Test | Open WI.DE. : l’aventure, version (très) sportive

Par Léo Kervran -

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Test | Open WI.DE. : l’aventure, version (très) sportive

A titre personnel, essayer un Open faisait partie de mes rêves depuis un bon moment. Haut de gamme, pointue et exclusive, précédée par la réputation de ses fondateurs, la marque a de quoi éveiller l’intérêt de tous les fins connaisseurs et amateurs de belles montures. Alors quand Mohawk’s, le distributeur français, nous a proposé de nous envoyer un WI.DE., il ne nous pas fallu beaucoup de temps pour dire oui. Le WI.DE., c’est une drôle de machine, un gravel à trois visages qui pourrait bien séduire les vététistes. Nous avons pu l’essayer dans une surprenante version 650b, voici le résultat :

Si le nom d’Open ne vous dit rien, on ne vous en voudra pas. Née au début des années 2010, la marque est assez confidentielle et loin d’être une spécialiste du VTT. Elle ne s’est aventurée qu’une seule fois sur notre terrain, avec un semi-rigide en carbone ultra-performant et exclusif baptisé One.

Pour comprendre Open, il faut s’intéresser aux personnes derrière la marque. Open a été fondé par le Suisse Andy Kessler, ancien directeur exécutif de BMC, et le Néerlandais Gérard Vroomen, le co-fondateur de Cervélo, sur une idée de ce dernier. BMC, Cervélo… Des noms qui résonnent joliment aux oreilles des amateurs de vélo de route, de belles machines ou de performance, et qui en disent un peu plus sur l’esprit qui anime Open.

A ce sujet, voilà comment Gérard Vroomen présente la marque : « Nous avons tous les deux passé du temps à développer et faire fonctionner une grande marque et il était temps de passer à autre chose. Maintenant, nous concevons nous-mêmes les vélos que nous voulons rouler, nous les produisons, nous les vendons à des personnes partageant les mêmes idées et c’est tout. »

Cet autre chose, c’est donc Open, une marque de niche pointue pour cyclistes exigeants (et au portefeuilles bien fourni) qui ne s’embarrasse pas trop des catégories de vélos. La gamme est aujourd’hui forte trois modèles : le MIN.D. pour la route (section maximale de 700 x 32 mm), le U.P. pour le gravel (27,5 x 2.1 ou 700 x 40) et ce WI.DE. pour… Pour quoi au juste ?

Avec son dégagement impressionnant qui lui permet d’accepter des pneus en 27,5 x 2.4 (ou 700 x 46), le WI.DE. interroge. Avant de laisser la place au test, un seul indice : WI.DE. est l’abréviation de Winding Detours, détours sinueux. Et lorsqu’on l’associe au nom de la marque, cela donne Open Wide, ouvrir grand… ses horizons ?

Châssis

A l’arrêt, le WI.DE. brille par la simplicité de ses lignes. Seule la zone du boîtier de pédalier apparaît particulièrement travaillée, avec un gros volume pour la rigidité et des bases qui « plongent » pour augmenter le dégagement au niveau du pneu.

Comme tous les vélos Open, le cadre est en carbone et la finition minimaliste. Une seule couleur, brillante, qui parvient pourtant à donner une vraie présence au vélo. Ce n’est pas forcément évident à sentir avec une photo mais ce WI.DE. dégage quelque chose, quelque chose qui donne envie d’aller rouler !

Pour Open, le WI.DE. peut prendre trois visages :

  • avec des pneus de VTT en 27,5 x 2.3 ou 2.4, le voilà prêt à s’attaquer aux singletracks techniques
  • avec des pneus de gravel en 700×42 ou 45, il devient une redoutable machine de gravel
  • enfin, si on lui monte des pneus slicks ou presque en 700×35-40, il se transforme en vélo de route extrêmement confortable mais toujours dynamique.

En ce qui nous concerne, c’est avec des roues format 650b (27,5″) et des pneus au profil très roulant en 47 mm que Mohawk’s, le distributeur français de la marque, a choisi de nous envoyer le vélo. Ceci dit, passer d’un format à un autre n’a rien de compliqué puisque contrairement à un VTT, il n’y a ici aucun ajustement de géométrie à faire.

En bon Open, le WI.DE. a une orientation sportive et de ce fait, il n’est pas équipé pour voyager longtemps : pas d’inserts sur la fourche ou pour porte-bagage. Néanmoins, il offre quand même de quoi emporter un peu de matériel, avec 3 emplacements pour porte-bidon (les deux habituels + un sous le tube diagonal), des inserts sur le tube supérieur pour une petite sacoche et un cadre « spacieux », qui laisse la possibilité de fixer une sacoche sous le tube supérieur sans que cela n’interfère avec les bidons.

