Découverte | Rwandan Epic : jour de course, jour de fête en Afrique de l’est !

Par Olivier Béart -

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Découverte | Rwandan Epic : jour de course, jour de fête en Afrique de l’est !

Vous connaissez sans doute l’Afrique du Sud grâce au Cape Epic, et le Rwanda a aussi clairement la volonté de se profiler comme destination de choix pour la pratique du VTT. En prélude à l’organisation d’une vraie course par étapes sur 4 jours en 2021, les organisateurs du futur Rwandan Epic ont organisé cette année une sorte de « test event » sur une journée. Vojo y était, histoire de vous donner l’eau à la bouche et de vous montrer à quoi peut ressembler une course de VTT dans ce magnifique petit pays d’Afrique de l’est.

Le cyclisme est le 2e sport le plus populaire au Rwanda, derrière le football. S’il s’agit surtout de cyclisme sur route – une discipline dans laquelle les coureurs du « Team Rwanda » s’illustrent à travers toute l’Afrique et même au-delà – le VTT se développe aussi de plus en plus. Cela se fait sous l’impulsion de quelques expatriés, mais aussi suite à la participation de coureurs rwandais aux deux derniers Jeux Olympiques en VTT et à la volonté du pays de faire du cyclisme un sport pratiqué à l’école dès le plus jeune âge.

Le vélo est aussi et surtout ici un moyen de transport très utilisé ici, tant pour les personnes (avec les fameux vélos-taxi), que pour tous types d’objets. On voit d’ailleurs un peu partout des locaux pousser des vélos chargés de plusieurs centaines de kilos de marchandises, et descendre à toute vapeur tout aussi chargés.

Le pays comptant bien plus de pistes que de routes asphaltées, et une infinité de singletracks, on se rend très vite compte sur place qu’il y a là tous les ingrédients de base pour faire une excellente recette !

Avant de parler de la course et de s’immerger dans l’ambiance locale, un petit mot sur le Rwanda nous semble indispensable. Aujourd’hui encore, ce nom rappelle le génocide qui a marqué le pays il y a à peine plus de 25 ans. Mais si personne n’a oublié, la page de ce triste épisode est bel et bien tournée et le pays connaît aujourd’hui une croissance et une stabilité dont peu de pays africains peuvent se targuer.

La sécurité y est aussi un des points forts, comme nous avons pu le constater en arpentant le pays un peu avant et après la course ; parfois seul ou en petit groupe, sans jamais ressentir le moindre malaise, la moindre réaction hostile. Que du contraire, à la campagne comme à la ville, notre périple n’a été accompagné que de sourires, de réactions curieuses et enthousiastes.

Cela n’occulte évidemment pas la grande pauvreté dans laquelle vit encore une part significative de la population, mais des événements de proximité comme celui que nous allons vous montrer ici, sont source de revenus pour l’économie locale et tant les organisateurs que les institutions officielles sont attentifs aux retombées positives que cela peut générer.


Pour cette « édition zéro » du Rwandan Epic, le rendez-vous est fixé non loin de Musanze, une ville située à environ 100km de la capitale Kigali.

On se trouve ici à près de 2000m d’altitude, avec tout autour de nous les 5 grands volcans qui délimitent la frontière nord du Rwanda avec le Congo et l’Ouganda. C’est non loin d’ici que se trouvent aussi les principales réserves de gorilles du pays, rendues célèbres par la primatologue Diane Fossey.

Si cet endroit a été choisi comme centre névralgique de l’épreuve, c’est parce qu’il abrite l’Africa Rising Cycling Center, qui est non seulement la base de l’équipe nationale mais aussi un centre qui peut accueillir des cyclistes et vttistes de tous bords, désireux de profiter de la région sur deux roues. Atelier, restaurant, maisonnettes où loger : il y a là tout ce qu’il faut pour faire partir une belle épreuve.

Le Rwanda Epic « édition 0 »

Vu la crise du Covid, il était impossible pour l’organisation de pouvoir faire dès cette année une épreuve par étape complète et d’espérer accueillir un nombre significatif de coureurs étrangers. Ils ont donc décidé de retourner le problème en opportunité pour organiser un « test event » destiné à servir de répétition générale en vue du « vrai » Rwanda Epic qui aura lieu en 2021.

Derrière cette épreuve, on retrouve quatre expatriés : deux Belges qui s’appellent tous les deux Simon, Shaul qui est Israélien et Matt, originaire de Grande-Bretagne. Tous sont passionnés de  VTT et ils ont réuni autour d’eux une équipe de locaux avec le soutien de la fédération rwandaise de cyclisme, afin d’organiser cette épreuve et de développer l’attractivité du pays pour la pratique du VTT.

Ce test event a pris la forme d’une course de XC « à l’ancienne », avec 4 tours d’un parcours de 13km tracé autour de l’Africa Rising Cycling Center de Musanze. Il s’agissait de la première course de VTT organisée depuis 2016 dans le pays ! Visiblement, l’événement était attendu et il devrait marquer la relance de l’organisation de différentes épreuves dans le nord du pays, depuis la simple rando jusqu’à des courses locales.

Sur la ligne, plus de 50 coureurs se sont retrouvés pour former un beau peloton très varié avec des expatriés, quelques grands noms du cyclisme local comme Adrien Niyonshuti et Nathan Byukusenge qui ont représenté le pays aux deux dernières olympiades, de jeunes compétiteurs locaux désireux de profiter de l’occasion pour s’essayer au VTT, de simples randonneurs qui ne voulaient manquer ce moment sous aucun prétexte même s’ils ne sont en général pas attirés par les courses, plusieurs femmes aussi,…

Un parcours cassant et un public bouillant !

