Test nouveauté | Santa Cruz 5010 & Juliana Furtado : trop polyvalent ?

Par Léo Kervran -

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Test nouveauté | Santa Cruz 5010 & Juliana Furtado : trop polyvalent ?

Santa Cruz continue de décliner son architecture VPP version 3 à travers sa gamme et sans surprise, c’est au tour du 5010 (fifty-ten ? cinquante-dix ? cinq mille dix ? solo ?), le petit 27,5″ joueur de la marque, d’en profiter. Objectif annoncé ? Plus de stabilité et de progressivité, sans effacer le côté joueur et aérien. Nous avons passé trois jours à son guidon, voici nos premières impressions.

Comme tous les autres Santa Cruz à l’exception du Blur dédié au XC, le 5010 adopte donc l’architecture VPP Lower Link, avec un amortisseur placé juste au-dessus du boitier de pédalier. La marque en a profité pour retravailler le comportement et effacer le côté « on-off » de l’ancien 5010, qui consommait très vite son débattement.

Développant toujours 130 mm de débattement, cette nouvelle cinématique se veut plus progressive et devrait renvoyer des sensations similaires à celles des autres vélos de la marque. A l’avant en revanche, le débattement augmente et passe à 140 mm, géré par une Fox 34 ou une RockShox Pike selon les modèles.

On remarque au passage que ce nouveau 5010 affiche des lignes légèrement plus tendues que les autres modèles de la marque. On parle de détails, comme ce décrochage derrière la douille de direction ou cet angle sur le tunnel de l’amortisseur (qui permet aussi d’avoir la place nécessaire pour monter un amortisseur à ressort), mais cela montre que Santa Cruz continue d’affiner son design et il faut s’attendre à voir la marque continuer dans cette direction sur ses prochains modèles.

La géométrie évolue dans la tendance actuelle avec un angle de direction qui perd quelques dixièmes de degrés (66,5° sur l’ancien et 65,7° maintenant), un angle de tube de selle qui se redresse de 1,8° à 2,7° suivant la taille et un reach qui s’allonge de 5 à 15 mm. Conséquence logique de cette allongement, l’empattement gagne entre 20 et 34 mm. Rien de bien révolutionnaire là-dedans et on s’attend surtout à ce que ça rende le 5010 plus facile à prendre en main, avec une meilleure stabilité à haute vitesse.

Plus intéressant, ce nouveau 5010 affiche désormais des longueurs de bases différentes pour chaque taille ! Sur le papier, cela paraît logique pour conserver un bon positionnement du centre de gravité du pilote et le même comportement à travers toutes les tailles, mais toutes les marques ne le font pas (encore), donc on apprécie l’effort.

Santa Cruz a d’ailleurs trouvé un moyen original et économique d’y parvenir puisqu’on retrouve le même bras arrière sur toutes les tailles, du XS au XL. Ce sont en fait les perçages pour les points de pivots sur le triangle avant qui se déplacent. Techniquement, cela devrait aussi affecter le comportement de la suspension arrière mais la marque ne nous a pas fourni de données pour le vérifier et ne communique pas dessus, il est donc impossible de savoir s’il y a une différence sensible ou non de ce côté.

Un petit flip-chip est également présent sur la jonction entre le basculeur et l’amortisseur arrière pour faire varier la géométrie de quelques millimètres et dixièmes de degrés. D’origine, tous les 5010 seront montés avec la pièce en position « High ».

Ce nouveau 5010 sera disponible uniquement en carbone dans un premier temps, avec deux coloris au choix pour 6 montages et 1 kit cadre. On retrouve l’habituelle distinction entre les carbone « C » et « CC » (plus léger et plus haut de gamme), avec 4 montages de 4 399 € à 7 399 € en C et deux modèles en CC, à 7 199 € et 8 399 €. Le cadre sera disponible uniquement en version CC, au prix de 3 099 €.

