De la scène à l’Etna avec Jean-Michel Labadie (Gojira) et Jérôme Clementz

Par Paul Humbert -

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De la scène à l’Etna avec Jean-Michel Labadie (Gojira) et Jérôme Clementz

Il y a des rencontres qui ont une saveur particulière pour nous. C’est tout particulièrement le cas de celles qui évoquent des passions qui se croisent, comme entre Jean-Michel Labadie, bassiste du groupe Gojira, et Jérôme Clementz, premier champion du Monde d’enduro de l’histoire. Nous avons rencontré les deux et retracé l’histoire d’un projet qui a débuté sur scène pour se terminer sur l’Etna. 

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Une vidéo réalisée par Damien Vergez (Fastfokus) en 2015

Gojira, c’est un groupe de metal né dans le Sud-Ouest de la France et qui a petit à petit grandi en faisant gonfler sa discographie à l’instar de son nombre de fans. Ils sont aujourd’hui des centaines de milliers dans le Monde et le groupe écume salles, festivals et parfois même des stades. En 2017, le groupe français était nominé deux fois aux Grammy Awards, la cérémonie de référence internationale des musiciens, tous genres confondus. Ils étaient également les seuls artistes français représentés. Leur vie est faite de tumultes, mêlant concerts, voyages, séances d’enregistrement et de moments plus calmes, propices à la création et à la réflexion. 

 

Photos : Fiaz Farelly & Damien Guiot

 

 

C’est au calme, chez lui, que nous avons rencontré Jean-Michel Labadie, le bassiste de Gojira. Cette rencontre, on la doit à Jérôme Clementz : « J’écoute pas mal de musique, notamment en roulant, et je cherche pas mal de nouvelles choses. Je connaissais Gojira depuis 5 ou 6 ans et avec « Jean-Michel », on se suivait mutuellement sur Instagram. Un jour, après avoir posté une image d’un concert, il m’a contacté et on a discuté. Plus tard, j’avais pris des billets pour « Metallica + Guest » à Vancouver et j’ai appris que c’est Gojira qui allait ouvrir en première partie. On s’est rencontré dans la loge du groupe après le concert, il y avait aussi Damien Vergez de Fastfokus ! »

Et si l’idée d’aller faire un tour de vélo ensemble le lendemain du concert a été évoquée, il aura fallu attendre plus longtemps pour que Jérôme et Jean-Michel puissent enfin y arriver. Les tournées sont bien chargées et les dates s’enchaînent sans laisser de place au VTT. 

 

 

Cette rencontre rapide aura fait naître un projet photo/vidéo dans la tête de Jérôme Clementz : tourner une vidéo de VTT autour de l’univers de Gojira, avec la musique du groupe. Quelques mois plus tard, c’est « Stranded » de l’album « Magma » qui est sélectionné et Jérôme part en direction du volcan Etna, en Sicile, pour un tournage très « dark ». Avant la publication de la vidéo, découvrez en exclusivité les sublimes photos de Damien Guiot et le récit du pilote Cannondale. 

Interview : Jérôme Clementz

 

 

Pourquoi avoir choisi l’Etna pour rendre hommage à Gojira ? 

Quand je suis allé rencontrer Jean-Michel dans la loge du groupe à Vancouver, tout les autres membres de Gojira étaient contents de me voir : Jean-Michel allait enfin pouvoir parler de vélo avec quelqu’un ! Il m’a proposé à cette occasion d’utiliser une morceau du groupe pour une vidéo du groupe si je le souhaitais. Je l’ai pris au mot et j’ai commencé à réfléchir au projet. J’ai choisi l’Etna pour que la vidéo ait du caractère. Habituellement, on cherche des endroits beaux et chauds, là on voulait jouer avec les textures, filmer en automne quand les feuilles sont au sol, dans le brouillard et sur un volcan pour rendre hommage à l’album « Magma ». Je voulais quelque chose de sombre et pouvoir filmer de la lave, la Sicile, ça collait ! 

 

 

Avais-tu déjà choisi le morceau, la bande son de la vidéo avant le tournage ? 

Oui, on a fait le film avec la chanson en tête. Elle est à la fois calme puis très rapide avec de beaux mouvements de basse. 