Côté pratique, les gaines et Durits passent sans surprise en interne et on note que les étriers de freins sont au standard Flatmount 160 devant comme derrière, sans adaptateur. C’est relativement courant pour le cadre mais moins pour la fourche et Open prend justement soin de préciser qu’il faut utiliser à l’avant les mêmes vis d’étrier qu’à l’arrière.

Enfin, on dispose d’un petit trou sur le tube de selle pour vérifier que la tige de selle est suffisamment enfoncée. C’est bien vu, tout simple et utile, surtout si vous avez de grandes jambes !

Géométrie

Son orientation sportive, le WI.DE. la montre aussi au travers de sa géométrie. Bases ultra-courtes (420 mm), reach pas exagérément long (370 mm en M, 382 mm en L), le vélo a toutes les caractéristiques d’une machine dynamique, vive et nerveuse.

En revanche, l’angle de direction a de quoi surprendre : il varie sur chaque taille et passe de 68° en S à 71,5° en XL. 3,5° de différence, c’est très largement suffisant pour transformer complètement le comportement aussi bien sur route que sur les sentiers et c’est d’autant plus surprenant que c’est la seule cote habituellement « fixe » qui évolue ainsi. Notre modèle d’essai est en taille L, donc avec un angle de 71,5°. On verra bien ce que ça donne sur le terrain…

Equipements

Mohawk’s Cycles, l’importateur d’Open pour la France, nous a préparé un montage curieux mais intéressant pour ce test. Forcément, la dotation fait la part belle aux marques « maison » mais il a quand même fallu faire quelques entorses à cette règle pour équiper complètement le vélo, au niveau de la transmission et des freins par exemple.

Dans ce domaine, Mohawk’s a fait confiance à Shimano avec un groupe GRX 810 presque complet, assorti d’un très joli pédalier Praxis. Sur ce dernier, le plateau est en 42 dents tandis que derrière, la cassette 11 pignons est une 11-42.

Le train roulant est une invitation à la vitesse, avec de superbes roues Enve AG28 conçues spécifiquement pour le gravel (28 mm de large, 21 mm de haut, pour pneus en 45-57 mm) reliées à des moyeux I9 et associées à des pneus WTB Byway 47, impressionnants avec leur gros volume et leur structure minimaliste. Petite particularité de cet ensemble, il est en 650b !

Les roues Enve ne sont disponibles que dans cette dimension (pour le 700, il y a les AG25 en 25 mm interne) et d’une certaine manière ça tombe bien, puisque nous n’avons jamais roulé de gravel en 27,5″. On reste convaincu que cette dimension peut avoir un intérêt en VTT pour concevoir des vélos très joueurs mais qu’en est-il en gravel ? Ce sera l’occasion de le découvrir.

Enfin, en ce qui concerne les périphériques, c’est varié avec une selle WTB, une potence 3T en 90 mm et une tige de selle ainsi qu’un cintre Ultimate Use. Mention spéciale pour la forme de ce dernier (modèle Escape GR 24), que nous avons adorée et trouvé parfaitement adaptée au gravel. Un de nos testeurs aux épaules plus larges que les autres l’a trouvé un peu étroit mains sur les cocottes mais pour le reste, ce fut un plébiscite.

Poids de la bête ? 8,4 kg sur notre balance, ce qui en fait l’un des vélos les plus légers essayé par Vojo ! Il est d’ailleurs possible de descendre facilement bien plus bas, en changeant la selle et la tige de selle par exemple. Côté prix, il faut compter 7 299 € pour ce montage.

Versions et tarifs

On l’a dit plus haut, c’est Mohawk’s Cycles (Pivot, Enve, IndustryNine, WTB, Fidlock…) qui s’occupe de l’importation d’Open en France. Le cadre nu, disponible en 4 coloris ou en version RTP (Ready to paint) est affiché à 3 500 €. Pour les montages complets, les prix s’échelonnent de 6 100 € (Shimano GRX) à 8 500 € (Sram Eagle AXS / Enve).

L’Open WI.DE. sur le terrain

Avec la bande de roulement parfaitement lisse de ses pneus, ses roues carbone et son dynamisme intrinsèque, le WI.DE. est un régal sur le bitume. Le vélo est léger, dynamique et répond à chaque impulsion de son pilote, le tout dans un confort de tout premier ordre grâce aux pneus à gros volume et aux haubans fins.

Les petites routes abîmées ne font plus peur, bien au contraire. Rassuré par le surcroît d’adhérence procuré par les gros pneus ainsi que les excellentes performances des freins Shimano GRX 810, on aborde les descentes les plus techniques sans la moindre arrière-pensée. L’équilibre souplesse-précision est bien trouvé, c’est moins pointu qu’une pure machine de route mais tout de même assez précis pour tailler de belles courbes et en contrepartie, on a un peu plus de tolérance sur les petits trous, cassures…

Sur piste roulante ou singletrack lisse, le constat est le même. Le volume des WTB Byway 47 en 650b sur ces jantes larges est un réel atout comparé à un pneu « habituel » en 700×45 avec des roues plus étroites et pour peu qu’on soit gonflé à la bonne pression, on voyage sur un véritable tapis volant.

