Test | Moustache Samedi Trail 6 : oui, en électrique, le full suspendu est un must !

Par Olivier Béart -

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Test | Moustache Samedi Trail 6 : oui, en électrique, le full suspendu est un must !

Rappelez-vous, il y a quelques mois, nous avions testé le Moustache Samedi Off 6. Moteur Bosch Performance CX, batterie de 500Wh, équipement cohérent : il avait tout pour plaire… sauf une suspension arrière. Vu le poids de l’assistance, le vélo reste plus au sol qu’une machine clasique et le châssis doit être plus rigide. Bref, la conclusion était que nous avions envie de tester son alter-ego full suspendu, le Moustache Samedi Trail 6, pour voir si comme nous le pensions, une suspension arrière était bien un must sur un électrique. Moustache nous a pris au mot et nous l’a envoyé pour un essai… très instructif !

Autre point que nous soulevions en épilogue de ce test : le principal concurrent du Off6 se situe sans doute dans la gamme Moustache elle-même, avec le Trail4 vendu 100€ plus cher, moins bien équipé mais doté d’une suspension arrière, ou le Trail 6, 600€ plus cher que son homologue semi-rigide, mais équipé de façon quasi identique. Après lecture de nos réflexions, les responsables de la marque d’Epinal nous ont pris au pied de la lettre et ont proposé de nous envoyer le Moustache Samedi Trail 6 à l’essai pour que nous puissions vérifier tout cela sur le terrain !

Cadre et motorisation

Le cadre du Moustache Samedi Trail 6 est en aluminium. Il existe une version carbone (que  nous avions déjà eu l’occasion de tester et de comparer à la déclinaison alu en version Race de 160mm de débattement, contre 140 ici), mais au tarif auquel il est affiché, il ne faut pas se faire d’illusions. 4599€, c’est déjà une belle somme, mais dans le monde des vélos à assistance, surtout à double suspension, difficile de passer sous les 4000€ pour trouver quelque chose de qualitatif.

Néanmoins, s’il est en aluminium, le cadre ne fait aucune concession sur les points qui caractérisent un e-bike contemporain, à commencer par l’intégration de la batterie. Ok, c’est avant tout esthétique, mais ici, cela ne se fait pas au détriment de la répartition des masses. Même si Bosch a depuis sorti (très récemment) sa solution intégrée maison, Moustache a, depuis deux saisons maintenant, sorti sa propre version en concevant ses cadres de façon à « intégrer une batterie non intégrée ».

C’est un beau défi technique, mais cette dernière a l’avantage d’être très compacte et de permettre un centrage des masses idéal, quand une batterie intégrée classique a tendance à se prolonger fort vers l’avant et à charger (trop) fort le train avant. C’est moins le cas chez Bosch, un peu plus chez Shimano et cela dépend des marques et des vélos, mais c’est une tendance qu’il ne faut pas ignorer.

Grâce à une trappe, la batterie reste amovible, et on dispose sur le Moustache Samedi Trail 6 de la version 500Wh, quand le Trail 4 (proposé à 3999€) est équipé de la « petite » en 400Wh, synonyme d’autonomie plus courte (mais il est aussi disponible à 4199€ avec la batterie 500Wh). Le moteur est, dans tous les cas, le Bosch Performance CX, véritable best-seller VTT connu pour sa poigne de fer. On dispose aussi de la mise à jour e-MTB, un mode d’assistance qui joue un peu le rôle de boîte automatique grâce à sa polyvalence, sélectionnable via la commande Purion (modèle le plus minimaliste chez Bosch). Mais tout cela, le Moustache Samedi Off6 semi-rigide à 3999€ l’a aussi ! Ce qu’il n’a pas, le Off, c’est une suspension arrière. Justement, c’est le moment de s’y intéresser.

