Test | Propain Hugene CF 29 : on peut le garder ?

Par Léo Kervran -

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Test | Propain Hugene CF 29 : on peut le garder ?

Le Hugene, c’est le petit vélo de Propain, une machine polyvalente capable de (bien) pédaler pour s’amuser lorsqu’on n’a pas envie de rouler avec un gros vélo ou lorsque les bikeparks sont fermés. Après 3 ans de bons et loyaux services pour la première génération, la marque allemande renouvelle la plateforme avec l’objectif de la rendre plus joueuse et dynamique, sans limiter ses capacités en descente. Au point d’en faire un vrai touche-à-tout ? Vojo l’a testé :

A sa sortie en 2018, le Hugene était le premier 29″ et le tout premier vélo de trail de Propain. Une certaine prise de risque pour la jeune marque du sud de l’Allemagne, aux racines solidement ancrées dans la culture gravity/freeride.

Malgré tout, le pari a fonctionné et le Hugene est de retour cette année dans une version remaniée et plus polyvalente que jamais. Objectif, améliorer son dynamisme au pédalage pour bien marquer la différence avec un mini-enduro, mais aussi ses performances en descente, notamment sa stabilité à haute vitesse et sur les successions de gros impacts. Après tout, c’est quand même un Propain !

Châssis

Côté châssis, on retrouve exactement les mêmes lignes que sur le Spindrift testé l’an dernier, ou encore sur le Tyee découvert un peu plus tôt. A l’image d’autres marques, Propain a trouvé « son » architecture et la décline sur l’essentiel de sa gamme, du polyvalent vélo de trail au monstre de freeride.

Vis-à-vis du précédent Hugene, les principales nouveautés se situent sur le triangle avant avec un tube supérieur qui descend droit jusqu’au tube de selle au lieu de se séparer en deux, une douille de direction moins volumineuse et un coude plus marqué du tube diagonal à l’approche du boîtier de pédalier. Un restylage qui a pour effet « d’alléger » le vélo, ce qui colle parfaitement avec son programme trail.

En parlant d’allègement, Propain annonce avoir économisé pas moins de 300 g sur ce nouveau cadre par rapport à l’ancien, pour un poids total qui descend à 2,3 kg sans amortisseur. Au-delà de ses nouvelles formes, ce cadre dispose aussi d’un basculeur supérieur en carbone (en aluminium auparavant) et de plus de fibres haut module que son prédécesseur, ce qui signifie que Propain a pu utiliser moins de fibres que sur l’ancien cadre sans que cela n’affecte la rigidité.

Particularité de ce modèle un peu plus tourné vers le pédalage, Propain ne propose pas de version 27,5″ ou mullet et de cadre en aluminium. C’est 29″ et carbone obligatoire pour tout le monde, un choix que la marque assume et juge plus cohérent vis-à-vis du programme du vélo.

La finition est du même acabit que sur les autres modèles, simple pour laisser les formes du cadre s’exprimer mais d’excellente qualité (aucune trace d’impact sur la peinture durant notre test). Comme de coutume chez Propain, trois coloris sont disponibles et c’est au Petrol Dark Gloss que nous avons droit sur ce vélo de test. Le Hugene existe également en noir Raw Gloss et en beige Safari Matte.

En ce qui concerne les protections et accessoires, un autre élément important des finitions du vélos, Propain est également au rendez-vous et ne fait pas de petites économies. Les protections de cadre sont généreuses et si celle de la base peut surprendre par sa forme, son fonctionnement ne souffre d’aucun reproche. De leur côté, les roulements de la suspension sont protégés des projections et infiltrations par les Dirt Shields, des robustes joints en caoutchouc.

Pour l’aspect pratique, les passages internes de gaines sont entièrement guidés, ce qui a le double avantage de faciliter la maintenance et de limiter au maximum les bruits de gaine dans le cadre. On dispose bien sûr d’un emplacement pour porte-bidon sur le tube diagonal (un élément obligatoire sur cette catégorie de vélo) et si vous aimez rouler sans sac mais pas sans matériel de réparation, vous pourrez utiliser le support d’accessoires sous le tube supérieur pour ranger votre matériel.

Suspension

Il l’avait inauguré en 2018 et c’est donc sans surprise qu’on retrouve sur ce Hugene deuxième génération l’architecture Pro10 dans sa version avec l’amortisseur devant le tube de selle. En effet, ce système à point de pivot virtuel était historiquement basé sur un amortisseur placé derrière le tube de selle (comme c’est encore le cas sur le Rage de DH), mais Propain avait changé sa position sur le premier Hugene de façon à recentrer les masses sur le vélo.

