Test | Quarq Shockwiz : les suspensions, c’est pas sorcier

Par Christophe Bortels -

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Test | Quarq Shockwiz : les suspensions, c’est pas sorcier

Le Quarq Shockwiz est un petit boîtier électronique conçu pour nous aider à optimiser le réglage de nos suspensions à air. Mais est-il facile à utiliser et, surtout, est-il utile et fiable ? Voici notre verdict après plusieurs mois en sa compagnie  :

Il s’est finalement passé peu de temps entre la campagne de financement participatif sur Kickstarter pour le développement du Shockwiz en 2015, son acquisition par Sram en 2016 et la commercialisation début 2017. C’est donc il y a un peu plus d’un an que nous avons pour la première fois pu mettre la main sur ce petit boîtier, qui nous a depuis servi à peaufiner les réglages de bon nombre de fourches et amortisseurs. Proposé dans un premier temps à plus de 400€, le Shockwiz a vu son prix baisser récemment pour passer à 349€ (ou 399€ pour la version directmount spécifique pour la fourche inversée RockShox RS-1).

Le principe du Shockwiz est en soi assez simple : connecté à la suspension via un petit flexible qui se visse sur la valve de la chambre d’air, il analyse en permanence (100 fois par seconde) les données de pression et de course de la suspension. Le système n’est donc pas compatible avec les fourches et amortisseurs à ressort, ni avec certaines suspensions pneumatiques particulières comme les Dual Position de RockShox, ou encore les Ohlins RXF et leurs deux chambres positives. Toutes les incompatibilités sont détaillées sur cette page du site officiel.

L’app, coeur du système

Une fois installé sans difficulté particulière sur la suspension, le Shockwiz doit avant tout faire « connaissance » avec la suspension via une phase de calibrage qui consiste en une succession de manipulations : étendre la suspension à fond et la maintenir dans cette position quelques secondes, puis la comprimer totalement et maintenir, ainsi de suite, avant de finalement gonfler la chambre, comprimer quelques fois à 50% de la course, étendre au maximum à nouveau, et voilà. L’opération est réalisable seul, mais certaines suspensions étant difficiles à maintenir totalement détendues ou comprimées, on vous conseille de faire ça à deux.

Pour le reste, pas de panique, toute la procédure est clairement expliquée via l’application Shockwiz pour smartphone qui vous guide pas à pas. On ne l’avait pas encore précisé, mais le Shockwiz travaille en effet de concert avec une app gratuite (dispo pour iOS ou Android), c’est d’ailleurs là que toute la magie opère puisque des algorithmes transforment les données acquises en statistiques et en suggestion de réglages que l’on retrouve sur l’app. Nous y reviendrons un peu plus loin…

En selle !

C’est enfin le moment d’entamer l’acquisition de données… et donc de rouler ! A ce stade, c’est surtout l’onglet principal de l’application qui nous intéresse. Il reprend notamment la pression dans la suspension, la course (en %) en temps réel, le degré de confiance en les données acquises jusque là et surtout il nous suggère le type de terrain à rouler. Au lancement d’une session, on nous demandera de simplement « commencer à rouler », puis les recommandations se feront plus précises : « pédalage », « racines et roches », « sauts et marches », etc. Le but est ici que la suspension puisse rencontrer une grande variété de cas de figures et de « difficultés » afin que les données acquises soient nombreuses et variées, et donc les suggestions de réglages pertinentes.

Le Shock Tuning Score

Quand la confiance est de 100% (il a acquis assez de données) et que « tout est correct » (on a suffisamment varié les terrains), on peut enfin se pencher sur la valeur indiquée dans le cadre « nombre de données acquises », qui est de 76 dans l’exemple ci-dessus. Comment ça, il n’a pas encore acquis toutes les données nécessaires ?! Il s’agit en fait d’une traduction un peu maladroite, les choses sont plus claires en anglais : Shock Tuning Score. C’est donc un score sur 100 qui reflète la qualité et l’efficacité des réglages actuels. 76 est ici un résultat plutôt moyen, le but étant évidemment de tendre vers les 100/100 synonymes de réglages parfaits… Précisons que ce score n’est pas figé, il évolue tant qu’on continue l’acquisition de données lors d’une même session, et il peut même parfois considérablement varier, passant d’un excellent score de 96/100 à moins de 80 en une ou deux descentes seulement. C’est à la fois une bonne chose puisqu’on se dit qu’il affine sans cesse ses résultats pour arriver à une certaine « vérité », mais ça peut être déstabilisant quand on pensait avoir obtenu un bon score alors que ce n’est finalement pas le cas.

Question de style

Ce score varie aussi en fonction d’un autre facteur : le « style de réglage » choisi. Certains vététistes préfèrent une suspension souple, d’autres un feeling plus efficace typé race avec une suspension qui reste bien haute, ou encore un compromis entre les deux. L’app permet donc d’opter pour différents styles voire même, c’est une nouveauté de la dernière mise à jour, de personnaliser ce style. Des quatre styles de base présents au lancement du Shockwiz (Equilibré, Joueur, Efficace et Agressif), seuls les deux premiers demeurent dans la version actuelle. L’Equilibré est le setting de base et permet d’obtenir une suspension que l’on pourrait résumer par « bonne partout », tandis que le style « Joueur » rajoute un peu de pep’s, de vivacité, au feeling de la suspension.

