Par Olivier Béart -

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Tel le phénix qui renaît de ses cendres, le Merida 96 est revenu au catalogue Merida il y a tout juste un an, dans une version complètement actualisée proposée tant en roues de 27,5 qu’en 29 pouces. Après avoir pu faire quelques tours de roues très agréables avec le très haut de gamme modèle Team utilisé en Coupe du Monde par l’équipe Multivan Merida, nous avons voulu voir si le Ninety Six parvient aussi à donner des frissons dans ses versions plus accessibles. Réponse avec notre test du Merida 96 – 6000 en version 29″, avant carbone et arrière alu, proposé à 3199€.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-19Comme vous pouvez retrouver dans notre premier article la présentation détaillée des spécificités techniques du nouveau Merida 96, nous nous permettrons donc d’être un peu plus brefs que d’habitude à propos de l’ossature et de la cinématique de suspension pour nous concentrer sur les spécificités de la version plus accessible testée ici.

4-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1Le cadre du Merida Ninety Six 6000 ressemble très fort à celui des versions haut de gamme mais, s’il en reprend la déco, il comporte plusieurs différences techniques qui permettent de faire baisser l’addition. Sur ce cadre, qui porte le nom de CFA, le triangle avant reste en carbone, mais il est fait de fibres moins haut de gamme que sur le CF5 utilisé sur le modèle Team.

Le bras arrière est ici en aluminium mais Merida a réussi à conserver les formes et l’aspect du carbone

Autre différence : l’arrière est en aluminium, mais on ne peut qu’admirer la performance de Merida qui a réussi à conserver les formes et l’aspect du carbone. On retrouve ce cadre CFA sur les versions 6000 (testée ici), XT (montage Shimano XT, comme son nom l’indique – 2999€). Il existe également une version 100% alu (cadre « Lite » sur les modèles 800 et 600, dès 1899€) et CF4 full carbone mais un peu plus lourde que la CF5 (Merida 96 – 7000 à 4799€). Ça va, vous suivez toujours ? Rassurez-vous, on en a fini avec les noms de code !

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-18Le cadre CFA qui équipe le Merida Ninety Six 6000 est toujours doté du passage interne « Smart Entry », qui garantit un bon calage des câbles et Durits pour éviter qu’elles ne bougent encore une fois introduites dans le tube. Le boîtier de pédalier est au standard PressFit BB92 et l’axe de roue arrière en 142×12. Jetons à présent un oeil sur la façon dont on est positionné sur la machine.

Géométrie

1-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1

Nous avons testé le Merida 96 en taille M, et il s’est avéré parfait pour nos testeurs dont la taille varie entre 175 et 180cm. Cela dit, au-dessus de 180cm, on vous conseille fortement de passer sur la taille L. Par rapport au Big Ninety Nine qu’il remplace, on voit que Merida suit la tendance en allongeant un peu le reach (+9mm en profondeur de cadre) et en raccourcissant les bases à 435mm, ce qui est bien court pour un full en 29 pouces. L’angle de direction reste assez droit, avec 70°. Bref, pas de folies, mais une géométrie bien actualisée. Comme on le voit dans le tableau ci-dessus, Merida propose son taille S en 27,5 » et donne le choix sur la taille M.

Equipements

2-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1Par rapport à la version XT, équipée du même cadre mais qui est en double plateau, le Merida Ninety Six 6000 prend une orientation un peu plus racing, avec un montage en 1×11. C’est le groupe Sram GX qui a été choisi pour son rapport qualité/prix. Et le moins qu’on puisse dire c’est que Merida a vu juste car, même si la rapidité des changements de rapports n’égale pas ceux des modèles haut de gamme (XO1 et XX1), on reste sur des performances élevées et un tel groupe ne fait absolument pas tache sur ce genre de vélo. Le choix d’un plateau de 30 dents est également très judicieux. Petit avantage quand on est en « full Sram » comme ici, on peut monter le shifter, les freins et la commande de blocage sur un seul collier. Bref, ça commence bien !

3-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1Côté suspensions, cette version n’a pas à rougir non plus, dans la mesure où elle est équipée du même amortisseur RockShox Monarch XX que le haut de gamme, c’est à dire équipé de l’excellent blocage hydraulique au guidon qui garantit un maniement durablement souple, quelles que soient les conditions climatiques et peu importe la longueur du chemin à parcourir jusqu’à l’amorto.

