World Cup XC 2023 #6 | Portfolio : Les Gets en 7 histoires

Par Léo Kervran -

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World Cup XC 2023 #6 | Portfolio : Les Gets en 7 histoires

On n’allait pas vous laisser comme ça ! Avant de tourner définitivement la page de cette coupe du monde aux Gets édition 2023 et de se projeter vers les dernières échéances de la saison, nous voulions revenir sur sept histoires, sept enjeux des courses XC Elites. D’une Mona Mitterwallner sans complexes au spectacle des Français en passant par la fatigue générale, Nino Schurter ou les Américaines, voici sept choses à retenir de cette 6e étape de la coupe du monde :

Le show Français

Si le Mont Chéry est la chasse gardée des descendeurs français (4 victoires d’affilée depuis 2019), le circuit de XC tracé sur le versant d’en face a connu moins de succès : avant cette année, seule Pauline Ferrand-Prévot avait réussi à y briller chez les Elites.

L’après-midi avait bien commencé avec la 3e place d’une Ferrand-Prévot pourtant légèrement diminuée et elle s’est poursuivie en fanfare. Après un début de course en peloton comme souvent chez les hommes, un petit groupe de quatre a réussi à s’isoler en tête : Victor Koretzky, Joshua Dubau et Jordan Sarrou, seulement accompagnés par Nino Schurter !

Si Sarrou était dans un moins bon jour que prévu, on a longtemps cru au doublé vu comme Joshua Dubau tenait tête à Nino Schurter avant même la crevaison du Suisse. Malheureusement pour le pilote Rockrider Ford, il y avait un tour de trop mais il parviendra tout de même à sauver une place sur le podium afin d’accompagner Victor Koretzky pour le plus grand bonheur du public.

Avec cette victoire, Victor Koretzky fait au passage un grand pas vers la sélection olympique. Bien qu’il ait connu un petit passage à vide à Vallnord (25e), il a montré qu’il savait être performant lorsque les conditions le demandent : meilleur français et au pied du podium lors des championnats du monde, victoire aux Gets pour la seule étape de coupe du monde en France.

Yvan Clolus, l’entraîneur national, nous expliquait que certaines étapes étaient plus importantes que d’autres pour la sélection et que Les Gets faisait partie de ces marqueurs. Pas pour le parcours, car il est très particulier, mais plutôt pour la capacité à performer sous la pression des supporters venus en nombre. Or, valider sa sélection avant l’hiver cela permet aussi de s’entraîner plus sereinement, sans avoir à prévoir un pic de forme au printemps pour décrocher une place sur l’une des premières coupes du monde de 2024.

Il n’y a bien sûr pas encore eu de confirmation officielle mais Victor Koretzky est désormais le mieux placé pour décrocher sa place aux JO. On n’oubliera pas non plus qu’il a déjà l’expérience de l’évènement, puisqu’il était du voyage au Brésil en 2016 et au Japon en 2021. Pour la deuxième place, on met une petite pièce sur Joshua Dubau mais rien n’est joué, contrairement aux femmes où Pauline Ferrand-Prévot et Loana Lecomte apparaissent un cran au-dessus des autres prétendantes.

Petit bémol pour le public en revanche : encourager c’est bien, être fair-play encore plus ! On a entendu beaucoup de bruit pour les athlètes français et on n’aimerait pas être à la place de Pauline Ferrand-Prévot et Loana Lecomte tant la pression doit être étouffante par moments. En revanche, c’était beaucoup plus discret pour les autres pilotes. Encourager les Français plus que les autres c’est normal à domicile mais le silence radio ou presque, c’est décevant. Prenez donc exemple sur vos homologues de la DH, bien plus enthousiastes à tous les passages !

Mona Mitterwallner, on ne l’arrête plus

Une première victoire dans le froid et la boue de Vallnord et une deuxième dans la foulée, sous la chaleur et dans la poussière des Gets : on n’arrête plus Mona Mitterwallner !

On entend parfois qu’une première victoire peut faire office de catalyseur pour débloquer un athlète et l’Autrichienne semble bien l’illustrer. Aux Gets, elle a réalisé la meilleure performance de sa carrière en Short Track (6e) avant de signer un récital sur le format olympique.

 

Double championne du monde marathon à seulement 21 ans, Mitterwallner avait l’habitude de finir très fort mais de perdre beaucoup de temps en début de course. Lors de la conférence de presse officielle en début de semaine, elle expliquait que cela tenait autant à son entraînement, fait de longues sorties en montagne, qu’à un manque de confiance pour s’imposer dans le peloton avec son petit gabarit.

Retirez la perte de temps au départ, gardez le final en boulet de canon et vous avez la Mitterwallner des Gets. Pour ses adversaires, difficile de lutter ! L’Autrichienne a signé le meilleur temps de chacun des trois derniers tours et a même réalisé le tour le plus rapide de toute l’épreuve… dans l’avant-dernier tour, après une heure de course !

