Nouveauté 2021 | Specialized Kenevo SL : Specialized frappe encore

Par Léo Kervran -

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Nouveauté 2021 | Specialized Kenevo SL : Specialized frappe encore

Après le Levo, le Kenevo et le Levo SL, voici le… Kenevo SL ! La gamme Turbo (VTTAE) de Specialized s’agrandit avec un tout nouveau modèle, dont la marque dit qu’il « n’existe pas d’e-bike plus léger et capable ». Au programme, 170 mm de débattement, des roues de 29″, du carbone et une assistance légère avec une petite batterie pour garder un poids le plus bas possible. Nous avons pu le découvrir sur le terrain, voici toutes les informations et nos premières impressions :

Si le nom rappelle le gros Turbo Kenevo (lire Specialized Kenevo 2020 | Du Levo, mais plus gros), ce tout nouveau Turbo Kenevo SL n’a finalement pas grand-chose à voir avec son grand frère en dehors de son positionnement d’e-bike taillé pour engager en descente. D’ailleurs, ce nouveau châssis n’a pas vocation à remplacer le Kenevo et ce dernier reste au catalogue sans aucune évolution pour cette année.

Pour trouver les origines de cette nouvelle plateforme, il faut plutôt aller chercher du côté du Levo SL, de l’Enduro et même du Stumpjumper Evo. Au premier, il emprunte la motorisation et le système d’assistance Specialized SL 1.1 avec batterie 320 Wh. Au second, la plateforme avec l’impressionnante architecture de type 6-bar linkage pour la suspension ainsi que des roues de 29″. Et au troisième, les deux coupelles de jeu de direction et le point de pivot des bases monté sur excentrique qui permettent à eux deux de sélectionner une géométrie pour le vélo parmi 6 possibilités.

Esthétiquement, le Kenevo SL se démarque donc de manière sensible des autres e-bikes Specialized, mais selon nous, il est encore plus réussi. La suspension de l’Enduro formant déjà un « bloc » bas et centré au-dessus du boîtier de pédalier, l’ajout de l’ensemble moteur + batterie n’alourdit presque pas la ligne et on a rarement vu un système d’assistance aussi bien intégré aux formes du vélo.

Le châssis est entièrement en carbone, de série Fact 11m sur tous les modèles (le deuxième plus haut de gamme chez Specialized, après le 12m réservé à la route et au XC). Selon le principe Rider First Engineered, les tubes sont étudiés de manière à garantir le même niveau de rigidité sur chaque taille et éviter l’écueil du vélo en S trop rigide ou du XL trop souple.

Sur la balance, le Kenevo SL affiche 5 kg de moins qu’un Kenevo « classique » : Specialized l’annonce à 18,7 kg en version S-Works et taille S4 (équivalent L). Pas si loin de certains enduros en aluminium, finalement. Le reste de la gamme devrait vraisemblablement se situer un peu au-dessus, sans dépasser la barre des 20 kg.

Comme de coutume chez Specialized, la finition est excellente et les protections généreuses, on dispose même d’un petit garde-boue vissé sur le triangle arrière. Au passage, signalons que la protection qui englobe le moteur et le bas du tube diagonal peut se retirer en un tournemain, ce qui donne accès à une trappe où passent les différents câbles et Durits.

Sur le plan technique, on l’a dit, cette assistance est sensiblement identique à celle du Levo SL. Le moteur est exactement le même (240 W, 35 Nm et 1,95 kg), tout comme la batterie intégrée (320 Wh et 1,84 kg) qui peut être complétée par un Range Extender de 160 Wh et environ 800 g, logeable dans le porte-bidon.

La marque nous explique au passage qu’il est possible de choisir la façon dont le système gère les batteries lorsque le Range Extender est installé : les deux simultanément si on part longtemps ou le Range Extender d’abord puis la batterie si on a la possibilité de déposer le Range Extender en cours de sortie.

Seule différence visible, la présence du nouvel écran de contrôle (en couleur, s’il vous plaît) TCU Mastermind sur le tube supérieur. Lancé il y a quelques mois avec la troisième génération du Turbo Levo, il est entièrement paramétrable via l’application Mission Control et peut afficher jusqu’à 16 pages et 30 informations différentes ! Pour changer d’écran, c’est tout simple, ça se passe au niveau de la commande au guidon avec un petit bouton dédié au-dessus du « + ».

On note toutefois que contrairement aux « gros » e-bikes de la marque, il n’est ici pas possible de modifier la réponse à l’accélération de l’assistance. Seules la puissance maximale et l’assistance pour chacun des 3 modes sont réglables, c’est-à-dire la puissance que peut délivrer le moteur (240 W maximum) et l’effort que vous allez devoir fournir pour atteindre cette puissance.