5-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1A l’avant, on retrouve la RockShox Reba RL en axe de 15mm, dont l’hydraulique et même l’emballage sont très proches de ceux de la SID, avec juste quelques grammes en plus. Ici aussi, on a droit à un blocage au guidon avec la nouvelle commande OneLoc que nous testions pour la première fois. Conçue presque comme une commande de changement de vitesse, elle se place parfaitement sous le cintre, à gauche, quand on roule en mono-plateau comme c’est le cas ici. Sa souplesse de fonctionnement est bluffante, comme son ergonomie. Par contre, on ne comprend toujours pas quelle mouche a piqué Sram d’inverser le sens d’activation du blocage sur ses cartouches hydrauliques. Bilan, aujourd’hui, en cas de pépin, la fourche est bloquée par défaut quand le câble est relâché.

6-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1On le voit, jusqu’ici, le Merida 96 – 6000 est plutôt bien doté. Mais c’est au chapitre du train roulant que ça se gâte. Les jantes DT466d sont des modèles OEM (première monte uniquement) assez étroits (19mm entre crochets) et lourds (près de 500g en 29 »), montées avec beaucoup de désinvolture et des tensions inégales sur des moyeux Sram d’entrée de gamme sans vices… ni vertus. Des pneus Maxxis Ikon complètent le tableau. Mais, si nous apprécions ce dessin en montage arrière et aussi à l’avant sur temps sec, il manque selon nous de polyvalence pour un montage en première monte et nous avons rapidement installé des Maxxis Beaver pour mieux profiter du vélo dans les conditions difficiles et boueuses dans lesquelles il a en partie été testé.

7-Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1Pour le reste, on constate la présence de freins Avid DB5, qui sont un mix entre les leviers des excellents Sram Guide et des étriers double piston d’entrée de gamme. Le couple fonctionne plutôt bien, mais il manque assez clairement de puissance dans certaines circonstances, malgré un disque de 180mm à l’avant.  Les composants cintre/potence/tige de selle sont signés Merida/Control Tech et ils sont de belle facture (mention très bien pour le cintre en 720mm de large à l’ergonomie agréable), alors que la selle Prologo est toujours plaisante à retrouver sur un vélo de test.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-17L’ensemble pèse 11,710kg sur notre balance (pour 11,8kg annoncés sur le site par Merida, bravo pour l’honnêteté), ce qui représente moins d’un kilo de pénalité par rapport au 96 Team, plus de deux fois plus cher : 7999€ contre 3199€. Voyons ce que cela donne au niveau des sensations sur le terrain.

Merida 96 – 6000 : le test terrain

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-1En se positionnant sur le Merida 96 – 6000, on ressent d’emblée une géométrie très typée racing, comme sur la version Team. L’avant est bas, on est nez dans le guidon, prêt à attaquer dès les premiers mètres. Cette posture n’a rien d’extrême, mais la géométrie fait un peu « old school » par rapport à d’autres machines du même segment testées récemment, comme le Trek Top Fuel, ou encore le nouveau Cannondale Scalpel.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-6Pour aller avec une telle position, il faut du tempérament. Et, à l’accélération, le vélo répond plutôt bien. On sent que le cadre CFA de cette version du Merida 96 garde son caractère et que la partie arrière en aluminium ne fait pas perdre grand chose en dynamisme par rapport au cadre full carbone. C’est un point sur lequel Merida a fait des progrès par rapport au passé et c’est un beau tour de force de retrouver quasiment le même dosage de rigidité que sur le haut de gamme avec des matériaux différents.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-11Par contre, on sent très clairement que les roues sont un gros point noir sur ce vélo. Complètement inertes et à peine tendues au niveau des rayons, elles grèvent complètement les ambitions du Ninety-Six. A l’accélération, elles marquent un temps de retard et affichent une inertie importante. Il leur arrive même de toucher les bases et les haubans au niveau du pneu, alors que le dégagement semble raisonnable. Nous avons essayé le 96 avec d’autres roues (des DT X-1700, bien plus cohérentes mais qui restent accessibles), et il s’en trouve métamorphosé. C’est un changement à prévoir d’office, et qui va hélas grever le budget suite à l’achat.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-12Même avec d’autres roues et malgré le cadre qui offre de bonnes sensations, on perçoit tout de même assez clairement qu’on n’est pas sur le modèle Team. Le petit kilo de différence est bien là et, dans les longues ascensions, le vélo peut se montrer usant à la longue, du fait de sa position exigeante et de son léger embonpoint. En dépit d’un confort plutôt très bon, en l’état, ce n’est pas vraiment un vélo de marathon mais plutôt de rando sportive pour des sorties de 50 à 60 bornes. Pour envisager plus, il faudra l’alléger.