 

 

La musique, c’est important pour toi ? 

J’en écoute beaucoup, mais pas que du metal. J’ai une préférence pour ce qui est assez lourd. Ce que j’écoute peut paraître bruyant pour certains mais c’est loin d’être violent, désordonné ou stressant. Au contraire, pour moi c’est plutôt apaisant. On peut faire une musique très « propre » qui prend du volume. Et quand on écoute Gojira et le discours du groupe, on comprend que la musique est précise, mélodique et calculée. 

 

 

Tu en écoutes en roulant ? 

Oui, quand je roule seul. J’ai des écouteurs de sport qui me permettent d’écouter ma musique mais également les bruits environnants. Je conserve toutes les sensations, le bruit du vent ou des pneus. 

 

 

Qu’est-ce qu’on retrouve dans la playlist de Jérôme Clementz en ce moment ? 

On retrouve le dernier album de Gojira et particulièrement « The Cell ». On retrouve également du Airbourne, du Iron Maiden et pas mal de Machine Head en ce moment ! 

Si il n’a pas pu prendre part au projet en rejoignant les pentes de l’Etna à vélo, c’est Jean-Michel qui s’est assuré que l’utilisation de la musique puisse se faire avec l’accord du reste du groupe et de la maison de disque. Nous l’avons rencontré pour échanger autour de ses deux passions, la musique et le VTT.

Interview : Jean-Michel Labadie 

 

 

Nous retrouvons Jean-Michel quelques jours avant qu’il ne s’envole à New York pour travailler sur le prochain album de Gojira. Rien par son apparence ne le distingue d’un autre VTTiste, bien au contraire. Il déplace dans son van avec ses deux vélos, un Moustache Samedi 27 Race 8 et un Santa Cruz Nomad. Ses deux machines, il les bichonne et on peut le retrouver sur les plus beaux sentiers de Savoie. Ce qu’il aime, c’est descendre mais il grimpe au mental et est un fervent défenseur du vélo électrique, avec lequel il se dépense autant qu’avec son Nomad. 

 

 

Jean-Michel profite de notre rencontre pour nous présenter un spot accessible à quelques minutes de chez lui : le Meyrieu Trail. L’association à l’origine de son développement travaille sur deux lignes mêlant flow et bosses de différentes tailles. Pour notre part, c’est sur la bleue que nous réalisons quelques images, avant de remonter en faire une, juste pour le plaisir ! 

Photo : Taylor Bingley

Calme et posé, Jean-Michel est aussi à l’aise seul en forêt que sur scène devant des milliers de personnes. Et les connaisseurs ne se laisseront pas tromper. Derrière une esthétique très « metal » Gojira distille, de par les thèmes abordés par ses chansons et les prises de position de ses membres, un message très proche de la nature, tout le groupe ayant grandi dans le Sud-Ouest de la France. Leur région est fragile et impactée par le réchauffement climatique, marées noires et autres pollutions. 

 

 

Les passionnés de musique et de metal te connaissent sur scène, avec ta basse, mais tu es aussi un VTTiste passionné. Comment t’es-tu retrouvé sur un vélo ? 

En 1996, mon frère s’est acheté un VTT XC et il s’en servait assez peu. Je lui ai emprunté et j’ai direct vu que j’aimais descendre. J’ai ensuite acheté un GT de XC avec une meilleure fourche. J’ai grandi dans le Pays Basque, j’y grimpais des cols entiers pour descendre sur les sentiers de randonnée bien défoncés. Ça m’a vraiment plu. J’aimais tous les sports de glisse comme le skate, le surf, le snowboard… J’ai retrouvé ces sensations en vélo, mais en plus brutal. J’ai ensuite découvert les vidéos comme « New World Disorder » et, rapidement, les prix des vélos qui m’intéressaient… J’ai sacrifié mon budget pour m’acheter un Kona Stinky après avoir bricolé des Sunn ou des Lapierre de cross-country. 

 

 

Tu voyages beaucoup, est-ce qu’il y a des endroits où tu aimerais pouvoir emporter un vélo ? 

