Test | Lapierre Overvolt AM 800+ : sur de bons rails

Par Pierre Fluckiger -

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Test | Lapierre Overvolt AM 800+ : sur de bons rails

Auréolé des multiples titres, le Lapierre Overvolt carbone a connu quelques aménagements  pour 2018. L’évolution du marché en VAE est extrêmement rapide, il était donc intéressant de savoir si ses améliorations étaient suffisantes pour qu’il reste une référence de la catégorie.

Construction

L’œil humain est habitué à un consensus visuel et les réactions face à un design « nouveau » sont souvent divisées. À ce titre, le cadre du Lapierre Overvolt AM800+ est une véritable prouesse technique rendue possible par l’utilisation du carbone. Le but de Lapierre est de centrer les masses au plus près du boitier de pédalier tout en abaissant le centre de gravité. C’est ce que Lapierre appelle le « Gravity Logic Project ».

L’objectif est que le pilote ressente le moins possible le poids et le placement de la batterie. Visuellement le résultat est magnifique : tube diagonale périmétrique façon moto (peut-être trop pour certains), tube de selle asymétrique, lignes tendues et racées… Ça en impose ! Pour 2018, Lapierre a judicieusement opté pour une couleur à deux tons pour le triangle avant (peut-on encore appeler ça  un triangle d’ailleurs ?) allégeant et égaillant le visuel tout en gardant le caractère très classe de l’ensemble. Les passages de gaines internes avec des entrées bien dessinées ne contraignent pas les gaines lors de la rotation du cintre. Le triangle arrière, également en carbone, (bases et haubans) est de forme plus classique, mais offre la possibilité d’une double monte de roues : classique ou 27.5+, par l’utilisation d’inserts réversibles au niveau de l’axe arrière.

La suspension arrière s’articule au sein d’une cinématique à point de pivot virtuel de type horst link utilisée depuis de nombreuses années par Lapierre sous le nom d’OST+. Elle est adaptée à la géométrie induite par l’encombrement du moteur.  La roue arrière est solidaire des haubans. En théorie, l’avantage de ce type de suspension est de pouvoir, régler son anti-squat (pompage au pédalage) indépendamment de son anti-rise (effet du freinage sur la cinématique). Comme souvent avec le moteur Bosch, le niveau d’anti-squat est élevé. Le point de pivot principal est de par l’architecture moteur placé en arrière et relativement bas. Une biellette en carbone assure la progressivité, au demeurant excellente, de l’ensemble. Elle fait le lien entre les haubans et le cadre et pousse un amortisseur à air RockShox Deluxe RT au format métrique 210 x 52.5 (course augmentée par rapport au modèle 2017). À l’avant, une fourche Rockshox Pike RC 2018 au format boost, réglable en compression basse vitesse et détente.

Comme déjà évoqué, le nouveau ressort Debonair permet d’obtenir une meilleure sensibilité en début de course et donc plus de maintien à mi-course à SAG équivalent en raison d’une pression d’air supérieure. On note la présence d’un axe de roue arrière Maxxlite Ultimate imposant un outil pour son montage / démontage : pas des plus pratiques !

Encore moins pratique : la Rockshox Pike est prévue pour être montée avec des moyeux équipés de « Torque cap » (une interface plus large entre le moyeux et la fourche, augmentant la rigidité) dont ne dispose pas la roue avant du Lapierre AM 800+. On est donc contraint de « viser » sans que la roue ne trouve son emplacement seule.

Géométrie 

Le Lapierre overvolt AM800+ va à contre-courant de la vague de modernisme touchant la production actuelle dans le monde du cycle. Contrairement à la tendance, l’avant est plutôt court avec un reach de 437 mm sur notre modèle Large, valeur qui correspond plus à un petit M voire un S au sein de la production actuelle. Conséquence de la présence d’un bloc moteur Bosch CX performance, les bases arrière sont longues voire très longues : 485 mm équipé avec les roues en 27.5+.  Elles sont, avec certaines productions exotiques extrêmes, les plus longues du marché AE. L’angle effectif de selle à 73° est assez couché par rapport à la tendance, ce qui théoriquement pourrait pénaliser l’Overvolt dans des conditions de forte pente. Le boitier  est placé relativement haut pour augmenter un peu la garde au sol. Sur le papier, les chiffres n’ont rien de révolutionnaires… Le bien-fondé de ces choix se révèlera sur le terrain.

Equipement 

Le moteur : le cœur, ou plutôt le poumon de tout VAE, provient de chez Bosch avec le Performance CX. Couplé à la commande Intuvia, il offre tout ce dont on a besoin, même si une commande au cintre pourrait être un peu plus ergonomique.

