Tutoriel | Comment régler son VTT ? Les suspensions

Par Léo Kervran -

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Tutoriel | Comment régler son VTT ? Les suspensions

Ah, les suspensions… Sans elles, le VTT ne serait pas le même sport. De plus en plus performantes, elles permettent à nos roues de mieux coller au terrain pour rouler plus en sécurité, plus confortablement et plus vite. Cependant, tout cela n’est valable que si elles sont bien réglées. Un mauvais réglage et c’est tout l’équilibre du vélo qui s’en retrouve perturbé, avec des conséquences allant de l’inconfort jusqu’à des mises en danger bien sérieuses. Alors, pour éviter tout ça et tirer le meilleur parti de vos suspensions, voici nos conseils pour les régler dans l’ordre et sans erreurs. Suivez le guide !

Une suspension, qu’elle soit à l’avant (fourche) ou à l’arrière (amortisseur) et à air ou à ressort hélicoïdal, se règle suivant la même procédure. On commence par la pression des pneus, premier élément de liaison au sol et d’amortissement. Ensuite, on passe aux suspensions proprement dites avec en premier la force du ressort (air ou hélicoïdal), qui varie selon le poids de chacun et chacune. On poursuit avec le rebond, qui dépend de la force du ressort et du pilotage, la compression qui dépend du pilotage, et enfin, si besoin, les tokens et butées de fin de course.

Voyons cela étape par étape :

1- Le sag

Le SAG (de l’anglais to sag, s’affaisser) correspond à l’enfoncement de la suspension sous le seul poids du pilote, en statique. C’est un élément primordial et la base de tout réglage de suspension. Il permet à la roue concernée de descendre dans les trous (reliefs « négatifs ») et de rester en contact avec le sol en permanence au lieu d’absorber simplement les bosses (reliefs « positifs »). On l’exprime en pourcentage de la course totale de l’amortisseur ou de la fourche. Avec un ressort à air, on l’ajuste en rajoutant ou en enlevant de l’air dans le circuit correspondant tandis qu’avec un ressort hélicoïdal, le choix du bon tarage de ressort est déterminant (il faut donc parfois changer de ressort).

Puisqu’il concerne la suspension, vous comprendrez qu’on ne règle pas le SAG d’un vélo de XC comme celui d’un vélo de descente. Sur les premiers cités, le débattement réduit et la recherche de performance au pédalage vont entraîner un SAG assez faible, entre 15 et 20 % pour la fourche et 15 à 25 % pour l’amortisseur selon les modèles et les préférences de chacun. A l’opposé, sur un vélo qui met l’accent sur l’efficacité en descente, on ira plutôt vers des valeurs entre 20 et 30 % pour la fourche et 25 à 35 % pour l’amortisseur, voire 40 % sur certains modèles très particuliers. Les marques recommandent généralement un SAG précis dans le manuel de chaque vélo, qui peut constituer une bonne base de départ à modifier éventuellement par la suite.

Enfin, la position du pilote lors du réglage a aussi son importance, car elle modifie la répartition des masses sur le vélo. Pour une même pression dans l’amortisseur, le SAG sera ainsi plus important avec le pilote assis que debout. Pour la fourche, c’est l’inverse. On estime qu’à réglage égal, il y a environ 5 % de différence entre la position assise (selle en haut) et la position debout : 30 % de SAG à l’amortisseur assis sur la selle donneront généralement autour de 25 % debout. 

L’ajustement du SAG de la fourche se fera toujours avec le pilote debout sur les pédales, en position neutre, mais pour l’arrière, on cherchera à faire le réglage dans une position cohérente avec le programme du vélo : assis sur la selle pour un vélo de XC, et debout, légèrement sur l’arrière, pour un vélo d’enduro ou de descente. Entre les deux, c’est un peu plus flou et c’est plutôt l’orientation du vélo, le style de pilotage voire le programme du jour qui vont déterminer la position à adopter pour le réglage.

Dans tous les cas, la mise au point du SAG se fait toujours avec l’amortisseur et la fourche complètement ouverts (en mode descente) et en tenue de vélo, y compris le sac et le casque, car 2 ou 3 kg de plus ou de moins peuvent avoir une certaine influence sur le comportement de la suspension. Gardez aussi à l’esprit qu’il s’agit avant tout d’avoir une base saine. Il se peut que le réglage au SAG vous convienne parfaitement sur le terrain… ou pas complètement. N’hésitez pas à enlever ou ajouter un peu de pression dans les suspensions et à faire des essais quelques % plus haut et plus bas que le SAG initial afin de trouver LE réglage idéal pour vous, vos terrains de jeu et votre manière de piloter.

Le réglage

Outils : un réglet + une pompe HP

On règle toujours la fourche et l’amortisseur l’un après l’autre, c’est plus simple.

