Tito Tomasi à la découverte du Canada
Par Paul Humbert -
Le rider, artiste et voyageur Tito Tomasi parcourt le monde au guidon de son vélo. Il expédie à intervalles réguliers les plus belles images de ses voyages, qu’il agrémente souvent de ses peintures. Il aura fallu attendre 13 de ses voyages pour le voir poser ses crampons au Canada. Sur les terres de son sponsor, Rocky Mountain, le Français s’évade en Colombie Britannique. Peu avant de prendre le départ de la BC Bike Race, Tito a décidé de partir cinq jours en autonomie sur le territoires des Chilcotins. Entre les sommets enneigés et les grandes étendues d’eau, l’aventurier nous livre son récit dans cette nature préservée, sur le territoire des grizzlis.
L’avion me pose à Vancouver, ça tombe bien il y a une belle marque de vélos qui a ses bureaux ici, et je roule pour eux! Rocky Mountain m’accueille et m’emmène visiter la ville. On parle de mon trip et de ce que je veux faire. J’ai n’ai pas l’habitude de me laisser guider mais cette fois j’écoute un peu, on me parle beaucoup des grizzlys invincibles … Je charge un Altitude dans ma caisse de loc et je sors de la ville, direction la nature!
Je passe une première semaine à rouler dans les environs de Whistler, histoire de comprendre le terrain et de sentir l’odeur des pins. Arrivant de la Clusaz et d’Annecy, je ne me sens pas vraiment dépaysé question paysages. En revanche, les chemins n’ont rien n’à voir, et plus plus largement, la façon de faire du vtt n’a rien à voir. Tous les sentiers autour de Whistler de Pemberton ou de Squamish ont été crées pour les vélos. Sur place, je retrouve les Français expatriés pour rouler et échanger: Rémy Metailler, Yoann Barelli et mon pote Audric qui n’emmène partout. On se régale sur les trails de Squamish, pleins de flow et de sauts bien nés.
De retour à Vancouver, je pars rouler sur les passerelles du North Shore avec l’équipe Rocky Mountain. Le spot est tellement proche de la ville que nous partons depuis les bureaux pour se marrer dans les bois. L’ambiance est différente, les sentiers plus techniques, il faut jouer dans les racines bourrées de petits sauts et de passages cassants. Je profite à fond de ces moments de communauté et de folie. Ici, il y a énormément de monde qui roule, et souvent il y a autant d’hommes que de femmes ! C’est vraiment génial de voir le vtt comme un style de vie, entre partage et nature.
Après ce début de voyage, c’est le moment de passer aux choses personnelles. Un trip en solo dans le nord. Direction les Chilcotins, un parc national magnifique, parsemé de lacs et de grandes forêts. Les altitudes varient beaucoup, entre 800 mètres et 2700 mètres pour les sommets et glaciers. Originellement tracés par les cavaliers à la recherche d’or, les sentiers servent aujourd’hui aux vététistes. La majorité des randonnées commencent par une dépose en hydravion sur un lac avant d’entamer le chemin du retour par les sentiers.
Mon périple en autonomie commence bien, même si je n’ai pas vraiment l’habitude de porter un sac aussi gros. Je me régale sur les sentiers roulant et ludiques. Ils n’ont rien à voir avec ceux des Alpes, des Andes ou de l’Himalaya. En roulant, je m’enfonce dans les montagnes, je découvre les lacs et la beauté des terres presque intactes. Ici, il n’y a pas de routes, pas de villages ni de câbles. C’est magnifique. Depuis le haut des cols, les descentes sont enivrantes jusqu’aux lacs ! Je n’oublie pas de crier et de chanter pour prévenir les habitants du coin : Les grizzlis. Il faut en être conscient, le coin est connu pour en regorger ! C’est d’ailleurs pour cette raison que mes camarades de chez Rocky m’ont prêté un téléphone satellite, une bombe au poivre et un « machin-qui-explose-pour-faire-peur-au-grizzly ». J’espère ne pas avoir à me servir de tout ça !
Je passe beaucoup de temps à contempler les paysages uniques et inhabituels. Parfois je croise quelques vététistes. On parle un peu et on échange des conseils.
La nuit, après avoir englouti mes sachets déshydratés, je m’endors dans ma mini tente. J’ai préalablement stocké ma nourriture dans les caches spéciales anti-ours. Après trois jours, au moment où mon stock de nourriture arrive à zéro et que je décide de rentrer, deux Canadiens me donnent de nouvelles vivres. Ils rentrent et ça ne leur servira plus ! C’est super, je peux rester un petit peu plus. Le soir même, alors que je retourne dormir près de Spruce lake, je tombe sur un groupe de gars venus à vélo. Ils ont fait monter leur matériel de camping et de pèche par avion pour rester quelques jours au bord du lac. Ils me prennent pour un fou à voyager seul ici au milieu des grizzlis. Ils m’invitent finallement à passer la soirée avec eux. C’est un bon prétexte pour économiser de la nourriture et continuer à rouler, ça me va bien ! Je suis toujours étonné par le style de vie des canadiens, leur amour de la nature, du sport et du partage. C’est le solstice d’été et le ciel est magnifique.
Le matin suivant, un aigle à tête blanche pèche sur le lac, la brume se dissipe et je mange un petit-déjeuner en compagnie de mes nouveaux amis. La nature est calme et la rosée me rafraichit les mollets quand je repars sur les sentiers. Je pars en quête de liberté et de sensations. Cette dernière journée est magique et silencieuse, j’avale beaucoup de dénivelé mais je sais déjà que mon retour à Vancouver approche. Les descentes sont folles, je traverse des rivières le vélo sur le dos, je roule dans la neige et je me régale. Alors que je ne m’y attendais plus, je croise un magnifique grizzly sur mon sentier! Quel moment intense, la bête est a quelques mètres seulement et elle s’apprête à venir vers moi. Je lui hurle dessus et elle retourne finalement vers ses petits restés derrière les arbres. Ma caméra était éteinte à ce moment mais cette rencontre restera gravée dans ma mémoire.
Après ce moment magique, j’ai l’impression d’avoir accompli quelque chose de personnel et je décide de rentrer. Heureux mais fatigué, je retourne à la civilisation.
De retour à Vancouver, j’échange mon Altitude contre un Thunderbolt. Je me prépare à attaquer une des plus belles épreuves au monde: la BC bike race. Je me lance dans sept jours de ride avec 620 autres participants! Le contraste avec mon aventure dans les Chilcotins est immense mais le plaisir de rouler est le même. Les sentiers sont les formidables et l’ambiance de partage est incroyable. Mais c’est une autre histoire. Je vous la raconterai une autre fois. En attendant, après le texte et les photos, place à la vidéo. Enjoy !
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Textes et photos: Tito Tomasi