Test nouveauté | Specialized Diverge 4 : un gravel qui veut tout faire

Par Adrien Protano -

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Test nouveauté | Specialized Diverge 4 : un gravel qui veut tout faire

Depuis plus de dix ans, le Diverge s’est imposé comme l’une des références du gravel. Specialized revient aujourd’hui avec une quatrième génération annoncée comme la plus polyvalente et aboutie de la lignée. Au menu : plus de confort, plus d’espace de rangement et une géométrie revue pour répondre à l’évolution de la discipline. Nous avons eu la chance de l’essayer en avant-première. Présentation et premiers tours de roue : 

Lancé en 2014, le Diverge a accompagné la montée en puissance du gravel, oscillant entre machine de course et vélo d’aventure longue distance. Un segment sur lequel Specialized a souvent voulu faire office de précurseur avec des idées fortes (Future Shock, intégration Swat…), et notamment avec sa déclinaison Diverge STR : Specialized Diverge STR 2023 : un gravel en apesanteur

Châssis : (r)évolution discrète ?

Le Diverge 4 conserve au premier regard une silhouette fidèle à l’ADN du modèle : lignes tendues, tubes affinés (mais tout de même plus imposants que ceux du Crux) et une identité visuelle immédiatement reconnaissable.

Le cadre est fabriqué en carbone Fact 9r, annoncé comme le meilleur combo légèreté/filtration des vibrations de la marque à ce stade. On notera qu’un cadre en aluminium est également proposé par Specialized, on y revient plus bas.

Mais Specialized n’a pas simplement reconduit la recette précédente, le cadre a été largement revu pour répondre aux exigences du gravel moderne, où les terrains deviennent de plus en plus variés.

La première évolution marquante se situe au niveau du dégagement des pneus. Le Diverge 2025 accepte désormais des sections de pneus jusqu’à 50 mm en roues de 700c avec un dégagement suffisant pour toutes les conditions (8 mm de chaque côté, ce qui laisse songer à des pneus allant jusqu’à du 55mm et un dégagement plus réduit). Specialized explique également qu’il est possible de monter des pneus VTT, avec des sections allant jusqu’à du 2.2″.

Specialized a d’ailleurs travaillé la forme des bases pour maximiser ce dégagement sans sacrifier la rigidité de l’arrière. « On peut monter des pneus de 50 mm de section, en gardant une « clearance » de 8 mm de chaque côté, de quoi permettre un usage même par temps boueux », ajoute Miles Hubbard, product manager route et gravel chez Specialized.

Autre point important : l’adoption de la patte universelle UDH (Universal Derailleur Hanger). De quoi permettre une compatibilité accrue avec les transmissions modernes, notamment les groupes T-Types de chez Sram (cf. Test | Sram Eagle AXS 2023 : sans égal), à l’image de notre modèle d’essai équipé du récent groupe Sram Force AXS.

Impossible de passer à côté tant la marque insiste sur ce point : la boîte à gants à été améliorée pour permettre un gain de l’espace de stockage de 5% et une ouverture qui est 10% plus grande. « C’est plus que toute la concurrence… et pour rappel, nous étions les premiers à avoir une boite à gants », plaisante la marque.

Le passage des câbles et durites a également été revu. Specialized a opté pour une intégration discrète et propre, avec une entrée située sur le haut du tube diagonal. Le choix est clair : allier esthétisme et fonctionnalité, là où certaines marques privilégient parfois uniquement la première option.

Enfin, la base arrière côté transmission a fait l’objet d’un soin particulier. Plus fine et redessinée, en carbone ou en alu selon la version, elle « contribue à la fois au gain de dégagement et à la filtration des vibrations, tout en préservant la rigidité nécessaire pour les relances », selon les termes de la marque.

Suspensions : un gravel suspendu ? Pas tout à fait

La grande nouveauté de ce Diverge 4 se situe au niveau du poste de pilotage, avec l’arrivée du Future Shock 3.0. Si la potence suspendue était déjà présente sur les deux dernières générations de ce modèle, c’est ici la version 3.0 de ce Future Shock, déjà aperçue sur le Specialized Roubaix, qui fait son entrée sur le segment du gravel.

Placé au-dessus de la douille de direction, ce système propose 20 mm de débattement avec un fonctionnement désormais hydraulique. « Contrairement à une fourche suspendue classique, qui alourdit l’avant du vélo et modifie sensiblement sa géométrie, le Future Shock agit directement sous le cintre, sur l’axe de la potence. Résultat : la position du pilote reste inchangée et la direction conserve sa précision, tout en filtrant les chocs venus du terrain », détaille la marque. La fourche, elle, reste une carbone rigide pour conserver toute la réactivité, la légèreté, la précision et le rendement d’un gravel classique.

