Dream Build | Specialized Epic Evo S-Works : l’heure du bilan - Epic Evo 2021 VS Stumpjumper 1981, inauguration sur le Roc d'Azur

Par Olivier Béart -

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Dream Build | Specialized Epic Evo S-Works : l’heure du bilan - Epic Evo 2021 VS Stumpjumper 1981, inauguration sur le Roc d'Azur

Vous avez été plus de 2000 à nous livrer votre vision de ce que serait le « down-country » de vos rêves, sur base d’un magnifique cadre Specialized Epic Evo S-Works. Il est maintenant temps de vous dévoiler notre version de ce montage, qui suit largement mais pas entièrement les grandes tendances dégagées lors de notre enquête. Et surtout, de vous expliquer les raisons de nos choix et de les confronter à la réalité du terrain après un peu plus d’un mois d’essai. En selle pour un article en forme de triptyque avec le montage de la bête, les premiers tours de roues au Roc en compagnie d’un des premiers Specialized Stumpjumper produits il y a 40 ans, et enfin le test complet sur nos terrains de jeu habituels !

Epic Evo 2021 VS Stumpjumper 1981, inauguration sur le Roc d’Azur

Une fois le vélo monté, en vrais passionnés, nous étions comme des gamins, impatients d’essayer ce tout premier vélo Dream Build de Vojo ! Et, peu avant le Roc, une proposition originale et intéressante est arrivée par l’intermédiaire de Julien Rebuffet, bien connu pour son action au sein de la Mountain Bikers Foundation, mais qui est aussi un passionné de VTT vintage et un des membres actifs de l’assos Génération Mountainbike qui réunit des collectionneurs et des passionnés de l’histoire de notre sport.

Il se trouve que Julien détient dans sa collection une pièce majeure : un des 500 premiers Specialized produits, datant de 1981 ! Au-delà du fait qu’il s’agit d’un des tout premiers vélos au grand « S », et qu’il y en a ensuite eu des millions d’autres car la marque est devenue un des plus gros acteurs mondiaux du vélo haut de gamme, le Stumpjumper est aussi considéré comme le tout premier vélo de série au monde.

Il était donc intéressant et amusant, 40 ans plus tard, de le confronter à l’une des toutes dernières productions de Specialized et de rouler ensemble le Roc d’Azur sur ces deux machines extrêmes chacune dans leur genre.

D’un côté, de l’acier, pas de suspensions, des freins à patin assez rudimentaires (il n’existait pas encore vraiment de composants spécifiques pour le VTT à l’époque), et de l’autre un tout suspendu en carbone avec des freins à disque. « Par contre, j’ai plus de vitesses que toi », me fait malicieusement remarquer Julien. Eh oui, 3 plateaux et 6 pignons, cela fait bien 18 vitesses sur le papier, quand je n’en ai que 12 avec mon mono-plateau et mon énorme cassette. Mais moi, j’ai de l’électronique sans fil, na !

Julien a tout de même fait une entorse au « tout d’époque » : les pneus. En effet, cela n’a pas de sens et c’est même dangereux de rouler avec des gommes de 40 ans, fragiles et complètement sèches. Même équipé de pneus récents (à flancs beige tout de même pour rester dans le look d’époque), crever demeure la plus grande peur de Julien qui reste équipé de chambres à air. Finalement, cette crainte va s’avérer infondée mais notre homme parle d’expérience et on se souvient tous qu’on crevait beaucoup, beaucoup plus avant que le tubeless débarque dans le VTT au début des années 2000.

Par contre, notre homme a poussé le vice jusqu’à s’équiper d’époque pour le casque, la grosse banane Chouinard (ancêtre de Patagonia) et les chaussures Five Ten !

Tout au long du parcours, Julien et son Stumpjumper de 1981 attirent énormément de sympathie et d’encouragements. Et l’ancêtre vole complètement la vedette à notre Dream Build qui passerait presque inaperçu à côté ! Il faut dire qu’en plus, Julien, qui est par ailleurs moniteur VTT, a un fameux coup de guidon et une certaine habitude de rouler avec des vélos anciens. En côte, j’arrive à le suivre et même parfois à le distancer légèrement quand c’est très technique, mais notre ami n’est jamais bien loin.

Dans la fameuse descente du Fournel, l’applaudimètre s’emballe à nouveau ! Julien et son Stump’ de 40 balais se paient non seulement le luxe de tout faire avec style sans mettre pied à terre, mais en plus de dépasser plusieurs autres concurrents.