Reste à voir comment elle va gérer ce nouveau statut de favorite qui va s’imposer petit à petit si elle continue à ce rythme mais contrairement à d’autres, elle est déjà dans la lumière depuis plusieurs années avec ses performances impressionnantes dès la catégorie Juniors. Au classement général, elle garde encore une petite chance de détrôner Puck Pieterse en cas de défaillance de cette dernière. De quoi nous offrir une belle fin de saison !

Puck Pieterse nous fait mentir

Troisième des championnats du monde et 7e à Vallnord, on pensait qu’elle commençait à fatiguer après son début de saison sur les chapeaux de roues, mais Puck Pieterse a montré aux Gets qu’il n’en était rien.

La Néerlandaise a mené l’essentiel de la course, parfois seule en tête, et n’a dû s’incliner que face à Mona Mitterwallner dans les deux derniers tours. Si elle continue sur la même lancée, elle pourrait devenir la plus jeune pilote de l’histoire du XCO à remporter le classement général de la coupe du monde Elites…

Si on sort du petit monde du VTT, il sera aussi intéressant de voir comment elle compte gérer cette fin de saison. Elle figure en effet parmi les meilleures mondiales en cyclo-cross (championne d’Europe en titre et 2e de la dernière coupe du monde), dont la saison commencera cette année une semaine seulement après la finale du XCO au Mont-Sainte-Anne.

Obligée de prendre part à au moins une étape de la tournée nord-américaine pour défendre sa première place au classement général (elle compte 321 points d’avance sur Mona Mitterwallner, soit un peu plus d’une manche), Puck Pieterse est dans une position délicate. Sécuriser le titre en XC ou se reposer pour viser celui en CX ? Réponse dans deux ou trois semaines…

Le retour des Américaines ?

Sara Ballantyne, Ruthie Matthes, Julie Furtado : les Américaines ont largement dominé les premières années de la coupe du monde de XC, remportant les cinq premières éditions et en plaçant deux pilotes sur le podium final à trois reprises. Depuis l’an 2000, la discipline est surtout devenue une affaire européenne, avec quelques incursions canadiennes ici et là (Marie-Hélène Prémont, Catharine Pendrel).

Si Kate Courtney peine encore à retrouver son niveau de 2018-2019, la pilote du team Scott Sram est encore jeune (28 ans cette année) et sa carrière est loin d’être finie. Surtout, elle a ouvert la voie à la nouvelle génération : avec Haley Batten (25 ans) et Savilia Blunk (24 ans) en plus, les USA sont tout simplement le deuxième pays le mieux représenté dans le top 20 mondial derrière la Suisse.

Batten sur le podium dès son retour à la compétition après une mauvaise chute à Leogang qui l’a forcée au repos (commotion cérébrale), Savilia Blunk qui décroche son premier podium Elites… L’avenir s’annonce radieux pour les supporters outre-Atlantique ! Et n’oublions pas que dans trois semaines, la coupe du monde posera ses valises à Snowshoe, dans l’Etat de Virginie-Occidentale.

Inoxydable Nino Schurter

Un podium de Nino Schurter en coupe du monde, quoi de plus normal ? Ça n’y paraît pas comme ça mais en réalité, le niveau de performance du pilote Scott Sram cette saison est presque un exploit. Ce week-end, la moyenne d’âge du top 30 était de 28 ans alors que Schurter a fêté ses 37 ans au printemps. Présenté autrement, le Suisse était le deuxième pilote le plus âgé du peloton (après le Mexicain Jose Manuel Meza Bucio, classé 108e et dernier) aux Gets !

On le croyait en bout de course en 2020-2021 mais il a trouvé le moyen de se remobiliser pour revenir jouer aux avant-postes depuis l’année dernière. S’il s’est fait déposséder de « son » maillot de champion du monde (9 titres entre 2012 et 2022) par Tom Pidcock à Glentress, il occupe actuellement la tête du classement général de la coupe du monde et s’il parvient à défendre cette position jusqu’au bout, ce sera son 9e sacre à ce niveau.

Il en deviendrait alors le plus vieux vainqueur… effaçant au passage encore un record de Julien Absalon ! Pour mettre les choses en perspective, Puck Pieterse avait 7 ans lorsque Schurter a remporté son premier classement général chez les Elites.

Aux Gets, il s’est en plus offert le luxe de ridiculiser tous ses concurrents à l’exception de Victor Koretzky. Incapable de répondre à l’accélération du Français en milieu de course puis victime d’une crevaison à l’arrière, il est reparti avec le groupe à la lutte pour le podium, les a rapidement distancés et n’a fait qu’une bouchée de Joshua Dubau dans le dernier tour pour revenir en deuxième position comme s’il ne s’était rien passé. Impressionnant.