Pas de mode Shuttle non plus, le système n’est pas adapté à ce genre d’utilisation. En revanche, la fonction Micro Tune qui permet d’ajuster rapidement le niveau d’assistance d’un mode par tranche de 10 % sans avoir à sortir son smartphone (il suffit d’appuyer 3 secondes sur le bouton « + » pour activer la fonction) est bien de la partie.

Côté suspension, le Kenevo SL développe 170 mm de débattement à l’avant comme à l’arrière. Comme évoqué plus haut, il reprend l’architecture de type 6-bar linkage de l’Enduro (voir ce gif pour mieux comprendre son fonctionnement), elle-même issue du Demo de DH, avec quelques modifications pour tenir compte de la présence du moteur. Le point de pivot principal est ainsi placé un peu plus haut et moins en avant, ce qui a pour conséquence d’augmenter légèrement l’anti-squat et de modifier un peu les courbes, que ce soit le ratio ou le trajet de l’axe de roue arrière.

Le principe général reste cependant le même, à savoir une suspension plutôt progressive avec un axe qui recule en début de course pour avoir un vélo qui s’allonge et qui encaisse bien les chocs, plutôt qu’une roue arrière qui « bute » sur les obstacles les plus frontaux et agressifs. On note que l’amortisseur adopte une fixation à « l’ancien » standard à œillets plutôt que le format Trunnion, une solution que Specialized explique être liée à l’intégration de la batterie et du moteur.

Dans le domaine de la géométrie, le Kenevo SL pousse les choses encore plus loin que le Kenevo ou l’Enduro. En configuration d’origine (encadrée en jaune), il affiche en effet un angle de direction de 63,5° ! Et il est possible de descendre encore bien plus bas, jusqu’à 62,5° grâce aux différentes possibilités d’ajustement.

Le reach est un peu moins « extrême » mais tout de même loin d’être court dans l’absolu, puisqu’il mesure 460 mm en taille S3 (équivalent taille M). Parmi les autres cotes importantes, on relève un angle de tube de selle à 76°, des bases à 447 mm et un boîtier de pédalier à 350 mm au-dessus du sol.

Toutefois, la géométrie présentée ici n’est qu’une possibilité parmi de nombreuses alternatives… 6, très précisément. Comme sur le Stumpjumper Evo, qui a inauguré cette fonctionnalité chez Specialized, ou sur le dernier Levo, le Kenevo SL dispose en effet d’un excentrique au niveau du point de pivot des bases (2 positions) et de deux coupelles supérieures différentes pour le jeu de direction, dont une est réversible (donc 3 positions).

Les deux interagissent, et il serait trop long de lister ici tous les effets sur la géométrie suivant leurs positions relatives, mais retenez qu’ils agissent sur l’angle de direction, l’angle du tube de selle, la longueur des bases, la hauteur du boîtier de pédalier, le reach, le stack et enfin l’empattement du vélo. Rien que ça !

Seulement 2 montages complets sont présentés pour ce lancement mais, connaissant Specialized, on peut supposer sans trop s’avancer que d’autres modèles seront présentés plus tard.

Pour l’heure, le Kenevo SL le plus « accessible » (les guillemets s’imposent) est l’Expert, affiché à 9 499 €. Disponible en nuances de gris comme sur ces photos ou en jaune Gloss Brassy Yellow, il est équipé d’un amortisseur Fox Float X2 Performance, d’une fourche Fox 38 Performance Elite, de freins Sram Code RS, d’une transmission Sram X01 Eagle (sauf la chaîne, en GX Eagle), de roues Roval Traverse 29 et de pneus Specialized Butcher (AV) / Eliminator (AR) en 29 x 2.6 et carcasse Grid Trail.

Les pneus sont ici en édition spéciale Soil Searching, le programme de Specialized pour la promotion des trails builders. Sur le S-Works de série, ce sont bien des pneus issus de la gamme classiques, à flancs noirs, qui seront montés.

L’autre modèle disponible, c’est le S-Works, à 13 999 € (même prix que les Turbo Levo et Levo SL). A ce tarif, aucune concession n’est faite sur l’équipement : suspensions Fox Float X2 et 38 Factory, freins Sram Code RSC, transmission Sram XX1 Eagle AXS, tige de selle télescopique RockShox Reverb AXS, roues Roval Traverse SL et le même combo de pneus que l’Expert, Butcher / Eliminator en 29 x 2.6 et carcasse Grid Trail.

Notons que le Range Extender est livré de série avec le S-Works, alors qu’il faudra débourser 414,80 € si on souhaite l’installer sur un autre modèle (379,90 € pour la batterie en elle-même + 34,90 € pour le câble, spécifique car plus long que sur le Levo SL).

Enfin, le kit cadre S-Works (avec amortisseur Fox Float X2 Factory et pédalier Praxis Carbon M30) s’échange contre 6 999 €.