Un jour je vais le faire ! Pendant les tournées, des fans me proposent régulièrement d’aller rouler mais on manque de temps. J’y pense souvent en regardant à travers les vitres du bus. Evidemment, le Canada ou la Nouvelle-Zélande font partie des destinations qui font rêver. 

 

 

Vous avez de longues sessions d’enregistrement à New York. Il est impossible d’y rouler ? 

Je sais qu’il y a des choses à faire pas loin mais je n’ai jamais pu en profiter. Joe, le chanteur du groupe, et Mario, le batteur, sont frères et vivent à New York. Ils se sont achetés des vélos de ville mais ils roulent comme des branques ! Je les ai équipés avec du bon matos par contre ! 

 

 

Jouer de la basse, c’est de l’entraînement, de la pratique et de la rigueur. Est-ce que tu fais des parallèles avec le vélo ? 

Jouer de la basse sur scène, c’est un effort ultra physique. Je joue avec un médiator, sur chaque note, un peu comme un guitariste mais avec de très grosses cordes. Il y a aussi la gestuelle de scène, je bouge fort, je me jette, je saute : je « ride » la scène. Pendant le show, je monte à des endroits sans calculer, je fais des « 360 », je suis complètement libre ! J’ai un rapport physique à mon instrument. Quand le show se termine, je suis trempé intégralement, complètement claqué. Je suis peut-être anti-rock star parce qu’après un concert c’est une bière, une douche et au lit ! 

Photo : Christophe Brysse

On se doit de conserver une hygiène de sportif en tournée. On fait attention à notre corps, on se repose, on s’hydrate, c’est important pour la longévité du groupe et il faut entretenir ça. 

Faire du sport, ça aide à tenir le rythme. Pour le batteur également, il faut s’entraîner. J’aime pousser mon corps et l’adrénaline que ça procure. 

 

 

Être devant le public doit être assez grisant. Est-ce que ça te manque quand tu n’es pas en tournée, ou justement, tu profites de ces moments seul à la montagne ? 

J’ai vraiment besoin de ces temps morts, c’est vital ! J’aime ce que je fais, je travaille avec passion parce qu’on arrive à apporter un peu de joie de vivre dans une vie qui n’est pas toujours rose. Quand on monte sur scène, on se donne à fond mais après des mois de tournée, la machine fatigue et on est content de reconnecter à la réalité. Le vélo, c’est plus personnel, je me fais du bien à moi. J’aime les paysages, la solitude, la nature et l’adrénaline. 

C’est important de quitter le cocon qu’est la tournée où on est « bichonnés » pour être de retour à la vraie vie. Je ne me sens pas rock star mais juste humain. Je cherche ma place et je veux donner le meilleur de moi-même et, quitte à être utile, autant essayer de faire du bien aux gens. 

Quels pilotes de VTT t’inspirent ? 

Il y a évidemment Jey Clementz, que j’aime pour son esprit. D’ailleurs, suite à notre rencontre, je me suis mis à échanger avec Cécile Ravanel. Il y a également Kilian Bron que je trouve très actuel, avec une super approche. J’aime beaucoup Nico Vink qui reste simple alors qu’il repousse les limites du vélo. Il y a également les gars comme Vinny T (Vincent Tupin) ou Brandon Semenuk que j’assimile à Shaun White. Il y a aussi les castings des films New World Disorder avec Wade Simmons, Richie Schley, Dave Watson, Cédric Gracia ou Steve Peat ! 

 

 

Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ? 

Je sèche toujours à cette question ! Il faudrait que j’aille chercher mon iPod. Mais je peux te citer John Garcia & the band of gold de John Garcia, le morceau The Birth and Death of the Day d’Explosions in the Sky qu’on retrouve dans le film Life Cycle qui est incroyable et émotionnel. Je pourrais te prendre toute la discographie de Rage Against The Machine ou un immense classique comme Enter Sandman de Metallica. 

Le site officiel de Gojira : www.gojira-music.com

Rendez-vous le 5 Février pour découvrir la dernière vidéo de Jérôme Clementz, sur l’Etna. Pour retrouver notre portfolio mis en musique par Gojira, procurez-vous notre « Vojo Magazine, Volume 2 » disponible sur notre boutique en ligne : shop.vojomag.com

ParPaul Humbert