Suspension

On trouve la cinématique employée par Moustache depuis ses débuts, à savoir un four bar linkage assez classique, mais qui a été raffiné au fil des millésimes (ou « saisons » comme on dit chez Moustache) afin de s’adapter au mieux à l’évolution des pratiques en VAE. Sensible en début de course, plus progressive ensuite, elle offre 140mm de débattement avec un amortisseur maison qui nous a déjà prouvé qu’il n’avait rien d’un choix au rabais.

On le sait, Moustache est attentif aux détails et, outre l’intégration de la batterie, même si on est sur un vélo « entrée de gamme » dans son segment, la finition est superbe, que ce soit au niveau des soudures ou des points de pivot de la suspension dont la taille et le positionnement respirent la solidité. Le travail des tubes est aussi superbe, avec des sections qui restent épurées à l’œil mais qui sont en réalité très complexes pour garantir un excellent niveau de rigidité. Sans oublier le petit détail en carbone sur les biellettes de suspension, ou encore la petite protection d’amortisseur et l’indicateur de SAG pour régler facilement sa suspension correctement.

Géométrie

Par rapport au Off6, le Moustache Samedi Trail 6 adopte une philosophie comparable, à savoir se présenter comme un vélo facile et ludique avant tout. Certains pratiquants radicaux ne s’y retrouveront peut-être pas, mais ils ne sont après tout qu’une minorité et malgré certains choix tournés vers l’accessibilité au plus grand nombre, ni le Off 6, ni le Trail 6 ne sont des vélos fades. Que du contraire.

L’examen des chiffres montre quelques différences entre le Off semi-rigide et sont grand frère tout suspendu, le Trail. Si les angles sont très proches (67,7/67,6° pour la direction et 73,3/74,6° pour le tube de selle, mais les valeurs vont se rejoindre au SAG quand on sera assis sur la selle du Trail 6), le tout suspendu affiche un reach plus long, avec 436mm contre 398 pour le Off. Cela dit, nous verrons plus loin sur le terrain que cela ne se sent pas tant que cela.
Enfin, dernier chiffre intéressant : la longueur des bases. Moustache ne joue pas le jeu de ceux qui estiment que toujours plus court est nécessairement mieux. Le full affiche des bases de 465mm pour 459mm au hardtail (une différence non significative, donc), ce qui peut laisser penser qu’ils seront peut-être un peu durs à faire tourner dans le sinueux, mais l’expérience nous apprend que la géométrie est une authentique alchimie et qu’il ne faut pas tirer de conclusions trop hâtives de la simple lecture d’un tableau. Lors du test, le Off6 nous avait aussi montré un caractère très joueur.

Equipements et versions

Le Moustache Samedi Trail 6 est le modèle intermédiaire de la gamme aluminium, après le Trail 4 (fourche moins évoluée, transmission et freins plus basiques) et avant le Trail 8 doté de meilleures suspensions, freins et transmission. Les tarifs vont de 4099€ à 5299€. On peut aussi avoir le Trail 7 qui est en fait simplement la version cadre carbone du Trail 6. Il coûte 5699€.

Pour 4599€, sur notre Trail 6, on dispose des excellentes roues et jantes Moustache en aluminium, qui ont une fois encore démontré ici leur solidité et leur pertinence au niveau de la largeur (35mm entre crochets) pour des pneus en 2.8″ de section. Les « boudins » sont des Maxxis Rekon, à l’avant comme à l’arrière. Nous verrons sur le terrain que, si ce sont de bons pneus, on préfère nettement ce modèle à l’arrière qu’à l’avant.

La fourche est identique à celle du Off6, à savoir une SR Suntour Aion 35RL avec traitement anti-friction sur les plongeurs. Elle ne nous avait pas éblouis lors du test du Off, et même si elle fonctionne correctement, c’est clairement le maillon faible sur ce vélo dont les capacités sont, du reste, assez énormes. En passant un peu de temps sur les réglages (pression, rebond), on parvient à en tirer quelque chose, mais en dépit d’un châssis rigide, la partie hydraulique accuse le coup et se montre vite dépassée quand on commence à aller vite.

