au cintre nous semble incongru, tant au niveau de son placement que de son utilité qui ne nous a pas sauté aux yeux une fois sur le terrain.

Du côté de la transmission, on a droit à un panachage de composants Sram Eagle 12 vitesses qui vont du NX pour le shifter et la cassette, du GX pour le dérailleur et un pédalier X1 à manivelles carbone assez inattendu à ce niveau de gamme. C’est joli et sympa, mais on aurait tout de même préféré une cassette GX nettement plus légère que la NX et située au niveau du train roulant, où chaque gramme économisé a tendance à plus se faire sentir.

Le train roulant justement, est composé de moyeux maison (sélectionnés par Lapierre chez Fastace, un important fournisseur taïwanais) montés avec des jantes Mach 1 Maxx 29 fabriquées en France. Elles font 25mm de largeur entre crochets, ce qui est cohérent avec la catégorie du vélo, mais elles pèsent tout de même 620g pièce, ce qui n’est pas rien. Elles sont évidemment compatibles tubeless.

Pour les pneus, Lapierre fait confiance à Maxxis avec l’Ardent à l’avant et le Forekaster à l’arrière. Sur papier, on aurait plus été tentés de faire l’inverse, mais sur le terrain, ce choix se montre très cohérent avec un Forekaster qui offre une énorme traction sans trop se trainer niveau résistance au roulement, alors que l’Ardent est surprenant d’aisance côté accroche latérale malgré ses crampons assez bas, y compris dans le mouillé.  Petite précision : les deux ont été choisis dans des sections importantes (2.4 devant et 2.35 derrière), ce qui nous semble bénéfique tant pour le confort que pour l’accroche.

Les freins proviennent du catalogue Sram, avec un intéressant mélange de Level T à deux pistons pour l’arrière, et Guide T 4 pistons pour l’avant. Les leviers sont identiques, dont il n’y pas pas de différence d’ergonomie entre les deux. Combinés à des disques de 200mm devant et 180mm à l’arrière, cela permet d’avoir un freinage en rapport avec les capacités du vélo, même si on est sur des modèles d’entrée de gamme et pas vraiment connus pour leur puissance.

Enfin, le reste des composants est signé Lapierre, avec notamment une fort jolie potence, un cintre au galbe agréable, des grips plus confortables que la moyenne et surtout une tige de selle télescopique particulièrement réussie. Souple, rapide à la montée comme à la descente et dotée d’une commande agréable, elle mérite une mention spéciale. Elle est malheureusement surmontée d’une Selle Royale Vivo qui n’a pas fait l’unanimité parmi nos testeurs, qui ont jugé sa forme fort ronde et son rembourrage important peu confortables, sans compter que sa largeur importante peut gêner le passage derrière la selle en zone technique, y compris quand elle est abaissée.

Tarif et autres versions

Notre Lapierre Zesty TR 5.9 est affiché à 2999€. Une somme déjà rondelette, mais qui est dans la lignée de ce qu’on trouve chez Specialized avec le Stumpjumper ST Comp qui est affiché à 3099€ avec un équipement comparable, ou encore chez Orbea avec le Oiz H10 qui est à 2999€ et Scott avec le Spark 950 à 2899€, mais avec un groupe Sram NX un cran en dessous. Là où la comparaison est un peu plus délicate, c’est quand on s’aventure du côté des marques de vente en ligne, comme l’inévitable Canyon, puisque là, le Neuron AL 7.0 comparable est 700€ moins cher, et le CF 8.0 avec son cadre en carbone est à 2699€. Chez Rose, le nouveau Ground Control est quant à lui à 2499€ dans son meilleur montage mieux équipé que notre Zesty (XT, Pike, roues DT 1700).

Le Lapierre Zesty TR est aussi disponible dans deux autres versions plus accessibles : le 4.9 (fourche RockShox 35, transmission Sram NX Eagle) à 2499€ et le 3.9 (fourche RockShox Recon RL et transmission SX Eagle) à 1999€. Le Zety TR existe aussi en version femme 3.9 et 3.7. Leur équipement est similaire à celui de la version homme équivalente, mais la géométrie est adaptée et il est disponible jusqu’en XS ainsi qu’en roues de 27,5 pouces (version 3.7). Les modèles « homme » sont quant à eux disponibles uniquement en 29″. Notons aussi au passage que le Zesty AM (140mm de débattement) est aussi disponible en version alu avec des tarifs 100€ plus élevés que la version TR.

