Test | Garmin Edge MTB : un GPS compact pour le VTT, mais pas encore la révolution promise

Par Adrien Protano -

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Test | Garmin Edge MTB : un GPS compact pour le VTT, mais pas encore la révolution promise

Depuis des années, Garmin domine le monde des compteurs GPS vélo… mais avec une approche largement tournée vers la route, le gravel et le VTT sous le prisme de la performance. Avec le Edge MTB, Garmin change de paradigme : un GPS compact, renforcé et conçu dès le départ pour rouler en VTT avec des fonctions dédiées. Nous l’avons utilisé plusieurs semaines sur nos terrains habituels : sorties enduro, bikeparks et VTTAE. Présentation, analyse et verdict.


Garmin se la joue véritable poids lourd de la tech en enchaînant les lancements comme rarement dans le secteur du GPS vélo. Après avoir dévoilé coup sur coup les Edge 1050 et 850/550, la marque américaine a surpris son monde en présentant un troisième modèle la même année : le Edge MTB. Un choix assumé, qui reflète autant la stratégie de segmentation de Garmin que l’évolution du marché… avec un GPS annoncé comme véritablement pensé pour un usage tout-terrain.

Un boîtier compact, pensé pour le VTT

Au premier contact, l’Edge MTB n’a rien d’un Edge 840 miniaturisé, mais bien d’un appareil à part dans la gamme. Avec 51 x 78 x 20 mm et 58 g sur la balance, il est nettement plus compact et léger qu’un Edge 850 (54,6 x 92,2 x 16,8 mm, 113 g). L’écran de 2,13” (240 x 320 px) est plus petit que celui d’un 840/850 (2,6”/2,7”), mais protégé par un verre Gorilla Glass et entouré d’une coque intégrée bien caoutchoutée qui dépasse légèrement, histoire d’encaisser un contact avec un rocher ou un tronc sans exploser le bord de l’écran

Pas de tactile ici : tout se pilote via des boutons physiques bien marqués, facilement utilisables avec des gants mouillés ou boueux, là où les Edge 850 et 1050 misent avant tout sur de grands écrans tactiles haute définition.

Garmin livre d’origine un support pour tube supérieur avec sangle, peut-être plus cohérent en VTT qu’un support déporté classique exposé à la moindre chute. Ajoutez à cela une étanchéité IPX7 et un port USB-C protégé par un capuchon robuste : on est moins dans l’objet “premium de tableau de bord” que dans un outil compact et utilitaire, pensé pour encaisser les sorties engagées plutôt que pour briller sur le cintre.

GPS 5 Hz : la donnée qui change tout ?

Garmin introduit sur le Edge MTB ce qui est sans doute son évolution technologique la plus visible : un enregistrement GPS à 5 Hz, soit cinq relevés par seconde. À titre de comparaison, un Edge 840 ou 1050 enregistre classiquement à 1 Hz (un point par seconde), même en mode multibande. Cette fréquence accrue change réellement la lecture du terrain : les trajectoires enregistrées ressortent nettement plus propres dans les sections rapides, avec moins d’angles artificiels et une meilleure restitution des trajectoires engagées. En forêt dense, là où même les meilleurs GPS produisent habituellement un léger lissage ou des dérives latérales, le Edge MTB conserve une trace beaucoup plus centrée et crédible. En descente, c’est probablement le premier Garmin capable de restituer correctement la dynamique du pilotage, sans transformer une série d’épingles en une courbe approximative.

Cette finesse est soutenue par une puce GNSS multibande (L1 + L5) compatible GPS / Galileo / GLONASS, identique à celle du 1050 mais ici exploitée à son plein potentiel grâce au 5 Hz. Résultat : dans les environnements vraiment compliqués, le Edge MTB se place clairement au-dessus du reste de la gamme, y compris du très haut de gamme, pourtant mieux doté en fonctionnalités. Garmin semble avoir optimisé ce modèle pour privilégier la précision dynamique plutôt que la consommation, et cela se ressent immédiatement sur la trace finale.

Des profils entièrement dédiés au VTT

Jusqu’ici, même les GPS « haut de gamme » de Garmin se contentaient d’un seul et unique profil VTT. Avec le Edge MTB, la marque change réellement d’approche : ce n’est plus une simple variation du profil classique, mais une segmentation complète qui reflète la diversité des pratiques tout-terrain :

  • Le Profil « Enduro » est probablement le plus complet : il détecte automatiquement les alternances montée/descente, isole chaque run dans la session, et permet de rejouer ses lignes comme sur un logiciel d’analyse.
  • Le Profil « Descente« , lui, ignore volontairement tout ce qui n’est pas une descente : retour en navette, télésiège, liaison… le GPS ne comptabilise que ce qui se passe dans la pente, avec une succession automatique de chronos.
  • Il est également possible d’ajouter les profils plus classiques, tels que « VTT », « Gravel »…

Les données “historiques” du VTT chez Garmin — Grit, Flow, Jump — sont toujours là, mais avec un bond de fiabilité très net grâce au GPS 5 Hz. De quoi offrir une lecture plus proche de la réalité.

