Test nouveauté | BH Lynx 5 Carbon 8.9 : attention, félin agressif !
Par Olivier Béart -
Annoncé en même temps que la version alu sortie l’an dernier, le BH Lynx 5 Carbon était attendu impatiemment ! Après plusieurs tests, les pilotes du team, Karim Amour en tête, ont délaissé leurs Lynx 6 en roues de 27,5″ pour ce « petit vélo » de seulement 130mm de débattement arrière car il s’est montré systématiquement plus rapide. Nous avions donc hâte d’essayer la bête, ce que nous avons pu faire en avant-première sur nos terrains de jeu habituels, juste avant sa sortie officielle. Présentation et premiers enseignements :
La base de ce BH Lynx 5 Carbon est connue, dans la mesure où la version en aluminium est déjà apparue l’an dernier (voir notre présentation ici). Aujourd’hui, la marque espagnole va un cran plus loin avec cette plateforme dont les performances ont bluffé jusqu’aux membres du team, qui ont troqué depuis un moment déjà leur gros Lynx 6 en roues de 27,5″ contre le Lynx 5 alu en 29 pouces, en attendant la version carbone que vous avez sous les yeux.
Car même si, au départ, c’est un petit vélo Trail/All Mountain pensé pour être confortable, joueur et polyvalent, il a aussi montré un énorme potentiel face au chrono. Il sera donc décliné en deux variantes : le BH Lynx 5 Carbon « simple », monté avec une fourche en 130mm (Fox 34 comme sur la version testée ici) ou dans une variante LT inspirée par le team. Cette dernière conserve un débattement de 130mm à l’arrière, mais passe d’un petit amortisseur Fox DPS à un Fox DPX2, toujours à air mais plus costaud (un ressort passe aussi, les concepteurs y ont pensé), et surtout à une plus grosse fourche en 150mm à l’avant (Fox 36).
Maintenant que les grandes lignes sont tracées, rentrons un peu plus dans le détail.
Le cadre
Si les grandes lignes sont proches du Lynx 4.8, le nouveau Lynx 5 Carbon marque sa différence avec une douille de direction plus sobre (on peut même dire moins torturée), une partie supérieure un peu plus fine, mais aussi des couleurs qui s’inscrivent plus dans l’air du temps : flashy au niveau des teintes mais sobre dans le dessin.
Sous le vernis, on retrouve un cadre 100% en carbone, y compris l’imposante biellette et le bras arrière, qui est annoncé à un poids plume de 2,2kg sans amortisseur. On est dans la (très) bonne moyenne du segment, et dans des valeurs proches d’un de ses cousins hispaniques auquel il fait inévitablement penser : l’Orbea Occam.
BH précise que le poids annoncé comprend l’axe de roue arrière, mais aussi une série de protections, dont les développeurs ont absolument voulu équiper le vélo. « Nous voulons vraiment que nos vélos soient faits pour durer dans le temps et pour supporter un usage intensif », insiste Nicola-Yann Vies, le chef produit.
Nous nous sommes inspirés de ce que font les pilotes DH ou enduro race pour rendre le vélo plus silencieux. Cela peut paraître anodin, mais cela participe aussi au plaisir de roulage.
Il poursuit : « Nous avons donc équipé le Lynx 5 de fibres renforcées « Ballistic » sur le tube diagonal pour maximiser la résistance aux impacts, ainsi que de « mastic tape » aux endroits susceptibles d’être bruyants ou de recevoir des chocs répétés, comme au niveau de la base droite pour la chaîne ou sous le boîtier de pédalier. En cela, nous nous sommes inspirés de ce que font les pilotes DH ou enduro race pour rendre le vélo plus silencieux. Cela peut paraître anodin, mais cela participe aussi au plaisir de roulage. »
Sous le boîtier de pédalier, on constate aussi la présence d’une trappe, encore vide sur notre exemplaire de pré-série, mais qui pourra d’ici peu recevoir un petit nécessaire de réparation clipsé dans un logement spécialement prévu à cet effet. Sont prévus, une petite clé à cliquets avec une série d’embouts (façon Syncros ou Topeak), un logement pour cartouches de CO2 et un dérive-chaîne. Voilà qui devrait combler ceux qui roulent sans sac mais qui n’apprécient que moyennement de « straper » plein de choses sur leur cadre et/ou ceux qui étaient séduits par la fameuse Swat Door de Specialized.
Suspension
On ne change pas une équipe qui gagne : sur le BH Lynx 5, on retrouve toujours la fameuse cinématique Split Pivot, avec son point de pivot arrière concentrique à l’axe de roue, qui fait les beaux jours de BH depuis plusieurs années déjà.