Comment faire : compression complètement ouverte – position debout ou assise suivant la pratique – pomper pour équilibrer les chambres positives et négatives – replacer les témoins contre le corps de l’amortisseur / le fourreau de la fourche (se faire aider si possible) – descendre du vélo sans compresser l’élément qui est en train d’être réglé

Point vocabulaire

  • rebond bas / au minimum / du côté du « – » = rebond ouvert = retour rapide
  • rebond haut / au maximum / du côté du « + »  = rebond fermé = retour lent
  • compression basse / au minimum / du côté du « – » =compression ouverte = enfoncement facile
  • compression haute / au maximum / du côté du « + » = compression fermée = enfoncement difficile

Pour les ressorts hélicoïdaux, il faut se reporter au tableau du fabricant de la suspension (pour la fourche) ou du vélo (pour l’amortisseur, car cela dépend du ratio de la cinématique) afin de choisir le bon modèle. Ensuite, on pourra éventuellement ajuster légèrement avec quelques tours de précontrainte, en restant dans les limites admises par le fabricant (de l’amortisseur cette fois).

2- Le rebond

Le rebond contrôle donc le retour en position initiale de la fourche ou de l’amortisseur après avoir encaissé un choc. Dans la grande majorité des cas, la couleur de molette associée au rebond est le rouge. Et/ou c’est écrit dessus.

On distingue deux types de rebond : les basses vitesses et les hautes vitesses.

Ces termes ne désignent pas la vitesse à laquelle le pilote roule, ce serait un peu trop subjectif, mais la vitesse à laquelle la suspension revient à sa position d’origine. De manière très schématique, le rebond basse vitesse concerne les mouvements du pilote et les chocs « lents » tandis que circuit de rebond haute vitesse prend la main sur les successions rapides de chocs ou les gros impacts, avec des vitesses de retour élevées.

En réalité, les deux circuits interagissent : le circuit des hautes vitesses (HV) s’ouvre lorsque la pression d’huile est suffisante mais cela ne ferme pas le circuit des basses vitesses (BV) pour autant. L’essentiel de l’huile passera alors par le circuit HV, plus direct, mais une part ira toujours dans le circuit BV. Le réglage de rebond basse vitesse a donc une influence sur le comportement de la suspension à haute vitesse.

Généralement, seul l’ajustement du rebond basse vitesse est d’ailleurs possible sur la plupart des vélos. Pour la plupart des pratiques, il est suffisant grâce à l’interaction entre les deux réglages. Dans ce cas, le circuit de rebond haute vitesse est toujours présent mais son réglage est défini et fixé en usine. C’est seulement dans une optique de performance pure en descente qu’il pourra être intéressant de se pencher sur le rebond haute vitesse pour de la mise au point très fine. D’où le fait que ce réglage ne soit disponible que sur les modèles haut de gamme de fourches et d’amortisseurs d’enduro ou de descente.

Le réglage

Outils : rien sur les fourches (molette), clé hexagonale sur certains amortisseurs

Comment faire : le premier réglage du rebond en statique se fait avec la compression complètement ouverte, pour sentir plus facilement les différences. Pour les ajustements plus fins sur le terrain, on tourne la molette ou la clé de deux clics maximum avant de faire un nouveau test.

Pour une pratique polyvalente, on cherche généralement à avoir une vitesse de rebond équivalente à la vitesse de compression ou à peine plus rapide. Un rebond trop rapide rendra le vélo difficile à contrôler tandis qu’un rebond trop lent empêchera les suspensions de donner leur pleine mesure puisqu’elles devront encaisser un nouveau choc avant d’avoir « digéré » le précédent.

Si HV et BV sont disponibles : la marque du vélo établit la plupart du temps des préconisations de réglages qui constituent une bonne base de départ. On pourra ensuite ajuster les réglages selon ses sensations en gardant à l’esprit que sur la plupart des fourches et amortisseurs, le réglage BV influence aussi le comportement en HV (dans une certaine mesure).

Exemples (si le sag et la pression des pneus sont bons) :

  • mon vélo est difficile à contrôler dans le défoncé, il rebondit dans tous les sens et je me fais balader : je ferme le rebond. Si le vélo dispose de réglages HV et BV différenciés, il faudra peut-être jouer un peu plus sur les HV.
  • je veux un vélo plus « joueur » : j’ouvre le rebond BV pour rendre le vélo plus réactif.
  • mon vélo me pousse sur les sauts, je pars sur l’avant à chaque fois : le déséquilibre entre la fourche et l’amortisseur est trop important. Il faut soit fermer principalement les BV à l’arrière, soit les ouvrir à l’avant, soit les deux. Si la technique de saut est bonne, évidemment…
  • mon vélo est instable et rebondit en réception de gros saut ou de marche : je ferme le rebond. Si le vélo dispose de réglages HV et BV différenciés, il faudra peut-être jouer un peu plus sur les HV.
  • j’emprunte le vélo de mon ami(e) qui fait 15 kg de plus que moi et j’ai déjà réglé le sag. Dois-je toucher au rebond ?  J’ai moins d’air que lui donc le ressort est moins fort donc j’ouvre le rebond. Si je ne change pas ce réglage, je risque de me retrouver avec des suspensions qui reviennent trop lentement (trop de freinage par rapport à la force du ressort).