Garmin introduit également une nouveauté extrêmement intéressante pour l’entraînement comme pour le fun : les « Portes de chronométrage ». On place deux points sur la carte (ligne de départ / ligne d’arrivée), et chaque passage déclenche automatiquement un run chronométré. Une sorte de timing maison, sans balises. Simple, propre… et plutôt addictif, que ce soit pour comparer des lignes ou se tirer la bourre avec les copains.

Cartographie : Trailforks comme colonne vertébrale

Garmin intègre d’origine les cartes TopoActive combinées à la base Trailforks, et sur un GPS dédié au tout-terrain, c’est loin d’être un gadget. Le Edge MTB exploite pleinement ces données avec une version améliorée de Forksight, l’outil qui affiche automatiquement les sentiers à l’approche d’une intersection. Concrètement, l’écran bascule sur une vue contextualisée : liste des trails accessibles, leur difficulté (codes couleurs Trailforks), le sens de circulation, la distance avant l’entrée et même le profil altimétrique du sentier. Contrairement aux Edge généralistes, où Forksight est parfois timide ou un peu lent, le Edge MTB profite ici du GPS 5 Hz pour déclencher l’affichage au bon moment, sans décalage frustrant.

Autonomie, stockage et tarif du Garmin Edge MTB

Le Edge MTB offre jusqu’à 14 h d’autonomie en usage intensif (GPS actif, capteurs appairés et suivi d’itinéraire).En mode économie d’énergie, l’autonomie peut atteindre jusqu’à 26 heures. Le compteur embarque 32 Go de mémoire interne, suffisants pour charger des cartes détaillées (TopoActive, sentiers VTT via Trailforks, etc.), enregistrer de nombreuses activités ou stocker de multiples itinéraires. Garmin annonce la possibilité de conserver jusqu’à 100 parcours ou environ 200 h d’historique de roulage.

Le prix officiel est fixé à 399,99 €, ce qui le place dans la tranche “compteurs haut de gamme”, mais avec un positionnement spécifique clairement orienté VTT / enduro / DH.

Garmin Edge MTB : le test terrain

Dès les premiers tours de roue, on comprend que le Edge MTB n’est pas un “petit Edge” déguisé en modèle tout-terrain : c’est un appareil dont la logique d’usage a été construite autour du VTT.

Le Edge MTB fait l’impasse totale sur le tactile, un choix qui peut sembler étonnant en 2025. Sur le terrain, pourtant, on comprend rapidement que Garmin n’a pas simplement “oublié” l’écran tactile : c’est un positionnement assumé. Les sept boutons, larges et bien crantés, restent parfaitement utilisables avec des gants humides, des mains sales ou frigorifiées, là où un tactile classique perd souvent les pédales. On gagne en fiabilité ce qu’on perd en rapidité : modifier un champ de donnée ou ajuster une page en roulant demande clairement plus de manipulations qu’un coup de pouce sur un 840/850.

Cela dit, tout n’est pas parfait : la logique de certains raccourcis demande un temps d’adaptation, et il arrive d’appuyer involontairement sur un bouton. Pas de catastrophe, mais un petit rappel que Garmin a privilégié la robustesse et l’usage en conditions difficiles plutôt que le confort d’un smartphone sur cintre. Ceux qui aiment “tuner” leur GPS pendant la sortie resteront probablement sur un Edge tactile ; ceux qui préfèrent ne jamais se demander si la pluie ou la boue vont perturber leur compteur verront dans cette approche une vraie qualité.

Enregistrement GPS 5Hz et profil VTT Enduro/DH

Sur le terrain, le Edge MTB dévoile rapidement ce qui constitue probablement sa fonction la plus intrigante : l’enregistrement GNSS à 5 Hz, soit cinq points par seconde. En théorie, cela permet de conserver la trajectoire réelle dans les enfilades rapides, d’éviter les coupes d’épingle absurdes et d’améliorer la précision de vitesse instantanée. Dans la pratique, le gain existe… mais demande un certain “effet loupe” pour être réellement perceptible.

La trace du Edge MTB se montre effectivement plus propre que celle d’un Edge 1050 ou 840 en enregistrement 1 Hz

Sur des épingles, la trace du Edge MTB se montre effectivement plus propre que celle d’un Edge 1050 ou 840 en enregistrement 1 Hz. On retrouve mieux les arrondis, la ligne ne saute pas d’un côté à l’autre du single, et certains virages serrés restent enfin… des virages serrés. Mais il faut être honnête : la différence n’apparaît vraiment que lorsqu’on zoome très fortement sur le tracé. Pour un usage “plaisir” ou une simple analyse post-sortie, l’apport reste modeste. Pour un pilote qui travaille ses trajectoires, ou pour valider des lignes rapides, l’intérêt devient déjà plus concret.

