Test | Canyon Stoic 4 : parce qu’on est tous de grands enfants
Par Olivier Béart -
Beaucoup l’attendaient, avec le Stoic, il y a enfin un endurigide dans la gamme Canyon ! Pas de suspension arrière, du débattement à l’avant, une géométrie bien engagée, de bons gros pneus et une tige de selle télescopique : voilà les ingrédients pour faire un vélo fun et très capable à petit prix. Pour 1699€, nous avons voulu voir ce que le Canyon Stoic 4 a à offrir.
« Les VTT sont de plus en plus chers », « pour moins de 3000€ t’as plus rien de correct »,… C’est vrai que nous faisons un loisir qui nécessite un certain investissement, voire même un investissement certain ! Mais, en y regardant bien, il y a des solutions pour se faire (très) plaisir à petit prix. Parmi elles, si on a un pilotage engagé et qu’on préfère suer en descente qu’en montée, il y a les endurigides.
Connus pour leurs vélos à l’excellent rapport qualité-prix, notamment grâce à leur système de vente directe sur Internet, les Allemands de Canyon ne s’étaient, de manière surprenante, pas encore lancés sur ce segment. Une « anomalie » désormais réparée avec l’apparition du Stoic dans la gamme. Nous avons eu l’occasion de mettre la main sur le Stoic 4, le mieux équipé de la gamme, qui reste affiché à un tarif très attractif de 1699€. Faisons connaissance avec la bête.
Châssis
Le cadre du Canyon Stoic joue la carte des lignes tendues et très épurées, avec des soudures discrètes et une magnifique robe kaki mat qui met bien ses formes en valeur. Côté matériau, si beaucoup d’endurigides restent en acier, Canyon a fait le choix de l’alu 6061 T6, qu’ils maîtrisent parfaitement. Il est ici traité comme un vélo de « catégorie 4 », qui correspond au plus haut niveau de robustesse demandé chez Canyon, comme les vélos d’enduro tout-suspendus ou de descente. L’ensemble est garanti 6 ans.
Le traitement de la douille de direction et de sa jonction avec les tubes supérieur et diagonal est vraiment très agréable à l’œil et donne une véritable signature esthétique au vélo. On constate aussi que Canyon appliqué une recette désormais connue mais très efficace sur les hardtails, qu’ils soient de XC ou plus engagés, à savoir jouer la carte de la rigidité sur la partie basse du cadre et de la tolérance sur le haut. Cela se matérialise par l’emploi d’un tube diagonal imposant et de bases robustes, alors que les haubans sont nettement plus fins, tout comme le tube supérieur qui est aplati.
Canyon a vraiment visé la simplicité et la facilité pour l’utilisateur, avec par exemple un boîtier de pédalier fileté, juste le câble du dérailleur intégré au cadre alors que la Durit de frein reste à l’extérieur (avec néanmoins un trajet discret sous le tube supérieur et les haubans). On peut aussi choisir la taille de ses roues et de ses pneus avec beaucoup de liberté. En effet, si les tailles 2XS à S sont livrées d’origine en roues de 27,5″, on peut choisir entre 27,5+ avec pneus en 2.8″ ou 29″ avec pneus jusque 2.6″ de section sur les tailles M et supérieures. Si on le souhaite, on peut aussi opter pour un montage « mullet » avec du 27,5″ derrière et du 29″ devant.
Géométrie
Faire une bonne géométrie, cela peut tout faire sur un vélo et ça ne coûte pas plus cher ! Canyon a donc particulièrement soigné ce point pour faire du Stoic un vélo vraiment contemporain. 65° d’angle de direction, 75° d’angle de selle, un reach de 455mm en taille M : voilà des valeurs bien sympathiques pour un hardtail de 140mm de débattement. Mais pas extrêmes non plus. Canyon n’a pas voulu partir non plus dans quelque chose de fou comme certains endurigides exotiques. Il faut quand même convenir à un public large. Au passage, on note tout de même des bases très courtes, de 418mm de long : c’est un des charmes du hardtail, de pouvoir afficher une valeur aussi réduite à ce niveau, chose tout à fait impossible sur un full.
Equipements
Nous avons testé ici le Canyon Stoic 4 qui est le haut de gamme de la famille, affiché à 1699€. Outre un cadre très soigné, on remarque aussi la présence d’une fourche haut de gamme, avec l’excellente RockShox Pike Select en 140mm de débattement. Dotée d’un châssis rigide mais pas trop, de plongeurs en 35mm et de bons réglages simples mais efficaces pour la compression et la détente, elle permet de partir sur de très bonnes bases et on ne devrait pas avoir envie de la changer au cours de la vie du vélo.