3- La compression

La compression, c’est le troisième réglage des suspensions après le SAG et le rebond. Là où le rebond contrôle le retour en position de la fourche ou de l’amortisseur, la compression définit le comportement à l’enfoncement. Après le tarage du ressort ou la pression d’air (et la cinématique pour l’arrière), c’est cette fameuse compression qui va déterminer la sensibilité de la suspension, son support ou encore le pompage du système.

Le principe est le même que pour le rebond, avec un système de laminage d’huile qui contrôle la vitesse à laquelle le ressort se compresse. En fermant la compression, on réduit la taille des espaces qui permettent à l’huile de passer d’une chambre à l’autre, ce qui signifie qu’il faut exercer plus de force pour faire passer la même quantité d’huile. Sur le terrain, cela se traduit donc par une fourche qui se durcit.

Ici aussi, on distingue le réglage de la compression basses vitesses ou compression lente de celui de la compression hautes vitesses ou compression rapide. Les basses vitesses concernent les chocs lents et les mouvements du pilote tandis que tout ce qui dépasse cette vitesse d’enfoncement est du ressort des hautes vitesses.

Comme pour le rebond, c’est la vitesse et la pression du flux d’huile qui vont déterminer si le circuit des hautes vitesses s’ouvre ou pas. Le réglage de compression n’est pas présent sur tous nos vélos et quand c’est le cas, on retrouve généralement une seule molette qui joue sur les deux circuits en même temps comme c’est le cas sur les cartouches Grip et Fit4 de Fox :

  • En mode ouvert, les deux circuits sont ouverts et l’huile peut circuler naturellement selon sa vitesse. Sur la Fit4, ce mode dispose en plus d’un ajustement de la compression lente (molette noire).
  • En mode intermédiaire, le circuit de compression lente est fermé mais celui de compression rapide reste ouvert. La fourche est donc moins sensible aux mouvements du pilote mais filtre toujours les irrégularités du terrain.
  • En mode fermé, les deux circuits de compression sont… fermés. Une valve de sécurité permet néanmoins à l’huile de circuler en cas de gros choc imprévu, pour ne pas endommager le système.

Seules les versions haut de gamme et dédiées à la performance en descente disposent d’ajustements précis et séparés pour les deux circuits, comme la cartouche Grip X2 de Fox ou la Charger 3.1 de RockShox.

Le réglage

Outils : rien sur les fourches, clé hexagonale de 3 ou 6 mm sur certains amortisseurs

Ajustement 2 ou 3 positions : roulant / pédalage VTT / descente, rien de particulier

Si BV uniquement : presque pareil que le précédent, on peut jouer sur quelques clics en descente si le vélo est trop « mou ». C’est notamment utile pour la cartouche Grip de Fox, qui fonctionne mieux en descente avec un réglage « légèrement fermé », molette à mi-chemin entre « tout ouvert » et intermédiaire.

Si HV et BV sont disponibles : la marque du vélo établit la plupart du temps des préconisations de réglages qui constituent une bonne base de départ. On pourra ensuite ajuster les réglages selon ses sensations en gardant à l’esprit que sur beaucoup de fourches et amortisseurs, le réglage BV influence aussi le comportement en HV dans une certaine mesure. Pour les ajustements fins sur le terrain, on tourne la molette ou la clé de deux clics maximum avant de faire un nouveau test.

 

Exemples (si le sag, la pression des pneus et le rebond sont bons) :

  • mon vélo s’affaisse dans le défoncé et les successions de chocs ou je prends trop de débattement : je ferme la compression (jouer un peu plus sur les HV si réglages différenciés).
  • mon vélo est trop ferme ou je ne prends jamais tout le débattement : j’ouvre la compression (jouer un peu plus sur les HV si réglages différenciés).
  • mon vélo s’écrase complètement dans les réceptions de sauts et gros chocs, je talonne souvent : je ferme la compression (principalement les HV si réglages différenciés).
  • j’ai la sensation que le vélo « tape » sur certains chocs en roulant vite mais l’équilibre général est bon : je peux essayer de fermer un peu les compressions HV si elles sont disponibles afin de retrouver du contrôle et d’éviter de saturer le système. Si ça ne règle pas le problème, il se peut que le rebond soit trop lent.
  • mon vélo s’écrase complètement au freinage, lorsque je pompe ou consomme trop vite le début de course : je ferme la compression (principalement les BV si réglages différenciés).
  • mes suspensions sont top lorsque j’attaque mais impossible de rouler tranquillement, le vélo est trop ferme et inconfortable : j’ouvre la compression BV.

