Test nouveauté | Focus Jam² SL : le trait d’union

Par Léo Kervran -

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Test nouveauté | Focus Jam² SL : le trait d’union

Après le Jam et sa déclinaison électrique Jam² l’année dernière, voici le Jam²… SL ! Focus étoffe son offre all-mountain et polyvalente avec cet e-bike léger mû par un moteur Fazua Ride 60. Objectif, comme pour le reste de la famille : le fun et le plaisir de pilotage avant tout ! Nous déjà pu faire quelques tours de roues à son guidon, voici nos premières impressions :

2022, année de l’e-bike léger ? Si le segment n’est pas nouveau il est longtemps resté un peu à la marge, avec un intérêt relativement limité de la part des constructeurs : avant cette année, seulement trois acteurs majeurs (Lapierre, Specialized et Orbea) avaient osé s’y aventurer.

Désormais, c’est de l’histoire ancienne. Le lancement des moteurs Fazua Ride 60 et TQ HPR-50 a donné un nouveau souffle à la catégorie et les marques se bousculent au portillon : Pivot, Haibike, BMC ou encore Trek ont déjà lancé un modèle et d’autres arriveront encore avant la fin de l’année. Aujourd’hui, c’est donc le tour de Focus, qui se lance dans la danse avec un modèle relativement polyvalent : le Jam² SL.

Pour être tout à fait honnête, ce n’est pas la première incursion de la marque de Stuttgart sur le segment. En 2017, elle présentait en effet le Raven², un semi-rigide basé sur le Raven de XC et doté d’une assistance Fazua Evation. Autres temps, autres mœurs ? Ces dernières années, Focus a bien changé, délaissant l’aspect compétition et « sportif » du vélo pour un caractère plus ludique et insouciant. Adieu donc le Raven² et avec lui les e-bikes légers… jusqu’à ce retour cet automne, toujours accompagné de Fazua.

Développant 150 mm de débattement à l’arrière pour 160 mm à l’avant, le Jam² SL est un e-bike léger qui se veut polyvalent, avec différents montages et une géométrie (légèrement) adaptable pour séduire différents profils. D’ailleurs, en parlant d’e-bike léger, notons que Focus a sa propre interprétation de la question : la marque nous explique « ne pas se concentrer uniquement sur le poids du vélo mais plutôt la sensation de poids et de légèreté sur les sentiers, la facilité et le plaisir de pilotage ».

Côté moteur, c’est donc à nouveau la solution Fazua qui a été retenue, avec cette fois le système Ride 60 présenté en avril dernier. Pour rappel, le moteur propose 60 Nm de couple pour 450 W de puissance maximale et la batterie a une capacité de 430 Wh, pour un poids total de 4,2 kg (1,96 kg pour le moteur et 2,3 kg pour la batterie). On peut également lui adjoindre un Range Extender mais il nécessite un support spécifique, à faire installer en magasin. Un adaptateur pour porte-bidon peut ensuite être monté sur la base du Range Extender.

Par souci de cohérence avec l’idéal de discrétion et d’intégration que poursuivent ces « petits » moteurs, le poste de commande est minimaliste : un discret anneau au cintre en guise de manette et un affichage qui se résume à 5 diodes de couleur enchâssées dans le tube supérieur. Mise en route, mode Boost (une gros coup de pouce temporaire) et assistance à la marche, même les fonctions annexes se gèrent depuis l’anneau en maintenant plus ou moins longtemps la pression dans un sens ou dans l’autre.

Pour plus d’informations sur l’autonomie ou la distance parcourue, il faut connecter un compteur ou passer par l’application TQ, qui permet également de personnaliser les 3 modes d’assistance (Breeze, River et Rocket). Enfin, on note qu’il n’y a pas de port de charge sur le vélo : il faut obligatoirement sortir la batterie pour la recharger. Heureusement, cela se fait très facilement (la protection s’ouvre en un quart de tour avec une clé hexagonale de 6 mm) et Focus explique que cela leur fait économiser près de 200 g sur le cadre. Quand on parle d’e-bike léger, ça a son importance !

Assez parlé d’électronique, retour au vélo. On l’a dit, le Jam² SL offre 150 mm de débattement à l’arrière. Toutefois, on note que ce n’est pas à travers une architecture monopivot + biellette comme sur les autres machines de la marque (Jam, Jam², Thron) mais via un très classique 4 bar linkage.

Un retournement de veste qui a de quoi nous surprendre car Focus semblait assez fière de sa suspension sur ses autres modèles, mais la marque a toutefois un bon argument : cela leur a permis de gagner un poids non négligeable et comme c’est sur l’arrière du vélo, déjà alourdi par la présence du moteur, c’est également bon pour l’équilibre général. Par ailleurs, on sait que cela peut aussi apporter une meilleure indépendance vis-à-vis des forces de freinage, chose pas nécessairement inutile de manière générale et encore moins sur un e-bike, forcément plus lourd qu’un vélo classique.

