Test nouveauté e-bike | Deviate Kurgan : un Ecossais aux muscles saillants
Par Olivier Béart -

Deviate est une petite marque Ecossaise, fondée par un guide et un ancien ingénieur de chez Prodrive, qui tous deux rêvaient de concevoir leurs propres vélos. Et surtout, qui pensaient qu’il était possible de faire différent et encore mieux que ce qui existait jusqu’alors sur le marché. Le Kurgan est leur premier e-bike et Vojo a eu la chance de pouvoir tester cette rareté.
Deviate est une marque assez jeune, puisqu’elle a été fondée en 2016 par Chris Deverson et Ben Jones. Le premier est un ingénieur qui a travaillé dans la compétition automobile chez Prodrive, et le second est un guide qui passe la majorité de son temps sur un vélo. Les deux étaient persuadés qu’il y avait encore moyen d’amener de nouvelles choses dans le monde du VTT, avec la volonté à la fois d’innover, mais aussi de créer des vélos hyper solides et fiables, qu’on peut prendre plaisir à rouler fort tout en gardant l’esprit léger.
Si leur premier vélo était encore plus original, avec non seulement une suspension high pivot maison et en plus une boîte de vitesse intégrée Pinion, ils sont revenus depuis à des transmissions classiques, tout en restant fidèles à leur suspension fétiche (on en parle plus loin). La gamme est composée de trois modèles : le Highlander en 145mm de débattement arrière et 160mm avant pour un usage Trail, le Claymore en 165/180mm et leur tout premier e-bike, le Kurgan, que nous avons eu l’occasion de tester ici.
Si Deviate commence à avoir une belle réputation dans les pays anglo-saxons, où plusieurs de nos confrères comme Pinkbike, Singletrack ou GMBN ont élu le Highlander ou le Caymore parmi leurs vélos favoris, la marque reste encore peu connue sur le continent. Il faut dire que la production reste de petite taille et qu’on est sur du haut de gamme.
Pour la petite histoire, c’est grâce à Levy Batista que nous avons eu l’occasion de rouler sur le nouveau Kurgan ; un vélo que le pilote français a roulé au championnat du monde e-EDR cette année, en lieu et place de son habituel Rocky Mountain dont la motorisation n’était pas homologuée pour cette course. Avant que le vélo ne reparte pour l’Ecosse, il nous a laissé son Kurgan pendant une grosse semaine pour que nous puissions tester cet oiseau rare qui a été présenté en août dernier et dont les premiers exemplaires de production arriveront en janvier 2026.
Le Deviate Kurgan sur papier
Les deux têtes pensantes de Deviate croient dur comme fer aux vertus des suspensions high pivot et Chris a développé une cinématique spécifique qui équipe désormais toute leur gamme. Les avantages : pas de pedal kickback, donc une suspension très active tout le temps ; d’excellentes performances au freinage (suspension qui reste active et qui ne modifie pas la géométrie) ; et un trajet de la roue arrière qui allonge les bases au plus la suspension rentre dans le débattement, de sorte qu’on garde la maniabilité des bases courtes dans les courbes lentes et serrées tout en ayant la stabilité d’un vélo plus long dans le défoncé.
Malgré la présence d’une assistance électrique qui complique un peu les choses au niveau du placement des points de pivot et biellettes, pas question pour eux d’abandonner ce qui fait une bonne partie de l’ADN de leur marque sur leur premier e-bike. Ils ont donc réussi à conserver leur cinématique fétiche tout en faisant de la place pour le moteur Bosch Performance CX, dans sa dernière version avec 100Nm de couple et 750W de puissance.
Le Deviate Kurgan se positionne comme un gros e-enduro avec 165mm de débattement arrière et 180mm à l’avant. Mais, comme nous le verrons plus loin sur le terrain, ce beau gros bébé sait se montrer bon rouleur et plus polyvalent que ce que les chiffres pourraient laisser penser.