Specialized avance des chiffres parlants : selon leurs tests, menés en collaboration avec l’Université du sport de Cologne, ce système permet de réduire de plus de 50 % l’intensité des impacts subis par le cycliste. Concrètement, cela se traduit par une fatigue musculaire moindre, une meilleure stabilité sur terrain cassant et une efficacité accrue sur la durée. Les ingénieurs vont même plus loin en affirmant que le gain énergétique peut atteindre 11 watts économisés sur un sol particulièrement défoncé, simplement grâce à une meilleure gestion des vibrations.

Sur cette nouvelle génération, ce n’est pas un Future Shock que l’on retrouve, mais bien trois versions, simplement baptisées 3.1, 3.2 et 3.3. La première, plus simple et qui équipe les versions plus accessibles, est uniquement le système « ressort » là où les versions 3.2 et 3.3 bénéficient d’un amorti hydraulique. La version 3.3  est la seule dotée d’une molette sur sa partie haute (capot de jeu de direction) qui permet de régler la compression sur 5 positions.

À l’arrière, Specialized poursuit la même logique avec la tige de selle Roval Terra. Celle-ci offre une flexion contrôlée allant jusqu’à 18 mm, qui complète parfaitement le travail du Future Shock. Plutôt que de chercher à « suspendre le vélo » comme le font certains modèles concurrents avec des solutions intégrées au cadre, Specialized mise sur une approche plus minimaliste et légère : il s’agit ici de suspendre le pilote, en atténuant directement les secousses ressenties dans les mains et dans le bassin.

Pas question de transformer le Diverge en VTT déguisé, mais bien de l’armer pour les longues distances

Ce choix technique illustre bien la philosophie de la marque : conserver un vélo vif, rigide et performant, tout en ajoutant juste ce qu’il faut de confort pour repousser les limites de l’endurance. Pas question de transformer le Diverge en VTT déguisé, mais bien de l’armer pour les longues distances et les terrains les plus exigeants, sans compromettre sa nervosité.

Géométrie :

Le Diverge 4 adopte une géométrie plus progressive. L’angle de direction est légèrement plus ouvert (71° en taille 54), le boîtier de pédalier abaissé de 5 mm, le reach allongé de 4 à 15 mm selon les tailles et les bases arrière allongées de 5 mm. L’objectif de la marque : offrir plus de stabilité et de confiance dans le rapide et le cassant, sans sacrifier la nervosité dans les portions techniques.

Équipements du Specialized Diverge 2025 :

En haut de la pyramide, on retrouve le Diverge Pro, vitrine technologique de cette nouvelle génération. Avec un poids annoncé de 8,39 kg, il s’inscrit dans la moyenne supérieure des vélos de gravel en général, plus léger qu’une série de concurrents qui acceptent des pneus de 50 mm, mais sans être sur les premières places du classement du segment gravel.

Du côté de la transmission, la marque a choisi le nouveau groupe électronique sans fil Force AXS XPLR de chez Sram, avec un plateau de 40 dents, un pédalier en 172,5 mm en taille 54 (il varie en fonction de la taille), et une cassette de 10-46. On y trouve également un capteur de puissance intégré dans l’axe de pédalier.

Les freins sont du même acabit, avec une paire de Sram Force.

Les roues sont maison avec une paire de Roval Terra CL en carbone affichant 1408 g la paire sur la balance. Elles sont chaussées de pneus Specialized Tracer en 45 mm de section.

On retrouve également du Specialized au niveau de la selle avec la Power Pro Mirror, issue de la technologie d’impression 3D maison. Sa structure en nid d’abeille permet de répartir les pressions et d’absorber les micro-chocs.

Le Specialized Diverge Pro est doté d’un cockpit maison lui aussi, avec une potence Pro SL en aluminium (80 mm en taille 54), associée à un cintre Roval Terra en carbone de 420 mm en taille 54.

Versions, poids et tarifs du Specialized Diverge 2025

La gamme Diverge 4 se décline en de nombreuses versions, histoire de s’adresser aussi bien aux compétiteurs exigeants qu’aux pratiquants à la recherche d’un vélo polyvalent et accessible. En haut du panier, on retrouve le Diverge Pro LTD (9999 €) et ses 8,01 kg, suivi de près par le Diverge Pro (7999 €) à 8,39 kg qui illustre ici cet article.

Viennent ensuite le Diverge Expert (6499 € en Di2 ou 6299€ en AXS – 8,90 kg) et le Diverge Comp (4499 € – 9,70 kg), qui conservent un montage en carbone haut de gamme mais avec des choix d’équipements un peu plus mesurés pour contenir la facture. Le Diverge Sport (3499 €), à 9,95 kg, ferme la marche du segment carbone avec une approche plus rationnelle, tout en profitant du même cadre et de la même philosophie que ses grands frères.

Mais Specialized ne s’arrête pas là et propose aussi deux modèles en aluminium : le Diverge Alloy Comp (2799 € – 10,60 kg) et le Diverge Alloy Sport (2299 € – 10,74 kg). Ces derniers conservent exactement la même géométrie que les cadres carbone, et surtout – grande première sur un cadre alu – ils bénéficient eux aussi du rangement interne SWAT 3.0, un atout pratique pour stocker une chambre à air, une pompe ou des outils.

