Test nouveauté | Lapierre XRM 8.9 : rouleur au long cours - Lapierre XR & XRM, la genèse

Par Léo Kervran -

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Test nouveauté | Lapierre XRM 8.9 : rouleur au long cours - Lapierre XR & XRM, la genèse

Lapierre XR & XRM, la genèse

Découvrir le vélo sur les lieux de sa conception, c’est bien, mais plonger au cœur de la marque, c’est encore mieux. Avant de parler des XR et XRM, Lapierre nous a invités à venir découvrir son univers, réparti sur trois sites autour de Dijon. Du récent Experience Center jusqu’à l’usine encore bien active, visite d’une fierté locale en remontant les différentes étapes de la vie d’un vélo jusqu’à la genèse de ces nouveaux modèles :

Lapierre

Avant de s’intéresser à ce nouvel XR et à ses déclinaisons, une visite des lieux s’impose. Née en 1946 à Dijon et toujours sur place 76 ans plus tard, Lapierre est la figure historique des marques françaises de vélo, la seule à disposer d’une gamme aussi large et d’une présence au plus haut niveau en route comme en VTT. Une position qui lui confère un statut un peu particulier, encore plus en VTT puisque c’est sur les sentiers que la marque s’est réellement construite et qu’elle a vécu ses plus belles heures.

Sans surprise, c’est donc le VTT qui trône au milieu de l’Experience Center de Dijon, en périphérie de la ville, où nous commençons notre visite. Premier du genre pour Lapierre, cet espace configurable à souhait tient à la fois de lieu d’exposition, de magasin, de point de rendez-vous pour des sorties organisées, d’hôte pour certains évènements…

Le projet fonctionne et fait même des petits puisque depuis son ouverture en 2017, un deuxième Experience Center a ouvert à Besançon et trois autres seraient en projet dans toute la France.

Toutefois, ce n’est pas ici qu’on apprendra beaucoup de choses sur le XR, en tout cas au moment de notre visite puisque le vélo n’était pas encore sorti. Direction le siège officielle de Lapierre donc, situé à quelques kilomètres de là. En pleine mutation, il abrite une partie des bureaux ainsi qu’une ligne de production, amenée à être repensée dans un futur proche.

Une partie des bureaux ? Oui, car l’équipe de recherche et développement est encore dans un autre bâtiment, à quelques minutes de là. Nous n’aurons pas l’occasion d’y rentrer pour cause de projet top secret en cours mais à la place, Lapierre nous propose de faire un tour par cette fameuse ligne de production.

On y retrouve Brice Vandemoortele, le responsable des lieux, qui nous explique que tout est en train de changer. Ici, on travaille à la chaîne : « Avant, on avait 50 % de montage individuel et 50 % de montage à la chaîne mais c’est fini maintenant, on passe sur du 100 % montage à la chaîne. Le type de montage ne définit pas la qualité et l’avantage de la chaîne, c’est que ça s’apprend bien plus vite pour les opérateurs en cas de remplacement, de nouvel arrivant… En temps de covid, c’est pratique. » En revanche, cela prend de la place : pour une chaîne complète, il faut compter 25 à 30 m de long.

Autre particularité du lieu, le mode de production et la polyvalence des opérateurs : ici, on fait du montage en petite série, quelques dizaines de vélos d’un coup au maximum pour avoir de la disponibilité sur toute la gamme Lapierre en permanence. Par ailleurs, la ligne monte également des vélos pour les réseaux de vélos partagés de villes comme Dublin, Bruxelles, Ljubljana… Une activité minoritaire mais qui demande là aussi un savoir-faire particulier.

« On vise 13 titulaires en production, très polyvalents et capables de tout faire, du montage d’une roue à l’assemblage d’un vélo. Sur la ligne, on travaille aussi à réduire les manipulations du cadre, à la fois pour économiser les opérateurs et pour réduire les risques d’abîmer la peinture. On a deux thèmes, qualité (0 défauts) et fiabilité (0 problème sécuritaire). »

« L’objectif, c’est de faire de Dijon un centre de pré-industrialisation et d’excellence, où l’on définira les process d’assemblage pour toutes les usines du groupe. En parallèle, on gardera une production classique où l’on fera le montage des vélos haut de gamme, là aussi pour tout le groupe. Enfin, cette réorganisation vise aussi à créer un vrai sens de visite. Une belle usine, c’est un outil marketing. » En plus d’être particulièrement agréable pour les gens qui y travaillent. Or, le confort, c’est (aussi) un facteur de performance, on est bien placé pour le savoir en VTT…

A ce sujet, on note d’ailleurs que pour un site de production, le bâtiment est particulièrement silencieux : il n’y a pas besoin de hausser la voix pour se parler et il n’y a nul besoin d’un casque anti-bruit pour y entrer. Ceci grâce au peu de machines pneumatiques ou automatisées, principales sources de bruit habituellement. Ici, la plupart des outils sont électriques ce qui joue pour beaucoup dans ce niveau sonore confortable.