Comme, chez Deviate, on aime faire des vélos capables de rouler longtemps, un travail important a aussi été fait pour pouvoir accueillir la plus grosse batterie Bosch de 800Wh, tout en conservant un bon centrage des masses (il est aussi possible de monter une batterie de 600Wh pour encore alléger l’ensemble). Le tube diagonal est assez reculé par rapport à la douille de direction et plutôt droit.
La protection du moteur s’ouvre avec deux vis et pivote pour permettre de retirer facilement la batterie pour la mettre en charge. On dispose aussi de deux fixations pour porte-bidon afin de pouvoir mettre le range extender Bosch en bas (+250Wh) tout en pouvant continuer à prendre une gourde avec soi. C’est assez rare que pour être souligné.
On ne l’a pas encore précisé même si cela se devine assez facilement : Deviate a beau être une petite marque, tous ses cadres sont entièrement en carbone. Et le Kurgan ne déroge pas à la règle. On remarque aussi que les Ecossais n’ont pas lésiné sur les protections au niveau de la chaîne afin que le vélo reste parfaitement silencieux quand on roule. On note aussi que les roulements sont très bien protégés, et que le galet supérieur de transmission lié à la suspension à point de pivot haut est très généreusement graissé avec de la graisse marine. Bref, tout respire la solidité et la durabilité.
Côté géométrie, le Kurgan affiche des chiffres résolument engagés avec notamment un angle de direction de 63,5° et un tube de selle très droit à 78°. Il adopte un format de roues mulet (29 devant, 27,5″ derrière) avec des longueurs de bases qui évoluent selon la taille de la machine. Il n’y a que trois tailles au programme, mais un flip chip au niveau du jeu de direction permet de faire varier le reach de 10 mm (-5/0/+5 mm). Petit point d’attention, le vélo est assez court malgré le reach ajustable. Nous avons roulé le M et on vous conseillera d’aller vers un L dès 178/180 cm car le M était un poil court.
Au niveau des équipements, deux montages sont proposés :
Kurgan Elite (9749 €) : fourche Fox Float 38 Performance Elite, amortisseur Fox DHX2 Coil Factory, transmission Shimano Deore 12 vitesses, freins Shimano XT, roues DT Swiss H1900, Continental Kryptotal DH Supersoft 2.4”
Kurgan Factory (11 999 €) : fourche Fox Float 38 Factory, amortisseur Fox DHX2 Coil Performance Elite, transmission Shimano XTR/XT Di2, freins Shimano XTR, roues Reserve HD en aluminum et moyeux OneUp, pneus Continental Kryptotal DH Supersoft 2.4”
Sans surprise, les tarifs sont élevés, tout en restant comparables à ceux d’autres e-bikes haut de gamme qui n’ont pas pour eux l’originalité du Kurgan. Ni son exclusivité, puisque la marque prévoit d’en proposer 25 par mois dans chaque taille. On n’en croisera assurément pas à tous les coins de rue !
Deviate Kurgan : le test terrain
Le Deviate Kurgan est un vélo qui a un côté intimidant quand on le regarde avant d’en prendre les commandes. Son design, sa géométrie, ses grosses suspensions : on se dit que c’est un vélo qui va demander énormément de doigté et un solide bagage en pilotage. Et aussi obligatoirement de la pente et du gros dénivelé pour être exploité. Puis, on grimpe dessus, on commence à le rouler et les craintes s’évaporent immédiatement.
Tout d’abord le Kurgan n’en a peut-être pas l’air, mais c’est un excellent pédaleur. Il est aussi assez léger, avec un poids vérifié par nos soins de 24,07kg sans pédales, ce qui est remarquable pour ce genre d’engin. Outre le poids, sa suspension est très neutre au pédalage, la position est très agréable en côte et même pour pédaler sur le plat, et on trouve aussi très vite ses marques à son guidon.