Là où les choses se corsent, c’est dans l’implémentation. Garmin a choisi de restreindre l’enregistrement 5 Hz aux profils Enduro MTB et Descente, et uniquement en descente. Et encore : en Enduro, il faut manuellement basculer entre Montée/Descente avec le bouton Lap. Si on oublie de passer en “Descente”, pas de 5 Hz. Le mode Descente est sans doute l’une des fonctions les plus pertinentes du Edge MTB : dès que la pente bascule franchement, l’appareil ouvre un nouveau run, compte les descentes et active automatiquement l’enregistrement 5 Hz. Simple, transparent, efficace. L’héritage du ski alpin est évident et l’adaptation au vélo fonctionne très bien : on obtient un découpage propre, lisible, exploitable dans Garmin Connect sans avoir besoin de tourner trois fois dans les menus.

Ce fonctionnement donne parfois l’impression d’un prototype logiciel sorti un peu tôt : la fonction est là, elle fonctionne, mais on passe trop facilement à côté si l’on n’est pas extrêmement rigoureux dans les réglages. Lors de notre test, il nous est arrivé d’oublier de basculer en mode « Descente » sur un profil Enduro, et toute la section engagée s’est retrouvée enregistrée en mode classique. Frustrant.

Enfin, il faut mentionner le coût énergétique : activer le 5 Hz divise quasiment par deux l’autonomie (26 h →14 h). Rien d’anormal pour un enregistrement cinq fois plus dense, mais il faudra en tenir compte pour les grosses journées en montagne.

Reste que cette technologie pourrait bien marquer un tournant. Même si les bénéfices sont aujourd’hui subtils, on imagine très bien que dans quelques années, le 5 Hz — ou plus — devienne la norme. Pour l’instant, le Edge MTB inaugure quelque chose de prometteur, mais pas encore totalement mature.

Portes de chronométrage

Autre nouveauté majeure du Edge MTB : les portes de chronométrages, une fonction pensée pour recréer de “vrais” chronos de sections, un peu comme si l’on installait un système de type Coupe du monde dans son bois local. Le principe est simple : on définit un point de départ, puis jusqu’à dix portes intermédiaires, et le GPS chronomètre chaque split en affichant en temps réel son avance ou son retard sur son meilleur run. Dit comme ça, c’est très séduisant – et, dans les faits, c’est aussi l’une des fonctions les plus amusantes du compteur.

Mais l’implémentation actuelle manque encore de maturité. Première contrainte : la création des portes ne peut se faire que sur le GPS lui-même, sur place. Impossible d’utiliser Garmin Connect ou d’importer un fichier. Garmin justifie ce choix par la nécessité d’une précision absolue… mais on aurait tout de même apprécié un minimum de flexibilité, ou au moins la possibilité de préparer le tracé à la maison avant de le finaliser sur le terrain.

Une fois les portes définies, le système fonctionne plutôt bien : un bip au passage du départ, un écran dédié qui affiche le split en direct et les écarts, puis un récap’ clair à la fin du run. Sur des trails que l’on roule souvent, c’est un excellent outil pour travailler une section précise, comparer des lignes, ou simplement se tirer la bourre entre copains. Clairement, c’est fun… et addictif.

 

En revanche, l’ergonomie pèche par moments. Il faut manuellement activer la session de « Portes chronos » avant chaque tentative, ce qui casse un peu la spontanéité. On rêverait d’une approche façon Strava Live Segments, où les portes s’activent automatiquement lorsqu’on approche du tracé défini. Autre étrange omission : impossible de voir le nom des segments dans le récap final, ce qui devient vite déroutant si l’on a créé plusieurs circuits maison. Bref, cette fonction est une très bonne idée, déjà intéressante en pratique, mais qui réclame encore quelques ajustements pour devenir un véritable outil d’entraînement moderne et intuitif. Garmin a posé les bases, il reste à polir l’expérience utilisateur.

Verdict :

Difficile de classer clairement ce nouveau Edge MTB dans la galaxie Garmin. D’un côté, l’appareil inaugure plusieurs fonctionnalités réellement pertinentes pour la pratique du VTT : enregistrement 5 Hz, modes Enduro / Descente dédiés, portes chrono… autant d’outils qui enrichissent la sortie et poussent l’analyse un cran plus loin. À ce titre, le Edge MTB joue parfaitement son rôle de laboratoire : c’est lui qui ouvre la voie.

Mais c’est justement là que les choses se compliquent. Toutes ces nouveautés logicielles sont déjà annoncées sur le Edge 1050 et 850/550 (MAJ 28.20)… Une fois cette étape franchie, qu’est-ce qui justifie encore un modèle “MTB-only” ? Son format compact, sa coque renforcée et ses boutons généreux ? Sans doute. Mais on ne peut s’empêcher de penser que Garmin aurait pu aller plus loin, notamment en proposant un véritable remplaçant moderne au Edge 130 Plus, très attendu des riders qui veulent un GPS simple, petit, solide et efficace. En l’état, le Edge MTB ressemble à une plateforme d’expérimentation : ambitieuse, pertinente, mais encore un peu brute. Certaines fonctions demandent un affinage (l’activation du 5 Hz en Enduro, les Portes chrono manuelles, le foisonnement d’alertes par défaut), et son positionnement tarifaire le rapproche dangereusement de modèles plus polyvalents.

Pour plus d’informations : https://www.garmin.com/fr-BE/p/1600117/

Par Adrien Protano