Du côté de la transmission, c’est le Sram NX Eagle qui a été retenu. Clairement, on n’est pas sur du haut de gamme et, depuis que le GX Eagle a évolué avec un fonctionnement qui se rapproche de plus en plus de celui des versions haut de gamme XO1 et XX1, on sent qu’il y a un « gap » avec le NX. Ce dernier est un peu plus lent et sa commande n’a pas la précision des modèles supérieurs. Mais le tout fonctionne tout de même très correctement, et on bénéficie de la grande cassette 11-50 dents qui donne une certaine polyvalence au vélo. Sans dire que cela en fait un grimpeur, cela vous permettra de remonter pas mal de pentes en restant sur le vélo !
On retrouve aussi du Sram au niveau des freins, avec les Guide T qui, malgré leurs 4 pistons, montrent assez vite leurs limites. Ça freine, oui, mais ça manque de consistance et aussi un peu de mordant. Globalement, ils ne semblent pas vraiment sous-dimensionnés, mais surtout bien placides et manquant de mordant pour un vélo comme celui-ci. Nous aurions clairement préféré des Shimano qui, dès le niveau de gamme Deore, offrent des performances plus en rapport avec ce qu’on attend sur un vélo destiné à un pilotage agressif.
Les équipements sont développés et produits chez Canyon, avec un poste de pilotage G5 dont on remarque l’originalité de la potence en deux parties, qui assure une grande rigidité à l’ensemble. Puis, il y a aussi bien sûr l’inévitable tige de selle télescopique qui a la très bonne idée d’être en 170mm de débattement, ce qui est un vrai plus pour prendre du plaisir et se sentir en sécurité sur un vélo comme celui-là !
Enfin, les roues sont un montage maison sur base de jantes Alex Rims en 30mm de largeur interne, chaussées de pneus Schwalbe Hans Dampf et Magic Mary en 2.35″ de largeur et gomme Super Trail. Rien à dire du côté des pneus, c’est du tout bon haut de gamme, mais sur les roues, on sent que Canyon a voulu jouer la carte de la robustesse maximale… et vu qu’il fallait aussi garder un tarif contenu, cela se ressent fortement au niveau du poids, ainsi que du comportement dynamique. Nous y reviendrons dans notre essai.
Versions
Le Canyon Stoic est disponible en 3 versions, qui partagent toutes le même cadre. Outre le haut de gamme à 1699€ testé ici, on trouve aussi un intéressant Stoic 3 qui, pour 1199€, a des équipements un petit cran en dessous du Stoic 4, mais tout de même suffisants pour résister à un usage régulier (transmission SX, fourche RockShox Recon, etc). Enfin, le Stoic 2 joue la carte de la version d’accès avec un prix mini de 799€ qui implique quelques concessions, comme l’absence de tige de selle télescopique. Mais pour le reste, les équipements tiennent la route, avec une transmission Deore et des freins qui proviennent aussi de chez Shimano. La fourche vient de chez Suntour, c’est moins prestigieux que RockShox, mais cela fonctionne aussi très bien. Seul hic à l’heure d’écrire ces lignes : la disponibilité ! Si des Stoic 4 haut de gamme devraient rentrer « prochainement » (Canyon invite les intéressés à laisser leur adresse mail sur son site pour être prévenus), on parle d’une livraison en… novembre 2021 pour les modèles 2 et 3. Le VTT a le vent en poupe et cela se paie sur la disponibilité. Mais c’est pareil chez à peu près tout le monde.
Canyon Stoic 4 : le test terrain
Quand on regarde le Canyon Stoic, on n’a clairement pas l’impression de rouler sur un vélo « cheap ». La finition est splendide, plusieurs composants clés comme la fourche, les pneus ou encore la tige de selle télescopique et le poste de pilotage sont haut de gamme, et cela se perçoit. Par contre, s’il dégage une belle impression de robustesse, il n’est pas léger : 14,28kg sur notre balance en taille L. Rapporté à son prix et au programme du vélo, ce n’est pas spécialement lourd, mais nous allons voir que c’est tout de même quelque chose qu’il a du mal à faire oublier.
Mais commençons plutôt par ses points fort. En tête, on trouve sa géométrie, absolument parfaite. Long, bas, avec de l’angle devant et une tige de selle bien droite, le Canyon Stoic est parfaitement dans son époque, et cela se sent. C’est un vrai vélo plaisir, fait pour… faire le con ! Très vite, on a envie de se lâcher, de sauter, de tenter des trucs, de s’engager dans la pente, et avec tout cela, on s’amuse vraiment beaucoup ! Il faut aussi louer le travail de la fourche, qui aide vraiment à se sentir en confiance et autant à placer la roue avant qu’à garder le cap au niveau du train avant.
