Présentation | Commencal Meta Power : centrage des masses et sensations fortes
Par Olivier Béart -
Ce n’était pas un secret : après le hardtail, le Commencal Meta Power full suspendu était dans les projets de la marque andorrane depuis un petit moment. Et, après une longue gestation, le bébé est désormais sorti ! Quoi, il n’a pas de batterie intégrée ? Mais c’est quoi ce truc ringard ! Mmmh, attendez deux minutes et ne jugez pas trop vite. On va vous expliquer le pourquoi du comment et vous détailler nos sensations à son guidon.
L’intégration, c’est joli, mais…
C’est plutôt une bonne chose que le Commencal Meta Power ressemble au Meta AM V4.2 classique car c’est une très bonne base mais, au niveau visuel, on ne peut s’empêcher de trouver étonnant que la batterie ne soit pas intégrée. Pourtant, Shimano propose bien cette option dans son arsenal et permet même aux marques partenaires de développer leur propre batterie (comme l’a par exemple fait Lapierre sur son dernier Overvolt).
Avant d’aller plus loin, nous allons écouter les explications de Commencal sur le sujet, par la voix de Nico Brizin, (leur responsable presse qui est un ancien confrère et qui n’a pas vraiment sa langue dans sa poche) puis nous verrons un peu plus loin sur le terrain que, tout compte fait, c’est un choix pas si bête que cela, même si la tendance est clairement à l’intégration.
« Pour bien comprendre, il faut revenir un peu en arrière. Les vtt électriques existent depuis plusieurs années, mais les premiers n’étaient pas vraiment fous à piloter. Depuis, il y a eu d’énormes progrès et le potentiel fun/amusant de ces vélos a éclaté. On a commencé à construire des prototypes il y a deux ans maintenant et on a tout de suite compris que les e-bikes ne sont pas juste faits pour les invalides ou les gars en petite forme. C’est sur ce côté plaisir que nous avons voulu travailler en priorité. D’ailleurs, voilà la vidéo qu’on a faite avec William Robert.
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Bref, on voulait avoir un vélo sans prise de tête et hyper ludique à rouler. Partant de là, nous avons testé plusieurs moteurs. Assez vite, le Shimano E-8000 s’est imposé : compact, léger, souple et coupleux… mais aussi avec un SAV disponible dans le monde entier, ce qui est vital pour une marque comme nous qui vend aux quatre coins de la planète ».
Nous n’avons pas voulu que le Meta Power soit un vélo construit autour d’un moteur.
« De là, on a commencé à tester le moteur Shimano E-8000 et à envisager plusieurs types de batteries. Au début, l’intégrée Shimano n’était pas disponible, on ne va pas s’en cacher. Mais on avait les plans et quand on a vu les dimensions, on a vite senti que la longueur de la chose risquait de trop charger l’avant et de compromettre le comportement du vélo. Car en e-bike, nous avons vu clairement lors de nos tests en phase de développement que le centrage des masses est capital. Nous n’avons pas non plus voulu que le Meta Power soit un vélo construit autour d’un moteur. Justement, on a cherché à faire l’inverse pour retrouver le comportement du Meta : le vélo d’abord et le moteur ensuite. Donc, en attendant une évolution des batteries intégrées, nous sommes restés sur la version classique. Voilà toute l’explication. »
Partant de là, l’ingénieur responsable du projet, Nicolas Menard, et le designer avec qui il travaille en tandem, Thomas Moret, ont travaillé quelques petits détails sur le cadre pour faire en sorte que la batterie classique soit la plus discrète possible, avec la présence de deux petits renforts soudés (car oui, bien entendu, s’agissant d’un Commencal, le cadre est bien évidemment en aluminium). Au niveau du renfort supérieur, la soudure est même polie afin d’éviter toute cassure visuelle.
Au final, bien entendu on voit toujours bien la batterie mais quand on voit le bike dans la réalité et pas juste en photo, ces petites astuces fonctionnent plutôt bien. Seul petit point noir à nos yeux, à l’heure où la tendance est de plus en plus à rouler avec le dos libre, sans sac : il est impossible de placer un bidon sur le cadre.