Les choses se compliquent un peu quand on se plonge dans les styles personnalisés et qu’on peut peaufiner ses préférences en termes de raideur et de vivacité. Planté et coquelicot ? Non, vous ne venez pas d’ouvrir votre app de jardinage… Encore un petit souci de traduction, le terme anglais « poppy » voulant dire « vif » ou « vivant », mais aussi… « coquelicot » ! On comprend mieux maintenant. Bref, ces options sont intéressantes et permettent d’obtenir un score non pas absolu, mais qui correspond à votre manière de rouler et à ce que vous recherchez comme feeling. Le style peut être choisi et modifié quand vous le souhaitez, et ces changements se reflètent directement dans le Tuning Score indiqué par l’app.

Un peu de patience…

Vu le nombre d’options possibles et le score qui évolue avec l’acquisition de données, on vous suggère donc de prendre votre temps, de faire de longues sessions représentatives de vos sorties habituelles et de continuer à rouler et à varier les terrains, même lorsque tous les indices de satisfaction sont au vert en homepage de l’app. Car ce Shock Tuning Score n’est finalement qu’une invitation à basculer vers l’onglet « suggestions » de l’application, les deux étant étroitement liés. Un mauvais score sera synonyme de nombreux ajustements à réaliser alors qu’un excellent score de 96 par exemple voudra généralement dire qu’il n’y a qu’un seul réglage à modifier légèrement.

Concrètement, on retrouve six axes de travail dans cet onglet suggestions :

  • Pression pneumatique de référence
  • Courbe de ressort pneumatique
  • Rebond à faible vitesse
  • Rebond à haute vitesse
  • Compression rapide
  • Compression lente

Votre suspension ne permet pas de dissocier les réglages de rebond à haute et basse vitesse ou n’offre pas l’ajustement des compression rapides ? Pas de problème, l’app vous permet de faire le ménage en enlevant les réglages qui ne vous seront pas utiles et de ne garder par exemple qu’une suggestion de « détente » au lieu des deux rebonds haute et basse vitesse. Pour info, cette option n’était pas disponible au lancement du Shockwiz, on voit donc là tout l’intérêt d’un système par app qui offre un caractère très évolutif en permettant des mises à jour. Le firmware (logiciel interne) du boîtier peut quant à lui également être mis à jour directement via l’application.

Une chose après l’autre

La lecture de l’onglet suggestions est simple : curseur au milieu (vert) ? Le réglage est bon. Curseur décalé d’un cran à gauche ou à droite (jaune) ? Un petit ajustement (5% de pression, un ou deux crans, un spacer) est nécessaire. Curseur décalé de deux crans à gauche ou à droite (rouge) ? Un ajustement plus important s’impose ! Encore une fois, l’app est très bien faite et un clic sur le réglage ouvre une page riche en infos sur ce qui est à corriger et de quelle façon.

Précision importante : il y a une hiérarchie à respecter quand vient le moment d’ajuster les réglages comme suggéré ! En clair, pas question de tout changer d’un coup, on modifie une seule chose à la fois en commençant par la plus haute dans la liste. L’app vous dit de modifier la pression d’air mais aussi le rebond et les compressions basse vitesse ? Commencez par l’air uniquement, relancez une session et entamez une nouvelle phase d’acquisition de données. Attention, il s’agit en quelque sorte d’une remise à zéro et en lançant une nouvelle session vos données de la session précédente ne sont plus prises en compte pour le Tuning Score et les suggestions.

C’est donc reparti pour un tour (indice de confiance, etc), et on réalise alors que le Shockwiz nécessite temps et patience pour se montrer vraiment intéressant et pertinent… Précisons qu’après avoir essuyé quelques reproches au tout début pour le caractère éphémère des sessions, Quarq a rapidement revu sa copie en lançant une fonctionnalité « Profils », qui permet de garder une trace des sessions précédentes en enregistrant les réglages, suggestions, etc d’une session particulière, et de retrouver facilement et rapidement les réglages pour un type de terrain ou une trace en particulier par exemple.

Suggestions vs feeling

Mais au final, les suggestions sont-elles pertinentes ? Eh bien globalement oui ! L’app suggère de retirer quelques psi alors qu’on est très content du feeling de cette fourche qu’on roule depuis un moment déjà ? Bon allez… Et en effet, on gagne encore de la sensibilité sur les petits chocs, bien vu ! Un ou deux clics de moins en détente ? Ah oui tiens ! Le Shockwiz se montre donc pointu et permet de valider ou de peaufiner ses réglages actuels, mais de l’autre côté du spectre des utilisateurs il aidera aussi à dégrossir les réglages quand on découvre les joies de la suspension et qu’on ne sait pas vraiment quoi faire de toutes ces commandes…
Il faut toutefois garder à l’esprit que ce sont des algorithmes qui sont à l’oeuvre ici, et qu’aussi puissants et pointus qu’ils soient, c’est au final toujours le feeling de l’utilisateur sur le vélo qui doit avoir le dernier mot. Il faut donc trouver un juste équilibre : être ouvert aux suggestions et ne pas s’accrocher à ses certitudes, mais aussi prendre du recul avec les chiffres s’ils ne sont pas totalement convaincants une fois mis à l’épreuve du terrain.

Verdict

Le Shockwiz est un outil abouti, très intéressant et pointu qui servira aussi bien au pilote chevronné qu’au pratiquant lambda, pour peu qu’on prenne son temps et qu’on respecte les consignes de l’app en matière d’acquisition de données et de hiérarchie des suggestions de réglages. Malgré sa récente baisse de prix, il n’est hélas pas vraiment à la portée de toutes les bourses, ce qui le réserve donc (à l’achat du moins) aux compétiteurs et passionnés mais aussi, ou surtout, aux vélocistes qui peuvent le proposer à la location ou comme service à l’achat d’un vélo, d’une fourche ou d’un amortisseur. Au final, le vrai point fort du Shockwiz est sans aucun doute son app mise à jour régulièrement qui offre au système un caractère évolutif particulièrement intéressant.

ParChristophe Bortels