Par contre, elle est flatteuse à vitesse plus faible. Le contraste avec l’amortisseur maison, qui rivalise sans mal avec les grands noms, est assez saisissant. Un dernier mot sur la fourche : son système de blocage de roue original n’a pas fait l’unanimité et ne se révèle pas plus simple qu’un axe classique pour la plupart des personnes à qui nous l’avons fait essayer.

Pour le reste, le montage est pertinent et on ne voit rien à changer d’urgence. C’est le cas des freins Magura MT4 inépuisables, de la transmission Shimano XT qui répond toujours présent, ou encore des équipements Moustache comme le poste de pilotage et surtout la tige de selle télescopique très onctueuse et agréable à manipuler. On signalera aussi le pédalier maison, au look sympa et qui est équipé d’un petit pignon de 14 dents bien adapté aux pentes raides, mais dont les manivelles un peu longues ont tendance à venir frotter au sol assez souvent. Un point qui se remarque, logiquement, bien plus sur un full que sur un hardtail…

Moustache Samedi Trail 6 : le test terrain

L’objectif de ce test, outre le fait de voir ce que le Trail 6 a dans le ventre, est de le comparer avec son petit frère semi-rigide. Nos souvenirs avec lui sont encore bien frais et nous avons roulé sur beaucoup de terrains similaires, même si nous avons aussi eu l’occasion de tester (et de faire tester) le Trail 6 sur la magnifique boucle spécifique VAE des 24h des Crapauds. Et il n’a pas fallu bien longtemps pour nous rendre compte que la suspension arrière sur un électrique… c’est la vie !

Nous avons beaucoup aimé le Off 6 et, objectivement, c’est impossible de dire que c’est un mauvais vélo. Par contre, à nos yeux et dans notre conception du VAE comme un outil pour découvrir, pour faire sauter des barrières, aller plus loin, ne pas hésiter à se perdre pour trouver de nouvelles traces, mais aussi comme un merveilleux moyen de se faire plus plaisir en descente en minimisant le temps des remontées… voire de transformer les montées (techniques) en moments de plaisir, eh bien là, il nous manquait souvent un petit quelque chose.

Avec le Trail 6, on n’a pas juste une suspension. On a une très bonne suspension arrière. Sensible, gardant bien l’assiette du vélo, magnifiant le grip de la roue arrière, elle permet aussi de rouler vite quand c’est défoncé. Et pas besoin d’être en descente pour l’apprécier. Au contraire, c’est même presque sur le plat qu’on le sent le plus ; là où on va vouloir rester assez sur la selle et se consacrer sur le plaisir de pilotage dans ce petit single rempli de trous et de cailloux, sans avoir envie que l’arrière rebondisse un peu partout. On va plus vite, plus sereinement et avec plus de plaisir, qu’en l’absence de suspension arrière.

Bref, très vite convaincus que, oui, le jeu en vaut la chandelle et que, si vous l’avez en poche, il faut vraiment mettre la différence pour avoir la suspension arrière, on peut se concentrer sur les autres caractéristiques du Moustache Trail 6. Contrairement à ce qu’annonce le tableau de géométrie, le Trail 6 en M ne nous a vraiment pas semblé plus long que le Off 6. Pour 178/179cm, on est à la limite et on a bien envie d’aller sur la taille L. On se dit aussi que les grands risquent de ne pas trouver leur bonheur chez Moustache… mais cela pourrait peut-être changer. On espère en tout cas que la marque travaille pour proposer plus de tailles. Wait and see.

Le Trail 6 reste plus un vélo orienté plaisir que performances pures face au chrono. Nous avons pu le voir sur le tracé des Crapauds, où nous sommes allés plus vite avec d’autres machines. Mais est-ce vraiment ce qu’on cherche en VAE ?

