Test nouveauté | Canyon Spectral:ON : cap sur l’intégration

Par Léo Kervran -

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Test nouveauté | Canyon Spectral:ON : cap sur l’intégration

Après le Grand Canyon:On et le Neuron:On, Canyon poursuit le renouvellement de sa gamme e-bike et c’est au tour du Spectral:On de recevoir une batterie intégrée. Ce n’est cependant pas la seule nouveauté puisqu’il se dote également d’un cadre en carbone, une première pour un e-bike de la marque allemande. Nous avons pu le découvrir il y a quelques semaines en avant-première sur les hauteurs de Barcelone, voici nos premières impressions.

Pour cette deuxième génération de Spectral:On, l’objectif de Canyon était de revoir le design de l’ancien modèle, sans batterie intégrée, ce qui était justifié à ce moment par une volonté de centrage des masses, et aussi d’améliorer les performances à la montée comme à la descente. Pour le design et le gain de poids, la marque allemande a fait le choix d’un triangle avant en carbone sur tous les modèles de la gamme. En revanche, l’arrière et la biellette restent en aluminium car le gain de poids serait vraiment marginal sur ces parties du vélo. Au total, le nouveau Spectral:On est annoncé 1 kg plus léger que son prédécesseur (qui n’était déjà pas bien lourd).

On ne peut pas la rater, l’autre principale nouveauté sur ce vélo, c’est la batterie intégrée. D’après Canyon, au-delà de l’aspect esthétique, avec l’arrivée de nouveaux modèles de batteries, cela permet également aujourd’hui d’encore baisser le centre de gravité du vélo par rapport à la précédente génération, ce qui devrait avoir un impact non négligeable sur le comportement.

Contrairement à celle du Neuron:On, pas besoin d’une clé spéciale pour la déverrouiller, une clé hexagonale de 4 mm suffit pour la retirer. En dessous, on accède au câble de dérailleur et à la Durit de frein, qui passent tous deux en interne.

Puisqu’on parlait de comportement, on remarque quelques ajustements dans la géométrie, même si les caractéristiques principales sont conservées. Ainsi, le reach n’évolue pas (445 mm en taille M) et le vélo garde son format « reverse mulet » avec une roue avant en 29ʺ et une roue arrière en 27,5ʺ. Par contre, il s’allonge légèrement. Les bases gagnent 5 mm pour la stabilité et le comportement en montée tandis que l’angle de direction se couche de 0,3°. Cela se ressent sur l’empattement, qui prend 10 à 13 mm suivant la taille. Enfin, pour favoriser un peu la position au pédalage, le tube de selle se redresse de 0,7° ce qui a pour effet de raccourcir le tube supérieur d’environ 6 mm.

Côté suspension, on retrouve bien sûr le 4 Bar Linkage que Canyon décline sur presque tous ses vélos, du Torque de freeride / gros enduro au Neuron CF de randonnée / trail. La cinématique suit ce que la marque appelle le principe Triple Phase, c’est-à-dire qu’elle est pensée pour offrir de la sensibilité en début de course, du support ensuite, puis une progressivité plus prononcée en fin de débattement pour éviter de talonner. Elle développe ici 150 mm de débattement et Canyon l’a retravaillée vis-à-vis de l’ancien modèle pour être légèrement plus linéaire.

L’assistance est toujours confiée à Shimano et au désormais bien connu moteur Steps e8000. Comme souvent, il est associé à une commande e7000, plus compacte et surtout plus facile à utiliser avec une commande tige de selle télescopique sous le cintre, que la commande e8000, qui a elle-même la forme d’un shifter. On note la très belle intégration de l’aimant du capteur de vitesse, qui prend place dans une des branches du disque de frein.

Comme sur le nouveau Neuron:On, le bouton de démarrage est placé sur le tube supérieur et il intègre une prise USB-C, pour recharger un smartphone, un GPS ou pour brancher une lampe. A part en dépannage, l’utilité nous semble moindre pour un smartphone ou un GPS (dont les modèles récents ont une grande autonomie), mais cela peut être intéressant pour une lampe, en vue de sorties nocturnes. En tout cas, c’est une option intéressante à avoir au cas où…

Au niveau des équipements, l’œil est directement attiré par le poste de pilotage, où on retrouve un combo cintre-potence en carbone une seule pièce ! D’un point de vue purement technique, ce n’est pas tout à fait une nouveauté : Scott travaille notamment en ce sens avec Syncros depuis plusieurs années, et de petites marques comme Gemini en proposent également. Canyon, qui dispose de sa propre gamme de périphériques, propose également de tels équipements sur certains de ses modèles route et gravel. Mais c’est une première en VTT pour la marque et c’est aussi la première fois qu’on voit cela sur un e-bike, toutes marques confondues. Ici, l’intérêt de cette conception réside aussi dans le fait qu’elle permet de faire passer toute la câblerie électronique entièrement en interne, de la commande vers l’affichage puis de ce dernier vers le moteur et la batterie.