Pour terminer cette visite, on passe voir Nico Chandenier, en charge de la supply chain ou chaîne d’approvisionnement en bon français. Autrement dit, c’est lui qui s’assure de commander et fournir à la production les bons composants au bon moment pour les vélos à venir. Un poste sensible en ce moment avec les délais que l’on connaît : « Avant le covid, on réfléchissait 6-8 mois à l’avance. Maintenant, c’est 2 à 3 ans. Concrètement, aujourd’hui on commande les pièces pour les vélos qui sortiront de l’usine en 2024. La relation avec les chefs produits et les directeurs commerciaux est super importante, pour savoir ce qui va arriver, ce qu’il faut prévoir… On a parfois des partis pris, des risques à prendre sur les modèles en milieu de gamme notamment et forcément, il peut arriver qu’on se retrouve coincé. »

Le vélo

Rendez-vous est donc pris pour dans quelques mois afin de voir les transformations des lieux. En attendant, il est temps de parler vélo et de ce nouvel XR ! Pour l’occasion, nous rejoignons Florian Robin, le chef produit en charge de ce modèle et Alexis Chenevier, arrivé chez Lapierre alors que le développement touchait à sa fin mais qui roule ce vélo presque quotidiennement depuis plusieurs mois.

Le XR, c’est un vélo bien particulier chez Lapierre. Sa première génération est apparue en 2013 pour remplacer le XControl, vélo mythique mais dépassé par les évolutions du marché. Sa remplaçante n’est arrivée qu’en 2017 avec un positionnement encore plus « performance » et une cinématique un peu plus aboutie. Un nouveau saut de 5 ans dans le temps et nous voici à cette troisième génération, orientée XCO avant tout mais avec une déclinaison un peu plus polyvalente en parallèle.

Le début du projet de cette nouvelle plateforme remonte en fait à 2019, nous raconte Florian. A l’époque, la version en cours du XR n’a que deux ans mais avec l’évolution très rapide des vélos dans cette période (géométrie notamment), la lutte avec la concurrence devient déjà difficile sur certains points.

Pour ce nouveau modèle, Lapierre a donc particulièrement étudié les différents signaux du marché et tendances à suivre afin de proposer un produit au goût du jour et qui ne vieillira pas (trop) vite. 5 objectifs ont été fixés :

  • la légèreté, avec la volonté d’être à moins de 1800 g pour le cadre sans amortisseur dans sa version la plus légère et épurée. C’est entre autres cette contrainte qui a dicté le choix de l’architecture monopivot et haubans flexibles, omniprésente en XC : sur ce vélo, elle permet d’économiser près de 100 g par rapport aux autres systèmes, sans compter l’entretien réduit et la rigidité accrue.
  • la cinématique, qui devait d’abord empêcher tout pompage. Une suspension efficace, c’est une suspension libre et sensible… sauf au pédalage, nous dit-on, en évoquant une astuce pour rendre le système encore plus sensible que sur l’ancien XR. On reviendra dessus un peu plus tard.
  • la géométrie, qui se devait de mettre en confiance le pilote et d’être efficace en descente sans compromettre la position au pédalage.
  • la fiabilité. Florian nous explique qu’un gros travail de simulation numérique a été fait, notamment sur le positionnement des feuilles et fibres de carbone pour améliorer les performances dans ce domaine. Autres choix importants, celui de roulements plutôt que de bagues en téflon pour les points de pivot (plus légers mais moins performants) et celui de faire des passages internes « classiques », avec entrée dans le cadre par les côtés de la douille de direction et non par le jeu de direction. La simplicité, ça joue aussi dans la fiabilité !
  • enfin, le design. Ce nouvel XR arbore des formes un peu moins torturées que son prédécesseur mais elles ont aussi un intérêt technique : ce positionnement de l’amortisseur, à l’horizontale sous le tube supérieur et presque avalé par ce dernier, permet un meilleur trajet pour le câble de blocage, une protection naturelle, moins de contraintes mécaniques et donne une impression générale de vélo simple, épuré.
  • Pour atteindre ces objectifs, notamment les deux premiers, Lapierre met en avant deux innovations technologiques. La première concerne le carbone en lui-même, avec deux niveaux de gamme suivant le prix et le positionnement des vélos. On distingue ainsi l’UD SLI Team, réservés aux modèles les plus exclusifs, de l’UD SLI utilisé sur la majorité de la gamme.

    Nicolas nous explique qu’au-delà de la différence de poids (environ 200 g sur le cadre), on sent réellement une différence de comportement entre les deux versions. Alexis confirme, en ajoutant que les modèles qui profitent de l’UD SLI Team « sont plus dynamiques, paraissent plus légers et réactifs sous la pédale ». Il serait même possible d’aller encore plus loin dans le domaine, avoue Florian, avec des performances « incroyables » mais l’impact sur le prix du vélo est tel qu’il a bien fallu garder une certaine mesure et savoir dire non.

    La deuxième innovation concerne la suspension. Pour atteindre son objectif de comportement à la fois confortable et insensible au pompage, Lapierre a imaginé un fonctionnement bien particulier. Comme il n’y a pas de point de pivot entre les bases et les haubans, une partie du fonctionnement du système repose sur la flexion des haubans. C’est un choix technique et une architecture connue en XC, exploitée par de très nombreux modèles pour ses avantages en terme de simplicité et de poids.