Bon, maintenant qu’on a crevé l’abcès et évacué la question de l’esthétique, en attendant de voir si tout cela se confirme sur le terrain et d’être sûrs qu’on n’est pas gentiment en train de nous mener en bateau, on va maintenant pouvoir rentrer dans le vif du sujet et s’intéresser aux autres points cruciaux qui façonnent le comportement d’un vélo sur le terrain : le châssis en lui-même, la géométrie et les équipements.
Châssis, moteur et géométrie
Un des avantages du moteur Shimano, c’est sa compacité. De sorte que Commencal, tout en optant pour une monte en pneus de 2.6 (nous y reviendrons), a réussi à garder des bases très courtes : 444mm, soit seulement 7mm de plus que le Meta AM V4.2. Un très, très joli score pour un vélo électrique.
Par contre, on remarque que la fixation est beaucoup plus large, et nous verrons un peu plus tard que cela a un impact très positif sur la rigidité du triangle arrière. Pour rappel, dans notre test du Meta AM V4.2, nous avions souligné que le vélo nous a paru très souple. Parfois trop. On attendait donc le Meta Power et ses 22kg au tournant ! Nous pensions que cela provenait des biellettes près de l’amortisseur, mais il semble qu’en fait c’est plutôt près du boîtier de pédalier que cela se joue.
En regardant mieux le tableau des géométries du Commencal Meta Power, on se rend compte aussi qu’il y a quelques petites différences avec le Meta AM V4.2 que nous avons testé il y a peu. Ainsi, le tube de selle est plus redressé d’un degré pour favoriser le pédalage et l’angle de direction est de 66°, contre 65,5 sur la version classique (mais la fourche passe en 160 ici, contre 170). Le top tube s’allonge aussi un peu (+6mm), tout comme le reach (+10mm) et c’est une modification qu’on retrouvera aussi sur le Meta V4.2 2018.
Equipements et gamme
La pièce maîtresse des équipements, c’est bien évidemment le moteur. On ne va pas vous présenter une nouvelle fois le Shimano Steps E-8000 qu’on connaît désormais bien et dont toutes les caractéristiques techniques seront toujours mieux détaillées sur le site Shimano que ce que nous pourrons faire ici. Il est présent sur les trois modèles de la gamme, avec la même batterie 500Wh.
Au niveau du poste de pilotage, l’écran de contrôle est clair, discret et bien protégé des chocs. On a un peu plus de mal avec la commande gauche, identique à celle d’un dérailleur Di2 et dont l’ergonomie ne nous convainc plus vraiment une fois transférée à un e-bike. Elle interdit aussi le montage d’une commande de tige de selle télescopique sous le guidon.
Du côté des roues et des pneus, le Commencal Meta Power est assez logiquement surdimensionné. Mais pas tant que cela finalement car les développeurs ont effectué pas mal de tests et, pour garder un comportement plus précis, proche du Meta classique, c’est vers des jantes en 35mm de large (WTB ou Spank Oozy Trail) que Commencal s’est tourné ; le tout couplé à des pneus en 2.6 de largeur même si du 2.8 passe aussi sans souci si l’acheteur préfère. Au catalogue, ce sont des Maxxis en carcasse Exo devant et Double Down derrière pour vraiment pouvoir attaquer, mais sur notre vélo de test nous avons eu droit à des Schwalbe Nobby Nic et Magic Mary vraiment intéressants aussi et qui pourraient d’ailleurs par la suite faire leur entrée dans la gamme.
On l’a dit, le débattement de la fourche est de 160mm, alors qu’il est de 150mm à l’arrière. Commencal fait confiance à RockShox avec une Yari sur le premier modèle puis une Lyrik RC ou RCT3 sur les suivants. Pour l’amortisseur, le premier modèle est en RockShox Super Deluxe Air, et les suivants optent pour un ressort acier.