Ce cockpit qui répond au doux nom de CP0012 aura demandé plus de deux ans de développement pour trouver la bonne géométrie et le bon niveau de rigidité. Malgré cela, il reste plus facile à concevoir qu’un cintre classique d’après les ingénieurs car il n’y a pas besoin de prévoir de renforts pour la fixation au niveau de la potence, la forme peut ainsi être mieux exploitée. En ce qui concerne les cotes, Canyon s’est arrêté sur une largeur de 760 ou 780 mm suivant la taille du vélo, avec un « équivalent potence » de 50 mm et un rise de 20 mm.

Comme son petit frère le Neuron:On, 4 versions (dont un modèle femme WMN) et 5 coloris sont au programme pour ce Spectral:On. Tous les modèles ont un triangle avant en carbone et un triangle arrière en aluminium et ils seront disponibles en 4 tailles, de S à XL. La gamme de prix commence à 4 599 € pour la version 7.0 et monte jusqu’à 6 999 € pour la 9.0 soit, comme toujours, des tarifs bien placés.

Canyon Spectral:On : sur le terrain

Pour découvrir ce nouveau Spectral:On, Canyon nous a donné rendez-vous il y a quelques semaines à côté de Barcelone, sur une des collines qui entourent la ville. Le terrain est sablonneux et il a plu la veille de notre arrivée, les conditions d’adhérence sont donc excellentes.

Nous grimpons sur un Spectral:On CF 9.0 en taille L, le modèle le plus haut de gamme affiché à 6 999 €. A ce tarif, on a droit à ce qui se fait de mieux en équipement : transmission Shimano XTR 12 vitesses, fourche Fox 36 Fit4 Factory, amortisseur Fox DPX2 Factory et roues Reynolds TRe Carbon. Du côté des pneus, on remarque que Canyon a fait le choix de pneus Maxxis en carcasse EXO à l’avant et EXO+ à l’arrière. Ça permet de gagner un peu de poids et d’améliorer la résistance au roulement mais, puisqu’on a un moteur, les pilotes plus agressifs préfèreront sans doute se tourner vers les carcasses DoubleDown, encore plus solides et plus rigides aussi.

Dans cette taille L, le vélo affiche un reach de 465 mm, c’est-à-dire dans la tendance actuelle, ni plus ni moins. Il est associé au cockpit CP0012 dans sa version 780 mm. Sur ce dernier, on apprécie particulièrement l’intégration de l’affichage Shimano, avec une petite bosse qui vient prolonger le point de fixation. Esthétiquement, les combo cintre-potence sont toujours polarisants mais de notre côté on aime beaucoup. Reste à voir si cela fonctionne bien sur le terrain.

On apprécie aussi les nouvelles poignées Canyon sans excroissance pour le collier de serrage qui permettent de positionner la commande dans une position idéale. On change de mode d’assistance presque comme on changerait de rapport, c’est particulièrement agréable.

Lors des réglages, un détail nous a perturbés : la longueur du tube de selle car, comme sur plusieurs modèles de la gamme, ce dernier monte loin au-dessus du tube supérieur. Problème, avec notre 1m79 pour 83,5 cm d’entrejambe nous sommes entre la taille M et la taille L et sur cette taille L, même en baissant la tige de selle au maximum la selle est tout juste trop haute pour nous. Si vous êtes dans le même cas que nous, faites particulièrement attention à ce point. Les choix stylistiques ont parfois des limites fonctionnelles…

Malgré ses 150 mm de débattement, le Spectral:On reste un e-bike de trail pour Canyon et la marque allemande recommande un sag assez faible en conséquence, entre 25 et 30 %. On suit ces conseils et c’est donc avec un peu plus de 25 % de sag que nous partons sur les chemins pour une première boucle en compagnie de quelques autres journalistes, d’une partie de l’équipe technique Canyon et de Fabien Barel (qui a participé au développement du vélo).