    Jusque-là, rien de nouveau. L’astuce, ou la particularité, se cache dans le fonctionnement des haubans : au lieux d’être en position « de repos » lorsque la suspension est détendue puis de fléchir de plus en plus jusqu’à la compression complète, ils sont ici en position « de repos » lorsque la suspension est au sag (à 26 % précisément).

    Lorsque la suspension est complètement détendue, ils sont donc légèrement fléchis dans un sens et ne demandent qu’à revenir à leur position de repos. Lorsqu’on passe le point de sag sur un choc ou une compression un peu plus forte, ils fléchissent dans l’autre sens et reprennent le fonctionnement classique.

    Autrement dit, les haubans sont libres au sag au lieu d’y être déjà contraints. Sur le papier, cela donne une courbe de suspension dégressive du 0 jusqu’au sag qui s’inverse ensuite pour devenir progressive du sag jusqu’à la fin de course.

    Avec un cadre sans amortisseur dans les mains, c’est assez impressionnant, on sent beaucoup plus qu’on ne s’y attendait tout le travail de flexion et de retour du carbone. Selon Lapierre, cette conception permet d’une part de réduire la flexion totale des haubans, ce qui améliore la fiabilité, et doit d’autre part apporter une sensibilité exceptionnelle. A vérifier sur le terrain !

    Côté géométrie, le XR suit sans grande surprise la tendance de ces dernières années : le tube de selle se redresse, l’angle de direction se couche et le reach s’allonge, tout cela pour amener plus d’aisance dans les sentiers techniques. Pour autant, Lapierre n’oublie pas la sportivité au pédalage et à cet effet, la marque a choisi de baisser la douille de direction ainsi que de raccourcir les bases pour garder un vélo réactif malgré l’allongement de l’avant.

    En chiffres, cela donne un XR (100 mm) taille M à 67° d’angle de direction, 75,5° d’angle de tube de selle et 602 mm de tube supérieur, avec un reach de 450 mm, un stack de 580 mm et des bases de 435 mm.

    Un peu plus polyvalent, le XRM (pour Marathon) est basé sur le même cadre mais utilise des suspensions différentes pour offrir un peu plus de débattement : 120 mm devant et 110 mm derrière. En conséquence, l’angle de direction passe à 66°, l’angle de tube de selle à 74,5°, le reach à 440 mm et le stack à 589 mm, toujours en taille M.

    Ces géométries placent la plateforme plutôt à l’avant-garde de la génération actuelle de vélos de XC, notamment en ce qui concerne l’angle de direction ou le reach du XR. Une bonne surprise, car Lapierre ne nous avait pas spécialement habitués à cela par le passé.

    On notera par ailleurs que la marque a étudié la forme du cadre de façon à pouvoir monter deux porte-bidons dans le cadre, et ce sur toutes les tailles. Sur le tube diagonal, on dispose même de trois inserts pour placer un porte-bidon unique dans une position optimale, ou le remonter pour laisser la place à un deuxième sur le tube de selle.

    Enfin, comme on évoquait des choix dictés par la recherche de fiabilité et de simplicité un peu plus haut, on notera que les passages internes sont entièrement guidés. Cela n’est pas sans effet sur le poids, même si la pénalité est tout à fait modérée (50-60 g), mais le gain de temps lors du montage du vélo est tel que Lapierre s’en accommode avec plaisir. C’est d’ailleurs l’un des points dont Florian est le plus fier : « Lorsque j’ai monté le vélo pour la première fois, sans aucune instruction, j’en ai eu pour 20 minutes montre en main. C’est un vélo logique, tout est bien pensé et tombe sous le sens. »

    En revanche, on notera que les XR et XRM sont montés avec des jeux de direction classiques plutôt que modèles à butée. Une protection pour le tube supérieur sera néanmoins fournie à l’achat du vélo, libre à chacun de la monter ou non.

    5 modèles figurent au catalogue pour cette première saison, 3 XR et 2 XRM. Au-delà du débattement, la principale différence entre les deux séries est le montage d’une tige de selle télescopique sur les XRM, quand les XR jouent la carte du poids et sont équipés d’une tige de selle fixe.

    En XR, la gamme commence avec le XR 5.9 (3 799 €), se poursuit avec le XR 7.9 (4 599 €) et culmine à 6 899 € avec le XR 9.9, seul modèle à profiter du carbone UD SLI Team qui permet au cadre de passer sous les 1 800 g nu (1 772 g précisément, ou 2 038 g avec visserie et amortisseur).

    En XRM, on commence un peu plus haut : XRM 6.9 à 4 099 € et XRM 8.9 à 5 199 €. Seulement deux modèle dans cette gamme et aucun d’entre eux n’a droit au cadre UD SLI Team… pour l’instant. Vu l’équipement du XRM 8.9, on se dit qu’il y a un peu de place au-dessus pour une version encore plus luxueuse.

    ParLéo Kervran

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