La transmission est en Shimano Deore sur l’entrée de gamme, puis en Sram GX 11 vitesses sur le suivant et enfin EX1 8 vitesses spécifique ebike sur le haut de gamme.
On termine avec les freins, qui sont systématiquement montés en disques de 200, qu’il s’agisse du Deore sur l’entrée de gamme jusqu’aux Sram Code du modèle le plus cher, en passant par les Guide RE (un mix entre un levier Guide et un ancien étrier Code, spécifique pour l’e-bike). Faut que ça freine ! On parle même de l’arrivée de disques de 220mm, comme on commence à en voir en DH.
Voici l’ensemble des spécifications (cliquez sur les images pour les agrandir).
On le voit, la gamme est assez réduite mais cohérente avec 3 modèles (Commencal Meta Power Origin, Essential et Race) dont le prix d’accès se situe à 3999€. Compte tenu des équipements de la version « de base », c’est plutôt concurrentiel et il risque même de faire de l’ombre au Meta HT Power Race à 3499€… sans suspension. Quant au haut de gamme à 5000€, il culmine là où d’autres e-bikes commencent seulement. Bref, Commencal est parvenu à rester dans sa ligne tarifaire habituelle et c’est tant mieux.
Il est temps maintenant de prendre les commandes de ce fameux Commencal Meta Power !
Commencal Meta Power : le premier test
Alors que nous avions rencontré quelques soucis avec le moteur Shimano lors de la présentation du BMC Trailfox AMP, ici notre Steps E-8000 est en pleine forme. Main de fer dans un gant de velours, on le retrouve enfin comme on le décrit souvent : à mi-chemin entre le Brose doux mais parfois un peu poussif, et un Bosch puissant mais moins raffiné. Malgré son poids assez élevé, le Commencal Meta Power grimpe bien. Ce n’est pas un foudre de guerre (un BMC Trailfox AMP ou un Scott Spark ont plus de « punch » dans ces situations), mais il a des arguments pour rouler longtemps.
Le tube de selle redressé est agréable pour pédaler en côte, même si, dans les forts pourcentages, on sent que l’avant a tendance à se délester. On perçoit qu’il a tout de même été un peu plus pensé pour dévaler les pentes que pour se tirer la bourre en montée. Encore que, il n’est pas contre le fait de tenter sa chance dans les montées impossibles et, souvent, on constate que ça passe, notamment grâce à l’excellent grip procuré par la suspension arrière avec son amortisseur à ressort.
Il faut oublier les clichés sur les amortisseurs à ressort qui pompent ou qui donneraient un effet « bateau » au vélo.
A ce propos, nous l’avions déjà souligné lors de notre prise en main du nouvel Orbea Rallon équipé d’un Fox X2 Coil, et c’est encore le cas ici avec le RockShox Super Deluxe Coil : il faut oublier les clichés sur les amortisseurs à ressort qui pompent ou qui donneraient un effet « bateau » au vélo. Désormais, c’est du passé.
Par contre, sur terrain mixte et technique (façon sentier en balcon avec des passages trialisants), le boîtier semble fort bas et les manivelles touchent le sol. Quand nous lui signalons, Thomas qui nous accompagne sourit : « On est d’accord et sur la version de série, nous avons remonté un peu le boîtier. Puis ici ce sont des manivelles de 175mm et il y aura des 170 en production. » Nous voilà rassurés !
Bon, maintenant qu’on est au sommet des montagnes, il est temps d’enfiler les protecs et de se retrousser les manches pour retourner dans la vallée. Au menu pour commencer… une impressionnante dégringolade droit dans la pente. Au-dessus, on stresse un peu en voyant la chose mais une fois qu’on est dedans, on garde sans aucun mal le contrôle du vélo et on n’a pas du tout l’impression d’être aux commandes d’un 38 tonnes qui tire tout droit et qui va avoir besoin de la voie de détresse pour s’arrêter. Ouf !