4- Les tokens

Les tokens ou cales de volumes sont des petits éléments généralement en plastique et parfois en mousse qui prennent place dans la chambre d’air positive de la fourche ou de l’amortisseur. Sur une fourche, on peut empiler plusieurs tokens identiques tandis que dans un amortisseur, on en place plutôt un seul mais différentes tailles sont disponibles (sauf chez Suntour, où cela fonctionne comme sur la fourche).

Lorsqu’on ajoute un token, on réduit la taille de la chambre positive (la plupart du temps, même si on peut parfois placer des tokens dans la chambre négative). La pression augmente ainsi plus vite lorsque la fourche ou l’amortisseur se compresse, ce qui se traduit par un ressort plus dur. L’ajout de tokens permet donc de durcir la fin de course de la fourche ou de l’amortisseur (plus on ajoute de tokens / plus la cale est de taille importante, plus leur effet est sensible tôt dans le débattement) sans affecter la sensibilité sur les petits chocs puisque la pression de départ reste la même.

Dans quelle situation ajouter des tokens ? Si on n’arrive pas à trouver un réglage qui permet d’allier sensibilité en début de course et contrôle du talonnage en fin de course.

La butée hydraulique

Sur certains amortisseurs, on trouve une butée hydraulique en remplacement ou accompagnement des tokens. C’est le cas sur le haut de gamme enduro/DH RockShox notamment. Le principe est le même, durcir progressivement la fin de course, mais le réglage est un peu différent puisqu’il suffit de tourner une vis avec la clé appropriée. Le plus souvent, cela intervient sur une petite aiguille qui ferme plus ou moins un orifice, contrôlant ainsi le flux d’huile (d’où le nom de butée hydraulique) et la force nécessaire pour compresser l’amortisseur.

Le réglage

Outils : douille hexagonale ou clé à cassette suivant le modèle de fourche / main ou clé à sangle pour les amortisseurs.

Comment faire placer des tokens dans ses suspensions vélo ? Dégonfler complètement la fourche / l’amortisseur (il en va de votre sécurité !) – enlever le bouchon avec la douille ou la clé à cassette / dévisser le corps de l’amortisseur à la main ou avec la clé à sangle (il faut parfois retirer un circlip ou un joint avant) – fixer le ou les tokens au bouchon / placer la cale au fond de la chambre – remonter et regonfler

Attention, l’ajout de tokens n’empêche pas la fourche de plonger au freinage et n’est pas une solution miracle pour apporter du support. Cette solution agit avant tout sur la fin de course et il faut parfois la combiner à d’autres réglages (compression notamment) pour obtenir le résultat voulu.

Conclusion

Régler les suspensions, c’est comme régler la position et inversement : ça ne se fait pas en deux minutes, et si les grandes lignes peuvent être définies rapidement, trouver le réglage idéal pour son profil et son terrain prend un peu plus de temps. Ainsi, il ne faut pas hésiter à jouer avec le multi-outils, les molettes ou la pompe haute pression durant les premières sorties pour affiner ses réglages par petites touches, en respectant deux règles d’or : toujours se souvenir (ou noter) le réglage de départ, pour pouvoir y revenir si besoin, et ne modifier qu’un seul réglage à la fois.

Si vous êtes complètement novice en la matière, on peut aussi vous conseiller quelques positions extrêmes des différents réglages afin de mieux sentir leurs effets. Sur des enfants, cette approche fonctionne plutôt bien comme on avait pu le constater (lire Mercredi après l’école, j’ai suspension). Pour le reste, souvenez-vous que s’il existe de mauvais réglages et des choses qui ne fonctionneront pas, il n’y a en revanche pas de réglage universellement bon. Ce qui fonctionne pour votre voisin ou voisine ne vous conviendra peut-être pas, ou peut-être que si. Une seule façon pour le savoir : aller rouler !

Si cela vous intéresse, les guides de réglages de la plupart des fabricants sont disponibles en ligne : voici pour Fox et RockShox par exemple. Attention, les préconisations pour les amortisseurs (quand elles existent) sont à prendre avec des pincettes, car le réglage dépend de la cinématique du vélo. Dans ce cas, la référence se trouvera sur le site de la marque de votre vélo. Vous pouvez aussi bien entendu vous rapprocher de votre revendeur et/ou d’ateliers spécialisés dans les suspensions pour obtenir des conseils personnalisés. N’oubliez pas non plus que des suspensions bien entretenues sont indispensables pour obtenir de bonnes performances et pour l’efficacité des réglages.

Par Léo Kervran