Test nouveauté | Orbea Rallon 2025 : un enduro dans le corps d’un DH 

Par Paul Humbert -

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Test nouveauté | Orbea Rallon 2025 : un enduro dans le corps d’un DH 

Orbea se lance officiellement dans la descente. Présenté quelques jours après sa première victoire en coupe du Monde, le nouveau Rallon affiche un double visage : un même cadre pour un vélo de DH et un vélo d’enduro. Orbea souhaite renforcer sa présence dans les disciplines « gravity », voici comme la marque souhaite s’y prendre :

Orbea ne pouvait pas rêver mieux pour lancer son nouveau vélo. La marque basque est ancrée dans la compétition depuis de longues années, mais la descente n’a jamais fait partie de son territoire d’expertise. On a senti que le vent changeait quand Orbea a annoncé son association à l’équipe FMD Racing et à Tahnee Seagrave, figure de proue de l’équipe. On pouvait donc se douter que la marque préparait un premier vélo de descente, mais nous ne connaissions ni la formule, ni la recette. 

En parallèle de ça, le Rallon d’enduro entre dans sa quatrième année d’existence (avec une légère mise à jour fin 2023) et sa pertinence dans la gamme commençait à être discutée au regard de l’évolution de l’enduro et de l’arrivée d’un Occam LT remodelé. 

À côté des équipes « factory » d’Orbea navigue la structure de recherche et développement baptisée Oolab qui travaille sur les futurs vélos d’Orbea, toutes disciplines confondues. Oolab fait régulièrement appel à des pilotes de la marque pour les projets qui leurs correspondent, on pense à Damien Oton sur le nouveau Rise ou Wild en VTTAE, mais plus particulièrement à Martin Maes qui a pris le départ de nombreuses course de descente sur des prototypes de vélos de descente. 

On se souvient du prototype basé sur un Rallon d’enduro, puis plus récemment sur le cadre du Wild, le gros VTTAE de la marque. Et c’est de ce dernier que le nouveau Rallon s’inspire, du moins pour la ligne de design et le positionnement de l’amortisseur. De son côté, Martin Maes poursuit pleinement ses rêves de descente et intègre l’équipe Orbea FMD pour un saison complète. 

Revenons entre les rubalises. Le 18 Mai 2025, Tahnee Seagrave remporte la première manche de coupe du Monde de descente en Pologne et fait taire les sceptiques quand à l’arrivée d’une marque « non endémique » avec son premier vélo de descente. Sur le podium, la britannique enlève le tissu qui camoufle son vélo et dévoile le nouveau Rallon aux yeux de tous. 

Un Orbea Rallon deux-en-un 

Si l’arrivée d’un vélo de descente ravira bon nombre de vététistes fans de compétition, la discipline reste marginale quant il est question du grand public. Ce qui n’est pas le cas des vélos d’enduro. Même si la résonance de la compétition est plus faible, le nombre de vélos d’enduro vendus reste bien supérieur à celui des vélos de descente. Orbea devait ainsi répondre à son besoin d’image et de notoriété, tout en proposant une machine « double » avec une déclinaison pour l’enduro. La décision est prise : on ne parlera plus du Rallon, mais des Rallon.

La marque a ainsi conçu un seul et même cadre en carbone pour les deux disciplines. « On a d’abord conçu un cadre de DH, qui se décline en enduro », nous explique Markle Uriarte, le product manager derrière ce vélo. Comment s’y prendre ? La marque utilise des amortisseurs de tailles différentes, des possibilités d’ajustement et se repose sur une pièce clé du vélo baptisée le « Gravity Link » qui se dévoile sous un cache en plastique. 

Situé sous le tube inférieur et juste devant le boitier de pédalier, le Gravity Link se décline en plusieurs options pour faire varier la progressivité de la suspension (DH et enduro), la taille de roue (enduro), la longueur des bases (DH et enduro) et la hauteur de boitier de pédalier (enduro). 

Ce Gravity Link est positionné au plus bas, comme peut l’être le moteur du VTTAE Wild de la marque et permet de baisser les masses du vélo là où « ça compte ». C’est un point central dans la conception et sur lequel l’équipe d’Orbea insiste. L’architecture et le design de ce vélo reposent sur une volonté de proposer une suspension la plus « libre » possible, tout en étant le plus bas possible en conservant les masses sous le centre de gravité du pilote. 