Lapierre Zesty TR 5.9 : le test terrain

Avant de monter sur le Lapierre Zesty TR 5.9, quand on le sort du carton et qu’on a terminé de le monter, un point nous interpelle : le poids. On ne s’attendait pas à une fine ballerine, mais tout de même. Et la balance le confirme : 15,1kg. Ouille. Un coup d’œil sur le site Lapierre nous apprend, d’une part, que la marque est très honnête sur ce point puisque le poids annoncé est identique au poids que nous avons mesuré, mais on constate aussi que le Zesty AM en 140 est en fait à peine plus lourd. L’expérience nous montre cependant que les chiffres sont parfois démentis sur le terrain et il est temps d’aller voir dehors ce qu’il en est.

En effet, à l’accélération, pas de miracle, ce n’est pas un foudre de guerre. Mais c’est bien mieux que ce que le chiffre sur l’écran de la balance pouvait laisser penser. La mise en vitesse est linéaire, on sent qu’il ne faut pas le brusquer ni espérer le rouler en relançant sans arrêt, mais on n’a pas l’impression de se trainer non plus. A ce niveau, le vélo peut remercier sa suspension qui reste bien neutre au pédalage, même quand on la roule avec un SAG généreux, autour de 30%. Et il n’est pas vraiment besoin de jouer du levier de blocage pour en profiter. On ne parle même pas du levier de blocage de la fourche, qui confirme son inutilité sur le terrain vu la philosophie du vélo.

La position est très équilibrée et confortable. Les points d’appui tombent naturellement sous le corps. Une fois encore, les suspensions apportent leur pierre à l’édifice, avec une excellente filtration des petits chocs à allure paisible. Ce n’est pas un vélo qui donne spécialement envie d’aller vite, mais pour qui aime prendre son temps, il permet de rouler longtemps de manière agréable et détendue.

Le Zesty AM étant un véritable cabri, nous sommes allés voir aussi ce que cette version TR a dans le ventre quand on l’emmène dans les montées techniques. Bonne surprise, la motricité est excellente. La suspension fait encore une fois merveille pour coller la roue au sol dans les évolutions complexes à basse vitesse. Habituellement les vélos ayant des bases très courtes sont plus délicats à manier dans ce genre de portions, mais ce n’est pas le cas ici et il apportera beaucoup de satisfaction tant aux débutants qui seront séduits par sa facilité qu’aux pilotes plus expérimentés. Mention très bien aussi pour le pneu arrière Maxxis Forekaster qui est tout à fait à sa place là, même si on a plus tendance à le voir en montage sur la roue avant.

Là où ça se complique, c’est quand on essaie de hausse le rythme. Parfois, on a envie de faire une relance pour suivre un pote, mais on est vite calmé dans ses ardeurs par le poids de l’ensemble. Surtout par le poids des roues en fait, ainsi que leur comportement particulièrement inerte. Clairement, elles brident le vélo et c’est dommage qu’il n’y ait pas de réelle évolution sur ce poste entre le modèle d’entrée de gamme et celui-ci. Car ce qui est compréhensible et pardonnable sur un Zesty TR 3.9 à 1999€, l’est tout de suite beaucoup moins sur un 5.9 à 2999€ comme ici. On a dit un peu plus haut que le Zesty TR permettait de rouler longtemps, oui, mais pas avec trop de dénivelé car l’inertie de son train roulant et son poids global peuvent s’avérer pénalisants.

Et en descente, qu’est-ce que ça raconte ? Là aussi nos impressions sont mitigées. Tout d’abord, du côté du positif, il y a la géométrie qui mérite encore une fois des éloges. Elle pousse à jouer et elle met vraiment à l’aise dans la pente. Par contre, les ardeurs sont ici aussi vite calmées par le train roulant dont le poids est tel qu’il vient perturber à la fois la facilité de placement de l’avant, ainsi que le travail des suspensions quand on hausse le rythme.