Au niveau de la géométrie, le Jam² SL est très proche du Jam sans assistance… et c’est une excellente chose, tant ce vélo nous avait plu (lire Test nouveauté | Focus Jam 8.9 : le Jam se met au carbone) ! Le reach affiche ainsi 460 mm en taille M et 485 mm en taille L, tandis que l’angle de direction peut être placé à 64,5° ou 65,5° grâce à des coupelles de jeu de direction réversibles. Seule grosse différence avec le Jam, la longueur des bases, qui est ici fixée à 440 mm ou 447 mm.

440 ou 447 mm ? Oui ! Focus a décidé d’adapter un minimum la longueur des bases à celle du vélo mais la marque a trouvé un moyen intelligent de le faire pour ne pas avoir à ouvrir 4 moules différents : il s’agit de deux flipchips, à utiliser de concert, placés au niveau de la biellette et sur l’axe de roue arrière. Les tailles S et M sont montées en position courte tandis que L et XL sont en position longue, mais dans les faits, rien ne vous empêche de faire l’inverse si vous voulez calmer un peu votre taille S ou rendre plus vive votre taille L.

Pourquoi pas un seul flipchip au niveau des bases ? Ce serait bien sûr la solution la plus simple mais cela aurait également des conséquences sur la hauteur du boîtier de pédalier. Pour n’influencer que la longueur des bases et conserver tout le reste de la géométrie, il était nécessaire d’agir également au niveau de la biellette.

La famille est composée de 4 modèles, tous en carbone. Pas de grande surprise à ce niveau, les marques peinant déjà à atteindre les 17-18 kg avec le carbone on voit mal comment l’aluminium pourrait se montrer compétitif ou réellement pertinent. A l’heure actuelle, seul Orbea s’est aventuré avec succès sur ce terrain, avec le Rise H (lire Test nouveauté | Orbea Rise H10 aluminium : saveur préservée).

La gamme commence avec deux modèles au programme similaire, les Jam² SL 8.7 (6 199 €) et Jam² SL 8.8 (6 999 €). Pneus Maxxis en carcasse Exo, petit amortisseur arrière, pour ces deux modèles « d’entrée de gamme » Focus a pris le parti de proposer des vélos plutôt orientés pédalage… ce qui permet aussi de baisser les coûts.

En haut de gamme, on a le choix. Les Jam² SL 9.9 (8 499 €) et Jam² SL 9.0 (11 499 €) passent tous les deux sur le cadre MAX, 300 g plus léger grâce à l’utilisation d’autres fibres de carbone, mais offrent deux caractères très différents. Le 9.9 s’adresse aux pilotes avertis peu friands de compromis en descente avec sa fourche Fox 36 en cartouche Grip2, ses pneus Schwalbe en carcasses différenciées (SuperTrail à l’arrière, SuperGround à l’avant) et un profil Magic Mary Soft à l’avant ou encore son amortisseur Fox Float X. A l’opposé, le 9.0 joue la carte de la légèreté avec des pneus Maxxis Dissector Exo, des roues Mavic Crossmax XLR en carbone et ses freins Sram G2 Ultimate.

Enfin, on termine cette partie « statique » avec une remarque sur la nouvelle direction prise par Focus en termes de décoration des vélos. Adieu les gros lettrages sur le tube diagonal, les logos disparaissent presque complètement du vélo pour laisser la place à de très jolis jeux de couleurs et de finitions. « Let the design and riding quality speak first » nous dit-on !

Sur le terrain

Un petit rappel avant de se pencher sur le comportement de ce Focus Jam² SL. Comme tous nos articles intitulés « Test nouveauté », il ne s’agit que d’une prise en main, d’une découverte. Nous avons reçu le vélo peu de temps avant sa sortie et au moment où nous publions ces lignes, nous n’avons pu faire que trois sorties à son guidon. Vous comprendrez donc que cela nous oblige à prendre un peu de distance : on ne donne pas un avis tranché avec si peu d’expérience. Pour les retours approfondis, détaillés et argumentés il faudra attendre l’essai complet, celui qui commencera simplement par ”Test ».

Au pédalage, le Jam² SL montre très vite de belles aptitudes. Pour un « petit » e-bike, le moteur Fazua Ride 60 pousse fort et comme la géométrie est bien trouvée, on peut s’attaquer sans faiblir à de sacrés passages. La roue avant reste plutôt facile à contrôler et le moteur parvient sans peine à donner le petit coup de pouce nécessaire lorsqu’il faut par exemple franchir une marche dans une section déjà raide. Le poids est également un atout : s’il reste élevé dans l’absolu (19,4 kg pour notre taille L), les quelques kilogrammes de différence avec un gros e-bike rendent la machine plus facile à contrôler, surtout quand on est soi-même pas très lourd.