L’aboutissement de cette idée permet à la marque de proposer des poids, des lests, qui se fixent sous le gravity link pour le vélo de descente (395 g, 95 g et 93 g en option) comme pour l’enduro (1 poids de 553 g en option). Assez commun en DH (on l’avait déjà vu sur le prototype de Martin Maes), c’est en revanche assez nouveau en enduro. Orbea développe : « Ajouter du poids permet une plus grand sensation de souplesse et d’être plus ancré. Enlevez les poids pour les pistes qui demandent des accélérations et des réactions plus vives. »

Avant de rentrer dans les détails de chaque vélo, voici ce qu’ils ont en commun dans leur construction : 

Sur toute la gamme, on retrouvera un multi-outil aimanté dans le point de pivot de la biellette, avec des clés hexagonales de 2, 3, 4 et 5. La clé de 6 est cachée dans l’axe de la roue arrière.

Sur ce vélo, vous pourrez choisir entre un montage des câbles en interne ou en externe. 

Sur les pivots principaux, les roulements sont isolés de l’extérieur avec un joint supplémentaire. Le cadre en carbone est également protégé avec des films de protection couvrant les « zones sensibles ». On apprécie ces petits détails qui favorisent la durée de vie des vélos. 

Le Rallon DH 

L’Orbea Rallon de descente développe 200 mm à l’avant comme à l’arrière. Il est conçu autour d’un montage mulet (29 pouces devant, 27,5 pouces derrière) uniquement. 

La marque présente les points forts du vélo : « traction, support et gestion de la fin de course ». Au-delà du cadre en lui même, la conception de la cinématique et la manière dont la suspension va travailler sont au centre du vélo. Orbea réduit au maximum le kickback, l’anti-squat et l’anti-rise pour minimiser les contraintes sur la suspension dans les freinages et lors de son fonctionnement. 

Afin de contraindre le vélo et de le « poser » encore davantage, trois lests sont disponibles. Ils se fixent sur deux vis du Gravity Link et permettent d’ajouter 395 g puis 95 g et 93 g pour un total max de 583 g. 

Orbea propose son architecture Four Bar Linkage – split pivot sans être tenté par un point de pivot haut avec un galet de renvoi comme sur de nombreux autres vélos de descente.

Le « Gravity Link », cette fois de couleur violette sur le DH, permet un ajustement de la progressivité de la suspension sur deux positions. La première permettra de dynamiser le vélo et de lui donner un côté plus joueur, quand l’autre permettra au vélo d’être plus posé et tolérant. La marque communique sur une différence de l’ordre de 5% entre les deux positions (de 25% à 30%).

Afin de poursuivre les mêmes objectifs, et offrir le choix au rider, deux longueurs de bases sont possibles : 442 mm ou 450 mm. Plus court, le vélo sera plus agile et joueur. Plus long, il offrira plus de stabilité à haute vitesse. Le choix devra se faire au moment de l’achat du vélo. Orbea utilise un point de pivot arrière concentrique à l’axe (et à la patte) de dérailleur. La marque ne pouvait ainsi pas intégrer un flip-chip à cet endroit-là, et ne souhaitait pas le positionner au niveau du pivot principal (pour des raisons de fiabilité). 

Côté géométrie, on retrouve un reach de 473 mm en taille L, un angle de direction de 63,8 degrés, des bases de 450 mm (bases longues) et un stack de 650,9 mm.

La géométrie et le design général du vélo ont été conçus pour que le vélo soit le plus bas possible, afin d’offrir un maximum de mouvement au rider. 

Le jeu de direction permet un ajustement de l’angle de +0,75° ou -0,75°. Une coupelle « neutre » est également livrée avec le vélo. 

Plus surprenant, mais finalement pratique, on retrouve la « boite à gant » dans le tube inférieur. Pensée autour de la pratique enduro évidemment, la marque y voit une opportunité pour les riders en bike park de glisser du matériel de réparation. 

Se pose alors la question de la rigidité du cadre. Lors des échanges avec l’équipe de descente, il est ressorti que de nombreux riders sont à la recherche de confort, ou du moins de tolérance, sur les cadres. Orbea se positionne donc « du côté souple du spectre pour les vélos de DH, et du côté plutôt rigide pour l’enduro », d’après Markel Uriarte, le chef produit. 

Les pilotes FMD-Orbea ont eu le possibilité de rouler avec un cadre sans ouverture, mais le gain de flexibilité offert par ce trou semble avoir été bienvenu pour les riders. 

Un seul modèle de Rallon DH sera proposé à 7999 €, mais la marque insiste sur la possibilité de personnalisation du montage, en plus de la couleur. Le programme Myo d’Orbea permet de personnaliser votre montage et vos équipements, ainsi que la peinture de votre vélo, avec des combinaisons très poussées. Le montage et les options sont à retrouver ici.