On l’a dit, le parcours a été tracé sous forme d’une longue boucle de 13km au pied des volcans. Pas de dénivelé impressionnant au programme ici car on reste dans les plaines d’altitude, qu’on appelle aussi le potager du Rwanda, mais on a ici une succession de chemins cassants qui imposent d’être toujours actif sur le vélo et très attentif pour ne pas se faire surprendre.

Quelques coups de cul bien raides viennent pimenter le tout et favoriser les attaques des plus forts, ainsi que mettre en avant les qualités techniques des pilotes les plus fins. Quelques singletracks ludiques agrémentent le tout.

Au sol, outre de la terre battue, on trouve d’innombrables rochers qui affleurent et qui donnent un bel avantage aux rares coureurs en tout suspendu, et il faut aussi sans cesse se frayer un passage au milieu des crevasses créées par les écoulements d’eau ainsi que l’usage intensif des locaux pour leurs activités quotidiennes.

Le tout se déroule dans un cadre grandiose, avec les volcans qui vous guettent en permanence et un ciel qui change en permanence…

…passant du grand bleu à un noir menaçant en quelques instants à peine.

Et puis, comment oublier le public ? L’événement a rassemblé plusieurs milliers de personnes au fil des villages traversés, venus assister à ce rare et drôle de spectacle qui se passe tout près de chez eux. Cris au moindre « bunny up », applaudissements fournis pour tous les coureurs jusqu’au dernier, chants et holà pour les coureurs les plus connus dans la région : il faut le vivre pour se rendre compte de ce que cela représente réellement et j’en ai encore la chair de poule en écrivant ces lignes !

Côté course

Au niveau de la course proprement dite, l’épreuve a été remportée par le champion national espoir sur route, Jean-Eric Habimana, de l’équipe continentale Saca. Il s’agissait de sa toute première course de VTT ; une discipline qu’il n’a commencé qu’en juin de cette année, encouragé par quelques expatriés qui ont vu en lui de belles qualités techniques.

Très à l’aise sur son VTT, doté d’excellentes qualités physiques, il s’est imposé avec près de 3 minutes d’avance sur son premier poursuivant. Et il a clairement envie de retenter l’expérience : « J’aime de plus en plus le VTT et cette victoire sur ma première course me donne vraiment envie de voir ce que je vaux face à des pros de la discipline. Je vais voir avec mon équipe et avec la fédération ce qu’il est possible de faire, mais pourquoi pas suivre l’exemple de Nathan et essayer de me qualifier pour les JO en 2024 ? »

Derrière lui, on retrouve Simon Hupperetz, un jeune belge qui vit au Rwanda depuis 2015 et qui est très actif dans le cyclisme local. Il s’est notamment occupé de coacher Nathan lors des JO en 2016 et il s’est aussi occupé du Team Rwanda sur route, entre autres nombreuses activités.

Passionné de VTT, entraîneur diplômé de l’UCI, ancien très bon coureur toujours très en forme et bien connu dans le pays (« Simoni » comme on l’appelle ici, égale certains locaux à l’applaudimètre !), il est une des chevilles ouvrières du Rwandan Epic et il a à cœur de permettre à d’autres européens de découvrir les charmes de ce pays dont il est tombé amoureux et qu’il ne compte pas quitter de si tôt.

Le podium est complété par la star Nathan Byukusenge qui ne voulait rater cette course sous aucun prétexte, même s’il n’est plus au top de sa forme, contrairement à la période avant 2016 quand il avait décroché sa qualification pour les JO. Son but est plus aujourd’hui de continuer à inspirer des jeunes et à les intéresser au VTT.

Plus grande star encore, mais plus âgé aussi, Adrien Niyonshuti s’occupe aujourd’hui de l’entraînement de l’équipe Saca après avoir participé aux JO VTT en 2012 et roulé dans des équipes World Tour pendant plus de 10 ans. Et s’il a tenu à être au départ, il a surtout tenu à donner son VTT personnel, ainsi que ceux disponibles dans l’équipe, à ses jeunes coureurs. Il s’est donc retrouvé… sur un vélo de gravel ! Ce qui n’était pas vraiment (voire même pas du tout) le choix idéal puisqu’il a rapidement crevé et dû marcher jusqu’au centre avant de pouvoir réparer. Mais qu’à cela ne tienne, il était là pour le plus grand plaisir du public et il a fini, ce qui est le principal !

Du côté des dames, c’est la talentueuse Marthe Ntakirutimana qui l’emporte largement, s’offrant au passage un top 10 au général, le tout en baskets et sur un VTT qui n’a rien de haut de gamme.

Au passage, c’est l’occasion de souligner que le Rwanda met l’égalité hommes/femmes dans ses priorités. Le pays dispose d’une équipe féminine sur route, et compte renforcer encore à l’avenir les initiatives visant à permettre à plus de filles de pratiquer le cyclisme.

La suite ?

Dès l’année prochaine, quand on pourra penser à « l’après Covid », les organisateurs vont passer à la vitesse supérieure. Les dates précise seront précisées début 2021, mais vous pouvez déjà noter qu’en novembre 2021, il y aura une course de 4 jours avec un prologue au centre de Kigali et 3 étapes variées dans le nord du pays, dans cette magnifique région des volcans, et du lac Kivu ! Par équipes de 2, simple amateur ou pur compétiteurs : tout le monde devrait y trouver son compte !

Vojo sera très certainement à nouveau de la partie car nous avons découvert ici non seulement un pays d’une beauté époustouflante, mais aussi des populations enthousiastes et des organisateurs aussi passionnés que motivés qui méritent vraiment d’être soutenus et que leur beau projet soit couronné de succès !

Pour plus d’infos et pour guetter les mises à jour : https://www.rwandanepic.com

ParOlivier Béart