Test | Cannondale Scalpel Team & SE : XC débridé ou Trail policé ?

Par Olivier Béart -

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Test | Cannondale Scalpel Team & SE : XC débridé ou Trail policé ?

La recette est désormais connue : sur base d’un même châssis, de plus en plus de marques développent deux versions, une pure XC en 100mm, et l’autre plus orientée trail/downcountry en 120mm. Le Cannondale Scalpel n’échappe pas à cette (excellente) tendance et il se décline désormais dans une version SE en 120mm, en plus de la pure bête de cross country identique à celle utilisée par le team en coupe du monde. Vojo a eu l’occasion de les tester longuement. Voici nos impressions et la vidéo de l’essai !

Le Cannondale Scalpel a évolué en 2020, avec cette fois deux vraies déclinaisons bien distinctes. Le châssis reste le même, mais pour que la version XC en 100mm se radicalise encore plus et vise les performances à 100%, une déclinaison SE voit le jour avec 120mm à l’avant/115mm l’arrière et des équipements un peu différents en vue de lui donner un côté plus accessible et polyvalent.

Nous avons déjà eu l’occasion de vous présenter le Scalpel dans cet article très détaillé, où vous trouverez aussi un essai complet de la version XC. Nous allons donc ici surtout nous concentrer sur la comparaison entre les Scalpel XC et SE, ainsi que les enseignements tirés au cours des semaines passées au guidon de chacun.

Suspensions

Commençons par la suspension. Cannondale dit avoir travaillé pour rendre la suspension de cette nouvelle version plus active, afin d’offrir plus de grip et aussi plus de confort pour permettre au pilote de se reposer. Et c’est vrai ! Par rapport à la précédente génération, on est toujours sur une suspension qui reste assez haut dans le débattement en toutes circonstances, qui ne s’enfonce pas pour un oui ou pour un non, mais qui se montre tout de même réellement impressionnante dans l’absorption des impacts.

Néanmoins, nous avons été plus convaincus par la suspension du modèle XC que par celle du modèle SE, malgré le débattement supplémentaire offert par ce dernier. La raison tient selon nous à l’amortisseur. Sur ce vélo, le Fox nous a clairement semblé supérieur et plus raffiné que le RockShox SID qui nous a paru un peu dur en début de course et manquant de maintien ensuite.

Le blocage au guidon est aussi un vrai atout sur ce genre de machine, mais il est hélas absent sur le Cannondale Scalpel SE

Le blocage au guidon est aussi un vrai atout sur ce genre de machine, mais il est hélas absent sur le Cannondale Scalpel SE, ce qui est selon nous une erreur car justement avec plus de débattement et vu la vocation plus polyvalente du modèle, on aurait aimé pouvoir régler l’amortisseur plus souple de manière à optimiser le comportement en descente, et disposer d’un blocage au guidon pour pouvoir le durcir dans les zones plus planes et les ascensions. Carton rouge aussi pour le réglage du rebond qui nécessite une clé allen sur le SID… tout sauf pratique !

Du côté de la fourche par contre, la RockShox SID qui équipe le Scalpel SE est absolument fabuleuse. Nous avons déjà dit tout le bien que nous pensons de cette fourche dans notre test complet et cela s’est encore vérifié ici : rigide, onctueuse, confortable en début de course, parfaite au niveau du maintien, c’est selon nous la référence du moment parmi les « grosses » fourches de XC en 120mm de débattement. Et contrairement à l’arrière, un blocage au guidon ne nous a pas manqué pour la proue.

Quant à la Lefty… eh bien c’est la Lefty ! Différente, attachante, elle ne laisse personne indifférent. C’est clairement à nos yeux la meilleure Lefty jamais sortie, et c’est une fourche précise, à l’amortissement très performant, mais il faut aller vite et être capable de lui rentrer dedans pour vraiment en profiter. A allure plus réduite, elle peut sembler fort ferme, alors que quand on hausse le ton, on se rend compte qu’elle procure une excellente lecture du terrain et tout ce que va rechercher un compétiteur. Il faut noter aussi que ses réglages sont un peu plus complexes que la SID, qui est vraiment beaucoup plus « plug and play ».

Géométrie et comportement

Passer de la Lefty à la discussion sur la géométrie : en voilà une belle transition ! Car il y a un point d’apparence anodin, mais qui change selon nous beaucoup dans le comportement des deux machines. Sur la version XC, la fourche Lefty présente un déport de l’axe de roue de 55mm, contre 42mm sur la SID. Et cela modifie beaucoup le feeling au niveau de la roue avant.

Sur le Cannondale Scalpel Team, la direction est très vive, les changements de cap ultra directs, ce qui rend le vélo pointu à piloter… mais aussi incroyablement jouissif. Rares sont les vélos actuels qui procurent encore des sensations aussi pures, brutes. Sur la version SE, tout est beaucoup plus policé, et il semble bien neutre par rapport à son turbulent jumeau. Attention, il reste amusant, tout en étant beaucoup plus facile et sûr, mais le XC a marqué notre mémoire au fer rouge, alors que le SE est plus « normal » dans son comportement.