Aujourd’hui, cette architecture est également présente sur les Tyee (160 mm) et Spindrift (180 mm) et développe sur le Hugene 140 mm de débattement. C’est 10 mm de plus que sur l’ancien modèle, ce qui devrait apporter un peu plus de confort et de stabilité sur les plus gros chocs.

La cinématique se caractérise par un anti-squat très élevé, autour de 113 % au sag et supérieur à 100 % sur le débattement. C’est typique des Propain et c’est entre autres à Robert Krauss, le fondateur de la marque, qu’on doit cette particularité. En effet, ce dernier n’aime pas les blocages de suspension et lorsqu’il n’est pas lui-même derrière la planche à dessin, il demande à ce que les vélos aient suffisamment d’anti-squat pour contrer toute tendance au pompage sans avoir à toucher un quelconque levier. On le verra sur le terrain, cela a aussi des conséquences sur le comportement en descente.

On signalera enfin que sur ce Hugene, la suspension n’a pas été pensée pour être utilisée avec un amortisseur à ressort hélicoïdal. La marque l’a optimisée pour les amortisseurs à ressort air, jugés plus cohérents avec le programme du vélo : c’est plus léger, donc plus adapté pour une machine capable de pédaler longtemps.

A l’avant, le débattement n’évolue pas et reste à 140 mm, avec la possibilité de monter une fourche en 150 mm grâce au configurateur. Si certains clients ont équipé l’ancien Hugene d’une fourche en 160 mm, Propain a préféré ne pas poursuivre dans cette voie jugée trop proche de l’enduro et travailler plutôt sur la géométrie pour apporter de la stabilité dans la pente et à haute vitesse.

Géométrie

Cette géométrie évolue de manière conséquente, en suivant la tendance du « plus bas, plus long, plus couché » qui guide depuis plusieurs années le marché, en attendant de trouver un jour le bon équilibre.

L’angle de direction perd ainsi 2° et affiche désormais 65,5° (65,1° avec une fourche en 150 mm), tandis que le reach gagne 20 mm et atteint 455 mm en taille M. Dans le même temps, l’angle du tube de selle se redresse de 1,5° (76,5°). On a fait plus droit (certains enduros affichent 77° voire 78°), mais cela permet de conserver un tube supérieur un peu plus long que sur le Tyee d’enduro, pour faire du Hugene un vélo plus agressif au pédalage sur les sentiers roulants. On constate aussi que les bases, relativement longues pour un vélo de cette catégories avec leurs 445 mm, ne bougent pas.

Au final, on a donc une géométrie qui reflète bien l’état actuel du segment des 140 mm et qui laisse présager d’une position bien équilibrée en montée comme en descente. Au passage, mention spéciale pour les documents proposés par Propain sur son site : la charte des tailles indique vers quelle taille s’orienter selon le comportement recherché dans le vélo et tombe très juste selon notre expérience, tandis qu’un tableau précise la longueur minimale d’entrejambe pour chaque combinaison taille de cadre – modèle de tige de selle – débattement de tige de selle.

Equipements

L’une des forces de Propain, c’est son configurateur. Très facile d’utilisation, il permet de choisir chaque composant de son futur vélo dans une liste déjà fournie et amenée à se développer encore dans les mois à venir. Pour ce modèle d’essai, la marque allemande est partie de la base Performance et l’a passée à la moulinette pour obtenir un montage orienté trail (petits pneus, petits freins et fourche 140 mm), affiché à 4 919 € et autour de 12,9 kg.

Côté suspension, on a droit à ce qui se fait de mieux dans le domaine avec un gros amortisseur RockShox SuperDeluxe Ultimate qu’on retrouve habituellement en enduro et une fourche RockShox Pike Ultimate. On note que la Pike est ici en version avec cartouche Charger 2.1 RCT3 et non RC2 comme on a l’habitude de la voir sur les Lyrik et Zeb. Cela signifie qu’au lieu d’avoir des réglages de compression hautes et basses vitesses sur le côté droit du té de fourche, on dispose d’un réglage de compression basses vitesses combiné à un blocage 3 positions. C’est un peu moins précis si on cherche la performance pure, mais cela sied parfaitement au programme du vélo puisque cela permet de bloquer (ou presque) la fourche pour les longues sections roulantes.