Specialized Kenevo SL : la prise en main

Deux jours avant sa présentation officielle, nous avons pu monter au guidon de ce nouveau Kenevo SL le temps de quelques heures. Comme vous pouvez le constater sur les photos, la météo était quelque peu capricieuse et cette prise en main s’est déroulé sous une pluie battante. Pas le plus simple pour découvrir un vélo, mais au moins ça donne une belle ambiance pour les photos !

Avec mes 1m79 et mon penchant pour les vélos vifs, je grimpe sur un S3 tandis que Paul, derrière l’objectif, opte pour un S4 plus adapté à son mètre quatre-vingt-trois et son goût pour les montures stables. Sur la position en descente, rien à dire, nous nous sentons tous les deux parfaitement centrés sur le vélo. En montée, l’angle de tube de selle pas spécialement droit fait qu’on se sent un peu sur l’arrière mais rien de rédhibitoire, d’autant que nous avons un moteur pour nous aider. Surtout, cela n’entraîne pas de cabrage dans le raide et les franchissements.

Le pédalage paraît très naturel et si le moteur nous aide, nous n’avons pas la sensation que c’est « exagéré » et qu’on monte trop vite trop facilement comme cela peut être le cas sur un e-bike classique à gros moteur. On apprécie également les options poussées de paramétrage qui devraient permettre à chacun de configurer l’assistance du Kenevo SL selon ses préférences. Cette prise en main étant assez courte, n’avons guère pu aller plus loin sur le sujet du pédalage et nous vous invitons à lire ou relire l’article et le test vidéo d’Olivier sur le Levo SL, doté du même moteur, pour plus de retours.

On note tout de même qu’à l’issue de cette prise en main de 850 m de dénivelé, le compteur de Paul (qui roulait avec son sac photo) atteignait à peine les 50 % d’autonomie, sans avoir roulé à l’économie ou même pensé à gérer la batterie de toute la sortie. Plutôt prometteur.

En descente, la première chose qui nous marque est la facilité avec laquelle on peut placer le vélo. Dans ces conditions difficiles, il n’y a rien de pire qu’un vélo lourd qui vous embarque là où vous ne voulez pas aller mais ce n’est pas du tout le cas avec ce Kenevo SL. Le vélo s’emmène d’un virage à l’autre sans effort, ne s’écrase pas dans les virages relevés et il n’y a jamais d’inertie malvenue au freinage.

Il se montre même presque vif lorsqu’on pousse sur les jambes pour accélérer, absorber le terrain ou jouer avec les trajectoires et la notion de « vitesse critique » bien présente sur la plupart des e-bikes classiques (le vélo ne devient maniable et agréable qu’au-dessus d’une certaine vitesse, en dessous on subit le poids) est ici complètement absente.

Toutefois, des gros e-bikes plutôt vifs et joueurs, ça existe. On pense notamment au Trek Rail ou au Specialized Turbo Levo (oui, encore lui), mais ces vélos peuvent alors se montrer un peu moins efficaces et plus « sautillants » lorsque ça va vite et que ça tape. C’est là où le Kenevo SL se distingue : par ses gènes issus de l’Enduro, on parle du vélo et pas de la pratique (quoique…), il reste stable et on sent qu’il a de la réserve, qu’il peut encaisser.

C’est toute la force du concept « SL » et des e-bikes légers en général : ce n’est pas le poids et sa répartition qui font (majoritairement) le comportement du vélo mais bien la géométrie et la suspension, comme sur un vélo classique. Bien sûr, avec un poids autour des 19 kg, le Kenevo SL n’est pas aussi joueur qu’un enduro sans assistance et il faut par exemple un peu d’aide pour le faire décoller, mais dans le pilotage, c’est clairement bien plus proche d’un vélo classique que d’un VTTAE à gros moteur et grosse batterie.

Ce n’était qu’une prise en main, mais le Kenevo SL nous a tellement bluffés que nous n’avons qu’une seule envie, remettre la main dessus le plus vite possible pour un test complet et exhaustif. Nous n’avons fait qu’effleurer son potentiel mais, au-delà du visage équilibré et facile à prendre en main, on devine qu’il y a une part du vélo qui n’attend qu’une chose, se donner à fond sur toutes les pistes d’enduro qu’on voudra bien lui proposer. Si on met de côté les tarifs (qui a dit prohibitifs ?) et qu’on ne tient compte que du comportement, ce Kenevo SL risque bien de plaire à toutes celles et ceux qui n’ont rien contre pédaler avec une assistance mais ne veulent à aucun prix y sacrifier le côté facile et naturel d’un vélo classique. Désormais, plus besoin de choisir !

Plus d’informations : specialized.com/fr

ParLéo Kervran