Attention tout de même, cela fonctionne bien… tant qu’on est en mouvement. Dans sa version d’origine, le moteur Fazua montre quelques difficultés en reprise et si vous ralentissez trop ou mettez pied à terre dans un passage technique, on vous souhaite bon courage pour repartir. La marque indique une cadence optimale entre 55 et 125 tours / minute et effectivement, on n’a pas senti de grosse différence au sein de cette fourchette, mais il faut absolument éviter de descendre en dessous. Il est possible qu’on puisse améliorer un peu cela via l’application Fazua avec la personnalisation des modes mais c’est quelque chose sur lequel nous ne nous sommes pas encore penchés.

Autre limite, l’adhérence du pneu arrière. Sur ce modèle 9.9, la version « enduro » du Jam² SL, Focus a opté pour un Schwalbe Nobby Nic en carcasse SuperTrail et gomme SpeedGrip. On salue le choix de la carcasse robuste mais pour le profil du pneu, on émet quelques réserves. Si on peut comprendre le choix de Focus qui a souhaité privilégier l’autonomie, on ne peut que que constater que ce couple gomme-profil atteint vite ses limites dans le gras.

Autrement, le Ride 60 offre un comportement intéressant, bien différent du TQ HPR-50. Ici, les sensations sont proches d’un « gros » moteur, le moteur pousse (ou tire) de la même façon au lieu d’accompagner discrètement. C’est moins perturbant pour les habitués de l’e-bike, l’impression générale est moins sportive. Côté bruit, on placerait le Ride 60 entre le TQ et un gros moteur. Il n’est pas aussi silencieux que le premier, véritable référence en la matière à l’heure actuelle, mais il fait tout de même bien mieux que le reste de la concurrence.

On apprécie aussi la fonction Boost, qui délivre 450 W de puissance pendant 4 à 12 s selon les conditions dans lesquelles on l’utilise (départ à l’arrêt ou non), dans la limite de la coupure à 25 km/h évidemment. C’est très drôle dans les pentes moyennes pour monter vite mais surtout, cela peut donner un coup de boost bien utile à l’entrée d’un passage technique pour peu qu’on l’ait anticipé.

En descente, le Jam² SL tient ses promesses. Le vélo est étonnamment facile à faire décoller pour un e-bike et mieux encore, bien équilibré. Contrairement à beaucoup d’autres machines à assistance électrique, même légères, le Jam² SL ne paraît pas planté de l’arrière et on peut profiter d’appuis qu’on réserverait habituellement aux vélos classiques pour prendre de la hauteur.

La suspension arrière complète ce tableau avec un comportement qui apparaît plus adapté aux pistes flow avec de gros chocs et de belles compressions que sur les sentiers plus lents avec beaucoup de petits obstacles pointus. Grâce à la géométrie, à l’équipement (merci l’excellent pneu avant) et au châssis qui offre un grip surprenant (le dosage des rigidités ?) on ne se met jamais en danger et on ne se fait pas peur, mais on a simplement déjà vu plus confortable.

Dans son domaine en revanche, le Focus Jam² SL est un régal et on s’amuse à son guidon comme rarement en descente avec un e-bike. Avec le poids qui stabilise l’ensemble à haute vitesse et le support de la suspension, il ne faut pas longtemps pour lâcher les freins et dévaler les sentiers en rebondissant d’appui en appui. Un régal ! Attention aux zones de freinage par contre, le Nobby Nic montre là aussi ses limites et même sur le sec, la roue arrière peut balayer la piste comme dans un toboggan. Toutefois, difficile d’en vouloir vraiment à Focus, il n’y avait pas vraiment de bon ou de mauvais choix.

Au-delà de compléter la famille Jam sur le papier, ce nouveau Jam² SL a réellement du sens sur le terrain. Plus pointu que le lourd mais très accessible Jam², il devrait séduire les pilotes un minimum expérimentés à la recherche d’un vrai e-bike, avec ce que cela sous-entend en termes de performances et de comportement moteur, mais qui n’ont pas envie de lutter contre le poids trop important d’un gros e-bike. Au guidon du Jam² SL, on n’est pas un passager et on peut piloter avec les mêmes excentricités (ou presque) que sur le Jam. On a maintenant hâte de passer un peu plus de temps en sa compagnie pour approfondir ces premières impressions, notamment celles liées à la suspension et à l’assistance. Rendez-vous dans quelques temps pour l’essai complet !

Plus d’informations : focus-bikes.com

ParLéo Kervran