Enfin, et comme de coutume chez Santa Cruz, le renouvellement d’un vélo entraîne l’évolution de son homologue chez Juliana, la marque sœur dédiée au femmes. Le cadre et les équipements du Furtado sont parfaitement identiques à ceux du 5010, seuls les points de contact (poignées plus fines et selle plus large) et les réglages de suspensions (adaptés pour des poids plus légers) changent.

Contrairement au 5010, un seul coloris est au programme pour le Furtado, cette splendide (c’est très subjectif mais sur les derniers modèles, les coloris des Juliana nous paraissent souvent plus jolis que ceux des Santa Cruz) teinte cuivrée au reflets métallisées parfaitement mise en valeur par notre séance photo sous la pluie. Le Furtado sera disponible en 3 tailles, de XS à M.

Le Santa Cruz 5010 sur le terrain

Pour découvrir ce nouveau 5010, Santa Cruz nous a invités sur les sentiers pour lesquels le vélo est pensé et conçu, c’est-à-dire… le bikepark d’Avoriaz/Super Morzine. Oui, ça peut faire bizarre quand on parle d’un vélo en 130/140 mm, mais pour Santa, le 5010 est avant tout un vélo fait pour s’amuser et prendre de la hauteur sur des modules tracés par l’homme : virages relevés, sauts…

Le rendez-vous était fixé au showroom de la marque, en plein cœur de Morzine, pour faire connaissance avec les vélos avant d’aller rouler. Nous y retrouvons Loïc Delteil, de Santa Cruz, et Jérémie « Aziz » Sevrain, ex-pilote de descente et désormais ambassadeur pour la marque californienne. Chez Vojo, nous sommes deux à avoir fait le déplacement puisque l’idée de cette découverte est aussi de mesurer et comprendre les différences entre ce 5010 et le Tallboy, sorti l’année dernière.

Une fois les machines réglées, direction Avoriaz pour une première journée de roulage qui nous servira également de support pour tourner notre vidéo de cette découverte, à retrouver en bas de l’article. Pas de chance avec la météo, c’est sous une pluie battante que nous montons sur le vélo.

Les premières sensations sont bonnes, le 5010 se prend facilement en main et la géométrie n’a rien d’extrême. Le vélo n’apparaît pas particulièrement joueur aux premiers abords mais on se surprend à ressortir des virages sur la roue arrière sans effort et sans y penser, c’est donc qu’il doit tout de même y avoir quelque chose là-dessous…

Jérémie, habitué à rouler l’ancienne version, fait aussi remarquer que le vélo paraît plus stable et plus progressif que par le passé, il s’affaisse moins dans les appuis ou sur les réceptions. A défaut d’avoir roulé l’ancien et de pouvoir comparer, on peut au moins vous assurer que le vélo réagit bien dans ces situations et qu’on n’a pas l’impression d’être limité par un manque de débattement ou une suspension trop souple.

Et en montée, qu’est-ce que ça donne ? Avec un poids de 13,36 kg dans la version la plus haut de gamme, le 5010 est loin d’être un poids plume. Malgré cela, nous avons été agréablement surpris par son comportement général au pédalage. Le vélo pompe peu tant qu’on reste assis sur la selle et monte bien au train, on peut même se permettre de hausser le rythme sans avoir l’impression de traîner un poids mort. Ce n’est pas un XC bodybuildé, loin de là, mais une vraie pratique trail est tout à fait envisageable avec ce 5010.

Le lendemain, changement de vallée et direction Abondance pour aller rouler sur les trails tracés par Jérémie. Ici, rien à voir avec du bikepark, on est sur du sentier naturel dessiné à la main avec une pelle, une brouette et beaucoup de temps. Seul point commun, la météo puisque c’est toujours la pluie qui nous accompagne, histoire de rendre les racines et les rochers encore un peu plus glissants.