Plus surprenant, ils offrent aussi une adhérence de très bon aloi au pédalage, y compris sur sol légèrement humide. En descente en revanche, il faut faire preuve d’un peu plus de prudence dans ces conditions, notamment au freinage.

Bon, tout ça c’est bien gentil mais on est tout de même en présence d’un vélo qui accepte des pneus de VTT en 27,5×2.4. Vous nous voyez venir ? Il ne nous a pas fallu très longtemps pour remplacer les WTB Byway par une paire de bon gros pneus cramponnés tels qu’on en a l’habitude (un Vittoria Agarro et un Schwalbe Nobby Nic en 2.3, dans ce cas précis).

Avec une monte aussi agressive (pour du gravel) le rendement sur goudron plonge et on a l’impression de monter guère plus vite qu’avec un enduro mais ce n’est pas une surprise et c’est plutôt le comportement sur chemins qui nous intéresse.

Là, on doit vous avouer que nous avons été surpris… et déçus. Avec ces pneus, le WI.DE. a une drôle de tendance à rebondir sur les impacts, comme les petites racines, les petits trous ou compressions… On a essayé de jouer avec la pression pour neutraliser ce phénomène mais on se retrouve avec d’autres problèmes pas plus agréables : avec moins d’air, on vient facilement toucher la jante et si on en met plus, on perd toute sensibilité et donc tout intérêt à monter de gros pneus.

En descente, c’est moins gênant mais c’est alors la géométrie du vélo qui nous est apparue très limitante. Avec ses bases courtes, son angle de direction relativement droit et son reach court, le WI.DE. envoie vite vers l’avant et comme on n’a ni tige de selle télescopique, ni tube supérieur très incliné, on n’a pas beaucoup de place pour bouger et rattraper tout ça.

Sur piste, ça passe encore bien mais n’essayez pas de vous aventurer sur des terrains à la frontière avec le VTT. Malgré son dégagement important, ce WI.DE. n’est certainement pas un monster gravel !

On ne peut s’empêcher de penser qu’il en aurait peut-être été tout autrement avec un cadre en taille S. Avec un angle de direction de 68°, digne d’un XC semi-rigide moderne, on aurait bien plus de sécurité lorsque la pente se fait un peu plus prononcée, sur les petits franchissements, etc. En revanche, le dynamisme et la précision sur route en auraient sûrement pâti.

Et ces roues de 650b / 27,5″ alors ? Clairement, nous n’avons pas été convaincus et on a du mal à voir ce qu’elles peuvent apporter sur un gravel, sauf peut-être pour les personnes de très petite taille. Pour tous les autres, un montage en 700×45 offrira bien plus d’avantages : le rendement sera meilleur, le franchissement aussi et le confort au moins aussi bon. Le seul petit inconvénient est à chercher au niveau du poids et du dynamisme en relance mais monter un Open sans une bonne paire de roues, c’est comme monter un DH en triple plateau.

Verdict

Pour un vélo qui invite à ouvrir grand ses horizons et faire des détours sinueux, l’Open WI.DE. fait tout de même bien sentir les racines routières et sportives de ses concepteurs… Du point de vue d’un vététiste, en tout cas. Pour nous, et dans le cadre d’un montage en 700×45, le WI.DE. est un excellent gravel qui parvient à mêler avec brio répondant au pédalage et confort, une machine idéale pour qui cherche un vélo dynamique et sportif mais pas bout de bois lorsqu’il s’agit de quitter le bitume. Finalement, il correspond plutôt bien à la définition de « vélo de route du vététiste » qu’on entend parfois pour le gravel. Il offre des sensations et surtout un terrain de prédilection suffisamment différent de nos machines habituelles pour avoir un intérêt, mais sans le côté limitant et trop sérieux d’un véritable vélo de route. Pour le 650b en revanche, nous sommes plus réservés, au moins dans cette version en taille L avec une géométrie qui limite trop les capacités en tout-terrain pour aller jouer du côté des monster gravel.

Plus d’informations : opencycle.com / mohawkscycles.fr

Open WI.DE.

7 299 €

8,4 kg(taille L, sans pédales)

  • Dynamisme au pédalage
  • Très confortable
  • Précis et ludique sur terrain roulant
  • Variations de l'angle de direction suivant les tailles incohérentes
  • Montage en 650b peu intéressant
  • Limité en terrain technique
  • Tarif élevé

Évaluation des testeurs

  • Prix d'excellence
  • Coup de coeur
  • Rapport qualité / prix

ParLéo Kervran