Sur la balance, comptez entre 16 et 17 kilos en fonction des montages (avec ou sans poids, roues carbones…). 

Le Rallon Enduro 

L’Orbea Rallon d’enduro est une déclinaison du châssis de descente. Les choix d’équipements et les deux différents « Gravity Links » lui donnent un visage toutefois bien différent. 

On retrouve le même cadre, la même cinématique, mais une fourche et un amortisseur différents. Le vélo ne développera ainsi « que » 170 mm à l’arrière et 180 mm à l’avant. 

Plus d’options s’ouvrent pour ce vélo d’enduro. On pourra choisir un montage mulet ou tout 29 pouces en changeant de Gravity Link. 

Avec un petit flip chip intégré au Gravity Link, on peut choisir entre deux hauteurs de boitier de pédalier. On fait évoluer la hauteur sur 7 mm, et l’angle de direction de 0,5 degré. On peut toujours faire évoluer la progressivité de la suspension, avec une différence de l’ordre de 5% (de 22,5% à 27,5%). 

Avec un amortisseur et un Gravity Link différents, le fonctionnement de la suspension n’est pas identique à celui du DH, même si l’objectif reste assez similaire. 

Une suspension libérée, c’est très bien en DH, mais en enduro, on aura besoin d’un vélo qui relance, qui est dynamique à plus basse vitesse et qui pédale dans une certaine mesure. Orbea se repose ainsi sur les blocages de ses amortisseurs, ainsi que sur l’utilisation d’un modèle à blocage électronique automatique (Fox Float Live Valve Néo) pour contrer les effets de la cinématique au pédalage. 

On retrouve une géométrie légèrement différente du vélo de descente, avec un reach de 478 mm en taille L, un stack de 647,2 mm, un angle de direction de 64,25° et des bases de 442 mm.

Là aussi, il faudra choisir la longueur de base de votre choix à la commande : 442 ou 450 mm. Plus courtes, le vélo sera plus agile et joueur. Plus longues, et il offrira plus de stabilité à haute vitesse.

Sur cet enduro, on peut « poser » encore plus le vélo en ajoutant un lest de 550 g. Il est évidemment possible, voire conseillé en fonction du terrain, de rouler sans, mais en condition « descente » ou bike park, c’est une option intéressante qu’on a testée. 

On retrouve également l’angle de direction réglable à + ou – 0,75°. Vous vous perdez dans les chiffres et la géométrie ? Orbea a conçu un tableau dynamique sur son site afin de connaître les évolutions possibles.

Plus « enduro », on retrouve un tube de direction bien droit et profond qui permet l’utilisation de tiges de selles à grand débattement. Ce choix, décliné dans la gamme Orbea est très appréciable et permet une insertion de 240 mm sur toutes les tailles. 

Dans la « boite à gant », on retrouvera des pochettes pour glisser ses outils et son matériel de réparation. 

Orbea dévoile trois montages « stock » à 5399 €, 6999 € et 9999 € pour le modèle équipé d’un amortisseur électronique. Les montages complets sont à retrouver ici. 

Là encore, les poids sont compris entre 16 et 17 kilos en fonction des montages (roues carbone, lests…).

Là encore, Orbea insiste sur son programme Myo qui permet de personnaliser votre montage et vos équipements, ainsi que la peinture de votre vélo avec près d’un million de combinaisons d’après la marque. 

Sur le terrain 

Nous avons découvert ces deux vélos dans le Val d’Aran, au coeur des Pyrénées. Les très belles pistes ont un profil plus « enduro », mais Orbea a sélectionné deux traces qui nous ont permis d’avoir un petit avant-goût du vélo en version DH. 

Les visages de ces Rallon sont véritablement multiples. Bases longues, progressivité de la suspension, taille de roue, hauteur de boitier de pédalier, jeu de direction, amortisseurs… Il serait bien ambitieux d’imaginer tout tester le temps de deux petites journées. C’est une véritable plateforme qu’Orbea a conçue. Il faudra consacrer du temps à ces vélos pour qui voudra tenter l’aventure. On aurait pu critiquer l’aspect fastidieux de ce processus, mais Orbea assume le choix de proposer un vélo pointu, pour un public averti. Vous êtes prévenus. 

On doit avouer avoir été un peu sceptiques quand nous avons découvert que les vélos partageaient un même cadre. Concevoir un cadre pour une discipline est déjà tel compromis, qu’accommoder les besoins de deux disciplines dans un même cadre est une mission presque impossible… si la marque n’a pas ouvert beaucoup de portes pour les ajustements et la personnalisation. 