Outre les modes classiques d’assistance disponible,  Bosch a remplacé cette année son mode sport par le mode « E-MTB ». À la manière d’une boite automatique, il adapte en permanence le couple et la puissance.

Derrière le pignon du moteur (bien sélectionné en 14 dents), une plaque en aluminium est intelligemment conçue pour éviter les remontées de chaîne. Petite coquetterie, de belles manivelles Race Face Aeffect spéciales E-bike sont associées à un efficace anti-déraillement.

La transmission est confiée à Shimano avec un mix très classique et fiable XT/SLX . On retrouve une cassette SLX 11/46 dont l’étagement est parfait pour la pratique et un shifter SLX doux, à défaut d’être ultra précis. Le dérailleur XT fait parfaitement son boulot.

Pour les freins, retour chez Sram avec un ensemble Guide RE spécialement prévu pour la pratique. Lapierre mélange une commande de frein Guide (levier/maitre-cylindre) avec l’étrier du nouveau Code. Nous n’avons pas été totalement séduits par ce couple. Certes dosables et suffisamment puissants à allure modérée, ils ont du mal à ralentir les ardeurs de la bête a haute vitesse. Il faut tirer fort car l’inertie aidant, le manque de puissance se fait sentir même avec les disques de 200 mm dont le toucher est parfois aléatoire. Pour rappel, nous avions été bluffés par l’ensemble Code (levier/maitre-cylindre) dans notre essai du Merida One-Fourty (à retrouver ici : www.vojomag.com/test-merida-one-forty-800-elargir-le-champ-des-possibles ). 

Le Lapierre Overvolt est proposé avec un ensemble de périphériques maison. Visuellement peu valorisants, ils ont le mérite de remplir efficacement leurs fonctions. Ainsi on retrouve une potence en 45 mm de long, parfaite pour le programme. Un cintre en 760 mm de large avec un juste dessin.

Les grips façon « champignon » et double lock-on ont un aspect suranné, pourtant leur confort et leur efficacité sont de premier ordre. La selle Lapierre by Velo que nous redoutions au départ nous a préservés de façon optimum dans nos longues sorties.

Bon point également pour la fluidité de fonctionnement et la fiabilité de la tige de selle télescopique.

Les roues Lapierre sont au format boost specifique e-bike avec des jantes en 35 de large à l’avant comme à l’arrière. Classiques mais très efficaces, on retrouve des pneus Maxxis High Roller II devant et Maxxis Rekon derriere. L’ensemble est proposé en 2.8 de large en carcasse EXO protection et gomme 3C Max Terra . Grip et confort au rendez-vous.

Au global, le montage du Lapierre Overvolt AM 800+ n’a rien de bling bling mais il est parfaitement fiable et plutôt bien pensé.

Sur le terrain : Lapierre Overvolt AM 800+

Si les réglages concernant la position de pilotage sont rapidement trouvés (preuve du bien-fondé de la géométrie de l’Overvolt), ceux concernant les suspensions ont été plus délicats à appréhender. Le Lapierre pousse beaucoup sur l’avant et a une tendance à le perdre en virage si on ne le charge pas. Pour pallier le phénomène, nous avons adapté les réglages de suspensions (air et détente) afin d’avoir une assiette naturellement plus décalée sur l’avant. Le grip augmente alors, et l’ensemble est plus neutre (moins sous-vireur). D’ailleurs nous l’avons constaté tout au long du test, le Lapierre adore être roulé sur l’avant.

Attention tout de même à ne pas aller trop loin dans les réglages, car dans la forte pente la fourche à tendance à vouloir plonger et la progressivité de la suspension arrière n’aide pas le Lapierre à « s’assoir ». Toutefois, ce n’est pas un drame car même avec des réglages moins travaillés, et comme nous le verrons par la suite, l’ensemble reste imperturbable et facile quelles que soient les conditions. Comme toujours dans notre protocole de test Vojo, l’Overvolt AM800+ est passé dans les mains de plusieurs pilotes aux niveaux bien différents.

Nous ne répéterons jamais assez, la monte de pneumatique et les pressions utilisées ne doivent absolument pas être négligées. Sur le Lapierre Overvolt AM800+ nous avons obtenu de bons résultats en comportement avec une pression de 1.0/ 1.2 bar devant et 1.2/1.4 bar derrière, suivant les testeurs. Attention quand même au cocktail de pressions basses, E-bike façon missile, calcaire saillant… la carcasse Maxxis Exo a ses limites et on attend avec impatience les carcasses Exo+ présentées à l’Eurobike 2018.