Sram s’occupe de la transmission, avec un ensemble mélangeant GX Eagle (cassette, chaîne) et du plus flatteur X01 Eagle (dérailleur, shifter), le tout relevé par un beau pédalier Truvativ Descendant en carbone. Notre vélo n’est pas équipé de guide-chaîne ou de bash mais le montage d’un tel accessoire reste possible grâce à un support ISCG 05 amovible et « clipsé » dans la boîte de pédalier.

C’est encore Sram qu’on retrouve au niveau des freins, avec des G2 RSC en disques de 200 mm devant comme derrière. Des freins qui nous ont beaucoup plu en Belgique et beaucoup moins dans les Alpes, mais le configurateur permet aussi d’opter pour des Formula Cura 4 ou des Magura MT5 voire MT7, donc ce n’est pas un vrai problème.

Côté roues, on a des Evolution SL A.30 de la marque allemande Newmen. Un modèle qu’on ne rencontre pas souvent dans nos contrées mais qui dispose d’une fiche technique plutôt flatteuse (1780 g et 698 € en pièces détachées) et qui nous a donné entière satisfaction sur cet essai.

Les pneus sont des Schwalbe Nobby Nic, en section de 2.35″, carcasse SuperTrail et gomme Addix Soft. Renouvelés en 2020 (voir notre article), ils disposent d’un dessin plus orienté vers le pédalage que par le passé. Combiné à une carcasse déjà bien robuste, même s’il existe des structures plus solides et typées enduro/DH dans la gamme, cela donne un mélange intéressant et qui ne nous a pas déplu. On relèvera toutefois qu’ils semblent plus limités en grip longitudinal dans le gras et la boue que la génération précédente.

Pour la tige de selle, le configurateur propose un large choix et c’est une BikeYoke Revive en 160 mm que Propain a choisi pour notre modèle de test. Fidèle à sa réputation, elle s’est avérée très souple, rapide et fiable tout au long du test même si un peu de jeu latéral pouvait être senti à la main en statique. Pour chipoter, on aurait aimé un levier un poil plus long (BikeYoke propose plusieurs références) car celui dont nous disposions demandait un effort un peu plus important que les références du domaine, mais c’est un point de détail.

Enfin, le reste des périphériques est signé Sixpack, une petite marque basée dans la même ville que Propain. Le poste de pilotage est formé d’un cintre en 805 mm de large et 30 mm de rise combiné à une potence en 50 mm. Malgré sa forme particulière, la selle nous est apparue relativement confortable. Ce ne fut en revanche pas le cas des poignées, un peu trop fines pour nos mains (mais comme toujours, cela reste très personnel).

Versions et tarifs

On l’a dit, Propain dispose d’un solide configurateur et le Hugene est logiquement pensé pour être personnalisé selon ses besoins et préférences. Cependant, la marque a aussi pensé à celles et ceux qui ont du mal à choisir et propose 3 montages « pré-configurés », qui peuvent être choisis directement ou servir de base de départ.

En version Start, le Hugene est ainsi affiché à 3 399 €. L’équipement est honnête (transmission Sram GX Eagle, suspensions RockShox Pike Select/Deluxe Select+) mais le vélo n’a pas de tige de selle télescopique.

Le montage Performance est très proche de notre modèle de test, la principale différence se situant du côté des roues puisqu’il est équipé de Stan’s Flow Mk3 Team. Ce modèle s’échange contre 4 549 €.

Enfin, le Highend et son équipement Sram XX1 / Fox 34 et DPX2 Factory est affiché à 7 129 €. Il est cependant possible de monter encore plus haut par le biais du configurateur, puisqu’on atteint 8 329 € avec une transmission Sram XX1 AXS, des suspensions Fox 36 et DPX2 Factory et des roues Crankbrothers Synthesis Enduro Carbon.

Le Propain Hugene CF 29 sur le terrain

Sur les sentiers, le Propain Hugene se distingue d’abord par son excellent comportement au pédalage. Si on est habitué aujourd’hui aux vélos qui ne pompent pas à allure modérée en position assise, le Hugene tire parti de son anti-squat élevé pour rester encore très haut dans son débattement lorsqu’on hausse le rythme ou lorsqu’on se met en danseuse.

Cela fait de lui un vélo particulièrement dynamique, efficace lorsqu’on veut monter à bon rythme voire se tirer la bourre avec ses compagnons de sorties, et très agréable en relances. Le blocage de l’amortisseur est réellement superflu, même si on peut toujours s’amuser à l’utiliser lors des passages sur goudron pour avoir un maximum de réactivité.