C’est rare que ce phénomène soit si marqué, mais on a ici l’impression que les roues « emportent » les suspensions avec elles en exagérant les mouvements de ces dernières et en les empêchant de suivre parfaitement les reliefs du terrain dès qu’on roule un peu vite et de manière plus active. Cela donne une sorte de retard sur les impacts, et l’hydraulique semble avoir du mal à contrôler la compression, de sorte qu’on va souvent tout au fond du débattement. Même topo pour le rebond, ce qui fait que tant la fourche que l’amortisseur claquent en détente. Ce n’est pas pour rien que sur tous les engins sportifs équipés de suspensions (voitures, motos, vélos, etc), on essaie de réduire au maximum les masses non suspendues pour améliorer la tenue de route…

Pour en avoir le cœur net, après avoir essayé plusieurs réglages sur les suspensions, nous avons changé les roues et essayé le Zesty TR avec des Asterion XC alu. Une très bonne paire de roues artisanales moyen de gamme qui alourdit tout de même la note de 600€, mais qui l’allège de manière significative car plus d’1kg est gagné sur le train roulant (ce chiffre s’entend avec des composants eux aussi un peu plus légers, à savoir des pneus Vittoria Mezcal 2.2 et une cassette GX, mais des disques identiques à ceux d’origine). Avec en plus un rayonnage bien plus soigné sur les Asterion, cela transforme littéralement le vélo et cela permet en fait simplement d’en révéler le potentiel. On découvre un vélo beaucoup plus réactif, et surtout des suspensions qui semblent comme libérées. On a tout de même encore l’impression qu’on n’exploite pas tout le potentiel de la cinématique et que le réglage d’usine de l’amortisseur arrière n’a pas bénéficié d’un travail de mise au point aussi poussé que sur les Zesty et Spicy, mais on revient tout de même à un comportement bien plus convaincant.

Avec de meilleures roues, le Zesty TR rappelle bien plus les bons souvenirs que nous avons de son grand frère AM. Néanmoins, la géométrie met tellement à l’aise qu’on ressent alors assez rapidement un manque de débattement au niveau des suspensions. Comme le passage à 120mm sur le TR contre 140 sur le AM ne fait pas vraiment gagner en poids ou en rendement, on se dit clairement qu’il vaut mieux s’affranchir des chiffres et des catégories dans lesquelles on a sans doute trop vite tendance à ranger les vélos en fonction de leur débattement (nous y compris) pour partir d’emblée sur le Zesty AM qui nous semble être un package plus cohérent et bien plus polyvalent, quel que soit le type de terrain sur lequel on roule ou son niveau technique.

Verdict

Vous l’aurez compris à la lecture de ce qui précède, nous n’avons pas été aussi éblouis par cette version TR en alu que par le Lapierre Zesty AM en carbone que nous avions testé précédemment. Bien sûr, les deux ne sont pas au même tarif et il cela peut expliquer beaucoup de choses, mais on ne s’attendait pas à un tel écart. Le premier gros souci vient des roues excessivement lourdes, qui brident tant la réactivité du vélo au pédalage que son comportement en descente quand on essaie de lâcher les freins. Nous avons aussi du mal à voir la plus-value de la réduction du débattement. Le Zesty AM, même en version alu, n’est pas vraiment moins bon pédaleur ni plus lourd que le TR, de sorte qu’on se dit qu’il serait dommage de se priver des 2cm de débattement supplémentaires qu’il offre. C’est une évidence si on habite dans une région vallonnée, mais même dans des coins sans grand dénivelé, on ne voit pas quand le Zesty AM pourrait se montrer pénalisant, alors que nous avons ressenti assez rapidement l’envie d’avoir plus de débattement sur le TR, même en Belgique où ce vélo a été testé. 

Lapierre Zesty TR 5.9

2999€

15,1kg

  • Géométrie équilibrée et très réussie
  • Confort et agrément à allure rando
  • Equipements pas luxueux mais bien pensés (tige télescopique, freins 2/4 pistons, pneus 2.4,...)
  • Dur de voir l'intérêt de cette version TR en 120mm par rapport à l'AM en 140
  • Blocage de fourche au guidon inutile et inesthétique
  • Roues très lourdes/masses non suspendues trop importantes, ce qui nuit au travail des suspensions et à l'agrément global
  • Selle inconfortable et trop imposante

Évaluation des testeurs

  • Prix d'excellence
  • Coup de coeur
  • Rapport qualité / prix

ParOlivier Béart