Présentation | Felt Edict 2018: La course au plus profond des fibres

Par Jurgen Groenwals -

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Présentation | Felt Edict 2018: La course au plus profond des fibres

Felt Bicycles place la course et la performance au centre de ses valeurs. Malgré un riche passé dans le VTT, la marque est aujourd’hui plus présente dans le triathlon. Avec sa gamme 2018, elle entend revenir sur le devant de la scène aussi en dehors de l’asphalte et le Felt Edict est une des pièces maîtresses de sa stratégie pour le cross-country. 

La marque américaine Felt n’est peut-être pas la plus connue du grand public dans nos régions, mais son palmarès n’est pas des moindres. Le champion du monde de cyclo-cross Wout Van Aert roule sur un Felt, Daniela Ryf a gagné l’Ironman d’Hawaï pour la 3e fois sur un Felt et la multiple championne Olympique Kristin Armstrong roule aussi sur Felt. En VTT, un coup d’œil sur le palmarès de ce Felt Edict montre que leur tout-suspendu de cross-country a, avant même sa sortie, déjà remporté quelques beaux succès. Nicola Rohrbach a piloté son Cape Cobra – un Edict avec une déco en peau de serpent – vers la troisième place sur l’Absa Cape Epic et vers la victoire sur le Roc d’Azur. Il y a aussi Thomas Litscher qui, après le disparition du team Multivan Merida, s’est retrouvé au sein team JB Felt Brunex. En guise de remerciement, il a emmené son Edict vers une belle troisième place au mondiaux, derrière l’intouchable Nino Schurter et Jaroslav Kulhavy. Plus proche de chez nous, dans le Benelux, le Habitat Mountainbike Team (avec notamment Anne Tauber et Ruben Scheire) est équipé de vélos Felt.

Moins connue, mais pas nécessairement moins jolie, est l’histoire de l’américaine Larissa Connors. Elle gagne presque chaque course à laquelle elle participe, le prestigieux Leadville 100 inclus. Lors de la présentation de la nouvelle gamme à la presse, son mari Brendan Connors se retrouve près de moi sur une chaise longue en train de profiter du soleil italien. Brendan Connors est l’ingénieur qui a conçu le Felt Edict. Il m’explique : “Nous vivons vraiment un saison de rêve. Larissa roule bien cette saison et l’Edict en est clairement une des raisons. C’est un honneur de pouvoir dire qu’un tout-suspendu de cross-country que j’ai conçu fait d’aussi bons résultats entre les mains de ma femme.”

Felt et le carbone

Pour Felt c’est clair : un vtt axé sur le cross-country et le marathon doit être léger et rigide, vif et maniable, et doit donner beaucoup de confiance. Rob Pauley, product manager pour le vtt chez Felt : “L’Edict est probablement le vtt le mieux accueilli que nous ayons jamais fait. Mais le vtt évolue et nous avons trouvé plusieurs points d’amélioration sur le premier Edict. La version que nous présentons maintenant est notre ultime vélo de compétition.”

Felt a une longue expérience dans la production de cadres en carbone, un matériau qu’ils ont été parmi les premiers à adopter dans le VTT. Leurs vélos de piste, chrono et de triathlon sont très avancés au niveau de leur forme et des techniques de construction. Parmi ces cadres, les initiales FRD – pour Felt Racing Development – représentent le fin du fin. Dans le cas présent, ils utilisent une fibre de carbone Textreme conçue par les suédois d’Oxeon. Cette fibre est utilisée notamment dans l’industrie aérospatiale où le Spread Tow breveté est constitué de plaques de carbone au lieu de fils. Plus de carbone et moins de résine mène à une combinaison plus légère et plus rigide.

L’Edict 1, avec lequel nous partirons à l’aventure par après, est conçu avec une fibre Ultra Hybrid Carbon, plus conventionnelle, et qui fait appel à une construction monocoque modulaire. Concrètement, des parties complètes du cadre sont réalisées dans un moule pour être ensuite reliées ensemble. Ceci permet d’avoir besoin de moins de matériau et chaque partie peut être ajustée plus facilement en fonction d’un but précis.