Clairement, tout est plus facile, plus relax pour moi et je peux me permettre des lignes encore un peu plus engagées au guidon de l’Epic Evo, mais Julien n’a pas choisi la ligne la plus soft non plus.

Quel est le secret ? Est-ce vraiment Julien qui est un extraterrestre ou bien le vélo est-il encore dans le coup malgré ses 40 balais ? Pour en avoir le cœur net, rien de tel qu’un petit échange des montures ! Et là, une surprise de taille m’attend au niveau de la géométrie : j’ai l’impression d’avoir des points d’appui très similaires à ceux de l’Epic Evo. Bien sûr, c’est obtenu autrement, avec de petites roues, une grande douille de direction et un cintre très relevé, presque comme sur un BMX, pour le Stumpjumper, mais la géométrie me semble vraiment d’actualité et me donne beaucoup de confiance.

Au final, je me dis que c’est dans les années 90 et jusque début 2000 qu’on est complètement parti en vrille, avec des vélos de XC hyper raides et des géométries extrêmement « nez dans le guidon », tout cela parce que ça donnait une illusion de performance. Alors que les vélos pionniers comme ce Stumpjumper premier du nom, mettaient le fun et le plaisir de pilotage en tête de leurs priorités.

Bon, le freinage est limite et on parlera plus de ralentisseurs que de vrais freins, et les pédales offrent une accroche très réduite pour mes chaussures pourvues de cales pour pédales automatiques (dont on ne parlait pas encore à cette époque-là), mais même dans les portions raides où plein d’autres gars passaient à pied, je me suis senti en confiance, avec un vélo qui ne me donnait pas du tout l’impression de vouloir m’éjecter à chaque cassure ou portion plus raide.

Dans le défoncé, pas de miracle non plus et il est impossible d’aller aussi vite qu’avec un vélo actuel, mais le cadre acier montre tout de même une très belle capacité d’absorption des vibrations et il permet tout de même d’arsouiller un peu. J’ai par contre eu beaucoup plus de mal avec la transmission et les manettes non indexées qui imposent des mouvements très précis peu compatibles avec le pilotage d’un VTT dans des zones cassantes…

De retour sur l’Epic Evo, c’est d’ailleurs la douceur et la précision de la transmission Sram AXS que j’apprécie le plus. La familiarisation avec les originales commandes de type triathlon se fait aussi très facilement et naturellement. Je n’en dirai pas autant de la commande de la tige de selle télescopique, dont l’activation ne m’a pas du tout semblé naturelle et qui m’a donné pas mal de fil à retordre sur ce premier ride. Une question d’habitude ? Nous verrons dans la troisième partie de cet article avec le test plus longue durée.

Pour le reste, l’Epic Evo est une machine assez bluffante de facilité. La prise en main est immédiate et les réglages de suspension très simples. Sans le blocage automatique Brain sur les suspensions, on a l’impression qu’il manque un petit quelque chose à cet Epic, mais force est de constater que son rendement est excellent et qu’on n’a pas l’impression de perdre d’énergie. Avec un poids de 9,8kg pédales comprises, notre Dream Build est une petite fusée en côte et un monstre de facilité qui compense bien ma forme physique très limite du moment. Sur le sol rocailleux du Roc d’Azur, les gros pneus et les jantes de 30mm font aussi merveille tant en terme d’accroche dans les montées raides (où je n’ai pas dû mettre une seule fois pied à terre) que dans les descentes cassantes où on peut lâcher les freins sans arrière-pensée et sans craindre la crevaison à chaque rocher.

Du côté du Stumpjumper, le vénérable ancêtre a très bien tenu le coup ! Aucun souci technique à déplorer, pas même une crevaison ! Et pourtant, le pilote n’a pas ménagé sa monture et a même donné quelques leçons de pilotages à d’autres bikers pourtant équipés de machines plus récentes. Comme quoi, peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse… et le moins qu’on puisse dire c’est qu’au guidon de ces deux machines, nous avons tous deux éprouvé des sensations différentes mais intenses.

Notre petite aventure touche déjà à sa fin, et si nous devons laisser avec regret Julien repartir avec son Stumpjumper très surprenant pour son âge, nous n’allons pas nous plaindre car nous allons pouvoir repartir avec l’Epic Evo et poursuivre le test sur nos terrains de jeux habituels, dans les conditions souvent difficiles que nous réserve l’hiver belge.

Rendez-vous à la page suivante pour découvrir nos conclusions après un essai plus poussé >>>

ParOlivier Béart