Le terrain est très différent de celui de la veille mais le 5010 y est là aussi parfaitement à l’aise, signe d’une belle polyvalence. Le vélo est très facile à placer et une fois qu’on a pris la mesure du trail et des ses petits pièges, on commence à jouer pour de vrai avec le terrain.

Grâce à l’allongement de la géométrie et la suspension revue, le vélo reste parfaitement sain en toutes circonstances, même dans la pente ou lorsqu’on prend un peu de vitesse sur ces sentiers tout sauf lisses.

Seul point négatif sur ce sol exigeant, le pneu avant. Commun à tous les montages, c’est un Maxxis DHR II en gomme MaxxGrip, une nouveauté sur ce modèle mais qui ne change finalement pas grand-chose. Nous n’avons rien contre le DHR II en montage arrière mais à l’avant, il nous paraît franchement limité sur des sentiers naturels, que ce soit sur le sec ou le mouillé. Son comportement est correct sur l’angle mais il manque de grip au centre et ne « mord » pas le sol. En bikepark et sur sol très dur, c’est une bonne chose pour avoir des appuis francs, mais ici, cela rend tous les freinages et entrées en courbes délicats.

Quid du positionnement face au Tallboy ? Lors de sa sortie l’année dernière, ce dernier nous avait impressionnés par ses capacités en descente pour un vélo avec si peu de débattement. Malgré cela, le Tallboy reste un vélo relativement sérieux, plus porté vers l’efficacité que le jeu.

Dans le 5010, on retrouve une bonne partie des traits de caractère du Tallboy, aussi bien en montée qu’en descente. Les petites roues apportent néanmoins un petit quelque chose qui rend le vélo plus facile à placer et qui incite à pomper, à jouer avec les mouvements de terrain pour accélérer, là où le grand frère préfère parfois se laisser porter par le sentier. Le côté « bad boy » du Tallboy, d’une certaine façon.

Le dernier jour, retour du beau temps et retour sur Avoriaz pour profiter de chemins secs. En alternant boulevards alpins et petits sentiers de racines, on finit de prendre la mesure de la polyvalence du 5010. Dynamique et parfaitement à l’aise sur les pistes tracées à la pelleteuse, il reste sain et réactif sur les sentiers plus étroits et scabreux où il faut sans cesse alléger, sauter, éviter pour ne pas se retrouver sur le dos.

Pour finir, on vous laisse avec un petit portfolio des meilleurs actions de Jérémie sur ces trois jours de découvertes. Nous n’avons pas la même pratique du VTT ni le même niveau mais visiblement, ce n’est pas ça qui va faire peur au 5010…

Avant d’en arriver à la traditionnelle conclusion, vous pouvez également retrouver notre avis sur ce nouveau 5010 et sa place face au Tallboy en vidéo ci-dessous.

Vous l’aurez compris, ce nouveau 5010 nous a surtout marqués par sa polyvalence. Santa Cruz le présente et le vend comme le vélo idéal pour jouer avec le terrain et prendre la voie des airs mais cela ne nous a pas sauté aux yeux comme avec d’autres vélos. Il sait le faire, aucun doute là-dessus, mais si votre préférence va aux trails naturels et technique, il y sera tout aussi bien. Même sur de la simple balade, le 5010 semble chez lui et vous n’aurez pas l’impression d’être assis sur une boule de nerf ou, à l’inverse, un tank qui n’attend que la descente. Bon, voire très bon partout, le 5010 réagit au doigt et à l’œil et impressionne mais comme toujours, la polyvalence a un inconvénient : on peut reprocher au vélo de manquer de caractère. Il est possible que ce soit une question de réglages et que nous n’ayons pas, au cours de nos quelques heures de roulage, trouvé celui qui révèlera le vélo, mais on aurait aimé sentir encore plus ce côté joueur et un peu fou, type BMX tout-suspendu, sur lequel Santa Cruz communique.

Plus d’informations : santacruzbicycles.com

Photos Keno Derleyn

ParLéo Kervran