Par Paul Humbert -

  • Tech

Nous avons tous en tête des dizaines de marques de composants haut de gamme qui commercialisent leurs produits en « after-market », dans les magasins. Pourtant, ce qui représente le plus gros du marché au niveau du chiffre d’affaire, ce n’est pas ça : c’est ce qu’on appelle l’OEM (original equipment manufacturer), ou encore la « première monte ». On retrouvera bien évidemment des marques très célèbres sur les vélos haut de gamme mais dès qu’on s’intéresse au milieu et au bas de gamme, on découvre d’autres enseignes bien moins connues alors qu’il s’agit de poids lourds du secteur. Et, surprise, nous avons quelques fleurons du domaine en France ! Nous nous sommes rendus chez l’un d’entre eux, Mach 1, qui s’est spécialisé dans la confection de jantes, rayons et embouts. À Saint-Etienne, embarquez au coeur de l’OEM.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-23Mach 1, c’est 3 millions de jantes par an, 280 millions de rayons et d’écrous, une cinquantaine de machines produites à l’année… et tout cela en France ! Pour vous donner une petite idée de l’impact de la société sur le marché du cycle, Mach 1 touche 20% du marché européen.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-41Quand nous demandons à Robert Marchal, le directeur général de la société, quel est le « gros du marché », il nous ramène à une réalité pragmatique : Les vélos « city » représentent 50% des parts, quand le VTT et la route se partagent l’autre moitié. Les pays porteurs pour les vélos de ville sont l’Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-48Le catalogue « vélo » de Mach 1 est composé de jantes simples ou doubles parois, d’un grand nombre de rayons et d’autant d’écrous. La majorité de ces produits sont destinés à l’entrée de gamme mais la marque propose également une sélection de produits de plus haut niveau de performance.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-25Et quand on s’interroge sur la non présence de roues complètes assemblées au catalogue, la réponse est toute simple: « Nous deviendrions les concurrents directs de certains de nos clients que nous fournissons ». Evidemment !

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-43Il n’est pas toujours évident d’identifier un produit Mach 1, et c’est souvent voulu. De grandes marques de vélo se fournissent auprès de l’entreprise en sélectionnant des produits qui viendront équiper ses machines et, au moment du montage, la marque Mach1 s’efface au profit de celle choisie par le constructeur. C’est le principe même de l’OEM. Pour d’autres, le logo et les stickers de l’entreprise Mach 1 restent bien visibles. Pour vous situer, l’entreprise compte les groupes Accell et Décathlon parmi ses plus gros clients.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-50Quand une entreprise spécialiste de l’OEM comme Mach 1 cherche à vendre des produits accessibles et qualitatifs, il est tout aussi important pour elle de connaitre les tendances, les attentes et les nouveautés sur le marché. Il n’ont rien d’une entreprise de « copie » de modèles haut de gamme. Ainsi, le vélo électrique est au coeur des préoccupations, tout comme le format 27,5 Plus. Plus généralement, les profils des jantes ont tendance à s’élargir et il est important pour la marque de proposer des solutions technologiques avancées au meilleur prix. On pense notamment au tubeless.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-6La recherche et le développement ne s’arrête pas aux jantes mais elle concerne également les rayons et les écrous, en bref, tout ce qu’il faut pour qu’une roue tourne !

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-27Sur le marché, vous pourrez retrouver des produits Mach 1 sur des vélos commercialisés aux tarifs compris entre 99 et 6000 euros… difficile de faire plus large !

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-7Quant à la protection de la propriété intellectuelle, pour Mach1, les brevets sont importants mais très lourds à mettre en place. Il est donc primordial pour eux d’exploiter en premier les bonnes idées.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-39Au fil de notre visite, nous découvrons avec Bruno Bayard les contraintes de cette entreprise en de nombreux points différente de celles que nous visitons habituellement. Chez Mach 1, le produit n’est pas toujours le plus « sexy » mais le client qui le commande aura la certitude de pouvoir travailler avec exactement ce qu’il a commandé. À la commande de boites de 20 000 écrous, si une boite contient cinq écrous défectueux et que trois boites sont dans ce cas là, toute la production est changée. Ce qui vous situe les enjeux en termes de qualité.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-49La discussion nous amène à découvrir les enjeux cruciaux et les forces de Mach1. L’entreprise est fière d’annoncer des délais de livraison très courts à ses clients ainsi qu’une bonne réactivité sur ses commandes. L’outil de production de l’entreprise est segmenté en fonction des produits fabriqués, mais surtout, en fonction de sa flexibilité. La rupture d’approvisionnement est la chose à éviter pour l’entreprise.

