Coupe du Monde DH – Plus élitiste en 2016 ?

Dans un communiqué de presse, l’Union Cycliste Internationale (UCI) vient de dessiner les contours de la saison 2016, avec des changements dans de nombreuses disciplines, dont le vtt et plus précisément la Coupe du Monde de DH. Nous avions eu vent de discussion entre l’UCI, les teams et RedBull Media House (le diffuseur de la Coupe du Monde) durant de la saison, et il semblerait qu’une décision ait été prise. Au programme : moins de pilotes, un accès plus difficile à la compétition et des frais d’entrée plus élevés. Dans quelle proportion ? Peu d’infos ont filtré mais nous avons tenté d’en savoir plus. 

Le communiqué :

« En prenant en compte l’intérêt grandissant du VTT de descente, il été décidé de réduire le nombre total de riders engagé dans la Coupe du Monde présentée par Shimano. Cela permettra de réduire la pression sur le tracé pendant les entrainements, sur les espaces exigés des organisateurs, ainsi que sur l’emploi du temps et le timing de la course en cas d’interruption/de drapeau rouge. Cela réduira les larges possibilités d’accès à la Coupe du Monde à des riders ne disposant pas de suffisamment d’expérience. Dans le même esprit, l’UCI Management Committee approuve la hausse des frais d’inscription des équipes (UCI Mountain Bike Team). »

Notre analyse :

Pour comprendre les problèmes que soulève une telle décision, il est important de rappeler que, si une partie des plus grosses équipes fonctionne avec un budget de fonctionnement élevé, la majorité des teams doit se battre chaque hiver pour assurer à ses pilotes une saison dans de bonnes conditions. Un réelle dichotomie existe entre les grosses et les petites équipes. Pourtant, il n’est pas rare de voir émerger les plus grands talents des équipes plus modestes. Poussés par leur passion et leur ingéniosité, certaines structures modestes arrivent après plusieurs saisons à se construire une place parmi l’élite. La dimension de notre sport n’a rien de commun avec celle de disciplines beaucoup plus médiatiques comme la F1 et ce sont avant tout des personnes passionnées qui investissent de leur temps et souvent de leurs moyens personnels pour faire vivre ce sport.

Derrière cette décision, il est bien évidemment question de couverture médiatique. Un nombre réduit de pilote garantit ainsi une plus grande présence dans les médias de ces derniers une plus grande visibilité. Le « produit » Coupe du Monde de descente devient ainsi plus facile à vendre à des marques aux budgets importants. C’est bien les médias, et la couverture qu’ils apportent qui permet aux équipes de grandir. Sans circuit parallèle, préparateur, médiatisé et reconnu internationalement, le sport perdra beaucoup. Réduire l’accès à la Coupe du Monde, c’est ajouter une barrière supplémentaire à la naissance de talents. Pourtant, créer un circuit national ou trans-national préparateur permettrait, si ce dernier garantit des pistes de qualité et un minimum de couverture médiatique, de renforcer l’assise de l’élite tout en formant les top-pilotes de demain. Sans un tel circuit, il ne sera pas surprenant de voir des petits team disparaître, faute de moyens et de perspectives de couverture médiatique « alternative ». Pour les « gros » team en revanche, il est fort probable qu’ils verront leurs moyens se multiplier. Il conviendra donc pour les équipes de faire les bons choix, si ces dernières en ont la possibilité.

Derrière cette annonce, difficile de ne pas imaginer qu’on retrouve la patte des plus grosses structures qui cherchent à augmenter leur visibilité et ainsi à revaloriser leurs contrats. De son côté, le diffuseur RedBull Media House a tout intérêt à travailler à la construction d’un programme spectaculaire, court et rythmé par les mêmes acteurs tout au long de la saison afin de créer un feuilleton facilement commercialisable. Tout ceci n’est que des suppositions mais nous aimerions connaitre la place qu’à pris le facteur « sport » dans ce choix car, à ce stade, il nous semble être en retrait.

Chez Vojo, nous sommes persuadés que la performance sportive n’est pas freinée par le format actuel de la Coupe du Monde. Une légère réduction du nombre de pilotes associée à la création d’un circuit préparateur pourrait même être bénéfique. Mais tout est une question de mesure. Le changement qui semble s’opérer ouvrira la porte à une plus grande médiatisation, probablement plus qualitative, mais à quel prix ?

L’avis de Laurent Delorme (Pure Agency, team manager de l’équipe Lapierre Gravity Republic)

« Avec cette décision, l’UCI permet à l’élite de se démarquer de la masse. Certains critères d’accès sont trop faciles et dans certains pays où le niveau est peu élevé il est possible de décrocher des points facilement et d’accéder à la Coupe du Monde sans réellement en avoir le niveau. La Coupe du Monde est le plus haut niveau mondial en VTT et on retrouve parfois au départ des courses des personnes qui ne sont pas à leur place. Dans ce sens, je soutiens cette décision, même si je n’en connais pas les dispositions exactes à ce stade. Il est important de valoriser la création d’un circuit préparateur et de créer des paliers dans la progression des athlètes. Aujourd’hui, certains pilotes sont dans un constat d’échec en ne passant pas les qualifications à chaque course. Il faut faire à la mesure de ses ambitions. Pour cela, il faut valoriser les circuits continentaux et il ne faut surtout pas supprimer le vivier de jeunes. Sur les Coupes du Monde, il faut continuer à laisser un accès aux équipes nationales qui opèrent déjà à une sélection. 

Du côté de la présence médiatique, je ne pense pas qu’il faille avoir trop peur d’une réduction de visibilité. Elle est effective depuis plusieurs saisons et RedBull opère à des choix. Quand un pilote quitte le top 30, il n’a aucune médiatisation de la part de RedBull mais un pilote qui performe, peu importe son team, aura sa part de visibilité. « 

Nous nous dirigeons probablement vers une refonte globale du circuit mondial. Laurent Delorme nous confiait qu’un projet radical de limitation de la Coupe du Monde à 10 ou 20 athlètes a été abandonné (il aurait été complété d’un circuit DH2). Dans tous les cas, cette démarche devrait inciter les organisateurs nationaux à se pencher sur leur offre d’évènements.

Et vous, qu’en pensez vous ? Rendez-vous sur notre page Facebook pour en discuter ! http://www.facebook.com/VojoMagazine/posts/981585348560020