Perrine Devahive, le trial au féminin

Par Olivier Béart -

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Perrine Devahive, le trial au féminin

Perrine Devahive a 20 ans et c’est, hélas, un spécimen : une fille qui fait du trial ! A l’occasion de la présentation du Team Merida-Wallonie dont elle fait partie, nous avons pris un peu de temps pour faire mieux connaissance avec cette souriante petit blonde qui est championne de Belgique et parmi les meilleures mondiales de la spécialité.

Perrine, comment es-tu venue au vélo trial ?
C’était il y a 5 ans. J’ai vu vu une démo lors d’un show à Liège avec de la moto trial et du vélo trial. J’ai eu le coup de coeur. J’ai tout de suite eu envie de faire cela car je suis attirée par les sports un peu extrêmes. Mon père s’est mis à chercher un club pour que je puisse débuter. Et heureusement il y en a un à Aywaille, pas trop loin de chez moi. Et j’y ai justement retrouvé Thierry Klinkenberg qui était la personne qui m’avait donné envie de faire ce sport lors du show ! Puis, dès que j’ai commencé, j’ai assez vite évolué, ce qui m’a permis de prendre du plaisir rapidement.

Justement, ce n’est pas trop dur apprendre les bases ? Le trial, cela semble si inaccessible pour la plupart des bikers…
Moi, c’est justement cette difficulté qui m’a attirée. En fait, avant de faire du trial, je ne faisais pas vraiment de vtt. Pas de façon sportive du moins. Par contre, j’ai fait beaucoup de gymnastique quand j’étais petite. Cela m’a donné de très bonnes bases d’équilibre et au niveau de la compréhension du schéma corporel. Par contre, je n’avais pas de « mauvaises habitudes » que peuvent prendre certains vttistes « classiques ». Malgré tout, au début, c’est clair qu’il faut vraiment s’accrocher pour rester sur le vélo, tenir sur la roue arrière, etc. Mais quand on a ces bases, on peut vraiment commencer à s’amuser. Il y en a beaucoup qui abandonnent avant car ce n’est pas facile pour tout le monde. Pour ma part, j’ai eu la chance d’évoluer assez vite de ce côté, et donc de vraiment accrocher à la discipline.

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Aujourd’hui, tu fais aussi du vtt « classique » ou d’autres disciplines du vélo ou justement pas car ce serait nuisible pour ta pratique du trial ?
Il y a plusieurs écoles à ce niveau mais pour le moment je fais justement de plus en plus de vtt classique car Kenny Belaey, qui m’aide et me coache, trouve que hors saison il faut avoir de bonnes bases d’endurance. Certains ne travaillent que l’explosivité, mais   lui trouve qu’il faut avoir les bases pour tenir et avoir des performances stables sur toute la durée d’une course. Je fais donc de plus en plus de course à pied, de vtt, de crossfit,…

Le physique, c’est ton point fort ? Et quels sont tes points faibles ?
Oui, c’est une de mes qualités. Par contre j’ai du mal avec la gestion du stress. Au championnat d’Europe, à une erreur près, je finis 2e derrière la championne du Monde. Je saute aussi haut que les meilleures et je passe les zones aussi bien qu’elles… sauf qu’il m’arrive de perdre mes moyens face à l’enjeu. Si je veux progresser, c’est cela que je dois travailler.

Perrine_Devahive_Copyright_OBeart_VojoMag-1En Belgique, le niveau est-il vraiment suffisant pour t’aider à progresser également ?
Il y a quelques compétitions en Belgique, c’est déjà très bien. Mais il y en a beaucoup moins que pour le vtt classique. Et souvent il y a très peu de filles. Il arrive qu’on se retrouve à deux ou trois. Mais nous pouvons alors concourir avec les garçons et choisir notre catégorie. Alors cela devient nettement plus intéressant et bon pour l’entraînement en vue des échéances internationales.

Sur les parcours de Coupe du Monde, quelles sont les différences au niveau des difficultés techniques par rapport aux hommes ?
Nous n’avons pas la même force que les meilleurs hommes. Nous ne savons donc pas sauter aussi loin ou aussi haut. Il faut donc adapter les obstacles et les lignes. Mais ces derniers temps, le niveau augmente pas mal. On voit arriver des filles avec beaucoup plus de puissance et j’espère que cela va continuer car c’est bon pour le trial en général de voir que les filles ne proposent pas un spectacle « au rabais », très loin de là !

Perrine_Devahive_Copyright_OBeart_VojoMag-6Justement, comment booster la discipline et pour les filles en particulier ?
Au niveau des courses, pendant longtemps, il a manqué le bon créneau horaire aux filles pour simplement montrer au grand public qu’elles existent. Les Coupes du Monde féminines avaient lieu la veille de la course hommes. Ce qui n’est vraiment pas idéal pour les spectateurs ! L’an dernier c’était mieux car nous étions juste avant les hommes comme en XC. Après, le problème de notre sport est aussi un problème de médiatisation et de conservatisme des grands médias qui s’intéressent toujours aux même sports mais pas à d’autres. Le vtt n’est déjà pas très bien logé, mais le trial en est encore le parent pauvre. Pourtant, je suis persuadée que cela pourrait intéresser beaucoup de monde car c’est spectaculaire et extrême sans être trop dangereux.

Le côté show, qui marche pour quelques-uns comme Kenny Belaey, est-il un passage obligé ? 
Bien sûr, l’aspect show aide à attirer l’attention médiatique. Kenny le fait de plus en plus, comme dans le cadre du Tour du Quatar, du salon de l’auto de Bruxelles, etc. Je crois que c’est une bonne chose car cela fait connaître le sport. Je suis un bon exemple : c’est un de ces shows qui m’a amenée au trial ! Puis il y a aussi les stars du street trial comme Mc Askill, ou encore Andrei Burton – qui passe dans Top Gear et qui touche public différent. Ce n’est pas pareil qu’une course mais j’ai énormément de respect pour ces personnes là.

Merida_Wallonie_Présentation_16Neuf_Copyright_OBeart-9Ces shows, tu en as déjà fait ? Cela te tente-t-il ?
Oui, j’en a déjà fait quelques-uns avec Kenny et Thierry. Les gens souvent très étonnés de voir une fille et j’entend régulièrement  des petits « oh, t’as vu, c’est une fille ». Mais bon, ce n’est pas possible de faire tout. Déjà que combiner l’entraînement et des études universitaires, c’est déjà dur à gérer. J’ai aussi mis un peu de côté mon site ilovetrialbikeforgirls par manque de temps. Puis, je peux compter sur l’aide du team Merida-Wallonie, ce qui est très précieux, et je ne les remercierai jamais assez de m’offrir la chance de pratiquer ma passion dans les meilleures conditions optimales.

Perrine_Devahive_Copyright_OBeart_VojoMag-4Quels sont tes objectifs l’an prochain ?
Je vais essayer d’accrocher un ou plusieurs podiums en Coupe du Monde et sur des compétitions internationales. A l’entraînement, je vois que c’est possible et je me suis faite aider pour mieux maîtriser mon stress. Je mise aussi beaucoup sur les championnats du Monde. La saison va bientôt recommencer en Belgique alors que la saison internationale démarre seulement fin mai. Ce sera déjà une bonne occasion de me tester.

ParOlivier Béart