Sans titreJustement, côté produits, Mach 1 propose à ses clients des jantes à simple ou double paroi (que l’on retrouve aujourd’hui sur la majorité des VTT sportifs). Des jantes spécifiques pour chaque taille de roues sont produites et on retrouve des modèles dédiés aux vélos électriques, des modèles larges comme des plus étroits et des solutions « Tubeless » pour les jantes les plus haut de gamme (« Easy Tubeless Ready »). Pour chaque pratique, une large sélection de rayons et d’écrous sont proposés.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-33Face aux évolutions du marché, Mach1 s’intéresse bien évidemment aux vélos électriques mais également aux autres tendances que sont le « Plus » ou le Gravel et le Fat dans une moindre mesure.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-46En prenant le temps de revenir un petit temps en arrière, nous découvrons l’histoire de cette entreprise française. Née en 1937 sous le nom de « Rayons Bernard », l’activité cycle de l’entreprise démarre à proximité de Saint-Etienne. C’est en 1992 que l’entreprise se transforme et devient Mach 1. Quatre ans plus tard, la marque s’ouvre à la production de jantes à simples parois. En 1999, la double paroi envahit les ateliers et depuis 2006, l’entreprise propose une gamme complète de jantes, rayons et écrous. Le service « just in time » assurant des délais de livraison très courts a été mis en place en 2013 et aujourd’hui la marque s’ouvre petit à petit sur le développement de produits à destination des particuliers.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-35L’entreprise compte, en moyenne, 80 salariés et n’envisage pas de voir sa production quitter la région ou le pays. Quand on aborde le sujet de la délocalisation, les dirigeants de l’entreprise nous expliquent que pour une meilleure réactivité et flexibilité, rien ne vaut une production française. Celle-ci est d’ailleurs justifiée dans le cadre de production artisanale ou, dans le cas de Mach 1, de production de masse ne nécessitant que peu de main d’oeuvre (le taux de main d’oeuvre ne dépasse pas 14%). Le service et la rapidité de livraison sont essentiels pour Mach1. Les corps de métiers nécessaires à l’activité de l’entreprise sont d’ailleurs très présents dans la région d’implantation du fabriquant.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-28

La production suit trois orientations principales. La première est la production de rayons. La productivité est haute et le contrôle qualité est omniprésent.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-5Une première salle est dédiée à la production des différents modèles.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-9Arrivés en bobines, ils sont redressés, coupés et stockés. Les rayons sont ensuite protégés par électro-galvanisation.

Sans titre2Relativement peu complexes, les jantes à « simple paroi » sont produites dans la salle suivante. Avant d’être ronde, votre jante n’est rien d’autre qu’une longue bande d’aluminium qui est ensuite arrondie, assemblée puis percée.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-11Un « ballot » pèse entre 500 et 600 kilos et permet la création d’environ 1000 jantes.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-38L’outil de production n’est pas très flexible mais il produit des gros volumes comme nous l’explique François Joly.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-31Plus loin dans l’usine, nous entrons dans la zone dédiée à la production des jantes à double parois que nous connaissons bien à VTT. Cette activité est d’ailleurs en pleine croissance.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-26Le premier atelier est dédié à la production de jantes en grande quantité, mais là aussi, la flexibilité est plus réduite. Seuls deux profils sortent de cette ligne et il est difficile de changer rapidement la production de l’atelier.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-29En revanche, dans la pièce suivante, bien moins de pièces sont produites mais les petites productions permettent une plus grande flexibilité.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-20Des petites productions sont parfois demandées sur certains modèles. Il est également parfois nécessaire de livrer des productions de couleurs différentes. C’est ici que tout se passe. Mach 1 propose le « stickage » et le marquage de ses produits. Là encore, tout est pensé pour optimiser l’outil de production et d’assurer les meilleurs délais de livraison.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-42On nous présente également les différentes moyens de « fermer » une jante. La première, la plus simple mais aussi la plus lourde, consiste à intégrer un « guide » tout le long de la jante et de joindre les deux extrémités pour la fermer. C’est la technique utilisée pour tous les produits d’entrée et de milieu de gamme. L’autre technique, plus moderne, consiste à utiliser une goupille (de 40 ou 50 grammes) qui viendra s’insérer et effectuer le lien.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-32Une simple soudure peut également permettre de fermer une jantes mais cette technique n’est pas utilisée par l’entreprise car même si elle peut s’avérer plus légère, elle est aussi moins fiable.

Mach-1-vojo-2016-paul-humbert-51Bien que fabriquant « OEM », nous interrogeons les dirigeants sur leurs intérêt pour les produits en carbone. Ils nous répondent très simplement qu’ils ne disposent pas des connaissances nécessaires et qu’à l’heure actuelle, la production de roues en carbone est plus proche de l’artisanat que de l’industrie. Le carbone est une petite niche (0,5%) sur un marché global du vélo, parfois bien loin de nos préoccupations de puristes. Parfois, il est bon de ne pas l’oublier et de s’ouvrir à d’autres horizons, comme lors de cette visite d’uns des fleurons méconnus du vélo made in France.

Plus d’informations sur le site de la marque: www.mach1.fr

ParPaul Humbert