Specialized Diverge 2025 : le test terrain

Bienvenue dans les collines de Lipica, à la frontière italo-slovène… Un terrain idéal pour découvrir ce nouveau Specialized Diverge, alternant entre longues portions roulantes, chemins blancs parfois cassants et quelques singles techniques à travers les bois.

Notre guide du jour : Monsieur Peter Sagan. « J’aime bien rouler en gravel, mais je dois avouer que je passe beaucoup de temps à m’amuser avec mon nouveau Levo pour le moment (rires) », nous glisse-t-il. Il faut dire qu’au moment de cette présentation du Diverge, le Levo de 4e génération était sorti depuis moins de deux mois seulement : Test nouveauté | Specialized Levo gen 4 : plus puissant, plus malin.

Pour notre mètre 77, c’est sur un modèle en taille 54 que nous avons grimpé. Nous avons également décidé d’échanger la potence de 80 mm de série contre une légèrement plus longue (90 mm). Dès les premiers tours de roues, le Diverge se distingue par sa position équilibrée : on n’est pas couché comme sur un pur vélo de route, mais pas non plus perché façon VTT. C’est une posture qui favorise le rendement tout en restant confortable sur la durée.

Ce Diverge 2025, c’était aussi l’occasion de découvrir ce système Future Shock de chez Specialized (personnellement dirons nous – le reste de la rédaction l’avait déjà côtoyé lors du Diverge STR par exemple : Specialized Diverge STR 2023 : un gravel en apesanteur). Après un premier tour de roues, nous choisissons d’échanger le ressort pour son petit frère plus souple, tout en fermant légèrement la molette de compression sur le haut du système. De quoi profiter de tout le débattement lorsque ça « tape », mais sans que le système ne donne l’impression de pomper lorsqu’on bascule debout sur les pédales.

Sur le terrain, le Future Shock 3.3 se fait complètement oublier… jusqu’au moment d’inattention où l’on ne voit pas venir cet obstacle surprise sur le chemin. De quoi amener une véritable sérénité d’esprit et maximiser le confort ! Nous ne dirons pas que nous ne pouvons plus nous en passer depuis, mais c’est une jolie petite option supplémentaire.

C’est peut-être LA question centrale : dans la dichotomie classique entre gravel « race » et gravel « aventure » que l’on opère actuellement, où se positionne le Specialized Diverge ?

Force est de constater que sur le plan du rendement pur, ce Diverge 2025 n’a pas à rougir. Ça file droit, ça relance (très) bien et on peut facilement tenir des vitesses élevées sans devoir se battre contre le vélo. Le montage haut de gamme de notre version d’essai n’y est pas pour rien – de par son poids moindre et ses équipements haut de gamme pensés pour la performance – et nous serions curieux de mettre à l’essai l’un de ses petits frères plus abordables.

Lors de sections bitumées, on se prend même au jeu d’hausser le rythme et de se chamailler au sein du groupe. « On se voit en haut de l’ascension ! »

Quand le terrain devient plus technique et/ou sinueux, on découvre un vélo joueur et réactif, capable d’enchaîner les virages avec fluidité. On a une machine confortable entre les mains et qui met clairement en confiance. C’est aussi là que se dessine son ADN : le Diverge n’est pas conçu pour élargir artificiellement les frontières du gravel, mais pour offrir une machine rapide, confortable et endurante, capable d’engloutir des kilomètres sans casser le pilote.

Voilà qui colle plutôt bien à la manière de Specialized de positionner ce Diverge : « il n’y a pas une façon binaire de séparer les modèles entre course et confort, c’est plus compliqué que cela. Ça va dépendre des conditions, si le terrain est technique, si la journée est longue… Le Diverge est clairement capable de faire la course, tout comme il pourra apporter du confort sur d’autres sorties. »

Sur les deux journées au guidon du vélo, nous avons passé la première équipé de pneus de 45 mm et la seconde de 50 mm de section. Difficile de se prononcer sur un laps de temps aussi court, mais nous avons eu l’impression que la paire en 50 mm de section ne nous a apporté que des avantages, sans perdre en rendement ou en maniabilité. On a par contre gagné en traction, en confort et en tenue de courbe.

Verdict :

Avec ce Diverge 2025, Specialized ne signe pas une révolution mais une évolution très aboutie : plus de dégagement, un Future Shock 3.0 convaincant, une intégration revue et un comportement qui conjugue rendement, confort et sérénité. Sur le terrain, c’est un gravel vif et rapide, mais qui sait aussi ménager son pilote quand les kilomètres s’accumulent. Les versions haut de gamme séduiront les compétiteurs en quête de performance pure, tandis que les modèles plus accessibles, notamment en aluminium, permettront à un public plus large de profiter de cette philosophie. Bref, Specialized confirme son statut de référence avec un Diverge affûté, polyvalent et prêt à tout avaler, de la course au voyage au long cours.

Pour plus d’information :

Par  Adrien Protano