En tout cas, le Trail 6 reste plus un vélo orienté plaisir que performances pures face au chrono. Nous avons pu le voir sur le tracé des Crapauds, où nous sommes allés plus vite avec d’autres machines (Specialized Levo Carbone en tête… tout en gardant en mémoire que son tarif n’a rien à voir). Mais est-ce vraiment ce qu’on cherche en VAE ? Et est-ce pour cela que nous étions plus satisfaits après notre tour ? Pas sûr…

Le côté jouet que nous avions adoré sur le Off 6 est pleinement préservé. Le vélo est hyper facile à prendre en main, il tourne facilement et se prête sans broncher à pas mal d’excentricités. Bon, on sent tout de même parfois son poids, qui frise les 23,5kg, mais le plus souvent, son petit embonpoint sait se faire oublier. Les vitesses passent bien, les freins répondent toujours présent, on sait qu’on peut compter sur des roues précises et solides, comme le cadre. Bref, on est en confiance.

On s’amuse aussi beaucoup en montée, même si le mode Turbo est toujours trop violent (vive le e-MTB) et si le poste de pilotage fort haut nous a parfois empêché de charger l’avant comme on l’aurait souhaité. La suspension arrière a beau dégager une grande impression de confort et de souplesse, elle n’a pas tendance à s’affaisser ou à entraîner le poids du pilote sur l’arrière quand elle travaille, mais le vélo donne l’impression d’être fort relevé de l’avant et nous avons placé la potence au plus bas.

On va le dire une dernière fois, mais quand on ouvre les gaz en grand, la fourche est vite dépassée, donnant l’impression de dribbler et de mal maîtriser son rebond. Là aussi, il semble que la marque ait entendu les remarques et qu’one montée en gamme soit prévue pour la Saison 8 qui pointe le bout de son nez. Vu les capacités du vélo, le pneu avant Maxxis Rekon est trop rond et manque d’accroche latérale. à notre goût. Il n’est pas non plus hyper polyvalent et il se montre vite dépassé dans la boue. Néanmoins, c’est un détail et investir dans un pneu avant s’il ne vous convient pas, c’est finalement assez peu de chose. D’autant que tout le reste est vraiment cohérent et prêt à rouler.

Dernier point : l’autonomie de la batterie. Une fois encore, nous avons eu du mal à faire plus de 35km en roulant en continu en mode e-MTB. Très agréable, il a tendance à consommer plus que si on joue soi-même entre les modes. Un peu dommage. En roulant à l’économie, on peut envisager de faire 55/60km, mais c’est souvent dur de résister à piquer une petite pointe ou à s’amuser dans une côte technique car cela fait partie intégrante des plaisirs du VAE. Full et hardtail font jeu égal sur ce point et la suspension ne semble pas avoir d’influence notable à ce niveau. Ce qui n’empêche pas d’attendre avec impatience des innovations à ce niveau, même si on sait que cela ne se fera pas d’un coup de baguette magique.

Verdict :

Oui, cent fois oui : mettre un peu plus pour avoir une suspension arrière sur son VAE, ça vaut le coup ! Ou alors, à tarif égal, faire quelques concessions. A la lecture de sa fiche technique, le Trail 4 nous semble presque aussi cohérent que le Trail 6, même s’il est moins bien équipé. Vu l’autonomie déjà un peu juste à notre goût – mais ce n’est pas propre à Moustache – on hésitera par contre à descendre sur une batterie de 400Wh. Il n’en reste pas moins que le Trail 6 nous a semblé ouvrir des horizons bien plus larges que le Off 6, et aussi nous offrir plus de plaisir. Et on ne sait pas vous, mais nous, c’est à la base même de notre conception du VAE.

Plus d’infos : www.moustachebikes.com/samedi-27-trail-6.html
Notre test du Moustache Off 6 semi-rigide : www.vojomag.com/test-moustache-samedi-27-off-6-simple-et-delure/

ParOlivier Béart