Nicola-Yann nous répète à peu de choses près ce qu’il nous avait expliqué pour le Lynx 4.8 : « Le but de Dave Weagle avec cette cinématique est d’avoir une suspension qui travaille sur tout son débattement et qui ne se durcit qu’en fin de course. Cela donne la sensation de rouler avec plus de débattement, car elle est très linéaire. Sans oublier qu’il s’agit d’un système qui reste actif au freinage. Il n’y a que sur la fin qu’on a beaucoup de progressivité, mais nous avons travaillé pour que cela ne se sente pas trop. » Elle a aussi été ici pensée pour s’accorder avec plusieurs types d’amortisseurs, depuis un petit Fox DPS jusqu’à du ressort pour ceux qui souhaitent.
La valeur d’anti-squat est assez élevée, de l’ordre de 104/108%, de sorte à conserver d’excellentes facultés au pédalage. Prévu uniquement pour mono-plateau (contrairement au 4.8 qui, signe des temps, était encore prévu pour le double il y a trois ans), le Lynx 5 a pu être optimisé à ce niveau en prenant comme référence un plateau de 32 à 34 dents dents pour le placement du point de pivot principal, qui est pile à hauteur du sommet des dents.
Géométrie
La géométrie est un chapitre sur lequel BH a pour habitude de se distinguer. On n’est pas sur des valeurs aussi « excentriques » que chez d’autres hispaniques (suivez notre regard plus au Sud, jusque chez Mondraker), mais on se souviendra que le Lynx 4.8 (encore lui), a été pionnier en matière d’allongement de reach.
Aujourd’hui, les valeurs annoncées n’ont plus rien d’extrême, mais elles sont toujours pleinement d’actualité : 440mm en taille M pour le reach, des bases en 435mm de long et un angle de direction de 66,5° sur la version 130mm. Le tube de selle est aussi très redressé pour favoriser le pédalage. Caractéristique des vélos BH, qu’on retrouve aussi ici, le boîtier de pédalier est assez bas, avec 330mm.
Sur la version LT, le reach diminue logiquement un tout petit peu (-5mm) du fait de l’avant plus haut, l’angle de direction passe à 65° et le tube de selle à 74°.
Equipement, prix et versions
« Nous sommes des bikers, on roule avec les produits et on veut que cela se sente sur les vélos. Nous avons donc choisi des pièces fiables avant tout et des produits que nous estimons vraiment performants », affirme de manière très décidée le chef produit, qui cite en exemple la tige de selle BikeYoke Revive, que nous apprécions beaucoup (voir notre test) mais qu’il est rare de retrouver en monte d’origine chez une marque de la taille de BH.
La gamme de composants BH a aussi connu quelques modifications, principalement au niveau des roues. Nous les avions critiquées par le passé pour leur poids excessif, et ça tombe bien car près de 200g ont été gagnés sur les moyeux. Sur cette version, on retrouve aussi de nouvelles jantes en 30mm de largeur, parfaites pour le programme du vélo.
Les pneus proviennent systématiquement de chez Michelin, avec le duo Force AM à l’arrière et Wild AM à l’avant, tous deux en 2.3. Une monte polyvalente et parfaitement dans l’esprit du vélo, que nous avons beaucoup appréciée lors du test.
Le cintre carbone est aussi de la marque maison « Evo » et il est couplé à une potence en 60mm de long sur toute la gamme. Les poignées sont aussi signées BH et on apprécie tant leur confort que leur grip.
Le modèle que nous avons la chance de recevoir en avant-première pour un essai sur nos terrains de jeu favoris est le montage le plus haut de gamme BH Lynx 5 Carbon 8.9 en Sram XX1 Eagle, avec le nouveau pédalier au format DUB, plus léger et dont nous vous reparlerons prochainement. Les freins proviennent par contre systématiquement de chez Shimano (XTR M9000, XT et M6000)
Au niveau des suspensions, BH fait confiance à Fox. Sur notre modèle haut de gamme, on a droit aux versions Factory Kashima de la F34 et de l’amortisseur DPS.
Le haut de gamme culmine à 6999€, ce qui est une belle somme, mais qui, vu le montage paraît presque raisonnable par rapport à beaucoup de concurrents. Nous l’avons pesé à 12,190kg sur notre balance, sans pédales.
Puis, surtout, le BH Lynx 5 est disponible dans des versions plus accessibles : 4699€ pour le 7.9 monté en GX Eagle et Fox Performance, 3699€ en NX Eagle et Fox Rythm.
Il y a aussi la version en aluminium, qui reprend la même géométrie et la même philosophie, et qui est accessible dès 1899€. Le haut de gamme alu, en GX Eagle et Fox Performance, est lui à 3699€.
Enfin, une version LT existe au niveau de gamme 7.9 en carbone et 5.9 en alu (GX Eagle, Fox Performance) avec des suspensions plus musclées comme expliqué plus haut. Les tarifs vont là de 3899€ à 5299€.