Revers de la médaille, avec notre réglage de base (sag à 25 %) le Hugene n’est pas des plus confortables sur les sentiers. La suspension offre un grip correct et grâce à la bonne position on a rarement des problèmes de perte d’adhérence ou de cabrage, mais on ressent plus les racines ou les petits cailloux que sur d’autres machines. C’est ce que Robert Krauss appelle avec un brin d’humour la sensation « voiture de sport », en étant parfaitement conscient qu’il y a des façons moins flatteuses de présenter la chose : là où certains vélos s’approchent des grandes GT, confortables et relativement placides, le Hugene est plutôt à comparer à une petite GTI, généreux en sensations sans avoir besoin d’aller très vite mais aussi plus ferme et moins « filtrant ».

Il nous conseille alors de descendre le sag autour de 32 %, assurant que cela devrait régler l’essentiel du problème. La valeur peut paraître élevée pour un vélo de trail, mais effectivement, cela fonctionne et si on perd très légèrement en sportivité sur terrain roulant, on gagne de manière non négligeable en confort.

En descente, le Hugene est très facile à placer grâce à sa géométrie bien pensée et sa relative légèreté. On aurait d’ailleurs tendance à dire qu’il paraît plus léger qu’il ne l’est réellement. Cela fait de lui un vélo joueur malgré ses bases plutôt longues et une suspension qui n’est pas la plus « poppy » du segment, un vélo qui invite à essayer des choses plus qu’à rechercher la vitesse à tout prix. La rigidité de l’ensemble n’est pas excessive et la suspension fait preuve d’une belle capacité à encaisser les gros impacts, ce qui permet au Hugene de pardonner beaucoup de choses. Avec des bases plus courtes, on aurait probablement un vélo encore plus joueur mais on perdrait alors une partie de cette indulgence.

Lorsqu’on prend de la vitesse, la vivacité des réactions nous rappelle qu’on est bien sur un trail et pas un enduro mais la plateforme ne prend pas en traître et ne devient pas dangereuse lorsqu’on approche des limites.

A nouveau, il peut afficher deux visages bien différents selon le sag. Avec 25 %, on a quelque chose de remarquablement dynamique, parfaitement à l’aise avec les pilotages engagés, les gros appuis et les lignes créatives. L’inconvénient, c’est que cela peut devenir très exigeant sur terrain difficile et qu’il faut de manière générale un pilotage particulièrement actif pour en tirer la quintessence. En repassant sur 32 % de sag, on pose le vélo, on gagne en grip et on a au final une machine plus facile, plus tolérante et plus accessible pour s’amuser plus facilement.

Verdict

« Un vélo pour les gouverner tous », écrit Propain pour présenter le Hugene sur son site. Une formule audacieuse mais cela n’effraie pas la marque, qui précise même que son vélo « convient partout, qu’il s’agisse d’une boucle rapide sur les sentiers, d’une sortie à la journée ou même d’un raid alpin ». Ce segment du 140/150 mm ultra polyvalent est pourtant très difficile car les vélos se doivent d’être excellents partout, pas simplement bons, et n’ont pas le droit à l’erreur tant la compétition est rude.

Avec ce nouveau Hugene, Propain réussit toutefois à cocher toutes les cases. C’est un vélo incroyablement plaisant à piloter, aussi bien capable de faire de la rando ou de longues sorties sur terrain vallonné que d’aller rouler en montagne, déguster quelques spéciales d’enduro ou jouer sur des sauts à l’occasion. En bonus, le configurateur permet d’optimiser son budget et de créer une machine parfaitement adaptée à ses préférences d’entrée de jeu, sans avoir à changer des pièces dès la réception du carton. Ce nouveau Hugene se place en concurrent sérieux pour les Specialized Stumpjumper ou Giant Trance X (entre autres) pour qui souhaite rouler différent, et pour nous c’est incontestablement un coup de coeur.

Propain Hugene CF 29

4 919 €

12,98 kg(taille M, poids constructeur)

  • Dynamisme au pédalage
  • Comportement en descente
  • Côté joueur présent mais maîtrisé
  • Rapport prix-équipement
  • Pas de 27,5 ni de cadre aluminium
  • Suspension un poil ferme au pédalage
  • RAS

Évaluation des testeurs

  • Prix d'excellence
  • Coup de coeur
  • Rapport qualité / prix

Plus d’informations : propain-bikes.com

ParLéo Kervran