Avec ce réglage, le vélo ne pompe pas au pédalage et les 3 positions de l’amortisseur sont totalement superflues, on reste en mode ouvert en permanence. La position est bonne et le vélo bien équilibré, il ne cabre pas exagérément et monte bien. La selle, à la forme surprenante au premier abord, s’avère confortable et on apprécie le soutien supplémentaire lorsque le moteur pousse dans les montées raides. Si les sorties envisagées comprennent de longues montées, baisser un peu la potence sera néanmoins une option à envisager pour gagner un peu en efficacité.

En descente, le Spectral:On se comporte réellement comme un vélo de trail : il reste haut dans le débattement et est plutôt dynamique. C’est assez agréable lorsqu’on roule tranquillement, de manière assez passive, mais quand on attaque un peu plus, c’est plus déroutant. Puisque la suspension reste haute, la roue arrière manque de grip et on se retrouve à faire du supermotard à chaque virage, avec la roue arrière qui drifte et qui flirte avec les limites du chemin. Très amusant mais un peu fatigant à la longue. Même problème lorsque ça tape, la suspension reste haute et avec une roue arrière en 27,5ʺ déjà vive, mieux vaut ne pas trop exagérer sur le rebond.

Sur les conseils de Fabien Barel, on change quelques réglages pour « enduriser » le vélo : potence au plus haut et sag à 35 % voire un peu plus. Dans cette configuration, passer l’amortisseur en mode intermédiaire devient nécessaire en montée, sans quoi le tube de selle s’affaisse et on se retrouve assis sur la roue arrière. En revanche, le vélo affiche un tout autre visage en descente.

La roue arrière retrouve du grip et on peut inscrire sereinement le vélo dans les courbes sans le perdre à chaque sortie de virage. Dans les parties rapides et défoncées, il s’assoit mieux, sans perdre trop en dynamisme dans les virages serrés grâce à la petite roue arrière. On aimerait presque remonter encore un peu l’avant et on comprend mieux pourquoi Fabien Barel roule avec une fourche en 170 mm et un cintre au rise plus important, au lieu de la 150 mm montée d’origine qui donne au vélo un avant assez bas (cette remarque s’entend pour un e-bike d’enduro ; c’est en revanche parfaitement cohérent pour un usage trail). Ici, c’est finalement la fourche qui est un peu dépassée par les performances de l’arrière et on aurait aimé avoir la cartouche Grip2 plutôt que la Fit4, pour affiner un peu les réglages.

Arrive la fin de la journée et on se rend compte qu’on vient de faire un peu plus de 40 km et 2000 m de D+ sans avoir mal aux mains ou aux poignets. Le terrain n’était certainement pas le plus exigeant pour éprouver ce fameux cockpit en une pièce en carbone mais à défaut de pouvoir affirmer avec certitude qu’il fonctionne bien partout et que la rigidité est parfaitement dosée, on peut déjà dire qu’il n’est pas trop rigide et qu’il fonctionnera très bien sur bon nombre de terrains.

Pas de crevaison à déplorer non plus, les pneus ont plutôt bien résisté mais une fois encore, le terrain n’était pas extrême. De manière générale, les carcasses DH nous paraissent plus adaptées aux e-bikes que des versions plus légères si on a un usage engagé du vélo, surtout pour la roue arrière qui a tendance à prendre un peu plus de coups. A nouveau, le choix de l’Exo/Exo+ est cohérent pour un usage trail, mais il faudra envisager un changement pour un usage plus « hard ».

Verdict

Ce nouveau Spectral:On est un bon vélo de trail qui autorise quelques excentricités. Le poids est bien géré et le vélo passe partout, sans mettre son pilote en difficulté. Malgré cela, on a l’impression que le nouveau Spectral:On rentre un peu dans le rang par rapport à son prédécesseur, que Canyon passe à côté de quelque chose et pourrait avoir un excellent e-bike d’enduro en changeant très peu de choses. Il suffirait de quelques toutes petites modifications sur la géométrie et les équipements pour transfigurer ce Spectral:On, sans que cela n’affecte vraiment son bon comportement au pédalage. Si le Neuron:On vous attire mais que vous souhaitez une petite réserve de débattement, le Spectral:On pourra vous convenir. En revanche, pour une pratique plus « débridée » à laquelle nous pensions que le Spectral:ON allait plus se destiner, nous sommes restés un peu sur notre faim et on se dit que ce serait sympa de voir la gamme complétée par une version aux équipements plus musclés et/ou carrément par un Strive:On plus radical.

Photos : Canyon/Markus Greber – Canyon/Nightmares&Sons

ParLéo Kervran