Le retour de l’été

Les Alpes sont moins durement touchées que l’ouest du territoire dans la vague de chaleur qui frappe la France ces derniers jours et Les Gets a l’avantage d’être un peu en altitude (1150 m au centre de la station), mais il faisait tout de même chaud sur le front de neige cette semaine : on attendait 25°C pour les courses Elites dimanche après-midi.

Et on parle de 25°C à l’ombre, or les pilotes sont plus souvent en plein soleil qu’en sous-bois sur le parcours haut-savoyard. Les deux longues montées, notamment, sont tracées sur des pistes de ski où il n’y a pas l’once d’une tache d’ombre pour rafraîchir les organismes.

Sous les arbres il fait un peu plus frais mais la poussière, omniprésente car il n’a pas plu de la semaine, prend alors le relais. Elle est tellement présente qu’il est parfois difficile de distinguer les pilotes depuis le bord de la piste, alors imaginez respirer là-dedans…

Sacré changement après les 7°C et la pluie de Vallnord !

Des organismes fatigués

On a vu beaucoup d’athlètes malade cette semaine aux Gets, dans toutes les catégories et toutes les disciplines. En XC, les plus évidents sont bien sûr Pauline Ferrand-Prévot et Nino Schurter, qui ont tous deux fait l’impasse sur le Short Track mais on pense aussi à Luca Martin chez les Espoirs ou Nina Hoffmann et Laurie Greenland en DH, ainsi que toutes celles et ceux qui n’ont pas évoqué le sujet publiquement.

On vient de disputer la sixième manche de coupe du monde, la septième épreuve de ce niveau en comptant les championnats du monde et cela commence à faire beaucoup pour certains. Comme l’année dernière, on pourrait assister à quelques beaux retournements de situation sur les dernières manches, surtout si les conditions météo viennent y mettre leur grain de sel…

Mais aussi…

Pêle-mêle, quelques images et réflexions sur des sujets qui ne méritaient peut-être pas chacun une section à eux seuls mais dont on avait tout de même envie de vous parler.

Crevaison pour Nino Schurter, problème de roue libre pour Filippo Colombo : les mécanos de Scott Sram ont eu une après-midi agitée ! Ça ne les a pas empêché de faire un sans-faute avec deux changements de roue arrière efficaces et ultra-rapides. La performance, ça passe aussi par là.

Le Flight Attendant, ce système de gestion électronique et semi-automatique des suspensions développé par RockShox, est de plus en plus populaire en XC. Après une première apparition exclusivement sur le vélo de Nino Schurter à Val di Sole (lire Spyshot | Bientôt une RockShox SID électronique ?), le système était ici également chez Specialized Factory Racing, Trek Factory Racing et Canyon Cllctv. Pourtant, cette version XC pour la fourche RockShox Sid et l’amortisseur Deluxe n’est toujours pas disponible au public.

Nicholi Rogatkin en spectateur ? Oui, vous l’avez bien reconnu, le slopestyleur américain était aux Gets cette semaine. Quant à savoir ce qu’il faisait là, c’est une autre histoire…

Sa 8e place sur la feuille de résultat ne reflète pas sa course : dépassée par Martina Berta puis Loana Lecomte dans les dernières secondes de la course, Rebecca Henderson a longtemps occupé la 6e position en chasse pour le podium. 2023 est une saison compliquée pour l’Australienne avec des hauts (3e à Val di Sole) mais aussi de gros bas (24e à Lenzerheide, 38e à Leogang) et ça fait plaisir de la voir à la lutte dans les premières positions !

Moins connu que ses illustres compatriotes, Marcel Guerrini s’est peut-être révélé au grand public aujourd’hui. Âgé de 28 ans, le Suisse progresse dans l’ombre mais régulièrement et cette quatrième place est tout sauf une surprise pour les suiveurs les plus assidus du circuit. L’année dernière, il avait fini très fort la saison : premier top 10 de sa carrière au Mont-Sainte-Anne (10e), 5e ici aux Gets pour les championnats du monde et 8e à Val di Sole la semaine suivante ! Il sera l’un des outsiders à surveiller lors de la tournée nord-américaine, dans deux semaines.

Après un seul top 10 sur les trois premières manches de la saison, Vlad Dascalu a retrouvé le sens de la marche ! 3e à Val di Sole, 9e à Vallnord et à nouveau 3e ici, le Roumain a brillé aux Gets dans son nouveau maillot de champion d’Europe. De bon augure avant les deux dernières manches de la saison ?

On termine avec une petite note de chauvinisme belge : 4e en XCC, 6e sur le XCO, Jens Schuermans a sorti une performance majuscule aux Gets ! On se souviendra que c’était déjà aux Gets qu’il avait réalisé l’un des meilleurs résultats de sa carrière en coupe du monde (5e en XCC et 7e en XCO en 2019). Après le passage à vide de Vallnord et la perte de son titre national cet été, voilà qui doit faire du bien !

ParLéo Kervran