Par contre, nous n’avons pas ressenti de différence flagrante de comportement qui nous semble pouvoir être imputée à la présence de fibres HM sur le Scalpel Team, alors que le Scalpel SE1 en est dépourvu.

Les équipements

Au niveau de l’équipement, le Scalpel XC étant en version Team très haut de gamme, il est logiquement mieux équipé que le SE. Mais les fondamentaux sont très similaires, à commencer par les roues Hollowgram carbone à jantes de 25mm. La différence se fait au niveau des pneus, en 2.35 sur le SE et et 2.25 sur le XC, mais dans les deux cas on profite de montes aussi accrocheuses que polyvalentes.

Dans l’ensemble, malgré 1,4kg de différence entre les deux (11,2kg contre 9,8kg, sans pédales mais avec multi-outil intégré), les sensations de rendement sont assez proches, mais les accélérations au guidon de la version XC sont clairement plus tonitruantes, plus explosives. Le SE dégage une belle impression de légèreté, il accélère fort et se classe parmi les meilleurs de la catégorie 120mm, mais il a face à lui une version XC qui navigue sur une autre planète en la matière !

LE gros point noir de la version XC, c’est l’absence de tige de selle télescopique. Avec moins de débattement, un comportement plus vif et délicat, le Scalpel Team aurait absolument besoin de cet accessoire pour être plus à l’aise en descente et profiter encore plus du tempérament ainsi que des performances de l’engin. Rien que cette tige de selle change tout sur le SE, et le rend beaucoup plus sûr et agréable en descente, où il garde un petit grain de folie bien agréable.

Sur tout ce qui est transmission et freinage, la confrontation directe entre XT et XTR montre que du strict point de vue du fonctionnement, il n’y a quasi plus de différence entre les deux. Seul le poids et le côté luxueux du XTR confirment son exclusivité, mais le XT apparaît clairement comme le choix malin pour qui ne veut pas dépenser son argent là où cela ne se sent pas directement. C’est vrai aussi au niveau des freins, pour lesquels nous avons même eu tendance à trouver les XT un poil plus agréables.

Sur le long terme

Tester un vélo longtemps, c’est aussi pouvoir se rendre compte de son vieillissement, des petites choses qui apparaissent avec le temps. Force est de constater que dans l’ensemble, les deux ont très bien supporté un usage assez intensif pendant plusieurs mois. Les transmissions sont peu marquées, les freins ont juste nécessité un changement de plaquettes mais rien de plus, et même s’ils ont quelques griffes inévitables, les cadres ont tous les deux gardé leur superbe. La teinte beige du Scalpel SE semble toutefois un peu moins sensible aux rayures que le noir brillant du modèle XC Team.

Les roues ont aussi très bien résisté, sans prendre le moindre voile ou saut, et fait remarquable, nous n’avons pas non plus rencontré la moindre crevaison. Au cas où, le fait de disposer sur sa machine d’un petit kit de réparation semi-intégré est aussi un bel atout. C’est le genre de détail que nous apprécions beaucoup et qui peut éviter bien des galères. Cela dit, si le multi-outil est bien intégré, il faudrait selon nous revoir la fixation du kit de mèches et de la cartouche de CO2. La courroie censée tenir le tout est fort lâche et ses petits œillets ont fini par se déchirer sur les deux vélos. Elle est facilement remplaçable, mais c’est dommage. On regrette aussi que le kit de mèche ne soit pas à 100% sécurisé lorsqu’on ne met pas de cartouche de CO2 ou de pompe par-dessus, car sans cela, la sangle reste trop lâche pour le maintenir correctement.

Mais dans l’ensemble, c’est bien un des rares détails qui nous ont chagrinés sur ce vélo au fil des semaines d’utilisation. Et ce que nous avons surtout apprécié, c’est que les deux vélos sont restés très silencieux, sans apparition de craquements ou de petits bruits intempestifs. L’absence de point de pivot arrière et des roulements bien protégés dans le cadre jouent un rôle. Et il est loin aussi le temps des boîtiers Cannondale qui craquaient à tout va. Bref, le bilan est positif !

Et il nous reste maintenant à vous en dire un peu plus sur le modèle, son historique et surtout à propos de nos sensation sur le terrain ! Le tout, en vidéo :

Cannondale Scalpel XC & SE : l’essai vidéo

 

Verdict

Objectivement, le Cannondale Scalpel SE est sans doute un meilleur choix pour 99% d’entre nous. Il est 3000 euros moins cher (5500€ contre 8500€), il est plus polyvalent… plus tout, en fait. Mais voilà, nous faisons un sport de passion, de plaisir, et le cœur a ses raisons que la raison ignore. C’est le cas ici, et si nous laissons juste parler nos sentiments ainsi que notre subjectivité, c’est sans aucun doute le Scalpel Team XC que nous aurions envie de garder ! Il est tellement atypique dans son comportement, tellement pointu, tellement extrême, qu’il marque a vie tout qui l’a roulé. Et nous, les vélos à forte personnalité, on adore ça !

Plus d’infos :

ParOlivier Béart