Après les présentations, voyons maintenant ce que ce gros félin a dans le ventre et passons au test >>>
BH Lynx 5 Carbon 8.9 : le test terrain
Avec des souvenirs encore marquants du Lynx 4.8, nous avons immédiatement vu pas mal de similitudes entre les deux vélos. Notamment au niveau de la suspension qui est un véritable tapis volant. Voilà le qualificatif qui vient immédiatement à l’esprit de ceux qui l’essaient. En cela, il fait penser à un Trek Fuel EX, qui dispose aussi d’un principe de suspension proche, mais le BH semble clairement plus destiné à envoyer du gros.
Grâce à son poids et à sa géométrie bien pensée, agressive mais pas extrême, il est très facile à prendre en main. Sur la taille M de notre test, des pilotes de 178 à 182cm sont sur une machine plaisir, dont la taille semble cohérente pour notre morphologie et qu’on n’a pas spécialement envie de sur-tailler, sauf si on recherche plus la stabilité et les performances à haute vitesse.
Tel quel, le vélo est maniable, une vraie machine à plaisir dont les suspensions onctueuses à souhait gomment les inégalités du terrain pour éliminer les vibrations et tout ce qui pourrait venir parasiter le plaisir, tout en laissant juste ce qu’il faut pour encore sentir ce qu’il se passe sous les roues. Un régal.
On sent qu’on rentre facilement dans le débattement, mais on n’a jamais l’impression non plus d’avoir une suspension trop molle, ou d’avoir les pédales qui n’arrêtent pas de toucher le sol. Par contre, vu le comportement de la suspension, on vous conseille de partir sur un SAG de 25% plutôt que de 30%.
L’avant n’est pas en reste et s’accorde très bien avec le reste du châssis. La Fox 34 dans sa version Factory à cartouche Fit4 est réellement une fourche à tout faire. De la rando à l’enduro light, elle ne bronche pas !
En mode chrono dans les spéciales d’enduro ou la pente est bien prononcée et les appuis musclés, le cadre ne bronche pas. Par contre, là, on commence à ressentir le besoin d’une fourche plus grosse et on comprend toute la pertinence du montage LT avec la Fox 36. Il sera par contre plus compliqué de « downsizer » le BH Lynx 5 pour en faire un vélo de XC hard. Ce n’est pas dans son ADN…
En poussant le vélo dans ses retranchements, au-delà de la fourche qui montre logiquement ses limites, ce sont les roues qui se montrent trop souples à notre goût, au vu des capacités du vélo. Il y a eu des progrès, c’est vrai, mais les BH Evo ne sont pas encore au niveau de DT Swiss 1501 par exemple. Cela se sent en descente, mais aussi dans les montées et en relances, où elles ne font pas preuve d’un dynamisme extraordinaire.
Grâce à son poids plume, notre BH Lynx 5 Carbon en version 8.9 tire bien son épingle du jeu dans les montées, qu’on grimpe sans effort, surtout si on le compare à un vrai enduro. Il y a aussi du grip à revendre et il est très à l’aise quand la grimpette est technique.
Par contre, en mode ouvert, la suspension pompe pas mal. Heureusement, le levier de blocage de l’amortisseur est facilement accessible, car on en joue beaucoup. Un de nos testeurs, qui roule en Scott Genius habituellement, était clairement en manque de sa manette Twinlock et des trois positions de ses suspensions… qui iraient aussi très bien au BH Lynx 5. Car quand on y a goûté, c’est comme la tige de selle télescopique, c’est difficile de s’en passer. A bon entendeur !
En parlant de tige de selle télescopique, c’est l’occasion de dire que, mis à part les roues, on sent effectivement que le montage a été fait par des gens qui roulent et que les composants ont été choisis par passion plus que pour des raisons purement commerciales.
Verdict
BH avait déjà frappé fort avec son Lynx 4.8 et la sortie du nouveau Lynx 5 en roues de 29 pouces tombe pile au bon moment, quand les grands boudins ont le vent en poupe. Sur le terrain, on comprend pourquoi et, combiné à l’excellente suspension Split Pivot, on a un vélo d’une efficacité rare. Mais aussi d’une vraie polyvalence. Très capable en enduro, il est assez léger pour envisager de très longues virées à son guidon. Capable de satisfaire les pilotes exigeants sans être pointu, on imagine sans mal que les versions les plus accessibles procureront beaucoup de plaisir aussi à un plus large spectre de pratiquants, y compris ceux qui cherchent un bon vélo confortable et polyvalent. Les Specialized Stumpjumper (auquel le BH nous a beaucoup fait penser au niveau du comportement), Trek Fuel EX et autres Orbea Occam (plus vif et nerveux mais moins onctueux en suspension) ont face à eux un nouvel adversaire très convaincant.
Plus d’infos : https://www.bhbikes.com/fr_FR/lynx5
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Test nouveauté | BH Lynx 5 Carbon 8.9 : attention, félin agressif !