Comme les chiffres sont souvent plus parlants, les voici : le nouveau cadre pèse 450 grammes de moins et est 15% plus rigide que l’ancien. Le cadre Edict FRD pèse donc 1925 grammes, l’Edict 1 que nous avons testé – en taille M – pèse 200 grammes de plus. La rigidité augmentée se retrouve surtout dans le triangle arrière et au niveau de la direction. Dans des tests en laboratoire, où 3 de leurs concurrents ont été mis au supplice, l’Edict avait de meilleurs résultats que les autres au niveau de la rigidité du triangle arrière et de la direction.

Suspension FAST

Fast, l’Edict fait tout pour l’etre, mais ici, FAST veut dire Felt Active Stay Technology, une suspension brevetée propre à Felt qui utilise les propriétés des fibres de carbone pour que les haubans fonctionnent comme un point de pivot… amélioré.

Pour faire simple, le triangle arrière permet de garder l’amortissement stable au sag, et pour y parvenir, il est moulé de sorte que les fibres soient en position neutre à 30% de compression de la suspension. Si l’amortisseur est en extension complète, les fibres de carbone vont se compresser et aider à offrir plus de sensibilité sur les petits chocs. Si l’amortisseur est enfoncé complètement, les fibres travaillent en extension et offrent plus de résistance pour éviter de « taper au fond ». Enfin, le triangle arrière est fait d’une seule pièce, ce qui permet de limiter le poids et l’entretien.

Mais aussi…

Un autre détail qui saute aux yeux, c’est le système de câblage interne bien organisé, qui rentre au niveau de la douille de direction pour éviter les frottements sur le cadre. Il est prévu pour tous les types de transmission – y compris électriques – et l’utilisation d’une tige de selle télescopique.

La forme du cadre offre la possibilité d’utiliser une tige de selle télescopique avec un grand débattement. Au niveau de la transmission, ce n’est pas une surprise de ne voir qu’un seul plateau, vu la longue collaboration entre Felt et Sram. Depuis l’arrivée du Sram Eagle, la plupart des coureurs en cross-country et marathon utilisent le mono-plateau. Pour les plus forts, il est possible de monter un plateau jusqu’à 38 dents.

Lorsque la première version du Felt Edict a été commercialisée il y a deux ans, le Boost venait seulement d’arriver. Généralisé entre-temps, l’Edict est maintenant aussi équipé du nouveau standard. Le triangle arrière est bien large, car des pneus 2.4″ peuvent être montés sans souci.

On note aussi qu’il n’y a pas de boitier de pédalier Pressfit sur l’Edict. Un boitier fileté est plus sûr et plus simple en entretien qu’un Pressfit. La zone du boitier de pédalier a beaucoup retenu l’attention des concepteurs au moment du design du cadre, avec des fibres continues qui viennent du tube diagonal et qui englobent ensuite le boîtier, l’ancrage bas de l’amortisseur et le point de pivot principal.

Nouvelle géométrie

Avant de me lancer sur le circuit très technique proposé autour du lac de Garde avec l’Edict, je discute encore un peu avec Ash Murrin, assistant product manager pour le vtt. La dernière fois que j’ai testé un Edict, c’était lors d’un comparatif avec un Scott Spark de la génération précédente. Dans les épingles les plus serrées, je ne savais pas faire tourner l’Edict facilement, alors que le même exercice passait sans souci avec le Spark. Ash Murrin: “Attends un peu, la nouvelle géométrie de l’Edict fera une grande différence par rapport à l’ancienne version.”  Un tour de circuit dur et rapide plus tard je dois – encore essoufflé et transpirant – donner raison à Ash. La nouvelle géométrie est une très grande amélioration par rapport à l’ancienne version. L’angle de direction reste très droit (70° contre 69° voire moins sur beaucoup de XC de conception récente), mais c’est 1,5° de moins que l’ancienne version et cela offre plus de contrôle dans les descentes rapides. Le tube horizontal a été allongé de 15 mm, et on trouve aussi une potence plus courte. Enfin, le passage au Boost 148 a permis d’avoir des bases plus courtes de 14 mm (436 mm). L’angle de la tige de selle est aussi plus prononcé d’1,3° (74,3°) et offre beaucoup de traction et de contrôle dans les montées. Il faut par contre noter que l’avant nécessite d’être bien plaqué au sol car il a parfois tendance à se lever.