Avant d’attaquer les vraies descentes, on joue un peu avec l’engin et il se montre joueur dans les singletracks à plat, bon dans les relances (vive le mode e-mtb du moteur Bosch, élastique à souhaits et encore plus depuis la mise à jour) et surtout assez incroyable d’aisance dans les montées techniques. Le grip de la roue arrière est bluffant et il est très facile de jouer avec son poids ainsi qu’avec la direction pour venir à bout de côtes assez indécentes, qu’on ne parvient pas toujours à passer, même avec des vélos qu’on connaît bien. Bluffant !
En descente, c’est moins une surprise, mais il est absolument impérial. La suspension arrière est particulièrement sensible sur les petits impacts, hyper à l’aise dans les successions de chocs moyens et impériale sur les plus grosses réceptions de sauts. On sent que la cinématique est parfaitement développée et pensée pour fonctionner avec le DHX2 Coil.
C’est probablement une des suspensions les plus abouties que nous ayons pu tester sur un e-bike, où les marques sont souvent obligées d’utiliser des cinématiques plus traditionnelles à cause de la place prise par le moteur et qui jouent un peu sur leur poids pour être bien posés au sol. Ici, on a à la fois un vélo tonique avec une suspension qui renvoie bien l’énergie du pilote quand celui-ci veut jouer avec sa machine et la placer, tout en étant capable de plaquer la roue au sol et de procurer une adhérence et un amorti de haut vol.
Au niveau du châssis, on constate aussi que la rigidité est parfaitement dosée. Ce n’est pas une barre à mine qui fatigue le pilote, mais plutôt un vélo qui semble vivre le terrain avec vous et presque le comprendre. On saluera aussi les bons choix d’équipements, comme les roues Reserve en aluminium qui dégagent à la fois une impression de robustesse et de douceur dans la lecture du terrain. Idem pour le cintre OneUp à la forme particulière, pensée pour absorber les vibrations. Chaque détail est pensé et a été testé par les concepteurs du vélo, qui sont de vrais passionnés. Et cela se sent.
Tout cela concourt à donner au final un excellent vélo, qui ferait presque oublier que c’est un e-bike, sauf en côte où l’assistance Bosch permet d’aller (presque) aussi vite qu’en descente. Mais sinon, c’est avant tout un vélo facile à faire partir en bunny-up au moindre obstacle, joueur, facile à basse vitesse et démoniaque de stabilité quand on ouvre les gaz en grand pour prendre de la vitesse ; un vélo aux masses particulièrement bien réparties aussi. Tout cela lui permet de séduire un panel assez large de pilotes, qui va du pur enduriste au gros niveau de pilotage, jusqu’à un amateur de beau matériel et de sorties un peu engagées qui a envie de se faire plaisir avec un (gros) vélo à la personnalité affirmée mais pas complètement inaccessible pour le commun des mortels.
Verdict
Le Deviate Kurgan est une machine exceptionnelle à bien des points de vue. De par sa rareté et son tarif, c’est vrai, mais après avoir eu la chance de faire quelques sorties à son guidon, on se dit que c’est un vélo remarquable car il réussit à faire une série de grands écarts entre des caractéristiques habituellement difficiles à marier. C’est comme un vélo de descente qui pédalerait quasiment comme un XC en montée grâce à l’assistance. Une machine hyper stable à haute vitesse façon grosse moto d’enduro, et (presque) une petite ballerine dans le sinueux ou à plus faible allure. Un gros e-bike plein de couple et de puissance, plein d’autonomie aussi avec sa grosse batterie, mais qui parvient aussi à donner l’impression que c’est un VTTAE léger voire même un simple vélo d’enduro sans assistance par moments. Ajoutez à cela une foule de détails qui montre que ses géniteurs ont passé énormément de temps à tout réfléchir et à tout tester au moment de la conception et, au final, vous obtenez un vrai vélo d’exception dans tous les sens du terme.
Plus d’infos : https://www.deviatecycles.com/kurgan