Quand on attaque du singletrack plein pot, le Commencal Meta Power impressionne par son agilité et sa vivacité. Il rappelle fort son cousin le Meta V4.2 et, quand il faut le comparer à d’autres VAE, c’est au nouveau Specialized Levo S-Works en carbone qu’on pense immédiatement. Belle référence, puisqu’il s’agit d’un vélo quasiment deux fois plus cher et nettement plus léger. On est aussi tout prêts à croire Commencal quand ils disent qu’ils font à peu près les mêmes chronos en descente avec le Meta Power et le V4.2. On a même parfois préféré le Power car l’arrière de l’électrique est un peu plus rigide que sur la version classique, sans tomber dans l’excès car le vélo reste très tolérant, et cela nous convient mieux.
Dans les portions lentes, souvent le point faible des e-bikes, le Commencal Meta Power est vraiment dans son élément. L’avant du vélo est facile à faire bouger, soit pour tourner ou pour le lever et enrouler les obstacles. C’est aussi un « bunny-upper » hors normes. Une fois encore, son poids s’oublie complètement et il semble bien plus léger qu’il ne l’est en réalité. C’est à ce moment qu’on commence à réfléchir et à se dire que le centrage des masses est vraiment un élément crucial sur un e-bike. Et que Commencal, en se souciant plus de cela que de l’aspect esthétique, a probablement tapé dans le mille.
Refuser des batteries intégrées encore trop longues est un pari risqué car beaucoup d’acheteurs fonctionnent avant tout au coup de coeur visuel, mais quand on choisit de privilégier le ressenti de terrain, c’est un choix qui nous semble très pertinent à l’heure actuelle… en attendant des batteries intégrées plus compactes !
Au moment d’évoquer ce point, on songe à la comparaison avec le Lapierre Overvolt AM en moteur Bosch, qui privilégie le centrage des masses au look et qui est désormais complété par un Overvolt AM i 2018 qui a lui une batterie intégrée Shimano mais avec lequel nous avons éprouvé quelques difficultés lors de notre prise en main. Enfin, c’est en Bosch et pas en Shimano, mais on pense aussi à Moustache qui a fait sa propre intégration d’une batterie classique, avec un résultat sur le terrain très intéressant. Il est plus polyvalent et type plaine/moyenne montagne que le Commencal mais les deux possèdent un caractère joueur auquel le centrage des masses n’est sans doute pas étranger.
Un autre point important de notre premier ressenti au guidon du Commencal Meta Power, c’est que nous avions l’impression d’être encore frais après ces deux sessions intensives où on a enquillé un bon petit 4000m de dénivelé négatif. D’habitude, on souffre plus des mains, des bras et des épaules, surtout avec un e-bike dont il faut être capable de tenir les 20 à 22kg sur de longues sessions.
Le centrage des masses et le fait qu’on n’a pas une direction camionnesque joue un rôle, mais les suspensions aussi. Fox fait une grosse razzia en ce moment, mais RockShox garde de solides arguments sur le terrain. L’amortisseur à ressort aide aussi à économiser le pilote au niveau des jambes en absorbant encore un peu mieux les mini vibrations qu’un amortisseur à air. Enfin, l’ergonomie du poste de pilotage et un détail comme les grips très confortables font office de cerise sur le gâteau.
Verdict
Le Commencal Meta Power nous a vraiment surpris sur le terrain. Avant la présentation, simplement en regardant le vélo, on avait le sentiment qu’il avait un train de retard sur la concurrence et que la marque andorrane avait loupé le virage de la batterie intégrée par manque de temps ou de moyens affectés au développement. Puis, quelques tours de roues ont suffi à balayer ces clichés. Le Meta Power est avant tout un Commencal, joueur, descendeur hors pair et une véritable machine à plaisir. Comme un bon vin, il ressemble au terroir où il est né. La partie moteur en devient secondaire et elle n’est là que pour aider à élargir son champ d’action ou augmenter le nombre de rotations possibles entre les descentes. Il n’est pas parfait mais cette façon de voir le vélo électrique est quelque chose qui nous parle et c’est, en toute subjectivité, un de nos e-bikes coup de coeur du moment.
Plus d’infos : www.commencal-store.com
Photos : Nico Brizin – Commencal
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