Et si vous vous posez la question : oui, on peut techniquement passer d’un vélo à l’autre avec le même cadre, mais il faudra changer, au minimum, fourche et amortisseurs, ainsi que le Gravity Link. Pas certain que le jeu en vaille la chandelle. 

Le Gravity Link est installé sous l’amortisseur, là où la terre peut venir se loger. Orbea nous indique qu’en retirant le cache plastique sous le cadre, on peut nettoyer de haut en bas et évacuer la terre.

On commence avec le vélo de descente, en bases longues et sur un terrain plutôt gras. On s’attendait à grimper sur un gros vélo d’enduro, mais il n’en est rien. On est vraiment sur un vélo de descente. L’arrière collé au sol, l’avant précis et un grip dépassant de loin les performances d’un vélo d’enduro. On trouve beaucoup de stabilité, surtout en bases longues, sans pour autant manquer de place ou de facilité à bouger le vélo dans les virages les plus serrés. 

Ce qui nous marque le plus, c’est la suspension du vélo. En position « linéaire », le vélo s’assoit, accroche le sol et ne le lâche pas. Les trois lests étaient installés sur le Rallon DH et on garde en tête la filiation avec l’Orbea Wild, un des VTTAE les plus réussis du marché (test à venir très prochainement). Côté position et géométrie, on arrive à être centré sur le vélo et à faire virer le vélo avec l’équilibre de notre corps. Le vélo répond et nous met en confiance. Pas d’effet « barre à mine ». Ici et au fil des descentes, notre confiance grandit et nous pousse à lâcher les freins dans les portions les plus rapides. 

Du côté de l’enduro, on a cherché à voir ce Rallon sous un nouveau jour avec des roues de 29 devant et derrière. On conserve des bases longues et une suspension linéaire. On lui ajoute la position basse du boitier de pédalier. Dès les premiers mètres, on se sent sur une machine très différente. Malgré leurs lests, les deux vélos ne transmettent pas une sensation de lourdeur. On est posé assez différemment et c’est surprenant. Plus haut, plus sur l’avant du vélo. On retrouve nos marques, comme sur d’autres gros enduro du marché. À l’inverse des sensations de la veille, le vélo offre cette fois-ci un confort très ferme. On descend rapidement en pression pour aller chercher du confort dans les premières descentes mais cette sensation ne nous a pas quittés de la journée.

On entame la journée avec le nouvel amortisseur Fox X2. On retrouve le même ADN que le vélo de descente et une suspension très libre qu’on découvre surtout au freinage. Avec moins de débattement, on plonge moins et on reste plus haut. Les virages serrés sont plus naturels mais on conserve une grosse capacité d’encaissement de la part du Rallon enduro. Par curiosité, on réalise nos deux dernières descentes sur le Fox Neo Live Valve. Là encore, le vélo change de visage. L’amortisseur a moins de « coffre » et d’assise, mais offre plus de réactivité et de vivacité. À défaut d’avoir véritablement pédalé, on a pu relancer le vélo dans de courtes sections de pédalages, et clairement, le vélo est en face des gros enduro du marché, loin d’une relance pénible sur un vélo de descente. Au pédalage « au train », la tige de selle à grand débattement et le tube de selle très droit sont de très bon points. 

L’amortisseur Fox X2 semble plus en phase avec ce Rallon enduro, mais on aime la porte ouverte par l’électronique, qui vient prendre la main quand il est question de pédalage, permettant ainsi de concevoir un châssis orienté vers les performances en descente. 

En descente comme en enduro, chaque Rallon a une identité propre, mais un ADN en commun. Il suffit de s’arrêter sur le bord des pistes pour observer la suspension du vélo lors des passages des riders : on est posé, ancré et on pilote par « dessus » cette zone clé du vélo. Le travail sur le centrage des masses et la suspension se ressent dès la première prise en main. On vous le disait, ce Rallon est une plateforme qui pourra prendre de nombreux visages, à vous d’avoir les compétences pour trouver celui qui vous conviendra. On aime l’approche sans compromis d’Orbea, qui aux côtés de vélos grand public comme l’Occam ose et propose désormais un produit « de niche » qui pourra séduire les pilotes les plus experts. Le vélo de descente a fait ses preuves dès sa première sortie en coupe du Monde, et l’enduro nous intrigue : sera-t-il polyvalent et accessible ou seuls les experts pourront en profiter ? Réponse après notre test longue durée à venir. 

Plus d’infos sur le site de la marque : www.orbea.com

Photos : Rupert Fowler – Orbea / Jérémie Reuiller – Orbea

Vidéo : Thomas Theunissen /  Jean Espert – Orbea

Par  Paul Humbert