Par contre, impossible d’ignorer que le cadre est rigide. Très rigide même ! Malgré des haubans aplatis et un tube supérieur effilé, le châssis ne filtre pas grand chose et on ressent vraiment le terrain en direct. Sans filtre. On sent que Canyon a clairement privilégié la solidité et la robustesse, pour faire un cadre à l’épreuve des pires traitements, plutôt que de jouer la carte de la subtilité. Dans ce cadre, peut-être que le choix de tubes en acier aurait permis d’atteindre un meilleur compromis ?
Quoi qu’il en soit, quand on a intégré cette donnée, on parvient à en faire façon… et on se dit que c’est bon pour soigner son pilotage ! Chaque sortie est aussi très intense. Impossible d’adopter un pilotage passif, il faut s’investir à chaque instant, jouer des bras mais aussi beaucoup des jambes, et cela participe aussi au plaisir de pilotage de réussir à dompter un tel petit monstre. Quand on remonte sur un tout suspendu juste après, tout semble vraiment très facile et on sent qu’on a appris des choses au guidon d’un petit vélo comme le Stoic. Et si c’est parfois un peu compliqué à vivre au quotidien si on habite dans une région au sol très cassant, c’est par contre plus sympa comme vélo d’hiver dans des zones où la boue et les sols souples sont fréquents.
Sur un endurigide, même au tarif accessible, on attend aussi souvent d’avoir un peu de rendement et quelques facilités en montée. Ici, ce n’est pas vraiment le cas, et on sent que Canyon a surtout misé sur les compétences sur les profils descendants. En montée, on n’est jamais bloqué, mais on n’a ni l’envie, ni les capacités d’aller vite. Les relances nerveuses ne sont pas vraiment sa tasse de thé non plus.
En analysant un peu plus en profondeur les choses, il s’est avéré qu’une grande partie de la cause était à chercher du côté des roues. Comme le cadre, elles misent sur la solidité maximale, mais elles en deviennent presque « monolithiques » dans leur comportement. Et elles sont aussi très lourdes. Elles n’ont pas vraiment d’élasticité, et donc pas vraiment de capacité à s’adapter aux reliefs, et elles ont un côté inerte qui ne permet pas vraiment de profiter des capacités du cadre, lui aussi très rigide.
Pour en avoir le cœur net, nous l’avons testé avec d’autres roues alu un peu plus haut de gamme et surtout moins rigides, ce qui leur permet d’être plus « vivantes ». Et là, nous avons découvert un autre visage du Stoic, encore plus joueur, encore plus enjoué, mais aussi plus tolérant et plus du tout avec ce petit côté austère qu’il pouvait avoir avant. Nous avons aussi découvert un vélo plus facile en montée et avec lequel nous avions envie de rouler plus longtemps car nous étions moins vite fatigués. Bon, difficile de dire au public qui achète un vélo à 1700€ qu’il faut remettre 5/600€ dans une meilleure paire de roues, mais si après quelques mois/années, vous avez un peu de sous et que vous voulez faire évoluer votre Stoic, vous savez par où commencer.
Verdict
Le Canyon Stoic est vraiment un vélo pour grands enfants, qui nous ramène à des sensations pures, parfois violentes, mais assez enivrantes. Exigeant avec son châssis très rigide, il dispose par contre des ingrédients de base d’un bon petit vélo pour se faire plaisir et déconner entre potes. Sauts, pentes bien engagées : il permet de se lancer un peu partout, mais il se montrera vite exigeant dans le cassant ou si on veut faire des sorties un peu plus longues à son guidon pour enfiler du dénivelé négatif. On peut regretter aussi qu’il soit bridé par ses roues qui, à vouloir être à l’épreuve des balles, en oublient toute subtilité et toute légèreté. Mais tout cela est à mettre en regard de son prix, et force est de constater que pour 1700€, on en a vraiment pour son argent, alors que côté sensations, il n’a pas grand chose à envier à des machines bien plus onéreuses !
Canyon Stoic 4
1699€
14,28kg
- Géométrie parfaite et bien dans son époque
- Cadre particulièrement soigné
- Fourche RockShox Pike
- Rapport qualité/prix
- Cadre très rigide
- Poids conséquent pour un hardtail
- Roues lourdes et sans vie
Évaluation des testeurs
- Prix d'excellence
- Coup de coeur
- Rapport qualité / prix