Avant de pouvoir retrouver son trail préféré, il faut pédaler et sur ce point le Lapierre est une réussite. La position assise est impeccable et le rendement de premier ordre. Sur un E-bike équipé de la motorisation Bosch CX, il est souvent difficile de dépasser la vitesse de coupure sans un effort important. Avec L’Overvolt carbone, on navigue facilement au-dessus sans forcer. Les gros pneus ne se font pas sentir, et la rigidité de l’ensemble est un atout dans la transmission de l’énergie.

Nous n’avons jamais utilisé la position fermée de l’amortisseur tant le niveau de pompage au SAG est faible. Dans la forte pente, le vélo ne cabre pas et le Lapierre est tout simplement impressionnant. Les limites du mode « E-mtb » et du Maxxis Rekon sont atteintes quand le sol devient plus fuyant.

Les épingles serrées en montée sont négociées avec facilité, sans avoir à se contorsionner. La maniabilité est excellente. 

Debout, la position amène naturellement le pilote au-dessus du cintre et instinctivement le regard se porte loin, sans effort.  Pour un bike de ce calibre, les premières épingles de la descente sont passées avec une incroyable aisance. On engage facilement l’avant et l’ensemble suit comme dans un mouchoir de poche. Une belle surprise !

Une envie d’attaquer et de lui rentrer dedans se fait alors instantanément sentir. L’association du châssis rigoureux et précis avec un train roulant confortable et tolérant fait des merveilles. Le niveau de confiance atteint est très élevé et ça roule vite, très vite. On oublie le relief, on tape dedans sans arrière-pensée. Les pierriers et les champs de racines sont une formalité, pas la peine de les éviter, même si ça tape et secoue un peu. Dans les trajectoires ou les réceptions hasardeuses, rien ne bouge.

Ce mix de rigueur et de tolérance procure un sentiment de sécurité qui pousse à vouloir toujours rouler plus fort. Alors certes, l’apport des roues au format « Plus » fait perdre un peu de précision, notamment au niveau du train avant, mais c’est bien peu de choses. Le gain en confiance est tel que les performances de l’ensemble progressent. La faculté à s’inscrire en virage est bluffante. La présence du combo moteur/batterie ne perturbe absolument pas cette phase souvent critique sur les VAE. 

Une fois les bons réglages trouvés, la tenue en trajectoire est impeccable. L’ensemble est posé et rien ne peut le faire dévier. Point de corde atteint, on se concentre alors uniquement sur la sortie pour lâcher les watts : le Lapierre est ultra efficace.

Revers de la médaille, le Lapierre overvolt AM800+ marque le pas dans les changements d’angle rapides où son manque de vivacité se fait sentir. Il faut alors le brusquer et ne pas hésiter à être violent à son guidon pour lui donner cette dynamique dont il a besoin pour être toujours efficace. Mais encore une fois, il supportera très largement ce traitement, notre physique un peu moins. L’association du centre de gravité bas et des bases longues ne facilite pas non plus la tâche lorsqu’il faut délester la roue avant, il faut alors tirer fort ou s’aider du moteur en évolution lente.

Le Lapierre overvolt AM800+ se délecte des pistes plus artificielles. Il y fait des merveilles. Il génère beaucoup de vitesse, les passages en courbes se font façon missile, pour peu que l’on n’oublie pas de charger l’avant. Dans ce cadre, l’AM800+ impulse très bien sur les appels de saut et son assiette en l’air est ultra équilibrée. La grande progressivité de la suspension arrière permet encore une fois d’être optimiste. Quel régal !

Verdict

Nous avons vraiment pris du bon temps avec le Lapierre Overvolt AM800+. Il fait partie des rares E-bikes présents sur le marché dont le comportement fait oublier leur caractéristiques « électriques ». Il reste pour nous certainement le vélo le plus performant de la gamme Lapierre électrique, d’autant que ses évolutions (trains roulant, augmentation du débattement) le rendent beaucoup plus facile à faire évoluer. Bien réglé, il procure beaucoup de plaisir et ce, quel que soit son niveau de pilotage grâce à un juste équilibre entre stabilité et maniabilité. Les pilotes les moins aguerris y trouveront un compagnon qui leur permettra de progresser et les pilotes experts auront quant à eux une machine prête à faire parler le chrono, si c’est l’utilisation qu’ils souhaitent en faire. Ce Lapierre donne naturellement envie d’être poussé pour libérer son potentiel. Toutefois, même si les technologies employées pour arriver à ce résultat ont un coût, le rapport prix/équipement pourra être amélioré. 

Plus d’infos sur le site de la marque : shop.cycles-lapierre.fr/overvolt-am-800

ParPierre Fluckiger