Le grip en côte technique est bien présent, mais l’avant demande un certain doigté pour être placé

En côte peu technique, il faut aussi penser à bloquer les deux suspensions car, si le vélo relance bien quand on se met debout sur les pédales et qu’on est en mode ouvert, il a un peu tendance à s’affaisser de l’arrière-train quand on reste assis sur la selle et qu’on veut pédaler en force. On comprend qu’il y ait une contrainte technique (blocage à câble pour la fourche, hydraulique pour l’amortisseur), mais disposer d’une seule commande pour les deux suspensions serait un vrai plus. Le grip en côte technique est bien présent, mais l’avant demande un certain doigté pour placer la roue pile où on le souhaite. Ici aussi, le modèle Team nous avait donné l’impression de plus de facilité et… de légèreté.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-10Quand on bascule en descente, on sent qu’on est sur un vélo orienté XC/marathon, sans véritable grain de folie. La stabilité est au rendez-vous, il s’en sort très bien dans les enchaînements de virages et il aime quand on le fait sauter au-dessus des obstacles comme un cabri même si, une fois encore, on a moins l’impression de virevolter qu’avec le modèle haut de gamme essayé à la présentation. Ce sentiment est surtout présent avec les roues d’origine… à propos desquelles on ne va pas en remettre encore une couche, on pense que vous avez compris.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-8En attaquant des portions plus pentues et défoncées, il faut clairement faire l’effort de se mettre bien en arrière car le vélo a naturellement tendance à placer le pilote plutôt en avant de la machine. On fait alors rentrer la suspension dans le débattement, et elle se montre très efficace et jamais dépassée par les enchaînements de chocs. A l’avant, la RockShox Reba n’est pas au niveau des meilleures fourches XC actuelles, mais elle ne démérite absolument pas.

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-13On se dit que c’est typiquement le genre de vélo un peu sérieux auquel une tige de selle télescopique ne ferait pas de tort. Julien Absalon s’y met, alors pourquoi pas vous ? Et pourquoi ne retrouve-t-on pas encore cet accessoire bien utile sur plus de vélos orientés XC ? Cela permettrait, nous en sommes persuadés, de rendre le pilotage du 96 plus accessible car, en l’état, il demande un certain doigté.

Verdict

Merida_96_29_Test_Copyright_OBeart_VojoMag-20Merida a bien remis au goût du jour la légende Ninety-Six. Mais, même si nous avons perçu que le cadre garde un caractère proche de celui des versions full carbone, nous avons toujours ressenti un petit quelque chose qui nous a empêché de retrouver les sensations perçues au guidon du modèle Team. Malgré des choix de composants judicieux comme pour le très bon groupe Sram GX ou les suspensions, le Merida 96 – 6000 est fortement pénalisé par ses roues. Il faudra absolument l’équiper de roues légères et bien montées pour espérer retrouver des sensations dignes d’un vrai vélo de course XC/Marathon. Car, en dehors d’un usage en compétition, le 96 a du mal à convaincre à cause d’une position qui n’incite pas aux excentricités de pilotage et qui se montrera aussi trop exigeante pour les randonneurs sportifs. Ce test aura permis de montrer que le Merida 96 dans sa dernière mouture est une excellente bête de course, mais qui nécessite d’être choisie dans une version haut de gamme très bien équipée pour vraiment pouvoir profiter de ses charmes. Car, dans cette déclinaison plus basique et plus lourde, même bien réalisée et équipée intelligemment (sauf les roues !), l’ensemble manque un peu de cohérence et on a du mal à voir à quel public s’adresse ce vélo, dans la mesure où le pur compétiteur le trouvera trop lourd et manquant de « pep’s », alors que le randonneur sportif risque d’avoir du mal à trouver ses marques en raison d’une position exigeante et d’un comportement en descente pointu.

Web

Plus d’infos sur le site Merida, dans notre article de présentation du Merida 96 et dans notre premier test de la version Team.

ParOlivier Béart