Felt Edict 2018 : versions et prix

La gamme Edict se décline en 5 versions. Elles ont toutes la suspension FAST et un cadre carbone. Le modèle haut de gamme FRD est équipé de la technologie carbone la plus avancée, d’une Sid World Cup, de Sram XX1 Eagle, freins Sram Level Ultimate et de roues DT Swiss XRC 1200. Il coûtera 9999 euros. L’Edict 1 (5499 euros), que nous avons testé, est équipé des fibres carbone UHC Advanced, d’une SID RL, d’une transmission Sram XO Eagle, de freins Sram Level et de roues DT Swiss XM 1750. Les Edict 3, 4 et 5 diffèrent quant à eux au niveau du montage (fourche, freins, amortisseurs, transmissions et roues), mais utilisent le même cadre que l’Edict 1. Ils coûteront respectivement 3999, 3499 et 3199 euros.

Felt Edict 1: le premier test

Ceux qui sont familiarisés au terrain et aux trails autour de Torbole savent qu’ils ne sont pas des plus simples. Les montées sont raides, alors que la surface est un fameux mélange de rochers et de cailloux. Felt avait tracé trois boucles pour l’occasion, dépendant du type de vélo. Plus tôt dans la journée, nous roulions sur le nouveau semi-rigide, le Doctrine (nous vous en reparlerons). La boucle pour le Doctrine était un parcours-type du cross-country moderne : une côte raide, une descente rapide suivie d’une nouvelle côte raide et d’une descente rocailleuse brutale.

L’Edict est vraiment dans son élément. Le trail simple prévu pour le semi-rigide est rapidement mis de côté. L’heure est venue pour le vrai travail. Nous montons encore un peu plus haut. Avec 10,7kg, l’Edict n’est pas vraiment un poids lourd. Et même si on aime tourner les jambes, le groupe Sram Eagle XO avec un plateau de 34 dents ne nous dérange pas.

Ce qui suit est un vrai régal : le trail serpente dans la forêt, il est très varié avec des parties très rapides et des sections où il faut serrer les fesses entre les gros rochers, les racines et les cailloux. L’Edict est une flèche et donne beaucoup de confiance, il est ludique et rapide. Alors qu’on disait que l’ancien Edict était un cheval de course nerveux, la nouvelle version est un mariage beaucoup plus réussi entre confiance, confort et vitesse.

Les gens de chez Felt nous disent que la boucle rouge n’est pas faite pour un tout-suspendu de cross-country en 100mm. Mais bon, on se dit que cela devrait aller tout de même. Alors, on bloque la très bonne fourche Sid et l’amortisseur Deluxe RC3 Debonair et on grimpe encore plus. Le cadre léger et rigide transforme vraiment chaque coup de pédale en force de propulsion. La descente qui suit n’est – honnêtement – pas adaptée pour un vélo avec seulement 100mm de débattement. Où est cette tige de selle télescopique quand on en a besoin ? Les drops sont hauts, les rochers font peur et les énormes cailloux ressemblent à des balles de tennis sur une patinoire.

Mais quand même, l’Edict s’en sort plutôt bien. La maniabilité est excellente, la confiance monte, la vitesse augmente. Les roues DT Swiss XM 1750 avec jantes de 25mm de large inspirent confiance et les pneus Maxxis Ikon offrent un grip adapté au terrain sec et caillouteux sur lequel nous roulons.

Verdict

Le nouveau Felt Edict 1 est une évolution réussie d’un tout-suspendu intéressant mais qui se devait d’évoluer avec son temps. Quelques très belles modifications dans la géométrie, un affinement de la suspension et surtout un tout nouveau cadre plus léger et plus rigide font de ce nouveau Felt Edict 2018 une belle alternative aux stars du segment XC. Les Edict FRD et 1 sont livrés d’origine avec une fourche en 100 mm. Les autres modèles de la gamme Edict reçoivent 20 mm de débattement en plus. De cette manière, on transforme une bête de course performante en une machine légère et confortable plus adaptée pour le marathon ; un domaine dans lequel il devrait aussi se montrer particulièrement à l’aise.

Plus d’infos sur www.feltbicycles.com

Photos: Ronny Kiaulehn, Martin Ohliger, Jurgen Groenwals

ParJurgen Groenwals